La Presse Bisontine 161 - Janvier 2015

ÉCONOMIE

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La Presse Bisontine n° 161 - Janvier 2015

ENQUÊTE

Union régionale des médecins

Même sans rendez-vous, un médecin Franc-Comtois répond dans la journée

sidente de la branche “médecins” de l’U.R.P.S. La très grande majorité de professionnels accepte de recevoir des patients non programmés, en particu- lier les spécialistes. Personne ne peut dire : je n’ai pas eu de conseil.” Devant le sentiment d’urgence res- senti à tort ou à raison par les patients et le développement du consuméris- me médical, “il est apparu nécessaire de qualifier et quantifier les différents modes d’organisation” explique l’U.R.P.S. qui a rapidement transmis son ana- lyse au ministère de la Santé dont le projet de loi de Santé sera discuté en janvier à l’Assemblée. Paradoxalement, aucune enquête de ce type n’a été menée par l’État ou les A.R.S. alors que l’avenir de la santé se joue en 2015. Cette enquête arrive donc à un moment opportun. “Veut-on créer des supermarchés de la médecine ouverts 24 heures sur 24 ?, interroge le docteur Bertin-Belot. Nos médecins se sont organisés : la nouvelle loi de Santé pourrait détruire ce maillage, démobiliser les professionnels. Mari- sol Touraine parie sur les maisons de santé pluridisciplinaires et les services d’urgences hospitaliers pour gérer les soins non programmés. C’est une pri- se en charge qu’assurent déjà, discrè- tement, les libéraux. Pourquoi vouloir créer quelque chose de plus coûteux alors qu’un service est en place et fonc- tionne !” pointe du doigt le docteur Ber- tin-Belot. En Franche-Comté, 99 % des généra- listes et 90 % des spécialistes décla- rent accepter de recevoir en urgence des patients. Ils gèrent en moyenne 5,4 demandes de consultations non

L’enquête menée par l’Union régionale des professionnels de santé (U.R.P.S.) bat en brèche des clichés. Seule une minorité de médecins (4,2 %) rejette toute demande de soins non programmés et un médecin sur dix en accepte plus de dix par jour. Le patient deviendrait-il “consumériste” ?

L’ U.R.P.S. ne s’attendait pas à un tel résultat, plutôt flatteur pour lesmédecins. Selon l’union qui représente les médecins libéraux de Franche-Comté, seulement 4,2%d’entre eux rejettent toute deman- de de soins non programmés et un médecin sur dix en accepte plus de 10 par jour. Les professionnels, à en croi- re l’enquête menée en juin par l’U.R.P.S. auprès de 1 856 médecins - dont 19 % ont répondu -, sont donc bien organi- sés pour répondre à ces demandes de “soins non programmés” qui sont l’en-

semble des demandes de rendez-vous dans un délai d’une demi-journée en dehors des horaires de permanence de soins. En clair, lorsque vous avez un mal de gorge ou des maux de tête, vous aurez une réponse rapide, que vous soyez dans le Doubs ou en Haute-Saône. Cela ne veut pas dire que vous aurez besoin d’une consultation mais bien qu’un professionnel vous a écouté, qu’il vous a ensuite dirigé. “Cette enquête menée en juin démonte quelques idées reçues, relate le D r Christine Bertin-Belot, pré-

moyen de refus pour une prise en char- ge le jour même est seulement de 1,75 patient par médecin, indique l’U.R.P.S. Sans surprise, la quasi-totalité des médecins s’organisent pour traiter l’ur- gence en cas d’absence pendant les heures d’ouverture du cabinet. Un sur deux mobilise son secrétariat télé- phonique. Un sur deux renvoie la demande vers un associé ou rempla- çant. À noter que 35 % d’entre eux res- tent joignables au téléphone. 29 % uti- lisent un répondeur avec renvoi vers le 15 ou le 39 66. Et 95 % des méde- cins disent également s’organiser durant leurs congés par des moyens similaires. Le docteur est prévoyant… E.Ch.

programmées par jour (et même 6,6 pour les généralistes). Ce sont 10 000 consultations non programmées qui sont réalisées chaque jour en Franche- Comté et 7 500 conseils téléphoniques.

“Les médecins savent hié- rarchiser l’urgence et la demande” complète le docteur Pierre Bobey. Néanmoins, 59 % des professionnels (49 % des spécialistes, 64 % des généralistes) se voient dans l’obligation de refu- ser les soins en urgence au-delà d’un certain seuil. Toutes spécialités confondues, le nombre

“Pourquoi créer quelque chose de plus coûteux !”

Les docteurs Christine Bertin-Belot et Pierre Bobey représentent les médecins libéraux.

SANTÉ

Étude Pasture Allergies : le remède est dans la ferme Les premiers résultats de l’étude européenne “Pasture” menée depuis douze ans auprès de 1 000 enfants dont 200 petits francs-comtois confirment que la consommation de lait cru et le voisinage d’animaux de ferme réduisent les risques allergiques.

A u-delà du joli coup de pub, cet- te étude confortera aussi les producteurs de fromages au lait cru du sentiment d’être assez utiles à la société. De là à dire qu’ils vont contribuer à boucher le trou de la Sécu, on en doute quand on connaît la puissance du lobby agro-alimentai- re qui n’en finit plus de nous vendre les bienfaits d’une nourriture aussi standardisée qu’insipide. Pendant longtemps, on expliquait la croissance des pathologies allergiques par la pollution urbaine. “Fin des années quatre-vingt-dix, des études menées en Suisse et en Allemagne ont démontré que ce n’était pas la pollution des villes qui était la cause des allergies mais davantage l’absence de facteurs pro- tecteurs qu’on retrouvait dans les fermes. Les facteurs en question étaient déjà bien identifiés. Il s’agit de la consom- mation de lait cru et du contact avec les animaux de la ferme. Mais beau- coup de scientifiques n’y croyaient pas. D’où la mise en place du programme

Pasture (Protection against allergy : study in rural environments) au début des années 2000” , indique Dominique- Angèle Vuitton. Cette immunologiste à l’Université de Franche-Comté intervient dans le cadre de ce programme qui suit 1 000 enfants dans cinq pays : Allemagne, Autriche, Finlande, Suisse et France. La moitié sont nés et vivent dans une ferme, les autres sont dans les mêmes villages mais sans lien avec l’ambiance agri-

En vivant au contact des animaux de la ferme, les enfants d’agriculteurs sont moins sujets aux allergies.

Douze ans après le lancement du pro- gramme, il reste encore 170 familles qui jouent le jeu. Que faut-il retenir au final ? C’est plus la diversité qu’un élément particulier qui permet de se prémunir des allergies. On a pu isoler chaque facteur de risque mais il est certain que tout cela se combine. Les résultats valorisent un style de vie un peu moins aseptisé dans les pratiques alimentaires. La promesse de faire for- tune pour celui qui mettra au point le comprimé de ferme… F.C.

cole. La Franche-Com- té et ses verts pâtu- rages avaient été retenus pour repré- senter la France. Les chercheurs ont béné- ficié du soutien actif de laM.S.A. sur ce pro- jet ambitieux et assez contraignant pour les familles. “Cette étude a suivi les enfants avant leur naissance. On a fait beaucoup de

résiste. Ce n’est pas tant la quantité mais la diversité des microbes qui édu- quent le système immunitaire. “Dans le même ordre d’idée, l’étude démontre l’intérêt de diversifier aussi l’alimen- tation au cours des 12 premiers mois. Les enfants qui ont consommé diffé- rents fromages au lait cru plutôt qu’un seul sont aussi mieux protégés.” Du comté au biberon oui, mais aussi du mont d’or, du morbier, du bleu de Gex. Restons comtois. Dominique-Angèle Vuitton s’étonne encore de l’implication des Comtois.

prélèvements de sang, d’environnement de logement, d’étable. À cela s’ajoute une multitude de questionnaires dans le but au final de trouver une explica- tion immunologique à cet effet protec- teur.” Les résultats confirment les bienfaits de la vie à la ferme et du lait cru dans la prévention des allergies. D’autres effets sont mis en évidence. La consom- mation de lait cru par la maman au stade de la grossesse conforte la pro- tection de l’enfant. Plus il est au contact avec des animaux différents, mieux il

La consommation de lait cru.

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