La Presse Bisontine 134 - Juillet-Août 2012

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Bisontine n° 134 - Juillet-août 2012

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LES NOUVEAUX DÉPUTÉS Barbara Romagnan “L’abstention peut être combattue par le comportement des élus” La nouvelle députée P.S. de 38 ans a fait ses premiers pas à l’Assemblée Nationale. Elle reste campée sur sa position concernant le non-cumul, une façon selon elle de réconcilier les électeurs avec le personnel politique.

“J’ai le sentiment d’une continuité dans mon parcours politique” 2 ÈME CIRCONSCRIPTION Éric Alauzet Le nouveau député né de l’alliance P.S.-E.E.L.V. a rejoint l’Hémicycle. Il siégera à l’Assemblée Nationale et à la commission des finances.

L a Presse Bisontine : Comment s’est passée votre “rentrée” à Paris ? Éric Alauzet : Curieusement, je suis resté longtemps avant de ressentir des émotions. La journée du lundi était très agréable. C’est quand je suis entré dans l’Hémicycle à l’Assemblée Nationale que je me suis dit : c’est ici que tout se joue. C’est un moment fort. Pour le reste, j’ai le sentiment d’une continuité dans mon parcours politique. Ce sont les mêmes questions d’organisation qui se posent, de partage des responsabilités, les premières négocia- tions avec la majorité. L.P.B. : Connaissez-vous déjà la commission dans laquelle vous allez siéger ?

nécessaire. Le reste du temps, je serai dans ma cir- conscription. Je cherche encore un local où je pourrais établir ma permanence. Elle se situera à Besançon entre les Chaprais et Palente. Je vais réduire également mon activité de médecin, mais je souhaite continuer à exer- cer. Le tout est de trouver le bon équilibre. L.P.B. : Lesquels de vos mandats allez-vous abandonner ? E.A. : Je démissionne du conseil municipal et donc, par ricochet, de l’Agglo et de la présidence du Sybert. Je démissionne également de l’exécutif du Conseil général dont je suis vice-président. En revanche, je resterai conseiller général de base jusqu’en 2014. L.P.B. : Comment définissez-vous votre mission de député ? E.A. : La mission d’un député est de voter les lois. Je ne suis pas un super-maire ou un super-conseiller général. Il y a cependant dans cette fonction un énorme enjeu de proximité, dans le sens que l’on vérifie les conséquences des lois sur le terrain. J’ai envie de pouvoir en discuter avec les acteurs socio-économiques pour en corriger les effets. L.P.B. : Vous faites partie des 18 élus verts à l’Assemblée Nationa- le. Vous avez pu constituer un groupe. Cela suffira-t-il à peser sur les décisions ? E.A. : Non, on le sait, cela ne suffira pas car globalement dans le monde le mouvement écolo ne pèse pas beau- coup. Il y a donc des moments où nous ne pèserons pas assez et d’autres où nous pèserons un peu plus.

L a Presse Bisontine : Surprise par l’ampleur de votre victoire ? Barbara Romagnan : Françoise Branget a eu ce mot malheureux quand elle a dit, “Hélas pour moi, dans cette cir- conscription, il y a Planoise.” En fait, on constate que nous sommes arrivés en tête dans tous les cantons, à l’exception de Quingey et de justesse. Ce n’est pas Planoise qui a fait l’élection. Ce serait prétentieux de dire que cet- te victoire ne nous a pas surpris, mais le contexte était vraiment favorable pour nous. Notre victoire était en effet plus probable que celle de M me Branget. L.P.B. : C’est aussi la circonscription où les électeurs se sont le moins déplacés… B.R. : C’est vrai. C’est la raison pour laquelle il est fondamental de mener des politiques qui permettent de fai- re prendre conscience aux gens que le fait de voter pour untel ou untel chan- ge quelque chose. Quand les gens constateront qu’il y a plus de person- nel dans les écoles pour s’occuper de leurs enfants, ils verront la différen- ce. L’abstention peut être combattue également par le comportement et l’attitude des élus. Je pense qu’il est nécessaire de s’appliquer les discours

qu’on porte. Quand on est de gauche, on dit qu’il faut partager les richesses, cela passe aussi par le partage des postes. En m’élisant, les gens permet- tent aussi à élire mon suppléant au Conseil général. Je suis très heureu- se qu’un Français issu de l’immigration entre au Conseil général du Doubs à ma place. L.P.B. : C’est aussi une pique à Claude Jean- nerot sur la question du non-cumul ?

E.A. : Oui, je vais siéger dans la prestigieuse commission des finances et du budget. C’est le nerf de la guerre. La mère de toutes les batailles sera la réforme fiscale que nous avons à mener. Elle aura deux objec- tifs : rembourser la dette et répondre des problématiques telles que celle de l’emploi. Je pourrais traiter d’autres sujets qui m’intéressent comme la santé, le logement, les déchets, l’environnement, par le biais d’autres canaux. L.P.B. : Comment allez-vous répartir votre temps entre Paris et Besançon ? E.A. : Je serai le mardi et le mercredi à Paris, avec un prolongement possible si

“C’est ici que tout se joue.”

“M me la députée, ça me

B.R. : En disant cela, je ne tacle pas Claude Jeannerot. Plus de 90 % des députés que j’ai croisé à l’Assemblée le premier jour où j’y suis allée cumulent les mandats. Cette posi- tion vise donc beau- coup de monde. Je n’ai aucune leçon de mora- le à donner mais je continue à croire qu’avec un seul man- dat on a forcément plus de temps de faire ce pour quoi on a été élu.

fait encore tout drôle.”

sur les marchés, auprès des agricul- teurs, des associations, des maisons de retraite… L.P.B. : Une émotion particulière le 18 juin quand vous avez fait votre entrée à l’Assemblée ? B.R. : Bien sûr, c’est très intimidant.

Des gens importants sont passés là, on sent leur poids. Paradoxa- lement, je ne réalise pas encore complète- ment. Quand on m’appelle “M me la députée” , ça me fait encore tout drôle. L.P.B. : Comment appré- hendez-vous ce mandat national ? B.R. : J’ai l’habitude de dire que le député tra- vaille pour l’intérêt général et pas pour des intérêts particu- liers. Il s’agit avant tout de voir comment les décisions qu’on prend au niveau natio- nal s’appliquent sur

L.P.B. : De n’être que députée ne risque-t-il pas au contraire de vous couper du terrain ? B.R. : Cela me donnera au contraire plus de temps pour y être sur le ter- rain. Tout le temps que je ne passerai plus dans les instances du Conseil général, je le consacrerai aux habi- tants de cette circonscription, je serai

“Nous devons être des professionnels de l’espérance.”

le plan local. J’aurai justement à cœur de bien expliquer en quoi consiste mon rôle, ce qu’on peut faire et ce qu’on ne peut pas. Si un jour par exemple on doit légiférer sur la fin de vie, je tiens à discuter d’abord avec les citoyens et les associations locales pour avoir de vrais moments de démocratie. C’est comme ça que je conçois mon rôle de députée et c’est d’ailleurs aussi com- me ça qu’on réconciliera peut-être les électeurs avec la politique. L.P.B. : Visez-vous un mandat dans la pro- chaine municipalité à Besançon en 2014 ? B.R. : Je me vois mal annoncer cela alors que je prône le non-cumul. Je ne vais pas faire le contraire de ce que je pen- se, je m’en voudrais beaucoup. Cette question du non-cumul, je suis per- suadée que c’est une façon de crédibi- liser la parole publique. Pour que je sois candidate à Besançon, il faudrait que je me trouve vraiment de bonnes raisons… Il faut savoir choisir.

Barbara Romagnan a fait connaissan- ce avec l’Hémicycle le 18 juin. Elle postule à la com- mission des affaires sociales.

Propos recueillis par J.-F.H.

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