La Presse Bisontine 219 - Juillet 2020

24 DOSSIER I

La Presse Bisontine n°219 - Juillet 2020

Une découverte mondiale faite au C.H.U. de Besançon L’équipe du Professeur Éric Delabrousse a établi le lien entre Covid-19 et embolie pulmonaire. La revue américaine “Radiology” a publié les travaux des Bisontins lesquels ont permis de sauver de nombreuses vies.

ment. Car après quelques jours, des patients que l’on croyait dans un état stable avec 75 % de capacité respiratoire présentaient une embolie pulmonaire, non décelée sur le scanner, et mortelle dans certains cas. Les cardiologues ou réanimateurs ne pouvaient d’ailleurs pas la déceler sachant que l’hypoxie était due à des caillots présents au sein de tout petits vaisseaux, que seul l’angioscanner parvient à détecter. Parmi les patients explorés par angioscanner pulmonaire dans cette étude, 23 (23 %) avaient une embolie pulmonaire. “Notre recommandation est donc claire : il faut dorénavant proposer la réalisation d'un angios- canner pulmonaire au lieu du scanner thora- cique sans injection aux patients Covid-19 ayant des signes de gravité” indique le profes- seur. Une technique qui a sauvé des patients à Besançon et qui en sauvera d’autres. L’hôpital universitaire de Strasbourg partage cette recommandation. La conclusion des D r Paul Calame (praticien hospitalier), Franck Grillet (chef de clinique), Julien Behr (radio- logue spécialiste du poumon) et des professeurs Sébastien Aubry et Éric Delabrousse est la suivante : injecter tous les patients Covid-19 sévère pour analyser leurs vaisseaux pulmo- naires en même temps que leurs poumons, puis en cas d’embolie pulmonaire les décoaguler, car même une pneumonie Covid-19 modérée peut conduire à une embolie pulmonaire. L’hôpital de Besançon prouve, une nouvelle fois, qu’il est à la pointe de la médecine dans de nombreux domaines. n E.Ch.

P ourquoi l’état de santé des patients atteints de Covid-19 se dégrade-t- il rapidement alors que certains ont été admis avec 75 % de capacité respiratoire, soit un chiffre assez correct ? Personne ne le savait jusqu’à ce que AVANCÉES MÉDICALES

l’équipe du Professeur Éric Delabrousse propose une réponse. Des patients à Besançon ont pu bénéficier de cette découverte. D’autres hôpi- taux dans le monde ont repris les résultats de ce travail depuis sa validation par une revue scientifique américaine.

“en mode commando”menée avec mes confrères les D r Franck Grillet, Julien Behr, Paul Calame et le P r Sébastien Aubry durant l’épidémie. Le scanner sans injection n’est pas la pierre angu- laire. Il faut réaliser un angioscanner pulmo-

naire ! Nous ne comprenions pas pourquoi des patients se dégradaient sur le plan res- piratoire alors que leur atteinte pulmonaire était modérée et parfois stable. Maintenant, on comprend mieux” expose le P r Éric Dela- brousse, au service radiologie de l’hôpital de Besançon. Entre le 16 mars et le 4 avril, 100 patients du C.H.U. de Besançon ont été explorés par angioscanner, un examen d’imagerie médicale avec injection de produit de contraste qui consiste à explo- rer les veines et les artères. Jusque-là, les médecins uti- lisaient le scanner sans injec- tion. Pas suffisant visible-

Publiée le 23 avril dernier par la revue américaine “Radiology”, référence mon- diale dans le domaine médi- cal, l’étude menée par l’équipe du P r Éric Delabrousse au C.H.U. de Besançon a été considérée comme un “tour- nant” dans la lutte contre le coronavirus. Si le professeur bisontin a reçu de nombreux messages de félicitations de la part de ses collègues à travers la France dont ceux du très réputé hôpital de la Pitié- Salpêtrière à Paris, il vulga- rise le contenu de cette publi- cation princeps (la première du genre) : “C’est une étude

Sur 100 patients, 23 font une embolie.

Un poumon atteint par le Covid-19, une maladie qui est bien inflammatoire (image : Radiology).

Le Professeur Éric Delabrousse devant un scanner.

l Application Pour davantage de rapidité “Trouver un lit de réa, c’est sauver une vie” Deux médecins bisontins ont créé au début de l’épidémie la première application dédiée aux professionnels de santé à la recherche d’un lit de réanimation pour leurs malades Covid +.

l G.B.M. Un “collaborathon” Le hacking health du Grand Besançon a apporté sa pierre Dès le 23 mars et ce pendant un mois, le hacking health du Grand Besançon a mobilisé les énergies pour tenter de trouver des solutions pratiques pour les soignants. Qu’en restera-t-il ?

D ans les crises, certains font preuve de pragmatisme… et de réactivité. Vincent Bailly et Romain Léger, sont de ceux-là. Développée en moins de six jours par ces deux médecins, pour des méde- cins, l’application “Covid-moi un lit” a reçu au début de la crise chez les professionnels un accueil enthousiaste. Sa particularité : proposer aux médecins de gagner un temps précieux dans leur recherche de lits de réa- nimation, avec une application diffusant les disponibilités en temps réel. “En France, il n’existait pas d’outils permettant de savoir où il y a des places de réanimation libres. Les réanimateurs les trouvent au prix de

D u 23 mars au 20 avril, au plus fort de la crise sanitaire, les énergies se sont mobilisées pour aider les soignants à trouver des solutions pratiques pour exercer leur métier tout en préservant la sécurité de tous. “On a eu à 175 participants en un mois, des gens qui se sont manifestés de toute la France” note Christophe Dollet, le responsable du hacking health bisontin, ce marathon de 48 heures dédié chaque année depuis 2017 aux innovations liées à la santé. Les demandes du C.H.U. étaient très précises et nécessitaient une solution immé- diatement utilisable. Des innova- tions ont émergé, mais les exi- gences sanitaires, les questions de responsabilité et d’agrément n’ont pas toujours permis de les mettre à l’œuvre.” L’application “Covid-moi un lit” développée par deux praticiens bisontins (voir ci-contre), ou la fabrication de

masques F.F.P.2 par des impri- mantes 3D sont passées par ce collaborathon, tout comme “un dispositif imaginé pour l’E.F.S. destiné à améliorer la sécurité des donneurs de sang et des pro- fessionnels de santé” qui comptent parmi les réussites à mettre au crédit de ce collaborathon. D’au- tres inventions nées du collabo- rathon bisontin comme ces dis- positifs de surveillance via portable imaginé pour éviter aux soignants de pénétrer dans la chambre d’unmalade Covid n’ont pas été acceptées par la direction de l’hôpital. Cette initiative prise en un temps record par les services de G.B.M. a également eu le mérite pour le hacking health d’élargir son réseau. La prochaine édition du hacking health est programmée les 17 et 18 octobre à Besançon. Il sera sans doute aussi question de cette expérience hors du com- mun du collaborathon. n

nombreux appels téléphoniques. Avec Romain Léger, nous avons voulu créer un dispositif de ter- rain, qui parle au terrain” expose Vincent Bailly, chirurgien uro- logue, à l’origine de l’application. Les deux n’étant pas sur le front du Covid, ils ont mis leur “temps libre” à concevoir ce système. Avec “Covid-moi un lit”, en 30 secondes, le médecin renseigne les lits disponibles. Les autres médecins pouvaient alors consul- ter gratuitement les lits capables

Avec la C.C.I., Silicon Comté…

Le docteur Romain Léger.

ciation Silicon Comté a apporté son aide technique et la Chambre de commerce et d’Industrie du Doubs la communication. n

d’accueillir un de leurs patients. L’application a été construite dans le cadre du Hacking health Besançon spécial Covid-19. L’asso-

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