La Presse Bisontine 259 - Janvier 2024

22 Le dossier

La Presse Bisontine n°259 - Janvier 2024

l Personnes à mobilité réduite Association Trottoirs libres “Pouvoir se déplacer à moindre coût, c’est conserver une vie sociale” Si des tarifs réduits s’appliquent aux personnes en situation de handicap, uniquement pour un abonnement et sous conditions, le coût reste généralement assez onéreux pour un public souvent fragilisé. Pour Yves Ketterer, de l’association bisontine Trottoirs libres, la gratuité des transports en commun favoriserait la mobilité.

Pour Yves Ketterer, de l’association Trottoirs libres, la gratuité des transports encommun pour les P.M.R. favoriserait leur mobilité et engendre raitmoins

L a Presse Bisontine : Des tarifs réduits s’appliquent aux jeunes (4-17 ans), aux étudiants (jusqu’à 27 ans) et à ceux bénéficiant des minima sociaux. Qu’en est-il des personnes en situation de han dicap ? Yves Ketterer : Il y a deux grandes caté gories de personnes à mobilité réduite, qui comptent tous ceux qui ont un han dicap qui entrave leur mobilité, pas seu lement ceux en fauteuil roulant. Il y a ceux qui sont en emploi, donc la moitié du coût du transport est prise en charge par l’entreprise. Et il y a les P.M.R. en retraite ou en invalidité importante, sans capacité de travail. Là, il n’y a pas de réduction ailleurs que sur les abon nements. Il est vrai que la commission intercommunale d’accessibilité, dans laquelle je siège, parle souvent des amé nagements de quais de bus, d’application pour les malvoyants. Le sujet des tari fications n’est pas souvent abordé alors qu’il mériterait un débat. L.P.B. : L’abonnement réduit pour les P.M.R. concerne ceux qui sont invalides à au moins 80 % et s’élève à 31 euros mensuels quand

on a peu ou pas de revenus. Si en plus, on est entravé dans notre circulation, aussi en tant que piétons avec les voi tures qui stationnent sur les trottoirs. On additionne l’obstacle financier, de la maladie, à la voirie pas toujours sécu risante. Tout cela s’ajoute en termes de mobilités. Je veux évoquer un dernier point, celui du lien entre l’accès à la mobilité, la vie sociale, la santé publique et donc des coûts indirects. Pouvoir se déplacer à moindre coût, c’est conserver une vie sociale, c’est garder le moral donc mieux pouvoir gérer sa vie. C’est lutter contre la sédentarité, donc moins de problèmes de santé. C’est être moins dépendant des aides à domicile. Ces points représentent des coûts indirects pour la société et celle-ci a donc un inté rêt global à lutter contre l’isolement des personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie. L.P.B. : Un mot sur l’accessibilité des aména gements des transports en commun ? Y.K. : Globalement, toutes les stations ont été mises aux normes. n Propos recueillis par L.P.

celui d’un étudiant de moins de 26 ans est à 16,80 euros ou entre 2 et 10 euros pour les bénéficiaires de minima sociaux. Et la gratuité est possible pour l’accompagnateur du voyageur P.M.R., sous conditions. Est-ce suffisant ? Y.K. : Vous savez, on vit dans une société régie par les valides. 31 euros par mois quand on a 950 euros d’allocation adultes handicapés ou l’invalidité, c’est beau coup. Et les P.M.R. qui ont de grosses difficultés de mobilité ne prennent pas d’abonnement car elles se déplacent peu. Elles achètent des tickets à l’unité au plein tarif. Et le tarif plein empêche encore plus la mobilité des P.M.R. Quelqu’un qui a un abonnement peut faire deux stations quand il pleut. Les autres ne paieront pas 2,80 euros pour un aller-retour pour deux stations. Ça fait cher sur de très faibles revenus. L.P.B. : La gratuité pour les personnes P.M.R. serait donc plus que bienvenue ? Y.K. : Il y a plein de manières de graduer les choses. Quand on est en situation de handicap, les coûts de la vie sont plus chers, le matériel n’est pas toujours bien remboursé, d’autant plus quand

de coûts indirects pour la société.

La politique d’accessibilité de la Ville La mise en accessibilité des arrêts de transport en commun prioritaires se poursuit sur Besançon et Grand Besançon Métropole : 13 arrêts ont été rendus accessibles comprenant deux créations de quai bus, 9 mises en accessibilité du quai bus seul, et deux mises en accessibilité du quai bus et cheminement. Par ailleurs, une application, Ginko guide, pour les personnes en situation de handicap (publics déficients visuels et cognitifs) est effective depuis le début 2023. Elle permet via un téléphone d’être guidé dans ses trajets, elle donne des informations sur les bus en départ et en arrivée, sur les problématiques et les perturbations du réseau (informations en temps réel vocalisées et simplifiées, alertes à l’arrivée du véhicule et en sortie, comptage d’arrêts), localise les différents types d’infrastructures physiques du transport en commun (valideurs, portes des transports en commun, sièges libres, composteur…) qu’elle indique via un signal sonore et des vibrations. n

l Grand Besançon Tramway Abonnements offerts pour le tramway, une attaque gratuite

Alors qu’il soufflera l’an prochain ses dix bougies, le tramway bisontin fait aujourd’hui partie intégrante du paysage de la ville. En guise de cadeau, il s’offre une “petite” polémique balayée par Marie Zehaf et Yann Chauvin, vice-présidente en charge des transports et directeur des transports à Grand Besançon Métropole.

En chiffres : l +8,8%: l’augmentation de la fréquentation (en nombre de voya geurs) pour le tramway et le bus entre octobre 2022 et octobre 2023 l 27 millions : le nombre de voyages sur le réseau Ginko (tramway et bus) en 2022 l 12 millions d’euros : les recettes commerciales annuelles encais sées par le Grand Besançon sur le réseau Ginko l 65 millions d’euros : le budget transports annuel de Grand Besançon Métropole

L e tramway bisontin fêtera ses dix ans en 2024. Alors que les fes tivités de son arrivée pourraient s’envisager dans la bonne humeur, il voit débouler chez certains usagers, confortés par un opposant politique à l’équipe municipale en place, une rumeur. On ne parle pas là

de rames qui arrivent, ou pas, à l’heure, mais “d’un tramway qui serait déficitaire du fait qu’une majorité d’abonnements serait offerte aux usagers.” L’oc casion, pour Marie Zéhaf et Yann Chauvin, de remettre la vérité sur les bons rails. “Un service public de transports est par nature déficitaire” rappelle le

directeur des transports à Grand Besançon Métropole. “L’ensemble du réseau Ginko, tram ou bus, est financé principalement par de l’argent public, comme tous les autres services publics, que ce soit les hôpitaux ou les écoles. Le tramway coûte plus cher en exploitation que le bus mais il transporte plus de personnes au

kilomètre. Donc si on ramène à la personne transportée, il coûte moins cher.” Pour continuer sa démonstra tion, Yann Chauvin propose un léger retour en arrière. “Entre 2011 et 2017, Transdev, l’entreprise qui exploitait le tram way, était déficitaire. Aujourd’hui, nous sommes dans un autre contrat, 2018-2024, dit “à forfait de charges” avec Kéolis Besançon Mobilités. Et Kéolis Besançon Mobilités n’est pas déficitaire. Au contraire, la santé financière du réseau est saine car nous nous sommes relevés de la crise sanitaire de 2020. Nous avons toujours conservé un niveau de services élevé pour ne pas perdre d’usagers. En 2022, nous avions retrouvé 90 % de la fréquentation de 2019 et en 2023 nous dépasserons la fréquenta tion d’avant-Covid. Nous avons au contraire des difficultés à accueillir tous les usagers, d’où la commande de rames de tram way supplémentaires notam ment.” Pas de baisse de fréquentation ni de déficit de l’exploitant donc.

Mais qu’en est-il de cette ques tion de gratuité, de cette “majo rité d’abonnements qui serait offerte aux usagers” ? “C’estune légende” balaie Marie Zehaf, vice-présidente en charge des transports et des mobilités à Grand Besançon Métropole. “Au contraire, il nous est souvent reproché de ne pas avoir d’abon nements offerts.” Pas d’abonne ments offerts mais des abonne ments à tarifs réduits, oui. “Il

solidaire C.S.S., ex-C.M.U. à 19,50 euros par mois pour les allocataires du R.S.A., le pass demandeur d’emploi à 2 euros par mois ou à prix variable sui vant l’allocation perçue, ou encore le pass Personne à mobilité réduite (P.M.R.) qui est à 30 euros par mois au lieu de 43,50 euros.” Chacun s’acquitte, pour le bon fonctionnement du service, d’une petite partie plus ou moins sym bolique. “Si demain nous vou lions faire la gratuité, il faudrait que la fiscalité augmente de 12 millions d’euros, ou accepter de voir le service dégradé. Mais la gratuité n’est pas forcément une demande des usagers. Comme l’a confirmé la F.N.A.U.T. (Fédération nationale des asso ciations d’usagers des trans ports), ils demandent surtout plus de services, mais que la col lectivité doit pouvoir financer.” n A.A.

Marie Zéhaf tient à rétablir la vérité concernant cette légende qui voudrait qu’une majorité d’abonnements du tramway soit offerte aux usagers.

n’y a aucune gratuité sauf pour des abon nements de courte durée pour les deman deurs d’emploi de 16 à 25 ans inscrits à la Mission locale. Nous avons le pass Complé mentaire santé

“La gratuité, pas la priorité des usagers.”

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