La Presse Bisontine 153 - Avril 2014

A g e n d a

La Presse Bisontine n° 153 - Avril 2014

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“Le cirque, c’est un peu la nostalgie du paradis” Le cirque Plume fête ses trente ans cette année. Son directeur artistique Bernard Kudlac savoure le chemin parcouru et commence à envisager sa succession. Le temps passe, l’émotion reste. CIRQUE - LE DIRECTEUR ARTISTIQUE DU CIRQUE PLUME

L a Presse Bisontine : Plume fête ses trente ans cette année. Comment se porte votre “bébé” ? Bernard Kudlac : La tournée du der- nier spectacle se passe formida- blement bien, la rencontre avec le public est magnifique… com- me à chaque fois j’aurais envie d’ajouter. “Tempus fugit” est le spectacle de nos trente ans. À chaque nouveau spectacle, on remet tout à plat mais à chaque fois la magie opère. Depuis les premières représentations à Besançon en mai dernier où on a reçu 22 000 spectateurs, le spec- tacle continue à séduire dans tou- te la France. La tournée est pro- grammée jusqu’en 2016 avec 350 dates au total avec des incursions dans toute l’Europe et des étapes probables au Brésil et au Qué- bec. L.P.B. : Le cirque est un art décidément universel ? B.K. : Le cirque est un langage universel, comme la danse. Le cirque convoque des mythologies, des puissances archaïques, pri- mordiales, partagées par toute l’humanité. Le cirque, c’est un peu la nostalgie du paradis, du temps d’avant la chute. Ce n’est pas pour rien que c’est un art qui convoque la chute. C’est d’ailleurs un art plus “lent” que les autres, à cause du danger qu’il compor- te. Il y a certains numéros com- me les mâts chinois par exemple qu’il faut travailler 5 à 6 ans avant de les maîtriser. Dans le cirque, on convoque le risque en permanence. C’est à l’intérieur de ça que se crée un poème et à travers nos créations, c’est ce poè- me-là que je cherche à chaque fois.

commun pour mettre tout cela en musique. Je prépare le poè- me et ensuite les artistes met- tent en forme. Si on fait un pro- chain spectacle, l’idéal serait de pouvoir le préparer pour le prin- temps 2017. L.P.B. : Puis vous penserez à votre suc- cession ? B.K. : Si après ce spectacle il doit y en avoir d’autres, une autre équipe devra le faire. Je com- mence à travailler à la manière de préparer l’avenir de la com- pagnie. C’est un vrai souci car la création est liée à des choses tel- lement intimes. Plume est un peu un cas à part. On est certaine- ment les seuls à remplir une jau- ge de 1 000 spectateurs à chaque représentation et ce, 110 fois par an. Et on n’est ni dans le show- biz ni dans l’industrie. On pour- rait faire des chapiteaux de 1 500 places mais je ne veux pas car les 500 spectateurs qui seraient derrière les 1 000 premiers ne verraient plus la scène, ne ver-

tenant derrière nous. Nous avons bénéficié d’une aide exception- nelle du ministère de la Culture et de la Ville de Besançon. Il faut savoir que dans notre budget qui est d’environ 3 millions d’euros par an, le total des subventions publiques atteint tout juste les 13 %. Ceci dit, nous ne nous plai- gnons pas, nous avons toujours fait avec les moyens qu’on avait. L.P.B. :Le cirque reste donc un art mineur aux yeux des collectivités ? B.K. : Il reste très marginal, c’est clair. Rien que le nom “cirque” est très dépréciatif. “Tu fais le cirque” , “tu te crois au cirque” … Le cirque a toujours été margi- nal mais du fait de sa margina- lité, il a toujours été tout public. Les aristocrates y allaient parce qu’il y avait des chevaux, le peuple y allait parce qu’il rigolait, les bourgeois y allaient pour aller voir la puissance de l’occident. Puis sont arrivées les années de la télévision et de l’enrichissement de la société. Là, le cirque s’est confondu avec la variété et a per- du beaucoup de public. Il est aus- si associé aux gens du voyage. Et malgré trente ans de cirque nou- veau, le cirque n’a toujours pas un “rond”. On est encore sur le pas de la porte. Il n’y a pas de centre national du cirque. L’ensemble de la profession du cirque, c’est-à-dire 400 troupes, reçoit de l’État des dotations glo- bales qui correspondent à la moi- tié du budget de fonctionnement d’un seul théâtre national, celui de l’Odéon. L.P.B. : Plusieurs projets ont échoué pour que le cirque Plume dispose d’une vraie adresse pour poser son chapi- teau. On a évoqué la saline d’Arc-et- Senans puis le site des Arènes à Besan- çon et vous êtes toujours des nomades.

valent-elles ? B.K. : Cette poésie vaut pour tous les cirques. Quand on voit un chien qui fait du vélo, c’est une image paradisiaque. Même les petits cirques dans les villages amènent l’expérience de l’odeur et de la peur de l’animalité aux jeunes enfants. Le cirque appor- te toujours du positif et de l’optimisme. L.P.B. : Ce spectacle “Tempus fugit” est le premier à avoir été créé après le décès de Robert Miny, votre compa- gnon de route qui avait signé toutes les musiques des précédents spectacles. Cette disparition a forcément beaucoup marqué la famille Plume ? B.K. : Robert a disparu il y a deux ans presque jour pour jour.Après ce drame, on a quand même déci- dé de continuer. Et sur ce der- nier spectacle, Benoît Schick a fait une musique magnifique avec une équipe formidable autour de lui. La disparition de notre cama- rade a été pour moi comme une maison qui m’est tombée sur la tête. Le spectacle “Tempus fugit” porte ce drame dans son A.D.N. L.P.B. : “Tempus fugit”, le temps fuit… La nostalgie vous guette ? B.K. : Le temps fuit, c’est la vie, c’est la réalité. Que peut-on espé- rer de mieux que de vivre tous les âges de la vie ? Il faut vivre le présent, c’est tout. Il n’y a aucu- ne nostalgie. On est juste fier, heureux et reconnaissant d’avoir pu mener cette belle aventure depuis trente ans. On est recon- naissant à la vie. L.P.B. :Vous projetez-vous déjà dans le spectacle suivant, qui serait le onziè- me ? B.K. : J’y pense. Je commence à poser des petits tas de sable ici et là. Ensuite on travaillera en

entre les deux.

C’est un échec pour vous ? B.K. : On a eu en effet des ouver- tures, des aléas, on a eu des projets et ça n’a pas marché. J’en parlerai cer- tainement un jour dans un bouquin… L’histoire d’une troupe, c’est aussi l’histoire de la société. L’installation per- manente, c’était un possible qui a ren-

raient plus les yeux des artistes. Si on veut que les gens continuent à sortir avec un vrai sourire, une vraie joie, il ne faut pas aller au-delà de 1 000 spectateurs. L.P.B. : 2012 a été une année “noire” pour vous avec le décès de Robert Miny. Elle a également été com- pliquée à cause du déficit important qu’accusait la com- pagnie. Où en êtes- vous ? B.K. : Cet épisode délicat est main-

L.P.B. : Ces plaintes s’adressent à qui : au maire de Besançon, aux autres col- lectivités ? B.K. : J’ai poussé des coups de gueule en son temps. Je n’ai aucu- ne plainte à formuler, j’ai juste constaté que certains pays com- me enAmérique ou dans le Nord de l’Europe, on est beaucoup plus réceptifs. Mais au vu de ces expé- riences qui n’ont pas abouti, il faut maintenant faire confiance à la jeunesse et aux gens qui ont des idées. Maintenant, à moi de chercher les talents qui pourront s’exprimer et poursuivre l’aventure de la compagnie. L.P.B. : Vous avez accepté de figurer dans la liste des soutiens au maire Jean- Louis Fousseret pour la campagne des municipales. Pourquoi ?

“Une autre équipe devra faire les spectacles d’après.”

“Je revendique pleinement mon côté utopiste.”

contré une impossibilité. En Fran- ce, on a une pensée institution- nelle. Quand on veut rester indépendant et qu’on veut tra- vailler à égalité avec les autres, c’est toujours compliqué. En Fran- ce, il y a le public, le privé, et rien

L.P.B. :Toutes les formes de cirques se

CALENDRIER

DANI LARY

DE PALMAS

COMPLET

ARNAUD DUCRET

OLIVIER DE BENOIST

SAM. 26 AVRIL 2014 20h30 BESANÇON MICROPOLIS

MER. 14 MAI 2014 20h30 GRAND KURSAAL BESANÇON

SAM. 8 NOVEMBRE 2014 20h30 BESANÇON MICROPOLIS

SAM. 26 AVRIL 2014 20h30 PETIT KURSAAL BESANÇON

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