La Presse Bisontine 152 - Mars 2014

A g e n d a

La Presse Bisontine n° 152 - Mars 2014

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“L’art n’est pas une science exacte” En avril, le Fonds Régional d’Art Contemporain (F.R.A.C.) installé dans la Cité des arts, fêtera son premier anniversaire. Sylvie Zavatta, la directrice de l’établissement, dresse le bilan. BESANÇON - SYLVIE ZAVATTA

L a Presse Bisontine : Cela fera un an en avril que vous êtes ins- tallés dans ces locaux. Com- ment se passe l’adaptation ? Sylvie Zavatta : Nous nous sommes approprié les lieux. On a pris nos marques. Mais l’installation du Fonds régional d’art contempo- rain dans la Cité des arts a été un grand changement. Nous sommes passés d’un appartement rue Mégevand, où nous avions nos bureaux, à cet espace cultu- rel recevant du public. Dans le même temps, l’équipe s’est agran- die pour accompagner la diver- sification de nos activités com- me la création du service des publics. Ce dernier s’occupe notamment de formations pro- posées aux enseignants, d’ateliers pour enfants, demédiation auprès des personnes en situation de handicap. Le F.R.A.C. emploie une vingtaine de personnes. L.P.B. : Le public s’est-il, comme vous, approprié le F.R.A.C. depuis qu’il a été inauguré par Aurélie Filippetti ministre de la Culture ? S.Z. : Sur neuf mois d’exploitation, le F.R.A.C. a accueilli 20 887 per- sonnes. Cela comprend les visites d’expositions et les personnes ayant assisté à la programma- tion. Si l’on intègre l’inauguration, le nombre de visiteurs est de 30 519.À période égale, nous obte- nons un meilleur résultat que le F.R.A.C. de Bretagne (14 935 visi- teurs) qui a été inauguré en sep- tembre 2012. Et nous ne sommes pas loin du F.R.A.C. de Proven- ce-Alpes-Côte-d’Azur dont la fré- quentation sur neuf mois et demi est de 24 621 personnes et de 31 157 si l’on ajoute l’inauguration. Je précise qu’en 2013, Marseille était capitale européenne de la culture ! Je crois

d’aller montrer des œuvres du Fonds régional d’art contempo- rain partout en région. Notre objectif est de créer des oppor- tunités qui doivent permettre au public de s’approprier la culture de son époque. Nous devons fai- re comprendre à un maximum de gens que l’art contemporain est fait pour eux. L.P.B. : Reconnaissez-vous que l’art contemporain n’est pas une évidence pour tout le monde ? S.Z. : C’est pour cette raison que nous développons des outils qui donnent au public des clés de lec- ture pour comprendre l’art contemporain. Des personnes sont intriguées, d’autres sont dubitatives face à une œuvre car elles n’ont pas forcément la cul- ture pour la comprendre. Nous avons donc mis en place des médiateurs qui expliquent les œuvres au public lors d’une expo- sition. Avec l’association “Les amis du F.R.A.C.”, nous avons mis en place un cycle d’initiation à l’art contemporain qui a lieu le premier mercredi de chaque mois. Évidemment, il y aura toujours des récalcitrants, mais cela n’est pas propre à l’art contemporain. L.P.B. : Dans le cadre de l’exposition “Les Choses” à voir au F.R.A.C. jusqu’au 13 avril, on peut découvrir le Télépho- ne de John Giorno. Quelle est la valeur artistique de cet objet du quotidien ? S.Z. : Lorsqu’on décroche ce télé- phone, qui a été fabriqué en série, on entend des poèmes.À l’époque, John Giorno avait créé une ligne téléphonique que tout le monde pouvait appeler pour entendre un poème. La valeur artistique de cet objet réside dans le pro- pos de l’artiste. Ce n’est pas seu- lement l’aspect esthétique et émo-

que l’on peut dire que la fré- quentation du F.R.A.C. de Besan- çon est remarquable. L.P.B. : Peut-on parler d’engouement pour l’art contemporain ? S.Z. : La Franche-Comté possède pour la première fois un équipe- ment de cette nature dédié à l’art contemporain. Cela est tout à fait nouveau. Maintenant, nous devons être capables de nourrir l’appétit du public pour l’art contemporain et de lui faire décou- vrir des choses qui vont le désta- biliser. Je crois que le F.R.A.C. tel qu’il est aujourd’hui répond à un besoin. L.P.B. : Exposer des œuvres n’est qu’une des missions du F.R.A.C. Mais ce n’est pas l’essentiel de votre travail puisque vous devez jouer aussi un rôle moteur dans le soutien à l’art contemporain. Qu’en est-il au juste ? S.Z. : Le soutien à la création pas- se par l’édition, l’acquisition d’œuvres qui viennent enrichir la collection du F.R.A.C. Franche- Comté, mais aussi par la pro- duction d’œuvres, et l’accueil d’artistes en résidence dans le cadre de l’opération aiR. Ce pro- gramme permet à un artiste de travailler et d’affiner son projet dans nos ateliers. Cependant, nous n’avons pas vocation à ne soutenir que des artistes régio- naux. En revanche, la théma- tique sur laquelle nous travaillons est chère à cette région puisqu’il s’agit de la problématique du temps. Ainsi, nous avons acquis des œuvres de Rodolphe Huguet, et nous aurons la première gran- de exposition monographique de l’artiste bisontin Jean-Christophe Norman qui se déroulera d’octobre 2014 à janvier 2015. L.P.B. : De quel budget disposez-vous

pour acquérir des œuvres d’art contem- porain ? S.Z. : Le budget annuel dédié à l’acquisition d’œuvres qui vien- dront enrichir la collection est de 165 000 euros. C’est un budget moyen par rapport aux autres F.R.A.C. En fonction des années, nous pouvons acheter de 12 à 20 œuvres. En 2013, nous en avons acquis 16. Les achats portent sur des artistes reconnus et sur d’autres qui émergent.Mais toutes les œuvres tournent autour de la problématique du temps, de la durée, de la mémoire. Ce thème, je l’ai proposé lorsque je suis arri- vée au F.R.A.C. en 2005. Nous ne pouvons pas revendre les œuvres de notre collection car il s’agit d’une collection publique qui est inaliénable. L.P.B. :Combien d’œuvres compte aujour- d’hui le F.R.A.C. ? S.Z. : Nous disposons de 530 œuvres. 60 % de notre collection tournent sur la région Franche- Comté. En 2014, le public pour-

tionnel qui confère à un objet une valeur artistique. L’art peut être la beauté d’une pensée traduite plastiquement. Dans ce cas pré- cis, il s’agit de la beauté d’offrir un poème qui va susciter une émotion. Ce qui interpelle, c’est qu’un objet du quotidien fasse partie d’une collection d’art contemporain. Mais il y a des exemples majeurs, qui font réfé- rence, comme l’urinoir de Mar- cel Duchamp transformé en fon- taine. L’artiste s’interroge sur notre société. Il dit des choses sur elle à travers ces objets. Je conçois que cela puisse être parfois désta- bilisant. L.P.B. : Le geste artistique n’est donc pas le critère principal par lequel il faut apprécier une œuvre d’art contempo- rain ? S.Z. : En effet, le savoir faire, avec l’avènement de l’art contempo- rain n’est pas forcément la valeur première. La maîtrise parfaite d’une technique ne suffit pas. Il faut une adéquation entre la tech- nique choisie et le propos recher- ché. Tout le monde a en tête les

sérigraphies de Marylin Monroe d’Andy Warhol. C’est de l’art, et pourtant on pourrait dire qu’il ne s’agit “que” de la sérigraphie. L.P.B. : Qui décide d’acheter telle ou tel- le œuvre pour le F.R.A.C. ? S.Z. : C’est un comité composé de critiques d’art, de conservateurs, de spécialistes, qui prospectent et proposent des pièces qui répon- dent aux orientations du F.R.A.C. Lorsque le choix d’œuvre est arrê- té, c’est le conseil d’administration de l’établissement qui décide de l’acquérir ou non. L.P.B. : N’y a-t-il pas une forme de bluff dans l’art contemporain puisque sans le discours qui l’accompagne et qui aide à sa compréhension,l’œuvre peut perdre tout ou partie de son sens ? S.Z. : Toutes les œuvres ne sont pas bonnes. Mais lorsqu’elle l’est, nous en avons collectivement l’intime conviction. Néanmoins, il y a toujours une part de risque quand on achète une œuvre. On peut y croire,mais il peut s’avérer que l’œuvre ne tienne pas dans la durée. Le phénomène d’usure

ra les voir dans des musées, les médiathèques, en milieu scolaire, à l’hôpital. Nous allons participer également du Fes- tival Idéklic (fes- tival international pour l’enfant) qui a lieu dans le Jura. On fera aussi des interventions en maison d’arrêt. À partir du mois de septembre, nous aurons un “F.R.A.C. mobile”, il s’agit d’un camion aménagé qui va permettre

“En 2013, nous avons acquis 16 œuvres.”

DANI LARY

PIERRE PERRET

FRANK MICHAEL

JACQUES HIGELIN

LES FATALS PICARDS

SAM. 12 AVRIL 2014 20h30 BESANÇON MICROPOLIS

SAM. 19 AVRIL 2014 20h30 DÔLE

SAM. 26 AVRIL 2014 20h30 BESANÇON MICROPOLIS

SAM. 15 MARS 2014 20h30 BRAINANS

DIM. 6 AVRIL 2014 20h30 BESANÇON MICROPOLIS

LA COMMANDERIE

MOULIN DE BRAINANS

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