La Presse Bisontine 135 - Septembre 2012

A g e n d a

La Presse Bisontine n° 135 - Septembre 2012

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THÉÂTRE - CENTRE DRAMATIQUE NATIONAL

Christophe Maltot : “J’ai besoin de jouer ma peau sur le plateau” Interprète avant tout, Christophe Maltot endosse à partir de la rentrée son costume de “chef d’orchestre” du Centre Dramatique National à Besançon. Il n’abandonnera pas pour autant son métier d’acteur.

L a Presse Bisontine : Qu’est-ce qui a vous a motivé pour prendre les rênes d’un centre dramatique national qui n’est ni le plus connu ni le plus “doté” de France ? Christophe Maltot : J’ai choisi de candidater à Besançon pour plu- sieurs raisons. D’abord une rai- son historique : le fait que la Franche-Comté ait été indépen- dante pendant 400 ans a beau- coup compté dans mon choix. Deuxième raison : la géographie. Avec l’arrivée de la L.G.V., la construction du tram, Besançon peut être un axe idéal pour le projet européen que je prépare. Par ailleurs, j’aime les défis. Le fait que certains m’aient dit “Qu’est-ce que tu vas t’enterrer à Besançon ?” constitue en soi un défi. Ce C.D.N. n’a pas encore tout à fait un rayonnement natio- nal. Mon objectif est justement de lui en donner un.

re que le public puisse vérifier le discours par rapport à un pro- jet artistique et la réalité phy- sique sur le plateau. Il faut pro- poser des actes en correspondance avec sa parole. L.P.B. : Vous avez aussi axé votre pro- jet sur l’ouverture à l’Europe et la proxi- mité avec la Suisse. Comment cette orientation se traduira-t-elle sur la scè- ne du C.D.N. ? C.M. : D’abord par une collabora- tion avec une compagnie esto- nienne qui viendra jouer à Besan- çon. Ensuite par une production franco-suisse avec une distribu- tion franco-suisse dirigée par Robert Sandoz. Enfin par un comité de lecture qui se met en place. Son objectif : réunir des partenaires, représentants du public autour des auteurs de l’Europe du Sud-Est. De chacun de ces comités naîtra une mise en espace d’un des textes choi- sis, à raison d’un tous les deux mois. L.P.B. : Comment comptez-vous ouvrir le C.D.N. à de nouveaux publics ? C.M. : J’ai fait la proposition à Anne Tanguy qu’on aille jouer au Théâtre Ledoux. Cela se fera dès décembre avec “Six person- nages en quête d’auteur”. L’idée est d’instaurer de vraies passe- relles entre les lieux de culture à Besançon. Dans le même esprit, le C.D.N. accueillera deux concerts de la scène nationale ici. Pour la fin de saison, j’ai proposé à Anne Tanguy “Antigone” d’après Sophocle, par le théâtre natio- nal palestinien, en langue ara- be, pour que la communauté ara- bophone de Besançon puisse se

Christophe Maltot jouera dans la première pièce qu’il crée ici en octobre : le “Timon d’Athènes” de William Shakespeare.

L.P.B. : Vous semblez vouloir mettre la fonction d’interprète au cœur de votre projet. C’est parce que vous êtes vous- mêmes connu d’abord en tant qu’interprète ? C.M. : En arrivant ici, j’ai créé une compagnie, La Loyale, avec 5 comédiens pour l’instant. Une de mes priorités ici est de travailler à la permanence artistique en réinjectant du vivant, avec des comédiens qui vivent sur place. Je pense que dans le théâtre on a perdu la notion d’ensemble et de collectif. L.P.B. :Votre nouvelle fonction de direc- teur d’une scène nationale est-elle com- patible avec notre métier de comé- dien ? C.M. : Oui, il faut qu’elle le soit. J’ai besoin de jouer ma peau sur le plateau. Il ne suffit pas d’être dans le discours. Il est nécessai-

té à fêter cet évé- nement. La deuxième créa- tion, c’est “De mémoire d’estomac”, d’Antoinette Rych- ner, auteure suis- se. C’est un spec- tacle jeune public et familles. La troi- sième création sera “Rouen, la

déplacer. Cet exemple est un concentré de toutes nos inten- tions. Ouvrir aux publics, c’est aussi avoir un langage compréhensible. C’est bien l’intention de ma com- pagnie La Loyale d’aller ren- contrer le public. La plus gran- de qualité pour un artiste, c’est la simplicité. En ce qui me concer- ne, je n’ai pas de prétention par- ticulière. Il y a longtemps que j’ai mis mon narcissisme de côté. L.P.B. : Quels seront les temps forts de votre première saison à la tête du C.D.N. ? C.M. : Nous aurons d’abord trois créations maison : “Timon d’Athènes” de Shakespeare, une pièce qui s’adresse autant “au cordonnier qu’à l’aristocrate”. On est là en plein dans la fable euro- péenne, c’est aussi un spectacle d’ouverture correspondant à mon projet artistique. À l’occasion de

de vos objectifs ? C.M. : La pièce “Timon d’Athènes” est programmée du 9 au 26 octobre. Nous faisons donc le pari de la jouer 14 fois. Je trou- ve terrible que dans les C.D.N. on joue si peu quand ça marche bien. Une des manières d’élargir le public, c’est aussi cela : comp- ter sur le bouche à oreille et jouer sur des périodes plus longues. En plus, ce sera ma première création ici, elle est censée être attendue… L.P.B. : Qui sont vos modèles dans le métier ? C.M. : Il y a deux immenses acteurs que j’ai souhaité rencontrer et que j’ai eu la chance de rencon- trer, c’est Laurent Terzieff et Michel Bouquet, dont j’ai appris qu’il était originaire du Doubs. Je partage avec ce dernier le goût de l’exigence et l’intuition. L.P.B. : Vous vous estimez donc intui- tif ? C.M. : L’intuition, ça veut dire être absolument au service des auteurs. Je suis dans un travail qui s’appelle la mise en œuvre, c’est essayer de faire éclore par l’interprétation ce qui nous dépas- se. Quelqu’un commeMichel Bou-

“J’ai mis mon narcissisme de côté.”

trentième nuit de mai 1931” d’Hélène Cixous qui présente une sorte de figure déconstruite de Jeanne d’Arc. L.P.B. : D’autres temps forts de cette saison 2012-2013 ? C.M. : Un autre temps fort sera la mise en place d’un oratorio, “Jeanne au bûcher”, en collabo- ration avec une troupe estonienne et sur une musique du Suisse Arthur Honegger, avec Jean- François Verdier à la direction musicale. Je souhaiterais que cet oratorio soit présenté à la Cita- delle. Il est programmé en juillet 2013. L.P.B. : Quand on parle d’élargissement du public, c’est aussi une hausse de la fréquentation du C.D.N. C’est aussi un

Christophe Maltot, de Paris à Besançon Ce natif de Reims est un pur produit du conservatoire national supé- rieur dʼart dramatique de Paris. Dès sa sortie, il est engagé par Daniel Mesguich pour jouer dans son Hamlet. Il enchaîne dès lors les premiers rôles sous la direction de Jacques Osinski, Philippe Lanton, Guy-Pierre Couleau, Caterina Gozzi ou Olivier Py, qui lʼembarque dans lʼaventure du Soulier de satin et lui confie le rôle principal de son cycle Les Vainqueurs. Metteur en scène, il fonde sa compagnie : Articule, en 1999 et intègre la même année lʼinstitut Nomade de la Mise en Scène. Il y assiste Matthias Langhoff en Afrique Noire pour y fédérer des compagnies. Il a été nommé à la tête du C.D.N. en janvier dernier et sʼapprête à entamer sa première saison théâtrale à Besançon.

ceTimon d’Athènes, on fêtera cette année les 40 ans du C.D.N. de Besançon. On fera une pre- mière partie de cet anniversaire, avant la pièce, sous la for- me d’un banquet où le public sera invi-

“Un acteur n’a pas d’âge.”

B

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