La Presse Bisontine 222 - Octobre 2020

8 L’ÉVÉNEMENT

La Presse Bisontine n°222 - Octobre 2020

l Le président des chasseurs du Doubs Réaction “La chasse est attaquée, et avec elle la ruralité”

Président des chasseurs du Doubs, Jean-Maurice Boillon demande à ses chasseurs de relever la tête face à ce qu’il appelle les “anti-tout”, des “bobos qui confondent le bien-être des animaux et l’équilibre d’un biotope” dit-il. Pour cela, il dégaine les arguments.

tionnelles puis les autres modes de chasse qui seront attaqués comme celle au chien courant. Aujourd’hui, on vise les chas- seurs, demain ce sera les pêcheurs, les cavaliers parce qu’ils font mal aux chevaux, les apiculteurs parce qu’ils spolient le travail des abeilles ! L.P.B. :La chasse est-elle nécessaire ? Vos détracteurs disent que non. J.-M.B. : La chasse est nécessaire sinon il y aurait trop de dégâts dans les cultures, dégâts que les chasseurs indemnisent aux agri- culteurs. Quand j’entends que des personnes dans les milieux anti-spécistes veulent stériliser les animaux sauvages, je m’in-

le torse ou au contraire préfèrent baisser les armes ? J.-M.B. : Il faut être fier d’être chasseur, ne pas avoir honte. On doit pouvoir pratiquer notre loi- sir. Aujourd’hui, des miradors sont sabotés, d’autres actes mal- veillants apparaissent dans le Doubs. Il est clair que cette ambiance est une raison de l’éro- sion des effectifs. L.P.B. : Vous n’êtes plus attaqués sur la sécuritémais sur la condition animale. Que faire ? J.-M.B. : Être chasseur, c’est ana- lyser, observer, sélectionner. On ne choisit pas de tirer sur le pre- mier oiseau qui passe ! Des chas- seurs publient des images sur les réseaux sociaux : il faut s’abs- tenir car ce sont des prétextes pour nous critiquer. L.P.B. : La chasse dans le Doubs ne va pas vers de beaux jours malgré son rôle de gestion des espèces, son rôle social et économique. J.-M.B. : Les jours seront difficiles mais nous sommes sereins. Chasseurs, pêcheurs, cavaliers, possesseurs de parc animaliers, de cirque, tout le monde doit faire front, ensemble. n Propos recueillis par E.Ch.

L La Presse Bisontine :Depuis mi-septembre,environ 7 500 chasseurs du Doubs ont fait leur retour dans les bois et prairies, un chiffre en légère baisse. Pourquoi cette ouverture 2020 est-elle si différente des autres ? Jean-Maurice Boillon : Elle est déjà particulière en raison du Covid. Nos effectifs sont vieillissants :

chasse qui est menacée, mais la ruralité. L.P.B. : Un projet de référendum d’ini- tiative partagée (R.I.P.) a été lancé le 2 juillet par un journaliste, et deux grands patrons français. Il prévoit l’in- terdiction de l’élevage intensif,en cage, de la chasse à courre et des chasses dites traditionnelles. Pourquoi a-t-il

nous devons prendre soin de nos aînés pour ne pas les exposer. Mais la vraie problématique de fond concerne les attaques de nos opposants. Elles fusent de toute part : des animalistes, des anti-spécistes.Moi, je les appelle les “anti-tout”. On ne peut plus vivre dans nos campagnes car ce n’est pas uniquement la

autant de résonance dans vos rangs ? J.-M.B. : C’est soutenu par un public “bobo” qui confond le bien- être des animaux et l’équilibre d’un biotope. Savent-ils que ce sont les chasseurs, qui, avec leur argent replantent des haies dans le Doubs ? Savent-ils que nous avons été moteurs pour protéger le renard ici ? Savent-ils encore que les bagues achetées par les chasseurs servent notamment à payer les dégâts occasionnés aux cultures ? Savent-ils que nous protégeons la faune et les automobilistes des collisions dues au trafic routier ? Nous devons le faire savoir. L.P.B. :La chasse peut paraître violente, non ? J.-M.B. : Personne n’a d’égard à tuer une mouche, personne ne veut la mort d’un chevrillard, mais la vie des uns se nourrit toujours de la mort des autres ! La mort d’un animal, ça trau- matise, mais elle doit être la plus propre possible. Avec ce R.I.P., ce sont les chasses tradi-

quiète de cette ingérence ! On ne va plus à la chasse pour manger mais pour réguler. Et non, les chas- seurs ne tirent pas sur tout ce qui bouge. L.P.B. : Face à toutes ces attaques,vos chas- seurs bombent-ils

“Aujourd’hui la chasse, demain la pêche, l’équitation…”

Le président des chasseurs Jean- Maurice Boillon ici dans le hall de la Fédération, à Gonsans.

l Élevage

Un commerce controversé

Le marché de la fourrure sur le déclin ? Aujourd’hui en dépôt de bilan, l’élevage de visons d’Émagny a été l’un des combats emblématiques de la cause animale dans la région. Les militants réclament toujours la fermeture des quatre

La surpopulation en cage et les conditions insalubres d’élevage sont (photo C.P.E.P.E.S.C.) souvent pointées du doigt par les associations de défense animale.

derniers élevages français, dont celui de Montarlot-lès-Rioz en Haute-Saône.

pour 18 200 visons, l’élevage se retrouve en dépôt de bilan. “L’éle- veur a bien tenté de formuler un recours contre cet arrêté de refus, mais sa demande a été jugée irrecevable” , précise le président de Combactive, qui appelle aujourd’hui à sa fermeture défi- nitive, à travers une pétition qui a déjà réuni 113 500 signa- tures. “Le comble dans cette histoire est qu’on n’a pas obtenu gain de cause au motif de la cause ani- male mais de protection de l’en- vironnement. L’élevage de visons faisant partie des plus pol- luants.” Cette question environ- nementale (gestion des effluents, protection des sols…) ajoutée au désaveu de la fourrure, avec le renoncement successif des grandes marques de mode, par-

le tribunal administratif décide d’annuler les autorisations accor- dées en 2012 sur les requêtes de Combactive. S’ensuit une nouvelle demande pour élever, cette fois, 18 200 visons. Un autre pas sera alors franchi en 2016 avec la condamnation de

ticipe au déclin de cette indus- trie. Et si dans le dossier d’Émagny, Combactive déplorait le manque de dialogue avec l’éleveur, la situation est tout autre sur la ferme de Montarlot-lès-Rioz : dernier élevage de visons en Franche-Comté. “On est en contact avec son gérant, on arrive à discuter. La solution d’un reclassement en centre pédago- gique a été évoquée et il n’y est pas opposé sous réserve que le gouvernement le suive” , signale Fabien Robert. n S.G.

environnementales et adminis- tratives ont émaillé de longues années de procédure. L’élevage, dont l’autorisation initiale était fixée à 1 000 visons, a semble- t-il été peu inquiété jusqu’en 2010. “Tout a commencé en 2012 lorsque l’une de nos adhérentes m’a alerté. La C.P.E.P.E.S.C.* avait déjà mené de premières investigations et obtenu plusieurs victoires couronnées par de lourdes astreintes infligées à l’éleveur, à la préfecture ainsi qu’à la mairie d’Émagny” , indique Fabien Robert. Alors qu’il obtient en 2012 une autorisation préfectorale pour 5 000 animaux, l’éleveur se voit condamner pénalement deux ans plus tard (et pour la troi- sième fois) à une peine d’empri- sonnement avec sursis. En 2015,

A près la nouvelle diffu- sion d’images chocs, tournées au mois d’août, l’association de protection animale One Voice demande la fermeture de ces élevages de visons avant la fin de l’année par arrêté ministériel. Le sort de ces “fermes à fourrure” continue de préoccuper en France. Mais aussi ailleurs en Europe, où d’autres pays ont déjà légiféré sur la question. “Le dernier élevage de Bosnie-Her- zégovine a fermé en juillet, les Pays-Bas stopperont l’exploita- tion de leurs 160 élevages en 2021, et la Finlande, elle aussi, prévoit de clore définitivement ses 700 fermes à fourrure” , fait remarquer One Voice dans un

communiqué. Si aux Pays-Bas, la propagation d’un virus chez ces animaux et sa transmission à deux employés ont précipité la fin de cette indus- trie, les lignes tendent également à bouger côté français. “D’après les derniers pourparlers avec le gouvernement, quelque chose va être fait assez rapidement, mais on ne sait pas quoi encore” , glisse Fabien Robert, président de l’as- sociation locale de protection des droits des animaux Com- bactive. Lui a toujours le dossier d’Émagny en tête, pas complè- tement refermé (la liquidation de la S.C.E.A. Le Charmot étant toujours en cours).Dans cette exploitation du Doubs créée en 1985, plusieurs irrégularités

l’éleveur à 6 mois de prison ferme (effectuée sous bracelet électro- nique). “Une peine inédite en France et probablement en Europe” , relève Fabien Robert. Début 2018, après un nouveau refus préfectoral concernant une nouvelle demande d’autorisation

De la prison ferme pour l’éleveur.

*Commission de protection des eaux, du patrimoine, de l’environnement, du sous-sol et des chiroptères

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