La Presse Bisontine 186 - Avril 2017

L’ÉVÉNEMENT La Presse Bisontine n° 186 - Avril 2017 LES SCANDALES DE LA SANTÉ À BESANÇON

L’affaire des empoisonnements supposés dans les cliniques bisontines a fait l’effet d’une bombe dans toute la région. D’autres polémiques surgissent dans le monde de la santé avec notamment cette enquête de l’A.R.S. sur des chimiothérapies présumées “abusives”. Dernière affaire en date : le centre d’études et de recherche sur le tégument (C.E.R.T.) rattaché au service dermatologie, mondialement réputé, risque de faire les frais d’une guerre des chefs au C.H.R.U. et de disparaître.

l C.H.U. Minjoz Sur fond de querelle de praticiens Une enquête de l’A.R.S. sur les chimiothérapies en dermatologie Une inspection diligentée par l’Agence régionale de santé sur la pratique médicale vise le service dermatologie. 66 dossiers de malades sont exa- minés. 18 d’entre eux auraient-ils pu échapper à un lourd et coûteux traitement de chimiothérapie ? Quel intérêt ? Réponse fin mars.

T outes ces affaires sont couvertes par le secret médical. Pourtant, des patients parlent et s’in- terrogent. C’est le cas de cet homme, atteint d’un cancer du crâne dont la maladie a rongé l’intérieur de la boîte crânien- ne. De la chimiothérapie lui a été prescrite mais il “n’a jamais eu de consultation auprès d’un neurochirurgien.” Une autre malade, atteinte d’une volumi- neuse tumeur au ventre, assu- re n’avoir pas vu de chirurgien mais avoir reçu un lourd trai- tement. “La chirurgie aurait pu guérir ces deux patients car la chimiothérapie arrive souvent en deuxième position. On a fait courir des risques au patient” indique un professionnel de san- té sous couvert d’anonymat. Quel intérêt à user et abuser des molécules chimiothérapiques coûteuses ? Pour rémunérer les

laboratoires pharmaceutiques ? Augmenter le volume d’actes pour s’assurer un bon classe- ment national (N.D.L.R. : le ser- vice dermatologie du C.H.R.U. a été classé 3 ème en 2015 par le magazine Le Point avant de reculer à la 11 ème place) ? Enri- chissement de médecin(s) ? Volonté de s’accaparer une noto-

Après les plaintes de patients, l’Agence régionale de santé Bour- gogne-Franche-Comté a en effet conduit une inspection - sur site entre novembre 2016 et jan- vier 2017 - concernant la pra- tique médicale et les conditions d’organisation au sein du ser- vice de la dermatologie. Sollici- tée, l’agence ne souhaite pas en dire plus. Cette enquête fait suite à - déjà - trois enquêtes de l’I.G.A.S. (ins- pection générale des affaires sociales), de l’Ordre des Méde- cins et de l’A.R.S. en 2015-2016. Il avait été conclu une confor- mité des procédures. L’enquête reprend pourtant. La direction de l’hôpital refuse de répondre. Techniquement, ce sont les R.C.P. (réunions de concertation plu- ridisciplinaires) qui sont poin- tées du doigt. Elles sont obli- gatoires pour tous les malades et consistent en la présence de

Une enquête vise la dermatologie et le traitement des mélanomes au C.H.R.U. de Besançon.

prochain rapport définitif de l’A.R.S.” dit-il. Sans le citer, il vise dans ces “dénonciations” le professeur Philippe Humbert. Entre les deux, un point de non- retour est atteint. Guerre de chefs sur fond d’ego ou scandale sanitaire d’État ? L’A.R.S. va trancher. Le servi- ce de dermatologie du C.H.R.U. est plus que jamais menacé. Seu- lement 5 lits sur les 24 du ser- vice sont ouverts. Une partie des patients sont renvoyés vers d’autres hôpitaux, Dijon notam- ment. Si aucun syndicat n’a sou- haité commenter cette affaire, l’un d’entre eux confirme le désarroi du personnel de san- té. n E.Ch.

santé. Si ces R.C.P. ne sont pas res- pectées, le médecin en charge du patient devient le seul à déci- der du traitement sans contrô- le. Des faits graves donnant à penser que la loi Cancer mise en place par Jacques Chirac ne serait pas respectée. Cette loi stipule qu’un malade a les mêmes droits et chances en matière de traitement et de sui- vi. À Besançon, c’est le réseau Oncolie qui désigne un seul res- ponsable pour les cancers cuta- nés : il s’agit du professeurAubin. Ce dernier répond : “Il y a eu déjà trois enquêtes sur des dénon- ciations calomnieuses, qui ont déjà conclu en la conformité des procédures. Nous attendons le

différentes disciplines, c’est-à- dire un oncologue, un chirur- gien, un radiothérapeute. Ont-elles été respectées ? Une source du dossier indique que des internes ont signé ces R.C.P. alors qu’ils ne sont pas méde- cins. “Pour être valables, ces R.C.P. doivent se faire en pré- sence d’au moins trois médecins de ces spécialités. Elles permet- tent d’avoir un avis pertinent sur toutes les procédures envi- sagées pour guérir le patient. Dans le cas contraire, le dossier doit être présenté avec le spé- cialiste manquant dans les plus brefs délais. La présence duméde- cin traitant du patient est sol- licitée mais n’est pas obligatoi- re” indique la Haute autorité de

riété ? Pourquoi le C.H.R.U. aurait-il traité autant de chimio (en derma- tologie) que l’Ins- titut Gustave- Roussy àVillejuif ? Autant de ques- tions qui trouve- ront réponse fin mars après l’en- quête diligentée par deux inspec- teurs indépendants de l’Agence régio- nale de santé.

Cette enquête

fait suite à trois autres enquêtes.

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