La Presse Bisontine 231 - Septembre 2021

4 L’interview du mois

La Presse Bisontine n°231 - Septembre 2021

TÉMOIGNAGE

L’ancien maire Jean-Louis Fousseret

“Besançon ne doit pas devenir un îlot de verdure inaccessible” C’est un Jean-Louis Fousseret plutôt fringant avec qui nous avons rendez-vous. L’ancien maire n’a rien perdu de son enthousiasme quand il s’agit de parler de sa ville et de politique. À fleurets mouchetés, il ne se prive pas de fustiger ceux qui lui ont succédé à la tête de Besançon. Le “vieux lion” de la politique bisontine en a encore sous la semelle.

L a Presse Bisontine : Un an après avoir quitté la scène politique bisontine, comment allez- vous Jean-Louis Fousseret ? Jean-Louis Fousseret : Je vais bien, je suis en pleine santé et j’ai même un peu mai- gri ! (rires). Sans doute parce que depuis un an j’ai une vie plus équilibrée, moins stressante, que je mange moins vite et plus sainement. Je fais aussi de l’exercice, de vélo notamment avec des copains, je me sens très bien. L.P.B. : Et sur le plan moral ? J.-L.F. : Le plus compliqué sans doute après une vie publique bien remplie, avec des journées où je travaillais de 8 heures le matin à 23 heures le soir et ce, pendant 37 ans, c’est d’arrêter du jour au lendemain.Un jour on a le pouvoir législatif et réglementaire en tant que maire et du jour au lendemain, on le passe à d’autres, sans transition. Le télé- phone sonne moins, même s’il sonne quand même encore beaucoup, et j’ai donc beaucoup plus de moments calmes, c’est logique. Même si elle est brutale, je m’étais préparé à cette rupture. J’ai le grand avantage d’être très bien entouré par ma famille et mes amis proches. Et ce temps libéré me permet de faire plein de choses que je ne pouvais pas faire avant comme aller chercher ma petite- fille au lycée, voir plus mes petits-enfants à Paris, ou encore classer mes archives ! J’en avais l’équivalent de 40 mètres linéaires ! J’ai tout donné aux archives, elles seront consultables dans 50 ans. L.P.B. : Bientôt la rédaction de mémoires ? J.-L.F. : Ce serait sans doute un peu pré- tentieux de ma part de me lancer dans un tel exercice… L.P.B. : Avez-vous tout de même gardé un pied dans la vie publique ? J.-L.F. : Oui, dans le milieu associatif notamment. Je fais partie du comité de l’Amicale cycliste bisontine, le club du président Pascal Orlandi qui prépare l’organisation à Besançon d’une manche de la coupe du Monde de cyclocross en fin d’année où on espère bien accueillir Mathieu van der Poel etWout Van Aert. Je suis aussi depuis cette année vice- président de l’office de tourisme de Besan- çon aux côtés de la nouvelle présidente

sation et l’avenir de notre territoire. Je pense clairement que sur certains dos- siers il y a nécessité d’accélérer la cadence. Je ne comprends pas qu’il soit si com- pliqué que cela de mener à leur terme des projets qui avaient été validés par les équipes précédentes. Je pense évi- demment aux Vaîtes, à la R.N. 57 ou à la future grande bibliothèque. Pendant que Besançon prend son temps, il ne faut pas oublier que les autres avancent. On peut discuter et concerter à l’infini sur des détails mais à unmoment donné, le rôle d’un maire, c’est de trancher. L.P.B. : Anne Vignot souhaite améliorer tous ces dossiers avant de les valider. J.-L.F. : Oui, je veux bien,mais des dossiers comme la R.N. 57 avec ces trois malheu- reux kilomètres restants, c’est précisé- ment le sujet pour lequel nous avions pris le temps de concerter, d’étudier toutes les possibilités et justement d’ap- porter les améliorations nécessaires pour qu’il soit accepté par tous. Pendant que ce dossier n’avance pas, ce sont aussi les voitures qui restent bloquées et qui pol- luent. Je me souviens déjà qu’en 1997 avec Paulette Guinchard on discutait de la fin de ce tronçon. 25 ans plus tard, on discute toujours… Quant à la grande bibliothèque, il me semble que j’avais obtenu 50 % de sub- ventions pour les équipements et 40 % pour sa construction. On peut toujours encore améliorer les choses, mais jusqu’où ?… L.P.B. : L’actuelle maire a revu ce projet pour améliorer la performance énergétique de ce futur bâtiment. Elle semble vouloir suivre ses idées politiques jusqu’au bout. J.-L.F. : Je suis bien d’accord, sauf que Besançon ne doit pas devenir un îlot de verdure inaccessible. Nous avions contri- bué à faire de cette ville par deux fois, et c’est inédit, la capitale française de la biodiversité. Mais en même temps, il faut que Besançon reste dynamique ! On peut tout à la fois rester dynamique, implanter des entreprises et construire des logements, et rester en même temps champions de la biodiversité. Le déve- loppement durable, ce n’est pas empêcher de construire des logements et envoyer les gens habiter à 30 km de Besançon.

Marie-Anne Spony, une femme très dyna- mique. Je suis toujours très attaché au fait que Besançon soit une vraie desti- nation touristique. Je reste aussi membre du conseil de surveillance du C.H.U. de Besançon, j’avais demandé cette faveur à l’A.R.S. car tout le monde connaît mon attachement aux questions médicales et de santé. Nous avons à Besançon des équipes fantastiques, soignants et non soignants, en matière de santé. L.P.B. : Vous gardez aussi des liens avec des fonctions nationales ? J.-L.F. : J’ai laissé la présidence de l’institut de formation d’En Marche à Bérangère Abba, la secrétaire d’État à la Biodiver- sité, mais je reste vice-président de cet institut. Je suis toujours membre de l’as- sociation des sites majeurs Vauban, ce qui me permet de continuer à suivre l’évolution de ces sites remarquables du patrimoine à travers le France. Je ne m’ennuie pas. L.P.B. : Tout cela vous laisse quand même du temps pour suivre l’actualité bisontine. Quel regard portez-vous sur les dossiers actuels ?

Retiré des affaires municipales depuis un an, Jean-Louis Fousseret observe toujours de près l’évolution des dossiers locaux.

éteigne complètement l’éclairage de la Citadelle ? La qualité de vie dans une ville, c’est évidemment indispensable. Mais il ne faut pas non plus oublier la précarité, la solitude des personnes âgées et malades. Il serait sans doute bien de rendre plus lisibles dans cette ville les politiques qui vont dans le sens des soli- darités. L.P.B. : Un mot sur la suppression du défilé du 14-Juillet ? J.-L.F. : Je crois que cette décision a choqué. L’Armée à Besançon, c’est 6 000 feuilles de paie, des enfants dans les écoles, des familles dans les magasins. Besançon est le siège de la 1 ère division de l’Armée de Terre, il faut l’avoir en tête. L.P.B. : Petit retour sur votre sortie de scène l’an dernier. Vous n’avez pas de regret d’avoir soutenu une liste qui n’a pas passé la barre des 5 % ? J.-L.F. : Si j’ai un regret, c’est qu’il n’y ait pas pu y avoir d’accord avec d’autres mouvements pour conduire une large liste allant du centre-droit au centre- gauche composée de candidats qui croient au développement de leur ville. Jean Minjoz n’avait rien fait d’autre que de rassembler des gens d’horizons divers, Robert Schwint avait su également le faire avec le P.C. et moi-même je l’avais fait avec les Verts. Ce genre de rassem- blements était bénéfique pour la ville. J’aurais bien sûr préféré que les choses se passent autrement cette fois-ci. Mais je reste convaincu que le programme que j’ai soutenu l’an dernier correspond parfaitement à ce que les Bisontins atten- dent aujourd’hui.

Le projet des Vaîtes tel que nous l’avions tra- vaillé, c’était tout sauf un bloc de béton ! Je ne comprends pas com- ment on peut bloquer ce projet. Même chose pour le projet d’allon- gement du tram : il faut avancer. Je suis évidem- ment bien placé pour comprendre que ce genre de dossiers est souvent compliqué, mais il faut d’abord marquer la volonté de les faire. Si j’avais fait un référendum sur le tram il y a dix ans, on connaît le résultat : il y aurait eu 80 % de non. Qui râle après le tram aujourd’hui ? Un maire doit décider. Quand

J.-L.F. : Je suis de près l’actualité bisontine évi- demment, et je m’aper- çois que ça fait du bien de regarder tout cela avec plus de recul, et plus dans les détails. C’est la raison pour laquelle je ne pose pas de regard et de juge- ment définitif sur ce que fait l’équipe actuelle. Je sais par expérience qu’il faut laisser du temps au temps et que les choses s’installent dans la durée. Ceci dit, je reste très vigilant par rapport à ce qui se passe actuellement à Besan- çon. L.P.B. : Quels sont justement vos principaux points de vigi- lance ? J.-L.F. : Ce sont des points de vigilance, voire d’in- quiétude sur l’organi-

“Pendant que Besançon prend son temps,

“Le projet des Vaîtes, c’était tout sauf un bloc de béton !”

les autres avancent.”

j’étais aux manettes, j’avais toujours en tête que je n’étais pas le maire du P.-S. ou d’EnMarche,mais le maire des Bison- tins. L.P.B. : Le réchauffement climatique ne justifie- t-il pas qu’on remette justement en cause certains projets d’aménagement ? J.-L.F. : Je suis entièrement d’accord pour dire que tout ce qui touche à l’environ- nement est un argument fort pour les villes de demain. Mais Besançon n’est quand même pas le Sahara ! On a plus de 3 000 hectares d’espaces verts. La question de la biodiversité justifie-t-elle par exemple qu’on ne fauche plus les herbes folles dans les cimetières ou qu’on

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