La Presse Bisontine 168 - Septembre 2015

LE GRAND BESANÇON

La Presse Bisontine n° 168 - Septembre 2015 28

CONJONCTURE

Les difficultés persistent dans le B.T.P.

Les entreprises ne voient pas le bout du tunnel Les entreprises du B.T.P. espèrent toujours

une reprise économique qui ne vient pas. Dans le bâtiment comme dans les travaux publics, le constat est le même : l’activité continue de décrocher.

C ela fait depuis 2008 et le début de la crise que le secteur du bâtiment et des travaux publics se rassure en se disant que les choses iront mieux demain. Mais à ce jour, la reprise franche et durable qu’espèrent toujours les entreprises, n’est pas venue. Il y a bien eu quelques soubresauts, des signes posi- tifs comme le plan d’aide engagé par la Région il y a un an (35 millions d’euros pour soutenir le B.T.P., censés générer 200 millions d’euros d’investissement de la part des collectivités), mais rien qui permette de rassurer les acteurs du B.T.P. sur l’avenir. “Depuis le début de l’année, le nombre d’entreprises qui ont déposé le bilan a encore augmenté par rapport à 2014. Beaucoup sont du secteur du bâti- ment. C’est significatif d’une crise pro- fonde. Je rappelle que depuis 2008, ce sont 3 000 emplois qui ont été détruits dans nos métiers en Franche-Comté” s’inquiète Alain Boissière, président de la Fédéra- tion Régionale du Bâtiment. Le président de l’Association des maires du Doubs explique que c’est l’État qui oblige les collectivités locales à revoir à la baisse leur budget investissement. L a Presse Bisontine : Les organi- sations professionnelles du B.T.P. appellent une fois de plus les col- lectivités locales à relancer lʼinvestissement. Que répondez-vous ? Patrick Genre : Je comprends leur cri dʼalarme. Je le partage et je le relaie même. Mais les collectivités font ce quʼelles peu- vent avec les moyens quʼelles ont ! Lors- quʼune ville comme Pontarlier dont je suis maire perd lʼéquivalent de 8 points dʼimpôts en dotations dʼÉtat, soit 900 000 euros, nous nʼavons pas le choix que de faire des économies pour compenser ce manque à gagner. Nous sommes dans une situation à Pontarlier où nous avons pu maintenir malgré tout lemême niveau dʼinvestissement en 2015 quʼen 2014, mais au prix dʼéconomies drastiques sur le fonctionne- ment. Toutes les communes ne peuvent pas le faire. L.P.B. : Les collectivités diminuent donc leur budget investissement pour com- penser la baisse des dotations dʼÉtat ? P.G. : En 2014, en France, lʼinvestissement des collectivités a reculé de 12 %. Si la tendance se confirme, la baisse sera de 25 % en 2017. Cʼest une catastrophe ! Les collectivités locales sont conscientes de cet état de fait, mais lʼÉtat les met au pied du mur. Car cʼest bien la baisse des dota- tions qui est à lʼorigine de tout cela. Ce nʼest pas un choix des collectivités de dimi- nuer lʼinvestissement. Les élus le font en

Il redoute que l'hécatombe se poursuive dans un contexte où les sociétés ont un carnet de commande qui va rarement au- delà d’un mois. Pour décrocher des mar- chés, certaines d’entre elles “tirent sur la corde et cassent les prix. Elles prennent des chantiers en dessous du prix de revient. Cela ne peut pas durer. On ne voit pas le bout du tunnel.Nous pensions que la repri- se interviendrait mi-2015. Elle n’a pas eu lieu. Maintenant, on parle de mi-2016. Les gens n’ont pas conscience de la crise qui frappe actuellement notre secteur. Ce constat vaut pour tous les départements français à l’exception de quelques grandes agglomérations” estime Alain Boissière qui fait régulièrement le point à Paris sur la conjoncture avec ses homologues. Signe de ces temps difficiles : des entre- prises qui ont pignon sur rue depuis de longues années vacillent et licencient pour retrouver un peu d’oxygène. “Dans mon entreprise par exemple, nous sommes passés de 25 à 15 salariés. On a eu recours

Les entreprises de travaux publics attendent que les collectivités

relancent l’investis- -sement.

encourager les collectivités à investir et soutenir ain- si le B.T.P. ont eu des réper- cussions “plus ou moins fortes en fonction des dépar- tements. Par exemple, l’effet a été positif en Haute-Saô- ne.” La F.R.T.P. lance un nou- vel appel aux élus locaux pour qu’ils ne compensent pas la baisse des dotations d’État par une diminution de l’investissement. La Fédération prend réguliè- rement son bâton de pèle- rin et va à la rencontre des exécutifs pour qu’ils inves- tissent. Mais il y a des freins qui entament la confiance des collectivités, comme la réforme territoriale récem- ment adoptée. La F.R.T.P. plaide aussi pour

au chômage partiel pendant les mois de janvier, février et mars. J’avais trois jeunes en apprentissage que je n’ai pas pu embau- cher. Nous sommes dans un contexte où on se prive en plus de compétences” ajou- te le responsable qui espère que l’avenir ne sera pas celui-là “d’autant qu’il y a des besoins. Mais les gens n’ont pas confian- ce.” Il faut dire que la morosité ambiante n’encourage pas les particuliers à inves- tir, alors que c’est avec cette clientèle-là que les entreprises du bâtiment réalisent en moyenne plus de 50 % de leur chiffre d’affaires (le reste provient des collecti- vités). Le constat n’est pas plus réjouissant du côté de la Fédération Régionale des Tra- vaux Publics. “Si on fait le compte de ce qui se passe depuis le début de l’année, l’activité a baissé de 8 à 10 %. Une perte qui ne sera pas compensée d’ici la fin 2015. Pour l’instant, rien n’indique que l’on va redresser la barre. Au mieux on parvient à stabiliser la baisse” observe Sébastien Perrin, secrétaire général de la F.R.T.P. Il précise que 400 emplois ont été détruits depuis un an. Les entreprises du secteur réduisent la voilure et cherchent des sources d’économies en se séparant de collaborateurs. Elles attendent toujours la reprise et comptent plus que jamais sur une relance de la commande publique sachant qu’elles travaillent principale- ment avec les collectivités. Les 35 mil- lions d’euros débloqués par la Région pour

EN BREF

Livre “Mademoiselle Clarisse”, un livre signé Sylvie Thirant aux éditions Sentiers du livre. La Bisontine déroule à travers ce livre ses expériences tumultueuses de manière tout à fait romancée. Expo À voir jusqu’au 27 septembre à la Maison Victor-Hugo (140, Grande rue à Besançon) l’exposition “Les femmes de Victor Hugo”. Travaux Des travaux sur les réseaux électricité, gaz et eau se déroulent depuis août rue Moncey à Besançon. Ils dureront 6 mois. La rue est coupée à la circulation. La Ville de Besançon a choisi une méthode originale pour que cette rue reste toutefois animée : des œuvres d’artistes seront Afin de clore en beauté la période estivale, la Ville de Besançon et la Citadelle proposent samedi 29 août (21 h 30) un spectacle envoûtant à la Citadelle de Besançon. La compagnie bisontine Bilbobasso invite les spectateurs à côtoyer les douces flammes de l’enfer avec sa création Le bal des anges, conte musical poétique et dansé. Thise À partir du 1 er septembre, la commune de Thise éteint les candélabres de minuit à 5 h du matin. Elle espère un gain de 12 000 euros par an. Marchés Vendredi 4 septembre, une vente de fruits et légumes du producteur au consommateur est organisée par le Parti communiste français place des Tilleuls à Palente et rue Chopin. exposées. Citadelle

RÉACTION Patrick Genre “Les collectivités sont conscientes du risque que courent les entreprises”

Un manque de confiance.

que le contrat de plan État-Région adop- té au début de l’été soit mis en applica- tion. “Nous comptons sur des projets struc- turants remarque Sébastien Perrin, comme des aménagements ferroviaires ou rou- tiers.” On se souvient que la construction de la ligne grande vitesse en Franche- Comté avait donné du travail à beaucoup d’entreprises de T.P., y compris aux plus petites.

T.C.

dernier recours et pas de gaieté de cœur car ils ont conscience du risque que cette décision fait courir aux entreprises du B.T.P. 75 % de la commande publique sont por- tés par les communes et des communau- tés de communes. Leurs investissements pèsent en moyenne pour 40 % dans le chiffre dʼaffaires des entreprises du sec- teur. Or, nous avons besoin de lʼéconomie sur nos territoires, car moins dʼéconomie, cʼest aussi moins de rentrées fiscales, moins dʼemplois. Cʼest un cercle vicieux. Lʼéquation que nous avons à résoudre est complexe. Les collectivités sont prêtes à participer à lʼeffort national, mais pas dans les proportions ni au rythme proposé par lʼÉtat car le remède se révélera pire que la maladie. Espérons que les propositions faites par lʼAssociation des Maires de Fran- ce au gouvernement qui visent à donner un peu dʼoxygène aux collectivités seront entendues. Recueilli par T.C.

Alain Boissière, président de la Fédération Régionale du Bâtiment (photo archive L.P.B.).

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