La Presse Bisontine 110 - Mai 2010

20 DOSSIER

La Presse Bisontine n° 110 - Mai 2010

“Cacahuètes et vin d’Arbois à la ville” La Ville de Besançon a la répu- tation dʼêtre pingre en ce qui concerne les frais de bouche. Inutile de chercher le buffet somptuaire avec petits fours et mignardises qui clôt une céré- monie, il nʼy en a pas. Les convives sont au régime sec, “cacahuètes, vin d’Arbois et jus de fruit” résume avec humour PatrickAyache, directeur géné- ral des services de la Ville de Besançon. Cʼest une volonté de la municipalité dʼêtre éco- nome sur les frais de bouche. “Nous ne sommes pas là pour boire du champagne.” Cʼest une forme de respect des deniers publics, ce qui nʼest pas le cas de toutes les col- lectivités qui souvent se lâchent sur les buffets qui accompa- gnent les réceptions. “Je reven- dique cette réputation de pingre poursuit PatrickAyache , et c’est sans doute meilleur à la san- té” sʼamuse-t-il. Quoique, entre cacahuètes et gâteaux secs, il y a plus équilibré…

RÉCEPTIONS, REPAS… Région et Département Les frais de fonctionnement dans le collimateur

Les collectivités sont souvent attaquées pour leurs dépenses excessives en matière de réception, repas ou communication. Quelques indicateurs. Tour de vis au Conseil général Les crédits “cabinet” sont passés de 179 000 euros en 2002 à 87 000 euros l’an dernier au Département. La suppression de la fameuse “garden-party” du Conseil général est un des éléments de rigueur voulus par l’exécutif. Un peu plus de 12 000 euros de cadeaux, 18 000 euros de loca- tions de salles et autres sonorisation et près de 100 000 euros pour le fonctionnement des assemblées (repas des élus) et pour les réceptions (inaugurations de collèges, de musées…)… Le bud- get géré par le cabinet du président du Conseil général avoisinait les 180 000 euros en 2002. Cette année, 148 000 euros sont ins- crits au budget mais le cabinet sait déjà que cette somme ne sera pas entièrement utilisée. Lʼan dernier, le coût de cette enveloppe “fêtes et cérémonies” est descendu à 87 582 euros. “Le président m’a demandé d’être particulièrement vigilant sur ces crédits, mais on ne peut pas tout supprimer” avoue Philippe Tempesta, le “dirʼcab” du Doubs. En 2007 par exemple, ces dépenses ont atteint 133 925 euros, “parce que sept collèges avaient été inaugurés cette année-là.” Retour à plus de rigueur en 2008 avec 94 266 euros de dépenses, et moins encore lʼan dernier avec 87 582 euros. Même chose pour les dépenses de communication qui ont atteint 2,9 millions dʼeuros en 2003-2004. “Aujourd’hui, nous sommes à 1,5 million.” Et de 20 salariés en 2004, le service comʼ du Dépar- tement est passé à 13.

La Région a-t-elle mis un frein à ses dépenses ?

Selon la “Société de protection du contribuable”, basée dans le Jura, le rapport de la chambre régionale des comptes en 2008 n’a pas infléchi les habitudes dépensières du Conseil régional. P oil à gratter local, la Socié- té de protection du contri- buable, basée dans le Jura et animée parAlain Pernot (can- didat malheureuxMoDemà une élection cantonale en2008àChau- mergy), s’est penchée sur les dépenses du Conseil régional depuis la mise en garde de la Chambre régionale des comptes sorti enmai 2008. Les habitudes ont-elles changé ? “Non”, affirme le contribuable jurassien qui a pris lapeinedepointer les récentes

dépenses qu’il juge “somptuaires” de la Région. Pêle-mêle, on peut noter 55 000 euros en frais de bouche et buffets “rien qu’entre le 1 er mai et le 31 août 2009.” Exemple le 14 mai 2009 où la Région a déboursé 7 258 euros pour un cocktail à l’hôtel Mer- cure suite aux“Assises de la gran- de vitesse”. Autre exemple : les 2 721 euros dépensés dans le buf- fet à l’occasion du vernissage à la saline d’Arc-et-Senans de l’exposition “90 minutes” pré- sentant la collection du fonds régional d’art contemporain. Ou encore ce savoureux cocktail à 1 282 euros dans le cadre d’une soirée-débat intitulée “La Fran- ce face à la crise” ! Les dépenses de communication sont aussi montrées du doigt : près de 100 000 euros dépensés en quatremois en publicité dans les médias. Mêmes excès pour le

site web de laRégion pour laquel- le “une somme de 240 000 euros a été engloutie ces derniers mois. Cette enveloppe s’ajoute aux 62 000 euros que le Conseil régio- nal a déjà déboursés il y a un an pour la mise en ligne de la nou- velle versionde ce site.” À laRégion, on affirme que contrairement à ce qu’on pourrait penser, “le train de vie de l’institution a été réduit.” Tout semble question d’interprétation… Plus contestable, on peut termi- ner par citer quelques études com- mandées par la Région, aux contours difficiles à cerner : 87 308 euros pour une démarche de consultation relative à la cri- se, 101 420 euros pour une mis- sion de conseil en gestion de la dette ou encore 25 672 euros pour une étude sur “l’organisation de la direction de la communication de la Région” ! J.-F.H.

CONTENTIEUX

Jugement le 3 mai

Le Conseil général aux prud’hommes Le dossier A.D.E.D. est une épine dans le pied du Département. La collectivité se retrouve aux Prud’hommes pour avoir licencié le directeur de cette association épinglée par la Chambre régionale des comptes pour son train de vie.

L’ audience est prévue le 3 mai au tribunal desPrud’hommesdeBesançon.Elleannon- ce sans doute l’épilogue du contentieux qui oppose depuis 2008 Guy Millet, l’ancien directeur de l’A.D.E.D. (agence de développe- ment économique et touristique du Doubs) au Conseil général. Le directeur aurait été licen- Rappel Quelques dérives de l’ancien directeur relevées par la C.R.C. “Tous les interlocuteurs de l’A.D.E.D. sont indifféremment invités à déjeuner par son directeur, y compris les relations de travail les plus habituelles : fournisseurs, assureur, comptable, avocats, chambres consulaires, représentants des services de l’État, journa- listes locaux, ce qui semble correspondre à une conception un peu dépassée des rela- tions d’affaires…” “La fréquentation d’un hôtel quatre étoiles à l’occasion du salon de l’horlogerie de Bâle est agréablemais coûteuse :les deux chambres et la soirée passée au Château d’Isenbourg (Rouffach) le 5 mai 1999 par le président et le directeur de l’A.D.E.D. ont été facturées 4 132 F.” “La facturation de deux fois deux coupes de champagne à la terrasse d’une brasserie bisontine le 27 juillet 2004 à 18 h 25 et 18 h 53 laisse perplexe.” “Le directeur de l’A.D.E.D. utilise parfois la carte bancaire de l’A.D.E.D. pour régler ses dépenses personnelles, celles-ci donnant lieu ensuite à “compensation” par les frais de déplacement qui lui sont ou seront dus. Les sommes concernées s’élèvent à 20 892,44 euros depuis 1998” !

cié de manière abusive. Selon nos sources, il demanderait jusqu’à 450 000 euros à la collec- tivité en réparation du préjudice. L’affaire a commencé en 2006 à la suite de la publication d’un rapport de la Chambre régio- nale des comptes. L’organisme de contrôle s’est en effet intéressé d’assez près à la gestion de cette association émanant duDépartement,sur la période 1997-2004.Les conclusions de ce rap- port dont nous avions fait état dans nos colonnes lors de sa publication sont accablantes.Au cha- pitre “standing de l’association”, la Chambre régionale des comptes révèleune série de dérives dans la dépense de l’argent public.Par exemple, “les frais de minibar dans les hôtels à la char- ge de l’association.” Plus loin on lit, “qu’il n’est peut-être pas indispensable que des Bisontins se retrouvent au “Train Bleu” à Paris, ou que l’A.D.E.D.fréquente de grands restaurants pari- siensHélène Darroze :296,75 euros pour quatre personnes le 22 octobre 2002.” On apprend enco- re que “le Château de Germigney ne devrait pas forcément être le restaurant retenu lors des ren- dez-vous de l’A.D.E.D. avec le directeur de la Saline Royale d’Arc-et-Senans.Si les repas pres- tigieux ne sont pas très courants, les repas chers sont fréquents sans que la que la qualité des interlocuteurs le justifie.” Visiblement, le direc- teur comme le président de l’A.D.E.D. avaient un goût prononcé pour les endroits raffinés. LaC.R.C.pointait également du doigt quelques dérives dans l’utilisation des cartes bancaires, dont une était jointe à un compte-courant de fonctionnent au nomdu directeur,et une secon- de (jusqu’en juillet 2009), existait au nom du président. Bref, autant d’éléments qui pour- raient être évoqués lors de l’audience publique du 3 mai. L’A.D.E.D. a été dissoute, pour être remplacée par Développement 25 qui a une mission de développement économique et touristique. Le Conseil général semble avoir tiré les leçons de cette affaire. “Il n’y a plus de carte bancaire dis- ponible à la direction” explique GérardGalliot, président de Développement 25. Le bureau a été élargi pour permettre un meilleur contrô- le de la gestion. “J’ai mis en place un bureau très carré. Même le président ne signe pas les chèques.C’est le trésorier qui s’en charge.Le sui- vi des comptes est très précis.” Cela n’a pas tou- jours été le cas. T.C.

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