La Presse Bisontine 264 - Juin 2024

4 L’interview du mois

La Presse Bisontine n°264 - Juin 2024

POLITIQUE

Le sénateur Longeot

“On ne me fera jamais dire ce que je ne pense pas” Il se pose en défenseur des territoires. Le sénateur Jean-François Longeot qui vient de rejoin dre le parti Horizons d’Édouard Philippe explique son engagement et sa vision des territoires.

L a Presse Bisontine : Vous venez d’an noncer votre adhésion au parti Horizons créé par Édouard Philippe. Qu’est-ce qui vous y a poussé ? Jean-François Longeot : Je pense que ce choix est cohérent avec mon parcours politique. J’ai adhéré à l’U.M.P. à la “grande époque” de ce parti fondé par Jacques Chirac. Mais je n’ai jamais voulu adhérer aux Républicains ensuite, les orientations de ce parti ne corres pondaient plus à ce que je défends. J’avais quitté auparavant l’U.M.P. au moment où je me suis présenté aux sénatoriales en 2014, en candidat “libre”. Et en entrant au Sénat, j’ai rejoint le groupe Union du Centre car je trouvais dans ce groupe les conditions d’exercice idéales pour un mandat de parlementaire, avec une liberté de vote totale laissée par le président de groupe Hervé Marseille. On trouve d’ailleurs dans ce groupe Union du Centre des élus U.D.I., MoDem, Horizons, Parti radical, etc. Une sorte d’auberge espa gnole comme la décrit notre président de groupe, où on peut aborder les sujets en toute liberté. Ensuite, à partir de 2017 quand Emmanuel Macron a nommé Édouard Philippe en tant que Premier ministre, j’ai voté la plupart du temps les mesures que proposait ce Premier ministre, parfois même

un excellent président de groupe envers qui j’ai beaucoup de respect et d’estime. Hervé Marseille est un élu U.D.I. C’était sans doute par peur de la décevoir que j’ai attendu. C’est mon côté négatif sans doute ! En plus, j’avais dit que je n’adhérerais pas à Horizons tant qu’Édouard Philippe ne viendrait pas à Besançon. Il est venu le 5 avril, j’ai adhéré. L.P.B. : Une adhésion qui signe la fin de votre esprit d’indépendance ? J.-F.L. : Non, et Édouard Philippe le sait aussi. Si je ne suis pas d’accord avec lui sur un sujet, je le lui ferai savoir. À mon âge, je peux maintenant me permettre de dire non ! (rires). Et ce n’est pas parce que je suis adhérent à Horizons que je suis inféodé à ce parti. Aujourd’hui comme hier, on ne me fera jamais dire ce que je ne pense pas. Je n’ai jamais aimé recevoir des ordres d’un parti, quel qu’il soit. La richesse d’un parti politique vient justement du fait qu’il compte des gens venant d’horizons très différents. L.P.B. : Vous allez donc tout faire désormais pour préparer le terrain à Édouard Philippe en vue de la prochaine présidentielle ? J.-F.L. : En rejoignant Édouard Philippe, je choisis le camp de la droite libérale

contre l’avis de mon camp. J’ai trouvé en Édouard Philippe un type brillant, réfléchi, qui savait écouter, avec une manière simple et sincère de faire de la politique, comme je m’attache à le faire depuis que je suis élu. L.P.B. :Aucun opportunisme dans la démarche alors ? J.-F.L. : C’est très cohérent. Je suis un Chiraquien de toujours, j’ai soutenu “le meilleur d’entre nous” à l’époque des primaires, donc Alain Juppé. Sur ce point, j’ai pensé que François Fillon allait droit dans le mur et ça n’a pas loupé. Édouard Philippe se revendique

lui-même comme étant le fils spirituel d’Alain Juppé. Cette adhésion à Horizons est donc logique. L.P.B. : Alors pourquoi avoir attendu jusqu’ici pour rejoindre Horizons ? J.-F.L. : Je fais de la poli tique par rapport à l’humain, pour le côté affectif et sincère des relations. Si j’ai attendu avant de me décider, c’est sans doute parce que j’ai

“Il faut revenir à un septennat, mais non renouvelable.”

comme disait Georges Gruillot, c’est celui qui gagne. Laurent Wauquiez, pour l’instant, il est à 4 % dans les son dages… À l’inverse, on sent bien qu’il y a une dynamique qui monte du côté d’Édouard Philippe et que les autres stagnent. Avant l’élection, de toute manière il faudra qu’il n’y en ait qu’un ou qu’une à droite. Et je suis persuadé que si Édouard Philippe sentait qu’il était en difficulté, il aurait l’intelligence de se retirer au profit de celui ou celle qui serait mieux placé. L.P.B. : Vous pensez que les gens ont déjà la tête à la présidentielle ? J.-F.L. : Bien sûr que non mais c’est maintenant, à droite, que nous devons nous y mettre pour construire les choses. Nous avons 18 mois pour le faire. L.P.B. : Et pour ces toutes prochaines élections européennes, soutiendrez-vous la liste L.R. ou celle de la majorité présidentielle ? J.-F.L. : Toujours en cohérence avec le parti Horizons, et avec mon groupe au Sénat, je soutiens la liste de Valérie Hayer. Et si les résultats de ces élections sonnent comme un échec avec un R.N. à 33 %, une majorité présidentielle à 17 et des L.R. à 6,5, il va falloir se poser les bonnes questions pour la suite ! On pourra me reprocher de ne pas soutenir la liste L.R. de François-Xavier Bellamy, mais je me sens beaucoup proche de ce que défendent des gens comme Hervé Marseille et justement Édouard Phi lippe. L.P.B. : Après les Européennes et avant la pré sidentielle, il y a les municipales dans moins de deux ans. Comment vous positionnerez vous ? J.-F.L. : C’est la même réflexion : il faudra fédérer. Si les municipales ont été per-

et sociale. Il est clair que si la droite va à cette présidentielle en ordre dis persé, elle court à la catastrophe et cela ferait alors quinze ans que la droite est dans l’opposition. L.P.B. : Le problème et vous le savez parfai tement, c’est qu’Édouard Philippe ne sera pas le seul prétendant à droite ! J.-F.L. : Je pense qu’Édouard Philippe est le meilleur de tous les prétendants. C’est celui aussi qui a le plus de contacts avec le terrain, et avec les institutions. Celui aussi qui a le plus d’esprit d’ou verture et de discussion, celui qui je pense aussi a la réflexion la plus aboutie sur l’avenir de ce pays. L.P.B. : Sauf que d’autres que lui ont déjà déclaré leurs intentions, mais pas lui… J.-F.L. : Pour l’instant, il se prépare. Il faudra à un moment ou à un autre que les candidats se résolvent à se retirer s’ils ne sont pas en mesure de rassem bler. Si la droite part divisée, il est évi dent qu’on se retrouvera à nouveau avec un R.N. au second tour et peut être là contre L.F.I. Personne ne peut souhaiter ce scénario. Il faut prendre conscience qu’au-delà de nos différences entre les sensibilités de droite, on ne peut pas ajouter encore 5 ans aux 15 années qu’on aura passés dans l’oppo sition ! L.P.B. : Il est sans doute un peu tôt pour imaginer la stratégie ? J.-F.L. : Le paysage s’éclaircira au len demain des Européennes. Je pense qu’à ce moment-là, d’autres élus vien dront rejoindre Édouard Philippe, y compris ici à Besançon. On ne peut pas imaginer qu’un Xavier Bertrand qui termine quatrième d’une primaire à droite puisse terminer premier à une élection présidentielle ! Le bon candidat,

Le défenseur de la ruralité Nouvelles zones de Revitalisation Rurale : le Doubs pénalisé

les lacunes du classement actuel et fasse émerger deux nou veaux défauts : la diminution du nombre de communes classées et l’inclusion d’aires urbaines dans un zonage rural” plaide le sénateur du Doubs. Des secteurs autrefois intégrés, très ruraux, ne le sont plus. C’est le cas par exemple de l’ancien périmètre du secteur d’Amancey aujourd’hui fondu dans la grande communauté de communes Loue-Lison exclue du nouveau dispositif au prétexte que cette nouvelle intercommunalité est considérée comme riche. Même chose pour des communes du nord du département comme Arcey, autrefois incluses, et sans doute bientôt exclues. “Dans cette commune, des médecins se sont installés récemment, ils ont pu obtenir des aides fiscales. Le prochain qui voudra s’y installer n’en aura plus. Cette réforme pensée à Bercy par des gens qui ne posent pas les pieds sur le terrain n’est pas satisfaisante. Et je vais continuer à me battre pour la modifier avant son entrée en vigueur” tranche le sénateur Longeot qui s’est fendu de plusieurs interventions au Sénat et courriers aux ministères concernés pour défendre sa vision de la ruralité. Cette réforme est d’autant plus inco hérente qu’elle se base sur un maillage intercommunal, “alors qu’une maille communale aurait été beaucoup plus perti nente.” Il y a quelques semaines, la ministre Dominique Faure a écrit au sénateur Longeot pour tenter de le rassurer, affirmant “poursuivre nos travaux de finalisation du zonage.” n

Un nouveau zonage baptisé “France Ruralités Revitalisation” doit remplacer l’actuel dispositif Z.R.R. La mouture du gouvernement n’est pas du goût des élus du Doubs. Le sénateur Longeot est monté au créneau. E lles étaient 226, soit près de la moitié des communes du Doubs à être classée en Z.R.R., comme “Zones de revitalisation rurale”. Ces zones permettaient à certaines professions qui souhaitaient s’y installer (médecins, artisans, petits commerçants…) de bénéficier d’un dispositif incitatif de défiscalisation. Avec la nouvelle loi votée au Parlement, elles ne seront plus que 29 à obtenir le nouveau label rebaptisé F.R.R., comme France Ruralités Revitalisation. Et une trentaine, dites “rattrapables” qui seront peut-être réintégrées au nouveau dispositif. Cette nouvelle législation doit entrer en vigueur le 1 er juillet prochain. Elle n’est pas du tout du goût des élus exclus du dispositif. Pour Jean-François Longeot, le président de la commission de l’aménagement du territoire au Sénat, ce nou veau périmètre est une aberration. “Certes, la nécessité de réformer les Z.R.R. fait l’unanimité : le zonage actuel avait perdu de son efficacité et ne traçait pas de cap crédible pour la ruralité. Mais tel qu’il a été voulu par le gouvernement, il est aberrant. Nous déplorons que le zonage proposé aggrave

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