La Presse Bisontine 168 - Septembre 2015

BESANÇON 16

La Presse Bisontine n° 168 - Septembre 2015

SANTÉ

C.H.R.U. de Besançon “Les années passées au service de l’hôpital resteront ma fierté” Directeur du C.H.R.U. de Besançon depuis sept ans, Patrice Barberousse quitte l’établissement pour partir en retraite. Il est parvenu à remettre l’établissement à l’équilibre financier et assume certaines décisions franches.

L a Presse Bisontine : Durant sept années à la tête de l’hôpital, vous avez mené plu- sieurs chantiers de front. equel retient votre attention ? Patrice Barberousse : Le chantier le plus délicat a incontestable- ment été celui de la réorgani- sation du temps de travail car tout ce qui touche au fonction- nement humain est très sen- sible. Celui qui a retenu le plus mon attention ? La construc- tion du pôle cancérologie-biolo- gie, avec l’emblématique I.R.F.C. ainsi que le développement de la recherche clinique. L.P.B. : Satisfait du travail accompli ? P.B. : Je suis satisfait d’avoir pu construire une relation de confiance et de mener un tra- vail efficace et constructif avec les représentants de la com- munauté médicale. L.P.B. : Acceptez-vous le terme de directeur fonceur ? Vous avez parfois pris des décisions à risques (main- tien de l’activité dans l’ancienne tour Jean-Minjoz). Dites-nous en plus ?

P.B. : Le terme de directeur fon- ceur me semble mal adapté à la réalité de ce que j’ai vécu. Je dirais que rien ne se fait à l’hôpital sans concertation, sans travail collectif. J’ai essayé de créer des stratégies d’équipe, en faisant parfois des compro- mis sur ce qui me semblait le plus souhaitable. Oui, je pense aussi avoir eu à cœur de prendre des décisions franches et tran- chées quand elles étaient néces- saires et de les assumer. Donc, fonceur, non. Plutôt pugnace et sans concession dans la défen- se des valeurs du service public hospitalier. L.P.B. : Vos relations avec les syndi- cats de personnel ont été tendues. Pourquoi ? P.B. : Les organisations syndi- cales sont évidemment indis- pensables dans la vie hospita- lière. Il avait été annoncé au niveau national que les hôpi- taux devaient revenir à l’équilibre financier alors même que leurs recettes devenaient très variables. Au C.H.R.U. de

Besançon, nous avons mis en place une autre stratégie, moins brutale : en révisant nos orga- nisations de travail dans le cadre des 35 heures. Cette décision, je l’ai assumée seul et j’en suis fier, en l’absence de consensus syndical sur le sujet. Sur la seu- le année 2010, le passage des personnels de 26 jours de R.T.T. à 18 jours a permis un gain de 3 millions d’euros. Soit l’équivalent d’une centaine d’emplois. Je regrette seulement que les organisations syndicales fassent parfois preuve d’un

Patrice Barberousse salue une dernière fois l’hôpital de Besançon. Chantal Carroger, actuellement directrice générale adjointe du C.H.U. de Nice prendra ses fonctions le 1 er octobre pour lui succéder.

300 000 euros, ce qui revient à un quasi-équilibre financier pour un budget de 500 millions d’euros. L.P.B. : Combien de postes avez-vous créé (et/ou) détruit en 7 ans ? Des ser- vices ont été regroupés, mutualisés ? P.B. : 300 postes non médicaux depuis mon arrivée ont été créés. L.P.B. : Quels seront les grands défis à relever par votre successeur ? Un conseil à lui donner ? P.B. : La procédure de nomina- tion de mon successeur est en cours. Ce sera Chantal Carro- ger, actuellement directrice géné- rale adjointe du C.H.U. de Nice, qui prendra ses fonctions le 1 er octobre. Pour les défis à rele- ver, l’hôpital de demain sera

confronté, plus que jamais, à trois sujets. Celui du vieillisse- ment de la population. Celui de l’évolution exponentielle des techniques médicales. Celui des contraintes économiques. Nous devrons dispenser des soins plus poussés, pour un nombre crois- sant de patients, au coût le plus juste. C’est ce qui est pudique- ment appelé “l’efficience”. L.P.B. : Vous partez en retraite. Avez- vous choisi la Franche-Comté pour vous reposer ? P.B. : Né dans la Morvan, je retourne dans ma maison fami- liale pour profiter pleinement de la vie. Les années passées au service de l’hôpital resteront ma fierté. Propos recueillis par E.Ch.

risque associé. Avec le recul, je suis heureux de constater que les différents partenaires ont progressé et disposent aujour- d’hui d’un niveau de connais- sance et de confiance qui per- mettra d’affronter l’avenir avec plus de sérénité. L.P.B. : Pensez-vous avoir (parfois) pêché en communication avec le per- sonnel ? P.B. : Il n’est pas toujours facile de trouver les modes de com- munication qui permettent de passer les bons messages à 6 700 personnes. L.P.B. :Avez-vous pu remettre le C.H.R.U. à l’équilibre financier ? P.B. : Oui, le C.H.R.U. a fini l’année 2014 avec un déficit limité à

“J’assume mes décisions.”

conservatisme qui peut bloquer les évolutions indis- pensables à un ser- vice public moder- nisé. L.P.B. :Avez-vous mal vécu les différentes attaques liées au dos- sier “amiante” ? P.B. : Le C.H.R.U. a tout mis en œuvre pour maîtriser le

ASSOCIATION Insertion Le théâtre casse les barreaux de la prison L’association Humanis de Besançon est intervenue cet été à la maison d’arrêt de Besançon où elle a proposé à 25 individus d’apprendre puis de jouer devant leurs co-détenus. Sa mission ne s’arrête pas là.

D errière cette immense porte ver- te qu’est celle de lamaison d’arrêt de Besançon, un autre monde s’ouvre. “La plupart des gens qui n’ont pas eu à rendre compte à la justice ne peuvent pas s’imaginer les difficultés que l’on peut avoir…” résume Saïd Mechai. Le Bisontin est le président et fondateur de l’association Humanis créée en 2005 suite à une demande des jeunes du quartier de Fontaine- Écu. Son but : “Aidez les détenus qui ont envie de s’en sortir, être proche des habitants des quartiers” dit-il. Et cela semble fonctionner. D’anciens repris de justice adhèrent à son combat : l’intégration, la lutte contre l’isolement des gens du quartier, l’insertion pro- fessionnelle ou des actions humani- taires. D’anciens détenus transmet- tent la bonne parole dans les quartiers de Besançon et font office de grand frè- re. L’association est habilitée à accueillir des personnes devant effectuer un tra- vail d’intérêt général (T.I.G.). Saïd Mechai n’est pas un grand frère. Mais un homme de conviction qui aide ceux qui veulent s’en sortir : “Nous avons

parfois la satisfaction de voir ces indi- vidus intégrer pleinement notre asso- ciation et continuer à venir nous aider après la fin de leur peine” témoigne le président. Durant l’été, avec les bénévoles, ils ont porté le projet d’un atelier théâtre dans les murs de la prison, à l’initiative du service pénitentiaire d’insertion et de probation, et concrétisé par la compa-

gnie de la Boutique du Conte qui a animé ces ateliers. Au total, 25 per- sonnes détenues ont inter- prété la pièce de théâtre “Casbah d’amour”. “Lorsque l’on propose cet- te activité, les détenus choi- sissent entre celle-ci ou la promenade. Aussi bien des jeunes que des plus vieux ont participé. Cer- tains se sont révélés ! Les détenus spectateurs ont même applaudi durant toute la pièce leur co-déte- nus. Ils n’étaient plus en prison. À ce moment, on

“Certains se sont révélés.”

Saïd Mechai, président de l’association bisontine Humanis, a proposé durant l’été des animations pour les détenus de la maison d’arrêt.

plement à aider les jeunes de son quar- tier, à Planoise. “J’aimais bien la pêche. Je les voyais traîner au pied de mon immeuble alors je les ai conduits avec moi…” Son investissement a commencé ainsi. Des visites de l’Assemblée natio- nale, des sorties culturelles, l’organisation d’un vide-greniers, la participation à la cavalcade de Saint- Ferjeux font de cette association une structure animée. Encore faut-il de l’argent, nerf de la

guerre. “Nous sommes aidés par cer- taines personnes. Mais c’est toujours compliqué.” L’association travaille éga- lement en partenariat avec le M.E.D.E.F. Elle transmet des C.V. Récemment, un jeune qui dort dans sa voiture, sans emploi, est venu deman- der de l’aide à Saïd. Il l’aidera à hau- teur de ses moyens. Au demandeur ensuite de se donner les chances de s’en sortir… E.Ch.

se dit que l’on ne fait pas cela pour rien” résume Saïd Mechai. Tout n’est bien sûr pas rose. Mais les bénévoles sont préparés. Ce travail est une goutte d’eau par rapport aux besoins. “C’est chaud dans les quar- tiers de Besançon en ce moment, témoigne le président d’Humanis. Il faut prêter attention à ces personnes et faire de la prévention. Les règles com- mencent très tôt, dès l’âge de 5 ans.” Saïd Mechai a commencé très sim-

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