La Presse Bisontine 134 - Juillet-Août 2012

SPÉCIAL TOUR DE FRANCE

La Presse Bisontine n° 134 - Juillet-août 2012

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CONFIDENCES Tour de roues avec le Bisontin Arthur Vichot Arthur Vichot : “Gagner une étape” Arthur Vichot (23 ans) disputera son deuxième Tour de France sous les couleurs de la FDJ avec de réelles ambitions. Domicilié à Besançon, le cycliste a conduit notre journaliste sur ses routes d’entraînement trois jours après sa victoire en solitaire d’une étape du Dauphiné-Libéré face aux Evans, Schlek, Wiggins et consorts.

L’ exploit est digne des grands cyclistes. Comme Poulidor, Merckx, Thévenet, Hinault, Moreau, Indurain etArmstrong avant lui, Arthur Vichot a remporté avec la manière une étape dumythique

Dauphiné-Libéré, épreuveWorld-Tour. C’était le 10 juin. Parti en solitaire à six kilomètres de la ligne, il a résisté au retour de ses compagnons d’échappée pour lever les bras. Les compliments ont fusé. De Marc Madiot - charisma-

tique directeur sportif de la Françai- se des Jeux - à Laurent Jalabert, les anciennes gloires du cyclisme ont loué la valeur du jeune garçon de 23 ans et sa lucidité. Ce succès,Arthur l’a savouré. Dans un

LA COURSE L’avis de l’expert sur les étapes franc-comtoises Grappe, l’entraîneur de la FDJ analyse l’étape Enseignant-chercheur à Besançon, Frédéric Grappe publie “Puissance et performance en cyclisme”. Pour La Presse Bisontine, il détaille point par point le contre-la-montre bisontin et dévoile ses pièges, notamment sur la pression des pneus. Son favori : l’Anglais Bradley Wiggins.

Arthur Vichot pose au pied de la Citadelle avant de conduire notre journaliste sur ses routes d’entraînement.

premier temps avec son père venu l’étreindre juste après la ligne d’arrivée et ensuite à Besançon avec ses amis. Domicilié dans le quartier de la gare Viotte et originaire de Colombier-Fon- taine (agglomération de Montbéliard), Arthur s’est offert une coupe de cham- pagne après ce succès. Pas de quoi lui monter à la tête. Vichot est du genre abordable voire très bon client pour la presse. Normal qu’il ait donc accepté une séance photo suivie d’une balade autour de Besançon pour parler de lui, de son parcours cycliste… et de ce Tour de France qui se profile. Il a conduit notre journaliste sur ses routes d’entraînement. C’est à la Passerelle, au pied des rem- parts de la Citadelle que le profes- sionnel de la Petite Reine fixe le ren- dez-vous. Tout de blanc vêtu, il dit reprendre l’entraînement après - seu- lement - trois jours de repos. Direction Saint-Vit via l’Eurovéloroute. Si Arthur peste contre son capteur de puissan- ce défaillant, il n’en aura pas besoin aujourd’hui. À 30 km/h, il se dégour- dit les jambes avant le mois de juillet si attendu et redouté à la fois. Les cyclistes croisés fixent ce cycliste pas comme les autres. Sur un nuage,Arthur ne l’est pas vraiment mais est bien conscient de son exploit : “Avec cette victoire enWorld-Tour, j’ai moins à me soucier de mon avenir en tant que cyclis- te professionnel. Je suis reparti pour quelques années (sourire).” Son équi-

semaine de course, d’une étape de 200 km, que les journalistes disaient facile, très dure mentalement. On rou- le très vite. Il y a des chutes” se sou- vient-il. Il avait réussi à accrocher une belle 6 ème place à Mûr-de-Bretagne, éta- pe qui se terminait en montée. Vichot veut faire mieux : en “gagnant une éta- pe sur ce Tour.” Le contre-la-montre reliant Arc-et-Senans à Besançon est connu pour lui…mais il ne l’a pas pré- paré à fond : “Pour faire une 100 ème pla- ce, je n’ai pas besoin de voir tous les virages. Je ne m’attends pas à mieux” dit-il avec lucidité. Cela ne veut pas dire qu’il prend cet exercice à la légè- re. Non, il se concentre sur d’autres étapes… et sans doute celle de la veille (dimanche 8 juillet) où la course s’annonce difficile. Arthur sera sur ses routes de jeunesse dans les cols des montagnes du Jura, la Côte de Maîche. Il a reconnu l’étape reliant à Porren- truy et s’attend à une course difficile. Il pourrait y jouer un rôle. Après une heure d’entraînement sur la vélorou- te, Arthur met le cap sur Besançon. “C’est une reprise en douceur avant des blocs d’entraînement plus intensifs avant le Tour.” Coaché par Jacques Decrion, le garçon se prépare sérieu- sement sans toutefois suivre des plans d’entraînements rigoureux. “Je ne veux pas partir à l’entraînement avec une boule au ventre en me disant, tiens, il faut faire 3 heures à fond. Je commence à me connaître pour savoir ce que je dois faire.” Une sacrée maturité pour celui qui est arrivé très tard au vélo contrairement aux autres (environ 17 ans). “J’ai cette motivation et ne suis pas dégoûté du vélo. C’est peut-être pour cela que ça marche” conclut-il avant d’entrer à Besançon via la rue deVesoul. Arthur fonctionne à l’envie. Dieu sait qu’il en aura au mois de juillet pour placer les couleurs blanches de la FDJ à l’avant de la course. Un autre Franc- Comtois, Thibaut Pinot, le rejoindra. Le cycliste de Melisey espère s’illustrer sur les pentes de La Planche-des- Belles-Filles, son terrain d’entraînement. Quant au Haut-Saô- nois Laurent Mangel (Saur-Sojasun), présent l’année dernière, une grave chute en milieu de saison le prive de cette participation. Dommage, d’autant que le Tour fait la part belle à la Franche-Comté. E.Ch.

F rédéric Grappe multiplie les casquettes. Ensei- gnant-chercheur à l’université de Franche- Comté, il est aussi l’entraîneur des cyclistes de la formation professionnelle Française des Jeux et à certaines heures consultant pour la pres- se cycliste spécialisée. Le Bisontin s’est forgé une renommée dans le milieu et a développé à Besan- çon un cursus pour universitaire très recherché. Son travail : amasser des chiffres grâce à des moyens techniques poussés pour favoriser la performance de ses cyclistes. Lui a déjà découvert et taillé des pépites comme le Belge Philippe Gilbert, Christophe Le Mével et aujourd’hui une partie des coureurs de la Française des Jeux-Big Mat. Le livre qu’il publie “Puissance et performance en cyclisme” (éditions De Boeck) en est illustration. D’innombrables don- nées combinant cadences de pédalage, puissance mesurée en watts ou pulsations cardiaques… sont analysées. Pour le cycliste lambda, c’est pointu voi- re parfois trop théorique. “Ce n’est pas un roman mais un livre en chapitre ou chaque cycliste peut aller y picorer des infos” se défend l’entraîneur. Le Tour de France sera un juge de paix pour les cou- reurs qu’il entraîne. Auront-ils eu la bonne prépa- ration ? La route décidera. En attendant, le coach évoque le contre-la-montre. S’il ne sera pas décisif,

pe l’a bien compris. Elle lui a redemandé de signer un contrat pour les deux années à venir. Arthur a accepté, même si des écuries étrangères étaient venues lui faire les yeux doux. Le jeune homme qui pro- jette de construire une maison dans les envi- rons de Besançon sait qu’il peut encore pro- gresser avec son équi- pe. Il ne veut pas tout quitter. LeTour de Fran- ce, il l’a vécu l’année der- nière pour la première fois : “C’est magique ! Tout est multiplié par dix. Le public, les médias, la pression. Je me sou- viens de la première

Pas un spécialiste du contre- la-montre.

il pourrait créer des écarts : “C’est un contre-la-montre assez particulier avec une route qui ne rend pas toujours. La route saute, elle est parfois grabonneuse. Il faudra se méfier des chutes. La recon- naissance est primordiale” dit-il. Selon lui, “c’est sur la pression des pneus et dans la descente d’Abbans qu’il fau- dra être vigilant. Il peut y avoir des chutes si les coureurs descendent trop vite et s’ils n’ont pas reconnu. La mon- tée de Quingey se fera sur le “39 dents” je pense. Au final, il n’y a pas beaucoup de longues lignes droites. Les coureurs devront gérer les crispations sur leur vélo” explique Fred Grappe. Pour l’arrivée à La Planche-des-Belles Filles (7 juillet), les écarts seront infimes “mais les coureurs devront être bien placés au pied de la montée.” Selon lui, l’étape Belfort-Porrentruy pourrait se révéler “piège.” Son favori est l’Anglais

Frédéric Grappe est entraîneur cycliste et aussi chercheur pour améliorer la performance des cyclistes à l’université de Besançon.

“Un contre- la-montre particulier.”

BradleyWiggins, devant l’Australien Cadel Evans : “Avec près de 100 km de chrono, il peut prendre 1 seconde voire 3 secondes au km à ses rivaux qui auront du mal à le combler en montagne.” Faites vos jeux. En attendant, tous les protagonistes sont venus au printemps reconnaître le parcours. Cadel Evans a été aperçu, les équipes françaises mais pas les Luxem- bourgeois Frank et Andy Schlek. Ce dernier (vain- queur de l’édition 2011 après le déclassement d’Alberto Contador suite à un contrôle anti-dopage positif) ne sera pas présent. Victime d’une chute, il regardera ses adversaires depuis son canapé. E.Ch.

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