La Presse Bisontine 201 - Septembre 2018

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Bisontine n° 201 - Septembre 2018

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POLITIQUE Jean-Sébastien Leuba, l’alternative à gauche ?

“Ce n’est pas Jean-Louis Fousseret qui décidera de mon avenir”

L a Presse Bisontine : Votre poste d’adjoint vous a été retiré en juin par Jean-Louis Fousseret au motif que vous avez perdu sa confian- ce. Depuis votre prise de position au conseil municipal, on ne vous plus pas entendu. Pourquoi ? Jean-Sébastien Leuba (ex-adjoint à la vie associative, quartiers, jeunesse. Conseiller municipal) : Je ne dirai pas plus et pas moins qu’avant. L.P.B. : Avec le recul, comprenez-vous les raisons de votre éviction ? J.-S.L. : C’est le fait du prince Jean- Louis Fousseret. Je suis davanta- ge attaché à la confiance des Bison- tins qu’à celle du maire et j’ai reçu beaucoup de messages de soutien de citoyens, fonctionnaires, agents de l’agglomération. Cela fait chaud au cœur. De toute façon, je savais que cette décision devait arriver ! L.P.B. : Pourquoi dites-vous cela ? J.-S.L. : Dès que j’ai lâché l’infor- mation de l’ardoise due par Jean- Louis Fousseret au Parti Socialis- te, soit un peu plus de 30 000 euros, ce fut un élément déclencheur. J’ai également dénoncé le fait que l’on ne puisse pas être socialiste et En Marche. Comme par hasard, un mois plus tard, il fallait chercher quelque chose contre moi. J’avais eu des bruits qui me disaient : “Attention, il va chercher des choses contre toi pour te sortir.” Comme il n’a rien trouvé sur moi, il a eu l’idée Démis de son poste d’adjoint par le maire pour un motif qui lui échappe encore, le socialiste Jean-Sébastien Leuba propose le rassemblement à gauche pour 2020. Il parle sans langue de bois et n’épargne pas Éric Alauzet.

nationaux en ont parlé ! Il casse le modèle que ses aînés ont mis en place sur la ville de Besançon. Cet arrêté, était-ce la priorité pour notre ville, pour notre commer- ce ? Je ne crois pas. L.P.B. : Vous semblez vous positionner pour 2020 et les prochaines munici- pales. Leuba futur candidat ? J.-S.L. : Quand on voit ce posi- tionnement dumaire puis les ater- moiements d’Éric Alauzet, je suis surtout convaincu qu’il faut ras- sembler tous les citoyens huma- nistes, que l’on mobilise toutes les forces de gauche pour créer un mouvement alternatif à cette politique qui n’est pas la nôtre. Aucun élu à gauche ne peut incar- ner un rassemblement à gauche : par contre, tous les élus rassem- blés peuvent ouvrir la porte à une voie alternative. Le maire ou la mairesse sera peut-être un citoyen élu. Il faut construire et redon- ner une vision à cette ville avant que le modèle bisontin ne dispa- raisse. L.P.B. : On vous sent ragaillardi ? J.-S.L. : Je suis un militant inves- ti et plein d’énergie. Je vais aller partout, dans les quartiers, ren- contrer le monde économique que je connais pour que l’on trouve cette convergence entre les éco- logistes, le P.C.F., les forces de gauche et tous ceux qui voudront se réunir autour de ce grand mou- vement qui nous a toujours per- mis de gagner. Je rappelle que le P.S. soutenu par E.E.L.V. a fait plus de 50 % à Besançon dans la première circonscription et ce, dans une vague Macron. Donc je suis très confiant. Jean-Louis Fousseret est sur une ligne dure de La République En Marche. La rupture politique existe, c’est lui qui l’a créée. L.P.B. : Vous êtes placé pour incarner le rassemblement ? J.-S.L. : La gauche n’est pas l’uni- té derrière un chef. Je ne veux pas faire ce travail seul. On n’a pas besoin d’un mouvement indi- viduel. Je viens de la société civi- le et s’il le faut, j’y repartirai. L.P.B. : Vous retrouverez sans doute sur votre chemin le député et conseiller municipal Éric Alauzet ? J.-S.L. : Ce qu’il y a de bien avec Éric Alauzet, c’est que personne ne sait ce qu’il va faire demain, pas même lui. Ce garçon nous sur- prend : il publie un article sur Monsanto mais il ne va pas voter à l’Assemblée Nationale, il vote sur la loi immigration après avoir dit autre chose, etc. Il est silen- cieux sur l’arrêté anti-mendicité. Il attend de savoir où est la bon- ne position comme il l’avait fait avec Macron. Il peut faire cam- pagne pour Benoît Hamon et expli- quer au premier tour qu’il a voté Macron ! Éric Alauzet, c’est notre nouvel Edgar Faure ! n

Jean- Sébastien Leuba est redevenu simple conseiller municipal.

sonnel.

festival Ludinam qui comptabi- lise 10 000 passages sur un week- end, assuré le maintien du car- naval malgré les restrictions budgétaires, fait pour que les mai- sons de quartier soient proches des habitants. Des chantiers étaient en cours comme la réflexion sur ce que doit être la politique associative. Une devait se tenir en octobre. Je n’ai pas de regrets personnels. L.P.B. : Vous êtes forcément touché par cette perte de délégation. Plus libre aus- si ? J.-S.L. : Cela ne m’empêche pas de vivre. Je suis toujours élu ! Je n’ai jamais compté sur la politique pour vivre. On me verra à Besan- çon et je suis toujours engagé aux côtés des associations. Ce n’est pas Jean-Louis Fousseret qui déci- dera de mon avenir. L.P.B. : Ce n’est pas lui qui décide, certes. Mais est-ce une façon de vous tuer poli- tiquement ? J.-S.L. : Demandez-le lui car c’est purement personnel. L.P.B. : Au conseil municipal du 20 sep- tembre, quelle sera l’ambiance ? J.-S.L. : Je ne sais pas, et je n’ai pas de rancœur. L.P.B. : Pourtant, des élus que l’on pen- sait proches de vous n’ont pas hésité à se désolidariser. J.-S.L. : C’était un vote de congrès. Ils ont toujours voté contre moi aux élections internes. Leur déci- sion est incompréhensible. Je n’ai pas entendu dans la voix deMichel Loyat une explication basée sur des faits. En revanche, d’autres m’ont soutenu publiquement com- me le P.C.F., Les Verts, Frédéric Allemann (société civile) ou enco-

re Anne-Sophie Andriantavy. D’autres élus s’exprimeront peut-être car j’ai reçu des mes- sages de soutien d’élus. Je ne veux plus polémiquer mais quand on est touché par l’injustice, cela fait plaisir de voir qu’il y a des gens qui ne le suppor- tent pas quand bien même ils ne sont pas socia- listes.

Bio express

L.P.B. : Des regrets ? J.-S.L. : Non. Cette évictionme per- met de prendre du recul, de voir de loin les actions et les mesures politiques d’EnMarche et de leurs représentants. Je suis moins atta- ché à mes titres qu’à mes enga- gements et mes convictions quand bien même ça peut me coûter des choses. Je me tiens à une ligne politique ! Depuis que je suis arri- vé comme secrétaire de section à Besançon, je me suis rendu comp- te que des élus ne payaient pas leur cotisation. Tout de suite j’ai entamé ce travail de transparence et d’éthique puisque nous avions les statuts. Quelle limite ai-je dépassée (il fait référence à sa prise de position sur la contrac- tualisation avec l’État, différen- te de celle dumaire lors du conseil de mai) ? Comment dans un lieu républicain peut-on dire à quel- qu’un : “Si tu n’es pas content, tu sors !” Comment un maire peut- il dire cela ? On a le droit de ne pas être d’accord mais au moins on se respecte. L.P.B. : Votre poste d’adjoint a été lais- sé vacant. Quelle analyse faites-vous ? J.-S.L. : Que l’on retire ma délé- gation, c’est un choix. Par contre, que le maire dans l’imprépara- tion laisse vacante une déléga- tion d’adjoint vie des quartiers jeunesse, vie associative, avec les problématiques que l’on connaît, c’est un geste fort et symbolique qui n’est pas celui d’un homme de gauche ! L.P.B. : Comment jugez-vous votre bilan depuis 4 ans ? J.-S.L. : J’ai travaillé avec et pour les associations, mis en place le

l Jean-Sébastien Leuba, 46 ans, Franco-Suisse, père d’un enfant Analyste financier Triathlète de haut niveau (de 1992 à 2002), il est présélectionné olympique pour l’équipe de Suisse, membre du comité olympique et sportif départemental, il est Conseiller technique régional (2001) pour le triathlon. l En 2014, il rejoint la liste conduite par Jean-Louis Fousseret l Il devient secrétaire de la section P.S. de Besançon l En juin 2018, il est démis de ses fonctions d’adjoint par le maire l

“Mon modèle, c’est Henri Huot, pas Robert Ménard.”

L.P.B. : Existe-t-il encore une cohésion au sein de la majo- rité ? J.-S.L. : Oui, car la cohésion c’est le programme municipal si on n’a pas des arrêtés comme celui qui a été promulgué cet été sur la mendicité… L.P.B. : Cet arrêté anti-mendicité vous a-t-il choqué ? J.-S.L. : Mon modèle à moi n’est pas Robert Ménard, maire de Béziers ! Mon modèle a moi, c’est Henri Huot, c’est Victor Hugo que l’on met en avant sur l’orchestre, sur le musée, et à chaque fois que ça nous arrange mais dont le mai- re a piétiné les discours. Chacun ses modèles. En 2011, je rappel- le qu’il disait autre chose sur l’ar- rêté anti-mendicité proposé à l’époque par la droite. Les posi- tions de Jean-Louis Fousseret sont dangereuses. Il attise des sentiments qui n’ont pas lieu d’être. Le maire disait qu’il ne fal- lait faire de mauvaise publicité à Besançon. Or, tous les médias

de trouver la confian- ce perdue. Qu’ai-je fait de si horrible ? Les Bisontins doivent savoir. Mais personne ne sait. Et cette soi- disant lettre dans laquelle des élus n’ar- rivent pas à travailler avec moi, personne ne l’a vue. Je l’ai deman- dée… et rien ! L.P.B. : Est-ce une injus- tice ? J.-S.L. : Si quelqu’un comprend que l’on peut sortir, dans une grande ville, un adjoint sans nommer les faits qui lui sont reprochés, c’est un procès d’in- tention et un acte per-

“Éric Alauzet, c’est notre nouvel Edgar Faure !”

Propos recueillis par E.Ch.

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