La Presse Bisontine 237 - Mars 2022

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MARS 2022

Mensuel d’information de Besançon et du Grand Besançon

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N° 237

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À moins de six semaines de la présidentielle Les militants bisontins à l’offensive

Tractage, boîtage, affichage, porte-à-porte et réseaux sociaux. Ils sont partout…

Ces militants de la majorité présidentielle tractaient déjà alors que leur candidat n’était pas encore déclaré.

le dossier en pages 22 à 27

P. 6 À 8

l’événement

santé P. 17 Depuis le début de la crise Covid AU C.H.U. de Besançon, plus de 8 000 opérations déprogrammées

Guerre contre les trafics À Planoise, la peur change difficilement de camp…

2 Retour sur info - Besançon Le procureur de Dijon répond à la vice-procureure de Besançon

La Presse Bisontine n°237 - Mars 2022

Besançon Maintenant a fermé sa permanence

L ancée en octobre 2020, l’association politique et citoyenne “Besançon Maintenant” (avec son chef de file Ludovic Fagaut) s’était dotée d’un local, au 6, rue des Boucheries, sur la place de la Révolution. “Nous invitons tous les Bison tins et Grands Bisontins à pousser notre porte, à venir nous rencontrer, pour des moments d’échanges. Notre local est leur maison, maintenant, et pour les années à venir” invitait alors l’association formée des élus municipaux du groupe “Besançon Maintenant” et d’une centaine de citoyens bisontins se sentant concernés par l’avenir de leur ville. Après un peu plus d’un an d’occupation, l’association a décidé de quitter ses locaux en ce début d’année 2022. Pour quelle raison ? “Après un an et demi de mandat municipal et maintenant que les habitants du centre-ville nous connaissent bien, nous avons choisi un nouveau format de pré sence pour les Bisontins. Dorénavant, nous monterons des permanences éphémères dans les différents quartiers de la ville de

L’ interview de la vice-procu reure de la République de Besançon (La Presse Bison tine de février) fait réagir le procureur de Dijon, Olivier Caracotch. “J’ai pris connaissance avec beaucoup d’intérêt de l’interview dema collègue Julie Fergane. Je partage la plupart de ses observations, faites avec pro fessionnalisme, mesure et attache ment à la vérité et au service public, ce qui correspond tout à fait au sou venir que cette magistrate a laissé au parquet de Dijon. Je me dois néanmoins de réagir à l’affirmation selon laquelle “l’activité correction nelle du tribunal de Besançon est 20 % plus importante que celle de Dijon alors que nous sommes huit magistrats au Parquet (ils sont dix à Dijon).” Une lecture un peu rapide de cette phrase laisserait à penser que les magistrats dijonnais sont 20 % plus nombreux que les bison tins, pour traiter d’une activité 20 % inférieure. “Or, il n’en est rien” dit le procureur bourguignon. En prenant les derniers chiffres stabilisés (octo bre 2021), “on peut constater que pour les dix premiers mois de l’année 2021, le tribunal correctionnel de Besançon a en effet rendu 12 % de jugements de plus que celui de Dijon, alors que le tribunal judiciaire de Dijon, dont son parquet, est mieux doté en effectifs. Il s’agit toutefois de la seule activité du tribunal cor rectionnel, qui n’est pas un indicateur suffisant ni pertinent pour mesurer l’activité d’un parquet” poursuit le professionnel. Si l’on prend le nombre de dossiers reçus, “il s’avère que le parquet de Dijon en a reçu 24 % de plus que celui de Besançon, dont

L’association “Besançon Maintenant” n’a plus de local,

ses membres adoptent une

nouvelle stratégie de présence et de communication.

manière à aller à la rencontre des habitants qui ne sont pas forcément venus nous voir au centre-ville” justifie Ludovic Fagaut. “Maintenant que le Covid commence à être derrière nous, je l’espère, nous allons repartir à la rencontre des Bisontins et organiser à nouveau des réunions publiques dans les quartiers” ajoute le leader de l’op

position municipale qui affirme vouloir aider le propriétaire de ces locaux à trouver un nouveau locataire. En ce début d’année 2022, l’association “Besançon Maintenant” souhaite “trouver d’autres façons de com muniquer. Une chose est sûre : notre asso ciation poursuit plus que jamais ses acti vités” insiste Ludovic Fagaut. ■

13%de plus d’affaires poursuivables, et qu’il a apporté 10,5%de réponses pénales de plus que son homologue bisontin. L’objectif n’est pas de dire que les uns travaillent plus que les autres ni que d’aucuns seraient mieux lotis - la situation est malheureuse ment très tendue pour tous les magistrats du parquet. Nous sommes au parquet de Dijon parfaitement conscients des difficultés de nos collègues bisontins et totalement solidaires avec eux. Il s’agit simple ment pour moi de ne pas laisser croire à vos lecteurs, qui pourraient faire une interprétation hâtive des propos de M me Fergane, que les magistrats du parquet de Dijon seraient moins engagés dans l’œuvre de justice que leurs collègues bison tins, ou le seraient dans de meilleures conditions de travail.” ■ Le tribunal de Besançon traiterait-il plus de dossiers avec moins de moyens ? Le procureur de Dijon dément.

Le centre Ophtalmologie Express ne plaît pas aux autres ophtalmos bisontins

N ous révélions dans notre précédente édi tion le projet d’implan tation à Besançon d’un centre Ophtalmologie Express : il ouvre le 7 mars au 21, rue de la République. Propriété du groupe privé Care Invest basé à Levallois-Perret (Hauts-de Seine), l’enseigne Ophtalmo logie Express spécialisée dans les soins oculaires promet “une prise de rendez-vous rapide et efficace” selon ses promo teurs. Les porteurs de projet annonçaient leur intention de

çon (N.D.L.R. : les Docteurs Bigan et Henriot). Les délais de prises de rendez-vous sont désormais entre 1 et 4 mois, pas plus” assure la cheffe de service au nom de ses confrères et consœurs installés en ville. En attendant, les por teurs du projet ont déjà débau ché plusieurs orthoptistes tra vaillant dans des cabinets privés bisontins pour l’ouver ture de leur centre qui “prati quera le tiers payant Sécurité sociale et mutuelle” notent ses responsables. ■

des soins n’est pas optimale selon nous” dit-elle. Ce projet de centre Ophtal mologie Express est motivé selon ses concepteurs par les trop longs délais de prises de rendez-vous auprès des pra ticiens bisontins. “Si ce constat était encore vrai il y a trois ou quatre ans, il est désormais faux. Ces trois dernières années, deux ophtalmos se sont installés à Besançon, un autre à Pontarlier et encore un à Ornans. Deux autres s’ins tallent actuellement à Besan

présenter leur concept aux responsables du service oph talmologique du C.H.U. de Besançon. “Nous n’avons jamais été contactés” constate le Docteur Anne-Sophie Gau thier, cheffe du service oph talmologie au C.H.U. de Besançon qui se dit “pas du tout favorable à l’arrivée d’un tel centre où travaillent surtout des orthoptistes et dont les ophtalmologistes ne sont même pas là à 100 %. On ne peut pas valider ce type de centre dans lesquels la qualité

C e ne sera une surprise pour per sonne d’apprendre que les conseil lers départementaux bisontins Michel Vienet et Ludovic Fagaut, que le sénateur Jacques Grosperrin, ou que la présidente duConseil départemental du Doubs Christine Bouquin ait signé un parrainage en faveur de Valérie Pécresse à l’approche de l’élection présidentielle. Pas plus que de savoir qu’Anne Vignot maire de Besançon a signé pour Yannick Jadot. Certains habitants de Berthelange pourront en revanche être un peu surpris que leur maire Marc Dupont ait apporté son parrainage au communiste Fabien Roussel, tout comme le maire de L’Hôpi tal-du-Grosbois Jean-Claude Grenier ait signé pour le candidat Jean Lassalle, que Marie-Jeanne Bernabeu, maire d’Avanne Aveney ait parrainé Nathalie Arthaud ou Éditorial Parrainages

on sait que ces candidats jouent en général sur la corde sensible en brandissant la crainte, parfois feinte, de ne pas réunir leurs 500 signatures, il serait pour lemoins choquant que ces derniers ne puissent pas concourir à la magistrature suprême au seul motif que certains élus locaux n’aient pas osé les parrainer. Les violences contre les élus sont devenues une réalité, œuvre la plupart du temps d’administrés pour qui tout semble dû ou de citoyens gavés de réseaux sociaux entretenant ressenti ments ou passions tristes. Dans ce contexte nouveau, il serait judicieux de rendre les parrainages anonymes ou de ne pas les faire reposer sur les seules épaules d’élus locaux, surtout dans les petites communes, qui peuvent se retrouver du jour au len demain honnis de leurs administrés sim plement parce qu’ils ont contribué à faire vivre et respirer notre système démocra tique. Les règles enmatière de parrainages méritent un sérieux dépoussiérage. ■ Par le directeur de la rédaction Jean-François Hauser

encore que Michel Gruet, maire délégué de Burgille ait signé pour Marine Le Pen. Le système de parrainage des candidats à l’élection présidentielle tel qu’il fonctionne en France - rappelons que pour être can didat, il faut obtenir au moins 500 signa tures d’élus locaux - est sans doute devenu obsolète. Non pas que la volonté de trans parence soit en soi une mauvaise chose, mais les publications nominatives par le Conseil constitutionnel des parrains et du candidat qu’ils adoubent ne sont plus adap tées à la période dans laquelle nous vivons. Simplement que par crainte légitime, de plus en plus de maires se refusent à un quelconque choix de peur d’être catalogué par ses administrés, voire cloué au pilori à cause d’un choix fait le plus souvent, nom pas au nom d’une idéologie politique, mais d’un attachement au pluralisme démocra tique. Parrainer Éric Zemmour, Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon ne signifie pas qu’on adhère à leurs idées. Même si

Directeur de la publication : Éric TOURNOUX Directeur de la rédaction : Jean-François HAUSER Rédaction : Édouard Choulet, Frédéric Cartaud, Thomas Comte, Jean-François Hauser. Ont collaboré à ce numéro : Alexandre Arbey, Cassandra Tempesta, Sarah George. Directeur artistique : Olivier Chevalier. Conception pubs : Alexandra Tattu. est éditée par la société “Publipresse Médias” S.I.R.E.N. : 424 896 645 Rédaction et publicité : 03 81 67 90 80 E-mail : redaction@publipresse.fr Crédits photos : La Presse Bisontine, C.H.U. de Besançon, F.R.T.P., G. Pertuisot, Simwill 66, M. Vienet. Équipe commerciale : Anne Familiari, Aurélie Robbe, Anthony Gloriod. Imprimé à Nancy Print - I.S.S.N. : 1623-7641 Dépôt légal : Février 2022 Commission paritaire : 0225 D 80130

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4 L’interview du mois

La Presse Bisontine n°237 - Mars 2022

FÉMINICIDES

Avec le Docteur Dominique Frémy

“Être le plus amont possible pour recueillir la parole des victimes” Loi des séries ou engrenage funeste ? En seulement deux mois à Besançon, deux femmes ont perdu la vie sous les coups de leur conjoint et une autre a été blessée. France victimes 25 avait tenté d’accompagner l’une d’elles, qui a refusé de porter plainte. Un sentiment d’impuissance auquel l’association ne veut pas se résoudre. Le point avec le Docteur Dominique Frémy, pédopsychiatre et présidente de l’association France Victimes 25.

L a Presse Bisontine : Depuis le début de l’année, deux femmes ont été tuées par leur conjoint à Besançon, une autre a été grièvement blessée. Comment l’expliquer ? Dominique Frémy : Les associations, la justice, la police, font lemaximum pour éviter d’en arriver là ! Le point de butée, c’est la volonté de la femme de s’extraire de l’emprise qu’exerce le conjoint violent sur elle. Pour que quelqu’un puisse la protéger, il faut que la victime passe par une dénon ciation des faits, c’est-à-dire qu’elle dépose plainte. L.P.B. :Pourtant, peu de femmes franchissent ce cap alors qu’elles ont déjà été battues. Elles passent sous les radars de la protec tion ? D.F. : Elles sont sous l’emprise de leur mari, une emprise qui consiste

à les isoler, à les disqualifier, à leur demander des injonctions contra dictoires qui sont déstabilisantes. La violence fait partie d’un cycle. Souvent, elle s’accompagne une fois que l’acte a été commis d’un repentir de la part du conjoint qui demande pardon, qui semble être apaisé, et qui fait penser à sa concubine que c’est unmalentendu, que c’est acci dentel. Isolée, la femme ne peut pas confronter ce qu’elle vit, ce qui aug mente son sentiment de culpabilité. Elle se sent responsable de la colère de son mari. L.P.B. : À quel moment votre association intervient-elle ? D.F. : À tous les stades de la procédure, et même en l’absence de plainte dans une démarche proactive auprès de la victime : intervenir avec huma nité et bienveillance pour écouter, reçues pour viols ou agressions sexuelles, 647 pour violences volon taires, 246 pour menaces, injures, harcèlements.En 2020, 91 auteurs ont été suivis dans le cadre de la prévention des violences de couple. 82 mesures de composition pénale ont été prononcées, soit une aug mentation de 49 à 60 %. Ces chif fres augmentent chaque année. n

accompagner, informer sur les droits grâce à une équipe pluridisciplinaire composée de la directrice, de quatre juristes, d’un psychiatre et d’un psy chologue, d’une assistante sociale, et d’écoutants. L.P.B. : Le commissaire de Police de Besançon lance un appel aux victimes de violence suite à la dernière tentative d’homicide qui a eu lieu à Besançon (lire par ailleurs). Il leur demande de porter plainte. D.F. : Ce n’est pas si simple que cela. Encore une fois, des femmes sont tel lement isolées qu’elles n’osent pas aller frapper à la porte du commis sariat de Besançon… bien qu’elles habitent au centre-ville. D.F. : Lorsqu’elles se rendent à l’hôpital pour se faire soigner par exemple. Souvent, elles racontent au médecin qu’elles se sont cognées contre un meuble. Ce dernier n’est pas dupe et remarque qu’il s’agit de coups. Il est important qu’il tende des perches afin de recueillir une parole ! Cela implique une formation des professionnels. L.P.B. : Cette formation n’existe-t-elle pas ? D.F. : Si, elle a progressé mais il faut la développer à tous les services des urgences, de l’interne jusqu’au per sonnel du S.A.M.U., aux pompiers. La première marque de ras-le-bol chez ces femmes, c’est de déposer unemain courante. Nous nous appuyons dés L.P.B. : Comment détecter ces victimes poten tielles ?

Historique l Le 29 décembre

2021, une femme de 51 ans est égorgée par son mari rue de Dole, à Besançon. l Le 17 janvier 2022, c’est une femme de 20 ans qui meurt, poignardée de 18 coups de couteau, à Battant. l Le 1 er février 2022, c’est une jeune femme de 18 ans qui appelle la Police à 2 heures du matin. Son conjoint de 33 ans qui est aussi le père de son enfant a tout cassé dans l’appartement. La Police arrive rapidement sur les lieux. Elle lui demande de s’enfermer et de ne pas ouvrir. À 3 heures, elle appelle à nouveau les policiers. Elle a ouvert la porte. Son conjoint lui a assené plusieurs coups de couteau. Elle a été prise en charge à l’hôpital de Besançon, ses jours ne sont plus en danger.

Dominique Frémy, pédopsychiatre et présidente de l’association France victimes 25, au chevet des femmes violentées.

une prise en charge sociale de la per sonne parallèlement au traitement par le gendarme ou le policier de la situation l’ayant conduite à solliciter les autorités d’enquête. Notre inter venante sociale intervient auprès de toute personne, majeure ou mineure confrontée à des violences de couple, violences intrafamiliales ou d’autres situations de vulnérabilité ou de détresse. Elle propose de rencontrer la victime, éventuellement de porter plainte. L.P.B. : Dans son travail, l’intervenante a d’ail leurs appelé une victime tuée par son conjoint quelques semaines plus tard à Besançon. D.F. : Effectivement. La victime n’a pas donné suite à nos appels. C’est cela

ormais sur ces dernières pour être le plus en amont possible afin de recueil lir cette parole qui nous permettra de les protéger. L.P.B. : En quoi les mains courantes peuvent elles aider puisqu’elles ne sont qu’une simple déclaration de faits ? D.F. : Depuis un an, l’assistante sociale de France victimes intervient dans les commissariats de police de Besan çon et de Pontarlier, dans les brigades de gendarmerie deMorteau,Pontarlier, Valdahon, Besançon, Saint-Vit, École Valentin, Ornans. La mise en place de l’intervenant social en commissariat et en gendarmerie (I.S.C.G.) au sein même des locaux de l’unité de gen darmerie et du commissariat assure

France Victimes 25 en chiffres E n 2020, 2 695 personnes ont été accompagnées par l’as sociation située rue Delavelle

à Besançon, dont 1 936 nouvelles victimes d’infractions. Plus de 60 % des situations sont des atteintes aux personnes, 50 % sont des vio lences volontaires. 30 % des infra ctions se produisent dans le cadre du couple. 162 personnes ont été

L’interview du mois 5

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l’obstaclemajeur : ces femmes sont terrifiées et sont convaincues qu’elles auront plus d’in convénients à engager une procédure judi ciaire qu’à ne rien faire. Elles refusent notre aide. L.P.B. : N’est-ce pas décourageant ? D.F. : C’est désolant parce qu’il existe une limite : la liberté individuelle.Vous ne pouvez pas forcer quelqu’un à porter plainte ou débarquer chez lui parce qu’il a évoqué de la violence.D’ailleurs, de nombreuses victimes reviennent sur leurs déclarations. L.P.B. : Vous semblez démunis ! D.F. : Les enfants peuvent être repérés comme des victimes. Ils peuvent être ainsi signalés par l’école ou ils peuvent eux-mêmes dénoncer les actes de violence. C’est tout de même assez rare car l’auteur des faits tient en silence la famille. Souvent, dans une fratrie, l’aîné prend d’ailleurs le parti du père et c’est lui qui va faire taire les autres enfants et faire respecter la loi du silence. L.P.B. : Pour briser cette loi du silence, quel message délivrez-vous ? D.F. : Si unemère ne veut pas faire la démarche pour elle, qu’elle le fasse pour ses enfants bien que ce message ait ses limites. France victimes a mis en place un site Internet (mémodevie) qui permet aux femmes d’ar chiver des preuves en vue d’une procédure comme une attestation médicale ou des témoignages qui l’aideront par la suite. Dés ormais les enfants sont considérés comme victimes à part entière de ces violences et non plus simples témoins. L.P.B. : Depuis 2019, des téléphones graves dangers et des bracelets anti-rapprochement sont déployés à Besançon. Sont-ils efficaces ?

D.F. : Ils ont permis à des femmes de reprendre confiance. Ils ont sauvé des vies. Il y a 14 téléphones graves dangers en service, dont 12 qui sont attribués pour le ressort du tri bunal de Besançon. Il y a 4 bracelets anti rapprochement, tous utilisés. L’auteur est prévenu s’il se rapproche géographiquement du domicile ainsi que la victime. Ce dispositif est àmon sens plus efficace que le téléphone grave danger. Si ce téléphone rassure la vic time, il ne la protège pas si l’auteur la sur prend et qu’elle n’a pas le temps de saisir le téléphone. Nous avons l’exemple de cette femme tuée par son mari en pleine rue à Besançon en 2018. L.P.B. : Votre métier de médecin vous conduit à ren contrer ces personnes violentées. Quel est le profil d’une victime ? D.F. : Ce sont souvent des femmes qui ont vécu un passé difficile, dès leur jeunesse, où elles ont été violentées voire violées par un père, un grand-père, un oncle… Elles sont vulnérables et choisissent un conjoint vul nérable en pensant qu’elles vont se “sauver”. Dans cette alliance improbable, c’est souvent

D.F. : Cela a permis de libérer la parole. Je note d’autres avancées. Un exemple : lorsqu’une femme est battue, ce n’est par exemple plus à elle de quitter le domicile familial en pleine nuit, parfois avec ses enfants, mais à son mari à qui l’association Altérité àBesançon propose un hébergement. Pour les enfants, des régions ont mis en place des protocoles pour les mettre à l’abri et sur tout qu’ils ne soient pas confiés au conjoint auteur du féminicide. L.P.B. : Qu’un père meurtrier puisse récupérer ses enfants paraît inconcevable ! D.F. : Jusqu’àmaintenant, l’autorité parentale n’était pas si claire puisqu’un père pouvait - après incarcération - demander un droit de visite bien que ses enfants soient protégés ou placés. Un projet de loi doit donner la possibilité de déchoir du droit parental un conjoint survivant d’un féminicide. L.P.B. : Un travail est-il réalisé avec les auteurs de ces féminicides ? D.F. : Oui, les auteurs ne sont pas laissés pour compte. Qu’ils soient condamnés pour les faits qu’ils ont commis, c’est normal. La nou veauté réside dans le fait que des obligations de soins leur sont proposées par l’intermé diaire de l’association Altérité qui travaille en direction de ce public ainsi que France victimes. Dans le cadre d’une alternative aux poursuites, ces auteurs paient une somme et sont tenus de participer à plusieurs séances pour parler des actes qu’ils ont commis… Ce travail est animé par une psychologue. Si je défends les victimes, je pense qu’il faut malgré tout aller chercher l’humanité des auteurs de violence. On ne peut pas les dia boliser complètement au risque de les condamner à récidiver avec le conjoint sui vant.Car cela se répète encore trop souvent ! n Propos recueillis par E.Ch.

la violence qui se déclenche. Si ce phénomène touche tous les milieux sociaux, il est encore plus difficile de dénon cer un acte de violence si l’homme violent est connu. Imaginons qu’il soit élu ou maire de sa commune, la femme possède une notoriété qui freine la dénonciation ou a parfois une dépendance matérielle. L.P.B. :Médiatiser les violences faites aux femmes a-t-il permis de faire évoluer positivement les lignes ?

“Ce n’est plus à une femme battue de quitter le domicile.”

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6 L’ÉVÉNEMENT

La Presse Bisontine n°237 - Mars 2022

À PLANOISE, LA PEUR CHANGE DIFFICILEMENT DE CAMP

Planoise, 19 000 habitants, un quartier gangrené par le trafic de stupéfiants. Depuis 2020 et la flambée de violence qui a coûté la vie à un homme, l’État et la Police mettent des moyens humains pour tenter de saper le travail des dealers. Des renforts de police sont arrivés au commissariat de quartier et d’autres sont annoncés. Les habitants attendent de voir.

l Planoise Pas de quartiers pour le trafic de stup’ Une guerre déclarée au trafic mais des habitants toujours otages Alors que les pouvoirs publics n’ont jamais mis autant d’énergie et de moyens pour gêner les trafiquants, les habitants demeurent dubitatifs.

U n matin de février, à l’aube, une caméra de vidéosurveil lance prend position rue de Fribourg à Planoise pour gêner un point de deal connu de tous. La caméra - qui tourne à 360° - tient quatre heures sur son poteau. Cisaillée à la disqueuse, elle tombe sous le regard médusé de quelques habitants réveillés par le bruit strident de la machine. Prévenue, une patrouille de la police municipale arrive la première sur les lieux. Le mal est fait. Dans son appartement, cet habitant qui tient à garder l’anonymat se dit dépité même si l’appareil a été remis en fonction mi-février par le centre de sûreté opé rationnel piloté par la mairie. Selon ce retraité propriétaire, rien ne change à Planoise.Après le calme apparent depuis deux ans (lire ci-contre), un homme a été blessé par balles à Cassin le 11 février. Deux jours avant, des tirs ont été enten dus rue de Picardie, et une arme, de type carabine avec lunette, a été saisie. La peur demeure. “Dans huit mois, un homme qui a participé aux tirs entre bandes rivales va sortir de prison… Il a déjà prévenu sa famille qu’il se vengerait à son retour bien qu’il sera interdit de présence dans le quartier” nous indique

une source policière. Les habitants ne sont pas dupes. ils savent l’équilibre précaire. La preuve lors de la réunion publique organisée le 1 er février dernier au gymnase Diderot par la Préfecture, la Mairie et la Police. Avant que la réunion ne débute, une dame dépose une lettre manuscrite à Anne Vignot pour l’alerter sur ce qu’elle vit au quotidien après lui avoir adressé par le passé deux missives restées sans réponse. Elle nous confie qu’elle ne pren

sommes déterminés car nous avons une obligation de résultat. Au 1 er mars 2022, il y aura 84 gardiens supplémentaires à Besançon comparé à 2017, soit + 40 % en 5 ans ! Nous menons un travail sur les écoles en dédoublant les classes de C.P., sur l’emploi avec 6 conseillers sup plémentaires Pôle Emploi à l’agence de Planoise, 10 pour laMission locale. Quant à l’aménagement urbain, la puissance publique se donne les moyens avec 180 millions d’euros qui seront investis” égrène Jean-François Colombet. Raser les tours, nombreux sont les habi tants à ne pas le vouloir. “Où va-t-on aller ?” , questionne une jeune femme. “Arrêtez de penser ce qui est bien pour nous, écoutez-nous !” lâche une autre. “Ce que l’on veut, c’est vivre comme nous vivions dans la sérénité il y a 50 ans ! C’était la cohésion entre tous” poursuit une riveraine. “Sachez que notre déter mination est totale” martèle le Préfet qui promet un autre rendez-vous avec la population, le 1 er juillet. Un habitant réclame une police municipale le week end et le soir. Benoît Cypriani (E.E.L.V.), adjoint à la tranquillité publique, ne répond pas à cette demande et déclare que la P.M. n’est pas là pour assurer la

Environ 200 riverains étaient présents à la réunion publique sur le thème de la tranquillité publique à Planoise. Prochain rendez-vous le 1 er juillet.

drogue dans leur appartement) qui tou chent 1 500 euros par mois ! Mais on laisse faire !” s’emporte-t-il. Si la peur n’a pas changé de camp, la pression est forte sur le trafic. Les points de deal du 1 au 20, rue de Fribourg, d’Ile de-France, ou encore de Champagne sont toujours là, ceux de la rue de Picardie, de Cologne, du squareVan-Gogh ont dis paru. Les trafiquants se replient là où ils sont les plus forts, ce qui gêne forte ment les forces de l’ordre. Un “jeu” du chat et de la souris. Des souris réguliè rement attrapées mais vite relâchées ou remplacées… Depuis quelques mois, les dealers font appel à des intérimaires venus d’autres villes comme Strasbourg, voire à des étu diants, des chômeurs, pour remplacer les charbonneurs et guetteurs épinglés. Un éternel recommencement. n E.Ch.

sécurité. C’est - selon lui - une mission de la Police nationale. “Faux, rétorque Laurent Croizier, conseiller municipal L.R.E.M.-MoDemprésent ce jour-là. L’ar ticle 2 212-2 du code des collectivités ter ritoriales qui régit les missions de la P.M. sont claires : la police a pour objet d’as surer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique.Avec cette muni cipalité, c’est comme si la policemunicipale n'existait pas” pointe l’élu. Or, quatre agents municipaux sont constamment présents à Planoise du lundi au vendredi. Ils contrôlent et saisissent même des stupéfiants et renvoient des délinquants au commissariat de Besançon. Selon un retraité qui interpelle vivement le Préfet, ce sont aux parents des dealers qu’il faut s’attaquer. “Les parents ferment les yeux sur ce que font leurs gamins car ils font vivre la famille. Il y a également des nourrices (personnes qui stockent la

dra pas la parole en public. Pourquoi ? “Si je parle, il y aura des représailles, assure t-elle. Je sais qu’il y a une personne dans la salle qui est là pour écouter ce que l’on dit.” Difficile de le vérifier sachant que plus de 200 sont présentes. Deux de ses voi sines confirment ses dires. Ambiance pesante. Pourtant, le climat change à Planoise. “Je ne suis pas là pour dire que nous sommes les champions du monde, concède le Préfet. Il y a encore beaucoup à faire pour amé liorer la situation mais nous

84 policiers supplé mentaires en 5 ans.

L’événement 7

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l Police

La nouvelle stratégie “antidrogue” “On va continuer à pilonner les derniers points de deal et à harceler les acheteurs”

Depuis son arrivée il y a un an au commissariat de Besançon, Yves Cellier a développé une nouvelle stratégie contre le trafic de drogue. Elle semble efficace.

des techniques d’investigation qui per mettent d’interpeller les individus et de constater les infractions. L.P.B. : Les mêmes procédés étaient utilisés par le passé… Y.C. : Cela ne change pas, c’est vrai,mais nous avons multiplié ces opérations. En 2020, la Police nationale a procédé à 268 interpellations dans le quartier. L’an dernier, 375 interpellations ont été enregistrées soit 107 de plus ! L.P.B. : En revanche, ce qui est nouveau, c’est le harcèlement mené auprès des consomma teurs ? Y.C. : Effectivement. Si vous êtes inter pellé avec du produit, plutôt qu’une procédure compliquée, nous avons - depuis peu - la possibilité de dresser une amende forfaitaire de 150 euros en plus de la saisie de votre produit. Cette technique permet de harceler les clients et de tenter d’assécher les points de deal. L.P.B. : À combien estimez-vous le nombre de ces “supermarchés” de la drogue ? Y.C. : Nous sommes passés de 40 à 6 points de deal. Nous continuerons à pilonner ces 6 lieux et poursuivrons le harcèlement des dealers et consomma teurs. Pour nous contrer, les trafiquants ont rationalisé les points de deal pour se recentrer sur ceux qui sont les plus enkystés, lesquels nous donnent du fil à retordre pour les démanteler. J’en tends la population qui aimerait que nous allions plus vite. L.P.B. :Malgré ces“bons”chiffres, les trafiquants ont toujours un coup d’avance ! Y.C. : Nous le savons et nous tentons de lutter contre l’ubérisation qui est deve nue à la mode puisque la commande se fait par les réseaux sociaux. J’ai sol licité les effectifs de terrain pour mener

L.P.B. : Quelle est-elle ? Y.C. : Elle consiste à s’attaquer aux consommateurs, aux dealers, aux gros sistes. Pour cela, nous nous sommes donné les moyens de nos ambitions en augmentant de 25 % le nombre de per sonnes à la brigade des stupéfiants. Tout cela à effectif constant, ce qui m’oblige à déforcer certains secteurs pour en renforcer d’autres. En plus de cela, 15 policiers (bientôt 19) sont dévo lus exclusivement à Planoise dans le cadre du quartier de reconquête répu blicaine. Ils connaissent très bien le lieu, ils multiplient les actions de désta bilisation ou de démantèlement de points de deal. Nous mettons en place

des opérations sur des zones de livraison que nous connaissons afin d’intercepter ces livreurs. L.P.B. : Vous êtes arrivé après la bataille qui a opposé deux clans et conduit à la mort d’une personne. Depuis 2021, il n’y a pas eu de règle ment de comptemortel. La peur a-t-elle changé de camp ? Y.C. : Ce n’est pas à moi de le dire. Il faut garder de l’humilité mais on note plusieurs points qui concourent à ces résultats : l’action de la chaîne pénale, la rénovation urbaine qui pèse sur les modalités d’organisation du trafic et notre présence que nous renforçons. Le commissariat de Planoise (6 policiers sur les 15) est ouvert 5 jours sur 7. Il a accueilli 1 100 personnes pour 444 plaintes déposées et 200 mains cou rantes. Nous allons augmenter les patrouilles pédestres dans le quartier pour ne laisser aucun répit à ces per sonnes. n Propos recueillis par E.Ch. En raison du “harcèlement” mené par la Police, nombreux sont les dealers à être “interdits de quartier” par la justice. Sinon, c’est la case prison. Du coup, les réseaux cherchent de la main d’œuvre. Ils font appel à des étudiants, des S.D.F., des personnes qui viennent même de Strasbourg, nous confie une source policière. Du coup, ils ne connaissent pas les policiers en civil… et se font interpeller parce qu’ils ont tenté de vendre à un représentant des forces de l’ordre. n Les intérimaires de la drogue

L a Presse Bisontine :Avez-vous décidé de déclarer la guerre au trafic de drogue dans le quartier de Pla noise ? Yves Cellier (Directeur départemental de la sécurité publique du Doubs) : Je ne fais pas la guerre à mes concitoyens mais aux trafiquants et aux consommateurs. La lutte contre le trafic de drogue est une priorité ministérielle car elle découle sur un chapelet d’infractions. La mission de la police est de lutter

contre la petite et la moyenne délin quance. Il arrive que nous parvenions - par effet d’aubaine - à interpeller de la grande délinquance. En revanche, il ne faut pas croire que nous réglerons le trafic en travaillant uniquement sur les grosses têtes de réseau. C’est faux. Besançon est une ville à la cam pagne qui offre une zone de chalandise importante aux trafiquants avec un débit important. Cela nécessite une stratégie obsidionale.

Yves Cellier, au

commissariat de Besançon.

l Coup de filet

Désormais, ils vendent sur Internet Après vos courses livrées à domi cile, voici la cocaïne (ou tout autre stupéfiant) sur le pas de votre porte. Pour échapper à la pression des forces de police sur le quartier, les trafiquants - comme souvent - s’adaptent. Certains ont migré vers d’autres quartiers comme les Hauts de Saint-Claude par exemple, d’au tres vendent sur Internet et notam ment sur le réseau social Snapchat ou sur l’application Telegram. Cer tains dealers proposent même des cartes de fidélité. La drogue est livrée en scooter ou par de faux V.T.C. Des trafics de plus en plus morcelés qui gênent le travail des enquêteurs. n

SAISIES Action de la Police 230 000 euros en liquide et 17 armes retirés aux trafiquants

Une tête de réseau interpellée

Sans ressources, il détenait 178 000 euros sur ses comptes T out commence le 11 janvier 2020, à la sortie du péage d’au toroute de Chemau

l Argent 230 000 euros en liquide ont été subtilisés par les enquêteurs et 17 armes ont été retirées. l Point de deal 41 opérations ont été menées l’an dernier sur les points de deal de Planoise. Elles ont conduit à 41 gardes à vue et 29 défère ments au Parquet. Le nombre de points de deal a diminué : d’une quarantaine il y a encore 3 ans, ils sont passés à 18 en 2020, 11 en 2021 et 6 actifs en 2022.

l Trafic À Mazerolles-le-Salins, les poli ciers ont saisi 282 kg de cannabis et 6,2 kg de cocaïne en octobre. Un record pour cette valeur mar chande de 2,5 millions d’euros. Ces stupéfiants alimentaient les points de deal de Planoise. 61 000 € ont été découverts. l Interpellations En 2020, la Police nationale a procédé à 268 interpellations dans le quartier de Planoise. En 2021, 375 interpellations ont été enre gistrées. Elles ont engendré 283 procédures judiciaires.

est menée avec 200 gen darmes ! L’action a permis de mettre hors d’état de nuire une équipe structurée de malfai teurs et démanteler deux points de deal. De nombreuses saisies sont réalisées, parmi lesquelles : 6 véhicules, 178 000 euros en numéraire et sur les comptes bancaires, des vêtements de luxe et des produits stupéfiants. Comme souvent, cette tête de réseau n’habite pas le quartier mais un village de l’ouest bisontin. n

sonné et actif à Planoise. “Grâce à des investigations particu lièrement méticuleuses, un fournisseur est identifié” raconte la gendarmerie du Doubs. Le départ d’un convoi de deux véhicules est détecté le 26 novembre 2021. Un dis positif opérationnel d’intercep tion est mis en place et permet lors du retour de réaliser une saisie de 162 kg de résine de cannabis ainsi que 6,6 kg de cocaïne. Le 11 janvier, une opération

din-et-Vaux. La gendarmerie observe un transfert de trois sacs opéré entre deux véhi cules, par un individu, pendant qu’un second observe et sur veille. Les investigations réalisées par la section de recherches de Besançon permettent de confirmer qu’il s’agit d’un trafic de stupéfiants organisé, cloi

8 L’événement l Procureur

La Presse Bisontine n°237 - Mars 2022

l Hôpital

53 mises en examen

Le cas des trafiquants blessés

“À Planoise, les trafiquants sont pourchassés au quotidien” Grâce au travail mené sur des téléphones portables pourtant cryptés, la justice a incarcéré 23 personnes ayant participé aux tirs entre bandes rivales. Premier procès en juin.

L’hôpital peut-il “balancer” à la Police un blessé par balle ?

Le Procureur de la République de Besançon prouve avec des chiffres que la justice ne baisse pas la garde.

E n 2020, l’hôpital de Besançon a soigné huit personnes bles sées par balles dans le cadre des règlements de compte qui ont touché le quar tier de Planoise. Plus récem ment, en janvier 2022, un jeune homme blessé au niveau de la jambe s’est présenté au C.H.U. L’acte médical réalisé, il s’est évaporé du service sans que la police n’ait pu l’auditionner.

tionner l’individu ? “Nous avons deux lois en conflit, admet la direction de l’établis sement. La première est l’article 40 du code procédure pénale qui impose l’obligation pour toute autorité ou fonctionnaire, dans l’exercice de ses fonctions, de signaler des crimes ou délits dont il a la connaissance. La seconde est celle qui s’impose aux médecins : le secret profes sionnel.” Malgré ces deux principes, il arrive - comme ce fut le cas en 2022 - que la Police soit pré venue. “Les décisions se pren nent entre le médecin et le direc teur de garde, précise le C.H.U. Si un praticien extrait un pro jectile, il doit prendre des mesures pour les conserver et les transmettre aux autorités judiciaires.” Selon le Parquet de Besançon, la communication entre le service de soins et l’au torité judiciaire doit se confor ter. n

en parvenant notamment à décrypter des téléphones que les trafiquants pensaient inviola bles” dit-il en guise de message. L’un individu venu se faire soi gner en janvier à l’hôpital (lire par ailleurs), il a été appréhendé avec une arme : “Il se retrouve en détention” précise le Procu reur. Quant à un autre jeune venu lancer depuis l’avenue Clemenceau des paquets pour alimenter un réseau à la maison d’arrêt de Besançon, il a été interpellé et est incarcéré pour 6 mois. “Soyez convaincus qu’au quotidien, nous ne travaillons pas pour les bourgeois de la Boucle ou de Bregille, nous tra vaillons pour tous les habitants de ce département pour lutter contre ces individus qui s’esti ment au-dessus des lois et qui veulent l’imposer” conclut Étienne Manteaux. n E.Ch.

ces tirs ? Nous en sommes à 53 mises en examen et 23 personnes détenues. Une première partie du dossier sera jugée en juin puis une autre à l’automne.” Parmi ces détenus, tous ne le resteront pas indéfiniment, ce qui fait craindre chez les habi tants de Planoise un retour de la guerre des gangs. “Les réqui sitions du Parquet, qui j’espère seront suivies, demanderont l’in terdiction de séjourner à Pla noise. C’est donc une réponse très claire à cette impunité dans laquelle les trafiquants se sont enfermés en s’appropriant le quartier” répond le Procureur. Depuis mars 2020 et l’assassi nat de Houcine Hakkar, les auteurs ont eux aussi été appré hendés “à l’exception du com manditaire que l’on retrouvera” prévient Étienne Manteaux. “Nous avons mis des moyens considérables sur cette affaire

“L es habitants ont été marqués et traumatisés par les tirs qui ont éclaté entre décembre 2019 et mars 2020 entre deux bandes rivales qui se sont approprié le quartier, convient le représen tant de la justice. Certains n’ont pas hésité à régler leurs comptes devant les habitants, terrorisant les petits et les grands.” Face aux riverains le 1 er février der nier, le représentant de la justice a rappelé que la justice ne “bais sait pas la garde” , chiffres à l’appui. “Nous ne cessons sur un plan judiciaire d’investiguer, d’interpeller, d’incarcérer les auteurs d’infractions les plus graves. Que s’est-il passé après

Interdiction de paraître,

qu’est-ce donc ? Le tribunal prononce des inter dictions de paraître. Sur une durée spécifiée, l’individu est interdit par exemple de revenir à Planoise, plus globalement Besançon, voire dans le Doubs. Une sanction qui n’est appliquée que si l’individu est appréhendé par la police. Selon le Parquet, “cette interdiction a pour but de mettre la pression sur ces per sonnes.” n

Un fait qui ne sur prend plus. Le 20 jan vier 2020, un jeune homme touché au bras par une balle est arrivé aux urgences sous une fausse iden tité. Soigné, il s’est arraché les perfu sions et a pris la pou dre d’escampette. Pourquoi le service ne prévient-il pas directement la Police nationale pour audi

Deux lois en conflit.

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La Presse Bisontine n°237 - Mars 2022

Dans l’atelier de maintenance de la société Kuba, à Besançon (zone de Valentin). Pour payer son titre de transport, la carte bleue suffit. Il faut la présenter devant un valideur.

TRANSPORT Nouveau mode de paiement sur Réseau Ginko Avec la carte bancaire, c’est “Sésame ouvre-toi”

Pour valider son voyage sur le réseau Ginko, une carte bancaire suffit ! Cette innovation technolo gique mise au point par la société Kuba est totale ment sécurisée, économique et écologique.

Qui est Kuba ? Kuba est spécialisée dans l’éla boration de solutions billettiques intégrées pour les transports en commun dans le but de simplifier le paiement et la validation des titres de transport. Connue sous le nom de E.R.G. puis Vix et enfin Kuba, la société emploie à Besançon 115 personnes. Elle dispose d’une filiale de 80 per sonnes enAfrique du Sud. Kuba est déployée auprès de 90 réseaux de transports. n

L es avancées technologiques simples sur le papier sont souvent les plus complexes à mettre en œuvre sur le terrain. Depuis fin janvier, les voyageurs des lignes de bus et de tramdu réseauGinko peuvent valider leur voyage avec leur carte bancaire, directement sur le valideur pour 1,40 euro (1 heure de trajet). Une cinquan

tibles. Les premiers retours sur le réseau sont concluants. “Pour les voyageurs, c’est rapide et fluide : pas besoin d’acheter un titre à l’avance, pas d’attente au distri buteur, c’est accessible à tous et simple d’utilisation” , présente Laurent Sénécat, directeur de Kéolis BesançonMobilités. Une réussite Made in Besançon “qui est le fruit d’une collaboration étroite entre les équipes de Kéolis Besançon Mobilités et de Kuba, collaboration facilitée grâce à la proximité géographique et par le fait que Kuba est installé àBesan çon depuis plus de 30 ans” résume Marie Zéhaf, vice-prési dente en charge des transports. “La transaction est complètement sécurisée” , confirme Clément Loi seau pour La Banque Postale. Lorsque la personne valide avec sa carte bleue, il se passe 500 millièmes de seconde pour que l’information bancaire soit trans mise à la banque. Avec ce service, le réseau espère améliorer sa ponctualité “car

taine de développeurs de la société Kuba, dont les bureaux sont installés zone de Valentin à Besançon, a travaillé depuis 2020 - avec Kéolis Besançon et Grand Besançon Métropole - à l’élaboration de cette innovation au service de la mobilité. Une invention saluée par la prési dente de G.B.M. Anne Vignot : “On s’interroge pour savoir com ment faciliter le transport en com mun. Le fait de ne pas avoir besoin d’acheter un titre de trans port à l’avance et de pouvoir uti liser sa carte bancaire fait partie des solutions” se réjouit l’élue. Près d’une centaine de voyageurs se sont portés volontaires pour tester et vérifier notamment le bon fonctionnement du système Open payment et des appareils de contrôle durant plusieurs semaines. “Près de 85 cartes ban caires ont été testées pour 1 500 validations effectuées, et tout fonc tionne” présenteAdrienNaudet, chef de projet chez Kuba. Seules les cartes bancaires japonaises et chinoises ne sont pas compa

dans les mois à venir à l’instar de Nice. Adieu le ticket papier ou la carte de transport. “C’est aussi, il faut le dire, une avancée écologique, car on limite la fabri cation de cartes confectionnées avec des métaux rares” conclut Laurent Sénécat. Une seconde phase interviendra avec le déploiement de cette solution sur le réseau périurbain en sep tembre 2022. n E.Ch.

moins d’achats de billets se feront auprès du conducteur, présente un professionnel. Cela aura une action de lutte anti-fraude meil leure puisque le voyageur aura la possibilité de se mettre en règle à bord du véhicule (sauf en cas de contrôles).On limite également le nombre d’équipements embar qués pour contrôler.” L’investis sement est d’1,24million d’euros. D’autres villes ou métropoles feront confiance à ce système

Tarik Dinane, directeur de Kuba à Besançon.

PLANOISE Formation d’un collectif Bal folk : entrez dans la danse Le Carrefour d’animation et d’expression musicales (C.A.E.M.) de Besançon lance un appel aux musiciens amateurs, expéri mentés et débutants, pour animer un bal folk en fin de saison.

Les musiciens participent librement aux arrangements. Ici lors de la deuxième répétition au C.A.E.M.

C’ est une véritable aventure musicale et festive que pro pose cette école de musique, habituée à la pratique col lective. Des répétitions sont organisées certains samedis dans ses locaux de Planoise avec tous les musiciens qui le souhaitent. “L’objectif est de partager un moment convivial et de préparer l’animation du bal folk qui se tiendra le dimanche 5 juin à Byans-sur-Doubs” , résume Jean-Baptiste Chané, directeur du C.A.E.M. Ce projet, monté à l’initiative de Phi lippe Brégand et Jean-Christophe David (deux musiciens intervenants au sein de l’école), s’adresse aussi bien aux enfants qu’aux adultes, quel que soit le niveau de pratique de l’instru ment. “Les participants sont invités à jouer un répertoire issu du folk tradi tionnel (bourrées, valses, chapelloises… ) et à faire danser le public. Ils joueront en première partie du groupe Flock.”Si

Fabrique”, qui organisera dans le même temps un marché de créateurs. “Ce ter ritoire a à cœur de proposer diverses animations culturelles. Nous y avons déjà fait des stages jazz et divers concerts par le passé” , indique Jean-Baptiste Chané. “Ce nouveau temps festif, axé autour du folk, va dans le sens de la politique d’enseignement musical de Grand Besançon Métropole, qui sou haite que nos écoles animent l’ensemble de l’agglomération et partagent diffé rentes esthétiques musicales.” n S.G. En savoir plus : 03 81 51 21 36 accueil@caem-besancon.fr

se fait ici surtout à l’écoute et au res senti. Pas besoin de maîtriser à la per fection une partition. Ce qui permet y compris aux amateurs et à ceux qui

certains connaissent déjà ce répertoire, pour d’autres c’est une découverte totale. “Cela change du classique, c’est plus libre” , se réjouissait ainsi une violoniste, lors de la deuxième répétition. “En plus, on participe aux arrangements. Du coup, on se sent plus impliqué.” Le style évolue en effet selon les influences des musiciens. Ce jour-là, le professeur encadrant invitait d’ailleurs la dizaine de musi ciennes présentes à ne pas hésiter à pousser leurs initiatives. “Si vous tentez quelque chose, allez-y jusqu’au bout. Il y a plein de choses différentes dans le folk, c’est ce qui est intéressant. Cela se vit avant tout par le rythme.” Le travail, mené en toute convivialité,

n’ont plus joué depuis un moment de participer, comme cette dame de Maîche, qui a saisi l’oc casion pour se remettre à l’accordéon. D’autres viennent simplement “pour le plaisir de faire danser les gens.” Ce grand bal folk est mis en place en partenariat avec la commune de Byans-sur-Doubs et l’as sociation locale “La Petite

“Pour le plaisir de faire danser les gens.”

Cette musicienne amatrice a saisi l’occasion pour se remettre à l’accordéon.

Besançon 11

La Presse Bisontine n°237 - Mars 2022

PATRIMOINE

Les 20 ans de l’I.N.R.A.P. Sous terre, plus de trente siècles nous contemplent

Besançon est (avec Autun) sans doute le plus beau “spot” archéologique urbain de toute la région Bourgogne-Franche-Comté. Le point avec le directeur régional de l’I.N.R.A.P. qui fut longtemps archéologue à Besançon, Laurent Vaxelaire.

L’ Institut national de recherches archéologiques préventives (I.N.R.A.P.) fête ses 20 ans en ce mois de février. À sa tête, aurent Vaxelaire. Celui qui fut long temps archéologue à Besançon résume l’activité de l’institut dans toute la région : entre 2002 et 2021, les archéo logues de l’I.N.R.A.P. ont réalisé 2 122 diagnostics et 277 fouilles archéolo giques. 78 fouilles et 1 009 diagnostics concernent la Franche-Comté. C’est sans doute à Besançon que cet archéologue a vécu ses plus belles découvertes, avant même la création de l’I.N.R.A.P. “L’archéologie dite pré ventive a commencé à vraiment exister dans les années soixante-dix et s’est structurée au plan national par la grande loi de février 2002 créant les I.N.R.A.P. La mise en place des diag nostics archéologiques avant fouille avait notamment pour but de ne pas ralentir les grands chantiers de travaux” rappelle LaurentVaxelaire.Aujourd’hui encore, l’archéologie préventive (une centaine d’archéologues sont rattachés à l’I.N.R.A.P. Bourgogne-Franche Comté) est financée par une taxe pré levée sur chaque permis de construire ou déclaration de travaux déposés par

parmi les plus importants au tournant des années quatre-vingt-dix et deux mille. “À Besançon, les premiers chan tiers d’ampleur ont commencé aumilieu des années soixante-dix avec la décou verte notamment de la mosaïque de Neptune suite aux travaux d’E.D.F. puis du collège Lumière. D’autres décou vertes ont été mises au jour en 1989 avec les travaux du parking de la Mai rie. Puis à la fin des années quatre vingt-dix avec le chantier Marché-Beaux arts, remparts dérasés (avec la décou verte du mur gaulois et du cimetière de l’ancien hôpital du Saint-Esprit), et Palais de justice, des opérations que j’ai dirigées” note M. Vaxelaire. Dans les années 2000, l’I.N.R.A.P. sera sol licitée pour le grand chantier de l’îlot Pasteur. “La Z.A.C. Pasteur a été la première opération de collaboration entre l’I.N.R.A.P. et le service archéologie de laVille qui depuis gère les principaux chantiers de fouilles à Besançon.” Le chantier du tram, puis celui de la gare Viotte ont ensuite occupé les archéo logues municipaux avec l’I.N.R.A.P. en support. Le prochain chantier important de fouilles à Besançon concernera le site Saint-Jacques. Si des diagnostics ont

les particuliers ou les collectivités. “Sur chaque permis de construire ou décla ration de travaux déposés, la taxe archéologie est de 60 centimes par mètre carré” précise Laurent Vaxelaire. Cette taxe prélevée par l’État est redistribuée aux différents I.N.R.A.P. régionaux ou aux services d’archéologie des collec tivités publiques agréés pour remplir ces missions. C’est notamment le cas à Besançon qui possède désormais son propre service d’archéologie préven tive. Tous les chantiers ne donnent pas lieu à des fouilles archéologiques, loin de là. “8 % des permis de construire ou

Laurent Vaxelaire, directeur régional de l’I.N.R.A.P. (photo G. Pertuisot).

d’aménager vont donner lieu à un diagnostic et sur ces 8 %, 20 % débouchent sur des fouilles” détaille Laurent Vaxelaire qui rappelle ses années d’ex périence à Besançon. “C’est une ville qui coche toutes les cases. À Besan çon, la question n’est pas de savoir si on va trouver quelque chose en creusant, mais ce qu’on va trouver” indique celui qui a mené des travaux comptant

Seulement 2 % du sous-sol du centre-ville explorés.

avant J.-C.) à l’ère moderne en passant par la période gauloise, romaine et médiévale, plus de trente siècles d’ha bitat se superposent. Les archéologues ne sont sans doute pas au bout de leurs surprises : Laurent Vaxelaire estime que “sur les 120 hectares que compte le cœur historique de Besançon, à peine 2 % ont été explorés !” n J.-F.H.

été déjà réalisés, le calendrier du chan tier de fouilles n’est pas encore calé, le chantier étant encore aux mains des politiques. Le sous-sol bisontin est loin d’avoir livré tous ses secrets.Tel unmillefeuille, les couches de constructions successives dans le sous-sol de la Boucle atteignent 6 mètres. Des premières traces d’ur banisation datant duNéolithique (3 500

25000 BESANCON 16 Rue du Bellay ZAC Châteaufarine Audi BESANCON - SAS ESPACE 3000 Tél.: 03 81 41 28 28

Orias n° 07 030 725

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