La Presse Bisontine 142 - Avril 2013

La Presse Bisontine n° 142 - Avril 2013

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Aux municipales de 1971, Edgar Faure, et sa liste d’entente pour la promotion de Pontarlier, l’emporte avec 62 % des voix. Du jamais vu jusqu’alors.

CONTEXTE Politique L’homme providentiel du Haut-Doubs En 1967, comme il l’avait fait 20 ans plus tôt dans le Jura voisin, Edgar Faure part à la conquête du Haut- Doubs où il s’impose rapidement sur la scène politique.

L e glissement comme il l’explique à ses amis “du Jura adminis- tratif au Jura géographique” relève d’une stratégie parfai- tement contrôlée qui laissait peu de place à la défaite. En 1966, Edgar Fau- re alors ministre de l’Agriculture dans le gouvernement de Georges Pompi- dou sait qu’une victoire aux élections législatives lui permettrait de confor- ter sa place dans l’équipe gouverne- mentale. Ses chances de victoire dans le Jura n’étaient pas évidentes que ce soit face à Jacques Duhamel à Dole ou à Louis Jaillon à Lons qui refusait tou- des banquets Épicurien dans lʼâme, Edgar Faure a usé et abusé de la méthode des ban- quets. En 1951, les socialistes du Jura, dans “Le Petit Comtois”, écrivaient déjà à son endroit : “Son arme principale est le banquet. Pour convaincre la tête, il s'adresse dʼabord à lʼestomac pour faire jouer la reconnaissance du ventre.” Le champion

te entente. Comme il avait pris pour principe de ne jamais poser sa candidature sans qu’elle fût désirée, mieux valait donc chercher ailleurs dans une circons- cription, autre règle, en phase avec son électorat de base, à savoir une bour- geoisie provinciale de petits patrons, commerçants et agriculteurs. Dans ces circonstances, le Haut-Doubs lui tendait les mains. Cette circons- cription conservatrice “peu évoluée poli- tiquement” est alors représentée par LouisMaillot.Ce personnage surnommé le “sot du Doubs” au mode de vie appa- remment bien arrosé accepte de lais- ser sa place assez facilement après quelques doses de gentiane. Il bénéfi- cie du soutien de la droite locale convain- cue de l’intérêt d’avoir un ministre à la tête de la circonscription Morteau- Pontarlier. Rarement campagne élec- torale fut menée avec autant d’éclat sur le Haut-Doubs. Edgar Faure eut droit à un accueil triomphal le 7 jan- vier 1967 en gare de Pontarlier avec fanfare, préfet, sous-préfet, élus locaux et tout ce que la ville comptait de petits notables. Du pain béni pour Edgar Fau- re qui fidèle à sa réputation a su trou- ver les petits mots et répliques qui font

mouche. L’auteur de la loi sur lamoder- nisation de l’élevage n’eut pas trop à forcer son talent pour convaincre dans les cantons alentour. Résultats : une victoire sans appel le 5 mars 1967 avec deux tiers des suffrages exprimés. Avec cette faculté bien à lui de savoir se rendre accessible, il renforce sa popu- larité au fil de ses visites dans son nou- veau fief. Ce qui ne l’empêche pas non plus d’être fidèle à sa légendairemodes- tie quand il confie aux agriculteurs : “Votre région a deux atouts : l’altitude et moi-même !” Vanité, quand tu nous tiens… Sa candidature aux cantonales sur Pon- tarlier en septembre 1967 est égale- ment couronnée de succès. Il restera au poste jusqu’en 1979 sans pour autant accéder à la présidence du Conseil géné- ral du Doubs comme ce fut le cas dans le Jura. Le champion des comices, roi des ban- quets, savoura sa troisième victoire électorale sur le Haut-Doubs aux légis- latives de 1968. Suite à quoi l’homme d’État se voit confier par le Général De Gaule leministère de l’Éducation natio-

nale avec la redoutable mission de trouver une issue pacifique à la crise universitaire. Une mairie ne serait pas pour lui déplaire dans son fief électoral. L’occasion se présente quand Jacques Lagier le jeune maire de Pontarlier annonce qu’il ne sera pas candidat aux municipales de 1971. “C’est une charge très lourde et je devais m’occuper de ma

son sens du consensus. “Le président de la République a dit récemment, qu’à son avis, les élections municipales ne devaient pas être politisées… Telle est notre opinion. Certains partis sont d’un avis contraire. C’est bien leur droit… Nous n’avons aucun esprit partisan. Je n’ai aucune animosité contre le P.C. Il y a dans le P.C. des hommes valables et bien des démocrates sincères…Quant au parti socialiste, je n’oublie pas le soutien qu’il m’avait apporté dans mon premier gouvernement et à diverses reprises par la suite…” (2) Le verdict est à la hauteur du person- nage. Sa liste passe en totalité avec 62 % des voix. Du jamais vu dans l’histoire pontissalienne. F.C. (1) Maurice Carrez. Edgar Faure. La robe, la plume et la politique. Éditions du Belvédère (2) Bernard Olivier. Edgar Faure : un itinéraire exceptionnel qui passe par la Franche-Comté

Votre région a deux atouts : l’altitude et moi- même !

vie professionnelle et familiale. Edgar Faure a essayé de me convaincre de continuer mais je n’ai pas changé de point de vue. À partir de là, il a posé sa candidature” ,se souvient Jacques Lagier. La majorité des électeurs pontissaliens ont vu en lui l’homme providentiel, “le chantre presque naturel d’une rurali- té dynamique” comme le qualifie Mau- rice Carrez dans l’ouvrage (1) qu’il lui a consacré récemment. Edgar Faure écrira dans un article du Pontissalien, un journal acquis à sa cause. Son édi- torial du 5 mars 1971 en dit long sur

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