La Presse Bisontine 230 - Août 2021
6 L’événement
ÉDITION SPÉCIALE ÉTÉ - Août 2021
l Agroalimentaire Fromagerie Milleret, à Charcenne Ortolan, Fin fou, Charcennay, les secrets de la famille Milleret
Denis Milleret,
président de la fromagerie du même nom, devant l’usine à Charcenne.
Dernier grand groupe laitier français détenu par la même famille depuis trois générations, la fromagerie Milleret emploie 192 personnes à Charcenne (Haute-Saône), village berceau d’une formidable saga. Un siècle plus tard, les petits-enfants investis- sent 30 millions d’euros dans un nouvel outil de production.
L’entreprise détenue à 100 % par la famille Milleret a résisté aux nom- breuses propositions de rachat de mas- todontes. Les Milleret, depuis trois générations, tiennent bon. La quatrième génération suit les traces avec un neveu, Mathieu, à l’atelier de fabrication, et deux cousin(e)s qui ont rejoint les rangs. Milleret est devenu une marque de fabrique, à savoir un groupe local qui travaille avec son territoire et collecte le lait chez 153 agriculteurs, tous situés dans un rayon de 25 km en moyenne autour de la fromagerie. La firme s’at- tache à rémunérer ses éleveurs à un prix du lait supérieur à la moyenne du marché depuis 14 ans déjà. 2021, année du centenaire,marque une évolution majeure : “Comme en 1975 lorsque mon père a lourdement investi dans l’achat d’un coagulateur révolu- tionnaire pour l’époque, et comme en 1990 lorsque nous avons construit la nouvelle usine pour 100 millions de francs, nous sommes en 2021 à l’aube d’un nouveau grand virage pour notre société…Nous prenons le pari de l’avenir en lançant la construction d’une seconde fromagerie à Charcenne. C’est osé, annonce Denis Milleret, petit-fils d’Henry, le fondateur. L’investissement, c’est ce qui nous fait avancer et nous n’avons pas de compte à rendre à nos actionnaires” ajoute-t-il. Devenue célèbre grâce à l’Ortolan, au Fin fou, au Roucoulons, au Charcennay ou à sa cancoillotte, la fromagerie a sans cesse innové dans son outil de production ou ses méthodes de mar- keting en s’entourant de compétences extérieures. C’est ce qui lui permet de figurer parmi les grands transforma- teurs de lait avec des produits connus et vendus à travers la France entière mais aussi au Canada, aux États-Unis, en Scandinavie et enAllemagne notam- ment. “Tout n’a pas été facile mais nous avons toujours avancé. En 1990, notre bâtiment (N.D.L.R. : l’ancien site du moulin) était devenu obsolète et ne res- pectait plus les normes européennes. La question de l’avenir de la société se posait. Entre frères, cousins, cousines, nous avons réfléchi et lancé la construc- tion de l’usine, au village, là où mon père était aussi le maire” se souvient
La fromagerie, lorsqu’elle était installée sur le site du moulin.
D ans l’univers ultra-concur- rentiel de l’agroalimentaire, la fromagerie Milleret fait figure de “village gaulois”. Pas de potion magique ici, mais une recette faite de tradition, de savoir- faire, et d’esprit familial pour une société capitalisant près de 75 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel ! En l’espace de cent ans, la société n’a évidemment plus rien à voir avec ses débuts, époque
où Henry, le fondateur, collectait quelques centaines de litres de lait par an dans les fermes du village pour les transformer en fromage dans la cave de la chapelle Saint-Leffond.Après un siècle, la fromagerie demeure ancrée dans ce village de Charcenne (300 habi- tants), à 30minutes de Besançon, entre le clocher de l’église romane et lesméan- dres de la Colombine, le ruisseau qui alimente en eau l’usine.
pense à l’environnement. Elle réduit son empreinte carbone de 37 % avec l’achat de deux pompes à chaleur qui remplacent l’énergie au gaz permettant de réchauffer l’eau dans le cadre de la pasteurisation du lait. Elle lance éga- lement la construction d’un bâtiment d’accueil du public avec salle de vidéo et de dégustation. L’ouverture est prévue en septembre. “Ce bâtiment nous per- mettra de mieux accueillir les visiteurs. C’est une façon de montrer notre trans- parence et de créer des vocations car nous recevons beaucoup de scolaires et d’étudiants” indique Thierry Martin. Le parking sera agrandi et couvert par des ombrières photovoltaïques qui pro- duiront environ 7%de la consommation en énergie de la société. Les 100 bougies posées sur le nouvel Ortolan maxi (500 grammes) auront fière allure. Habitants de Charcenne, salariés et membres de la famille Mil- leret les souffleront en septembre lors de trois jours de festivités. Ici, c’est du fromage qui coule dans les veines. n E.Ch.
Denis Milleret. Trente ans plus tard, lamême question se pose. Le choix de la direction : lancer la construction d’une seconde usine pour unmontant d’investissement éva- lué à 30 millions d’euros, à cinquante mètres de la première. “C’est un signal fort pour la commune, les collectivités en général, pour nos agriculteurs, que de lancer ce projet à Charcenne. Nous aurions pu nous faciliter la tâche en construisant dans une zone industrielle. Construire ici, là où nous habitons, c’est un point d’honneur” commente le pré- sident depuis son bureau où trône la
Jacques et Pierre, la seconde génération des Milleret qui a donné l’impulsion industrielle.
photo de son grand-père. “Ce site va nous permettre d’innover car nous en avons encore sous le pied, ajoute Thierry Martin, directeur général. On veut, avec cette usine, créer autre chose que des fromages à pâte molle à partir de 2024” annonce-t-il sans trop en révéler.La firme centenaire a des idées et
“2021, un virage pour nous.”
Les fromages une fois affinés sont conditionnés puis expédiés à travers la France et le monde entier.
L’atelier de fabrication (photo L. Hautecœur).
Charcenne et sa fromagerie, un duo qui perdure depuis 100 ans.
Repères l Milleret emploie 192 personnes à Charcenne (Haute-Saône), et 30 intérimaires l Elle transforme 120 millions de litres de lait par an l Chiffre d’affaires : 75 millions d’euros
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