La Presse Bisontine 206 - Février 2019

BESANÇON

La Presse Bisontine n°206 - Février 2019

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SANTÉ

8 % des naissances

Des soins sur mesure

pour les prématurés

Au chevet de ses jeunes patients fragiles, le C.H.R.U. de Besançon développe depuis dix ans un programme innovant appelé N.I.D.C.A.P. Une vingtaine d’unités de néonatologie l’appliquent en France.

E t si le bébé prématuré devenait acteur de son propre dévelop- pement ? C’est l’idée originale soulevée par cette philosophie de soins, qui nous vient des États-Unis. “On avait avant une prise en charge très paternaliste en France, où les parents n’étaient pas inclus dans les soins” ,

reconnaît le Professeur Gérard Thi- riez, chef du service de néonatologie et de réanimation pédiatrique. “Aujour- d’hui, il en est tout autrement. Les avan- cées scientifiques nous ont aussi per- mis de nous rendre compte que l’excès de bruit ou de lumière, les perturba- tions du sommeil ou les nombreuses manipulations…, pouvaient jouer un rôle néfaste dans le développement des prématurés.” Dans l’approche du N.I.D.C.A.P.*, on va chercher à adapter la prise en char- ge aux capacités individuelles de chaque bébé et tisser un lien étroit avec les parents “pour qu’ils soient partenaires des soins et non plus simples specta- teurs” , remarque Marie-Agnès Duboz, l’une des kinésithérapeutes du servi- ce. Dans la pratique, cela passe par une observation très fine des comporte- ments du bébé avant, pendant et après un soin. Si cela n’a l’air de rien, on trouve pourtant bien ici une petite révolution. Le fonctionnement du service s’en trou- ve bouleversé. “Les soins systématiques sont remplacés par un parcours de soins individualisé. Pas évident non plus de passer du statut de soignant tout-puis- sant à un partage de compétences avec les parents” , souligne Marie-Agnès Duboz. Mais l’équipe y voit l’avanta- ge de pratiques de soins améliorées dans une démarche de bienveillance et de qualité.

Simon à 6 jours est entouré ici de ses parents, de sa grand-mère et d’une infirmière. Sa sœur Margot est en couveuse à côté.

Du côté des prématurés, les bénéfices sont également nombreux. “On obser- ve à court terme moins de pauses res- piratoires, de ralentissement du ryth- me cardiaque…, une diminution globale des complications et une hospitalisa- tion plus courte” , précise le chef de ser- vice. Les parents vivent, eux, une nouvelle naissance. “L’expérience de la préma- turité est extrêmement traumatisan- te” , rappelle Olivier Roux, papa de Clé- mence et Raphaël nés en 2013 et en 2018 à respectivement 6 mois et 7 mois et demi de grossesse, passé par le N.I.D.C.A.P. bisontin. “Ici, tout part du bébé. Les soignants passent beaucoup de temps à nous apprendre à le com- prendre.” Si le peau à peau est la pier- re angulaire de ce concept autour du lien parental, ils sont aussi impliqués dans la gestion de la douleur, l’ali- mentation, les soins…Ce qui aide éga- lement au retour à la maison. “Reste

malheureusement une vraie inégalité territoriale sur la néonatalité en Fran- ce” , selon ce papa, par ailleurs béné- vole de l’association S.O.S. Préma. Le C.H.R.U. Minjoz, investi de longue date sur ces questions, avait, lui, déjà pris le parti il y a 20 ans de dévelop- per les soins de développement pour améliorer l’environnement du préma- turé en réanimation. Est arrivé ensui- te ce programme destiné aux préma- turés, mais qui peut aussi être utilisé chez tous les nouveau-nés à risque. Depuis 2008, 10 soignantes ont été cer- tifiées N.I.D.C.A.P. 150 grands pré- maturés (6 à 7 mois de grossesse) sont pris en charge chaque année au C.H.U. de Besançon sur les 14 500 naissances en Franche-Comté. n S.G.

* Neonatal Individualized Developmental Care and Assessement Program

Le P r Gérard Thiriez, chef du service de néonatalogie, voit de nombreux bénéfices dans le N.I.D.C.A.P.

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