La Presse Bisontine 142 - Avril 2013

LE PORTRAIT

La Presse Bisontine n° 142 - Avril 2013

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BESANÇON

Travaux publics Une détermination en béton armé Femme et chef

C omme pour mieux affirmer sa féminité dans ce monde un peu macho, elle a ajouté un “e” à la fin de son prénom. hantale Rochat est chef d’entreprise, P.D.G. de la société F.C.T.S. (Franche- Comté Transport et Services) qu’elle a reprise début 2004. Sa spécialité : le béton. À la tête d’une équipe d’une cinquantaine de salariés et d’une flot- te d’autant de camions-toupies, Chan- tale Rochat n’a pas choisi la facilité. “Je suis une femme chef d’entreprise dans un monde d’hommes, dans le domaine des transports, et en plus, dans les travaux publics. Je cumu- le…” sourit la dirigeante qui a connu un parcours plutôt atypique. Après une dizaine d’années passées d’entreprise, ce n’est déjà pas une mince affaire. Dans le domaine des travaux publics, c’est encore plus compliqué. Chantale Rochat relève ce double challenge. Sous le sourire, une indispensable poigne.

Chantale Rochat est à la tête de l’entreprise F.C.T.S., 50 salariés, depuis 2004.

en tant qu’assistante d’un dentiste du Haut-Doubs, elle s’est rendu comp- te que sa vie professionnelle ne pou- vait pas se cantonner au petit péri-

mètre d’un cabinet dentaire. Elle a alors mis ses capacités de gestion- naire au service de la marque horlo- gère Younger et Bresson, toujours

dans le Haut-Doubs, dont elle est devenue la responsable adminis- trative. Toujours promp- te à relever des défis pro- fessionnels, Chantale Rochat a ensuite occu- pé le poste d’adjointe de direction dans la socié- té de salaisons Morteau Saucisse. En même temps qu’elle cumule de l’expérience dans ses différentes entreprises, elle peaufi- ne sa formation avec des diplômes de technicien supérieur en gestion, puis passe une attesta- tion pour diriger une

a rapidement prouvé ses compétences. Bien sûr il y a eu les crises, celle de 2009 qui a obligé l’entreprise à revoir à la baisse ses effectifs salariés. Et 2013 ne s’annonce pas sous de meilleurs auspices. “Les prévisions sont de - 20 %. Le tramway de Besan- çon va nous permettre encore de fai- re une année correcte, mais après, c’est vraiment l’incertitude” déplore-t-elle. Dix ans après avoir repris l’entreprise bisontine dont le siège est situé sur la zone Lafayette, Chantale Rochat assure qu’elle n’a “pas encore fait le tour de la question.” Dans ce “petit monde” qu’est le béton, le relationnel client est primordial. En attendant des jours meilleurs pour l’économie des T.P., Chantale Rochat défend la profession. En tant que pré- sidente du syndicat de transporteurs O.T.R.E. pour la Franche-Comté et la Bourgogne, elle a récemment défen- du auprès du préfet de Bourgogne la position des transporteurs sur la nou- velle taxe poids lourds. “Il faut que les autorités se rendent compte que le secteur du transport est en grande dif- ficulté en France. Sur l’autoroute pour revenir de Dijon, je n’ai pas aperçu un seul camion français. Des camions espagnols, polonais, roumains, aucun français. En France, un chauffeur revient à 5 000 euros par mois avec les charges. Pour un chauffeur polo- nais, c’est 900 euros, pour un Rou- main, 300… Comment lutter ?” Également déléguée au conseil des prud’hommes et membre actif du réseau Entreprendre, Chantale Rochat croit pourtant dur comme fer à ses différents engagements. Ce n’est pas un hasard si elle vient aussi de prendre la tête du tout nouveau groupement d’employeurs interprofessionnel du Grand Besançon, car elle croit plus que jamais à la force de l’initiative pour créer de l’emploi. Femme “à poigne” comme elle se définit elle- même, elle n’est pas prête à lâcher les rênes. Mais une fois sortie de ce “monde de machos” , Chantale Rochat retrouve immédiatement avec bon- heur son rôle de maman et de grand- mère qui participent sans doute aus- si à son équilibre. J.-F.H.

“Retournez à vos casseroles et à votre ménage.”

entreprise de transport. Elle se trou- ve rapidement propulsée à la tête d’un groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification (G.E.I.Q.), à Pontarlier d’abord, puis à Besan- çon où elle dirige une équipe de 150 personnes. Toujours avec ce sourire mâtiné de fermeté. En 2004, la Bisontine a enfin l’opportunité de voler complètement de ses propres ailes en rachetant à Charles Ménestrier la société F.C.T.S. qu’il avait créée en 1992. “Ce chal- lenge de la reprise d’entreprise me ten- tait depuis de nombreuses années. Le hasard a fait que mon banquier était celui de M. Ménestrier qui cherchait un repreneur. Mon objectif était d’arriver à la tête d’une entreprise avant l’âge de 50 ans. Je l’ai fait à 49 ans et demi. ” Dans ce monde “de brutes”, Chanta- le Rochat a préféré avancer à pas feu- trés au départ. “Vous n’avez aucune crédibilité” lui avait asséné ce direc- teur commercial d’un groupe de T.P. “Même si je ne conduis pas mes camions, on ne me roule pas dans la farine comme ça. J’ai prouvé que je tenais la route” commente Chantale Rochat. Et à ce chauffeur qui lui a gentiment conseillé de “retourner à mes casseroles et à mon ménage” , Chantale Rochat lui a vite cloué le bec. “D’ailleurs, il n’est plus là ce chauf- feur…” Enfin aux clients qui étaient interrogatifs au début, la dirigeante

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