La Presse Bisontine 141 - Mars 2013

BESANÇON

La Presse Bisontine n° 141 - Mars 2013

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CULTURE

Fin du fonds d’aide Une mauvaise comédie pour le cinéma franc-comtois Toute la filière du cinéma franc-comtois proteste contre la suppression par le Conseil régional du fonds d’aide sur lequel elle a pu compter pendant 20 ans. Des solutions sont à l’étude pour remplacer ce dispositif d’accompagnement.

Jean- François Stévenin, acteur- réalisateur s’engage dans le débat.

D epuis que le Conseil régional a décidé de supprimer le fonds d’aide au cinéma et à l’audiovisuelle, le 7 ème art est en émoi en Franche-Comté. La collectivité territoriale le prive de l’enveloppe desti- née à soutenir la création dont le mon- tant variait de 300 000 à 450 000 euros ces dernières années. La Région a tran- ché, assumant son choix de fermer le robi- net après 20 ans. “Ce modèle de subven- tion à vécu. Désormais, nous sommes plus sur des schémas d’ingénierie financière” précisent les services du Conseil régional. En d’autres termes, la collectivité n’a plus vocation à aider à “fonds perdus” lemilieu du cinéma. Elle attend maintenant un retour sur investissement. C’est tout le sens de la proposition qui est faite à l’Association des producteurs audiovisuels Rhin-Rhône (A.P.A.R.R.), devenue le por- te-parole de toute cette filière culturelle. “Nous proposons aux professionnels du cinéma de bénéficier du dispositif d’aide aux entreprises qui innovent” ajoute le Région. L’aide en question a la forme d’une avance remboursable. “Si l’innovation a sa pertinence et qu’elle rencontre le suc- cès, la structure nous rembourse. En cas

pas eu de suite” déplore Catherine Siméon. Mais pour elle, il ne fait aucun doute que la Région a agi dans la précipitation en abandonnant cette aide “sans enmesurer les conséquences. Et puis franchement, 300 000 euros sur le budget de cette col- lectivité, c’était peu. Ce n’est pas en sup- primant le fonds qu’elle va réaliser des économies” remarque encore la présiden- te de l’A.P.A.R.R. qui compte désormais sur un dialogue constructif entre la col- lectivité et les acteurs de terrain pour fai- re bouger les lignes. En attendant, pour toute la filière locale du cinéma, c’est la fin d’un “système uti- le” qui servait les intérêts de la Franche- Comté à plusieurs titres. La production audio-visuelle est vecteur d’emploi et de retombées économique. “Ces 330 000 euros étaient un levier. Ils étaient multipliés par trois voire par quatre entre les dépenses locales générées par les tournages et l’emploi.” Mais la diffusion est aussi un vecteur d’image pour toute une région à condition de savoir tirer profit de la notoriété des films quand elle se présente (Berck-sur- Mer a surfé sur le succès de “Bienvenue chez les Ch’tis”). On ne peut que regret- ter que la Franche-Comté n’ait jamais sai- si l’opportunité de s’appuyer sur les mul- tiples tournages qui ont eu lieu sur son territoire pour bâtir, par exemple, une stratégie de communication efficace (les dix ans du tournage de Monsieur Bati- gnole ne feront pas beaucoup de bruit, sauf à Pontarlier où on s’apprête à fêter cet anniversaire).Pourtant,le cinéma pou- vait être une porte d’entrée dynamique et originale pour inviter le monde exté- rieur à regretter d’un peu plus près cet- te région dans toute sa diversité. T.C.

d’échec, l’aide est trans- formée en subvention.C’est dans cette logique-là que l’on essaie d’avancer. Le milieu culturel n’a pas l’habitude de ce genre d’approche. Mais quand nous avons rencontré les acteurs de la filière,ils nous ont bienparlé de l’économie de leur secteur d’activité. Alors si ces structures sont économiques, ce dispositif d’aide pour s’adapter.” C’est donc autour de ce princi-

Une aide aux entreprises qui innovent.

pe proche de l’avance sur recettes, qui existe dans le cinéma, que le dialogue s’engage entre la Région et les représen- tants locaux de la profession. Pour Cathe- rine Siméon, présidente de l’A.P.A.R.R., ce nouveau système d’aide ne répond pas exactement aux besoins de la filière contrai- rement à ce que prétend la collectivité. “Tel qu’il se présente, il n’est pas adapté à notre secteur d’activité. Il est aussi peu incitatif. Pour la jeune création, l’avance sur recette n’existe pas car les budgets sont trop dérisoires. Ce que je redoute, c’est que le fonds d’aide soit remplacé par une sor- te de grande machinerie qui se solde par une coquille vide” explique-t-elle. Substi- tuer une usine à gaz à un dispositif qui fonctionnait et qui a fait ses preuves en 20 ans, voilà ce que craint l’A.P.A.R.R. L’association des producteurs aurait pré- féré que la collectivité réunisse autour d’une table toute la filière pour discuter des évolutions à apporter au fonds d’aide plutôt que de procéder à une coupe sombre. “À plusieurs reprises, nous avons voulu communiquer avec le Conseil régional pour lui proposer de réformer le système qui en avait besoin afin qu’il concorde avec ce qui se pratique dans d’autres régions. Il n’y a

Catherine Siméon, lors de la conférence de presse organisée par l’A.P.A.R.R. fin janvier à Besançon à laquelle participaient des réalisateurs et acteurs francs-comtois comme Jean-François Stévenin et Samuel Collardey.

Zoom Les chiffres-clés du fonds d’aide selon l’A.P.A.R.R. 1 - Plus de 300 salariés intermittents et permanents travaillent dans le ciné- ma et la production audiovisuelle en Franche-Comté. En 2010, une année riche en tournages, plus de 900 salariés résidents en Franche-Comté ont été embauchés. 2 - Pour le Conseil régional, le fonds dʼaide représentait 0,08 % du budget global, et 2,7 % du budget culture et sports. 3 - En 20 ans, le fonds dʼaide a permis de soutenir 356 films. De grands réa- lisateurs français sont venus tourner en Franche-Comté. Plusieurs réalisa- teurs francs-comtois ont été remarqués comme Amor Hakkar, François Royet, Samuel Collardey et Raphaël Jacoulot. 4 - Des téléfilms à forte audience ont été tournés comme “Dessine-moi un jouet” et “Repaire de la vouivre”. 5 - La suspension du fonds dʼaide intervenue le 14 décembre 2012, menace- rait 12 entreprises du secteur audiovisuelle, et plus dʼune centaine dʼemplois. 6 - Lʼaide dʼune région représente en moyenne entre 10 % et 25 % du budget global dʼun film. 7 - Des retombées économiques mesurées : pour 140 000 euros dʼaides, 214 000 euros ont été dépensés en région lors du tournage du film “Comme un lion”. Pour 100 000 euros dʼaide, 524 000 euros de dépenses locales pour le téléfilm “Le repaire de la vouivre” en 2010. 8 - De nombreux prix récoltés par les courts-métrages francs-comtois lors du 35ème festival international du court-métrage de Clermont-Ferrand. “Avant de tout perdre” de Xavier Legrand a reçu quatre prix. François Choquet, réa- lisateur de “Swing absolu” a reçu le prix Canal +.

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