La Presse Bisontine 143 - Mai 2013

ÉCONOMIE 44

La Presse Bisontine n° 143 - Mai 2013

ENTREPRISES

Le président de la C.C.I. du Doubs “Besançon réussit doucement sa mutation industrielle” Dominique Roy préside la Chambre de

commerce et d’industrie du Doubs. Il annonce notamment la création d’une école d’horlogerie au sein de la C.C.I., pour l’année prochaine. Comment voit-il l’évolution de l’industrie et du commerce dans la capitale comtoise ?

Dominique Roy est président de la C.C.I. du Doubs, à la tête de 14 000 ressortissants et d’un budget de 11

L a Presse Bisontine : Quel est le moral des entrepreneurs du Doubs ? Dominique Roy : C’est l’atonie, comme ailleurs en France hélas. Une récente étude C.G.P.M.E.-K.P.M.G. indiquait que 92 % des dirigeants d’entreprise s’estimaient inquiets pour l’économie française. Mais paradoxalement, ils étaient “seulement” 53 % à se dire inquiets pour leur propre entreprise. Mais c’est surtout ce climat ambiant qui prête à l’attentisme et à la moro- sité. Je relativise tout de même car l’impression d’un monde économique en crise n’est pas nouvelle, c’est le sen- timent qu’on avait déjà quand j’ai créé mon entreprise en 1986. Je me sou- viens qu’on se disait déjà des “enfants de la crise”. La crise de 2008 a été vio- lente et destructrice, c’est indéniable. L’élément positif, c’est que les entre- prises qui restent en place ont acquis en cette période une capacité de résis- tance supplémentaire. Beaucoup d’entreprises se sont recentrées sur leur cœur d’activité et s’en sortent bien. Malgré tout, le phénomène majeur actuellement pour les entreprises du Doubs, c’est le manque de visibilité qui est préjudiciable à l’investissement et à l’embauche. L.P.B. : Ce constat est général sur le départe- ment ? D.R. : Non, la situation est disparate entre les trois bassins d’emplois prin- cipaux. Sur le secteur de Montbéliard, le chômage est en hausse de 11 %. Le Haut-Doubs quant à lui est toujours une zone privilégiée. Et le Grand Besan- çon enfin est dans la moyenne natio- nale. On remarque notamment que Besançon a une étonnante capacité de résistance à la crise, sachant qu’un emploi sur trois relève encore de l’industrie à Besançon. L.P.B. : Pourquoi Besançon résiste si bien ? D.R. : Après le traumatisme de la fin d’un certain type d’industrie, Besan- çon a réussi sa reconversion indus- trielle à partir de ses savoir-faire, au

travers de petites entreprises inno- vantes qui ont su diversifier leur mar- ché. Besançon réussit doucement sa mutation industrielle. Au moment où tout le monde parle de redressement productif, cet état des lieux constitue pour moi une bonne nouvelle. Je pen- se que Besançon a tout pour réussir son développement. L.P.B. : Vous êtes en phase avec Jean-Louis Fousseret quand il croit au renouveau de l’horlogerie ? D.R. : Je crois au développement indus- triel horloger et plus largement sur le luxe et dans ce développement, Besan- çon a toute sa place. Le développement de l’horlogerie sur la Suisse ne peut être qu’un bénéfice pour nous sur les dix ans à venir. Côté suisse, on annon- ce 5 000 créations d’emplois, je pense que ça peut générer 1 500 créations ici. Si les industriels savent organiser des bases arrières ici, ce sera une réus- site. Il faut continuer à jouer la com- plémentarité entre les activités de pro- duction en Suisse et le service après-vente en France, qui ne va ces- ser de croître.

millions d’euros.

D.R. : Pour le commerce à Besançon, ce que je souhaiterais, c’est qu’il y ait comme à Pontarlier une fédération qui chapeaute toutes les associations de commerçants. À Besançon il demeure une certaine ambiguïté avec l’office du commerce qui est présidé par l’adjoint au commerce. Je pense que si la gou- vernance de cet office était assurée par la C.C.I., ce serait plus logique, il n’y aurait pas ce mélange des genres. Pour le reste, le coup de chaleur de cet été entre l’Union des commerçants et la Ville est retombé et c’est tant mieux. Des actions communes sont à nouveau mises en place. Si la C.C.I. a pu jouer ce rôle de médiateur, tant mieux. L.P.B. :Quel est l’avenir du commerce de centre- ville selon vous ? D.R. : Il faut considérer que le centre- ville est une sorte de grande surface. Pour cela, il faut une politique pro- duits, une politique de communication et aussi d’horaires d’ouverture. Je suis toujours sidéré que les horaires soient aussi disparates dans les commerces du centre-ville. Pourquoi ne pas ima- giner des magasins ouverts entre midi et 14 heures à partir du jeudi ? Il faut vraiment que les commerçants aient ce sentiment d’appartenance à une “grande surface”. Et le rôle du com- merce de centre-ville, c’est de plus jouer sur la rareté et la qualité des produits, que sur le prix. Propos recueillis par J.-F.H.

notamment. Pour l’instant, cette for- mation n’existe qu’à Annecy et à Fou- gères en Bretagne. Est-ce que Besan- çon n’a pas sa place dans ce domaine ? Nous sommes donc en train de finali- ser la mise en place d’une formation en horlogerie “Wostep” (centre suisse de formation et de perfectionnement horloger) qui devrait démarrer dès l’année prochaine dans les locaux mêmes de la C.C.I. L.P.B. : Quel est le rôle de la C.C.I. dans le déve- loppement industriel du territoire ? D.R. : Nous souhaitons jouer de plus en plus un rôle de développeur d’activités auprès des collectivités locales. À mon sens, ce n’est pas aux collectivités d’imaginer en permanence des outils de développement économique, les C.C.I. ont la structure pour le faire. Par exemple en ce qui concerne la trans- mission-création d’entreprise : à un moment donné, il faut dire aux col- lectivités que c’est du ressort de la C.C.I. qui a tous outils pour le faire. L.P.B. : Comment se porte en ce moment la création d’entreprises ? D.R. : En 2012, hors auto-entrepreneurs, il y a eu 1 173 créations d’entreprise dans le Doubs et dans le même temps, 1 168 radiations ou liquidations, soit un solde positif de 5. En 2011, le sol- de était de – 11 avec 1 266 créations pour 1 277 radiations.

L.P.B. : Votre étude sur les conséquences du chantier du tram avait suscité la controverse en début d’année. Qu’en est-il aujourd’hui ? D.R. : Cette enquête n’avait d’autre préten- tion qu’être un thermo- mètre. Après, on peut très bien casser le ther- momètre pour dire qu’il n’y a pas de fièvre… Il est indéniable que nous avons à la C.C.I. des remontées de commer- çants qui souffrent vrai- ment, comment pour- rait-il en être

“Je pense que ça peut générer 1 500 emplois ici.”

L.P.B. :Il manque encore une vraie école de formation à Besançon ! D.R. : Sur ce point, deux projets se sont télesco- pés. Suite au départ de Breitling sur Témis, leurs locaux de Palen- te étaient vacants. Une structure basée àMont- benoît va s’installer dans ces anciens locaux Breitling pour faire de la formation continue en horlogerie. Parallè- lement, la C.C.I. lance des modules de 3 000 heures de for- mation. Sur les dix ans à venir, nous aurons un besoin de 300 horlogers à former au S.A.V.

“Considérer le centre- ville comme une grande surface.”

autrement ? Je relativise juste en disant qu’à Dijon aussi les commerçants conti- nuent à souffrir alors que le tram cir- cule. Il y a un climat général de moro- sité dans le commerce, c’est sûr. En même temps, on ne peut pas nier qu’un commerce dont le fonctionnement est basé sur le flux de passants, et qui est difficilement accessible, ne souffre pas. On peut tout de même se réjouir à Besançon de voir cette fois-ci les tra- vaux qui avancent rapidement. Mais l’appréciation du temps est forcément différente selon le secteur où on est situé. L.P.B. :Vos ressortissants commerçants sont- ils à nouveau dans une dynamique de construc- tion avec la Ville de Besançon ?

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