La Presse Bisontine 110 - Mai 2010

DOSSIER

La Presse Bisontine n° 110 - Mai 2010

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VOYAGES, TRAIN DE VIE, FRAIS DE BOUCHE… LES AVANTAGES DE NOS ÉLUS

C’est l’épisode récent du voyage express en Martinique d’Alain Joyandet, facturé 116 500 euros, qui relance le débat autour des moyens mis à la disposition de nos élus, qu’ils soient nationaux ou locaux. Dans ce dossier où sont abordés plusieurs aspects du fonctionnement de nos institutions, La Presse Bisontine se propose de lever le voile sur les dépenses réelles des collectivités locales, souvent qualifiées d’excessives, qui plus est en temps de crise. Voitures, déplacements, frais de bouche ou de cérémonies, La Presse Bisontine passe en revue quelques petits plus venant améliorer le quotidien des élus qui nous dirigent.

POLÉMIQUE

Un ministre pourtant économe… Le voyage en jet privé d’Alain Joyandet fait toujours des vagues La révélation du coût de 116 500 euros pour

Zoom Les voyages ministériels, comment ça marche ?

vais procès qu’on lui fait. Il ne faut pas tout confondre, cet argent, il ne l’a pas mis dans sa poche. C’est différent de la mesu- re par exemple prise par la présidente Dufay de nom- mer tous les conseillers membres de la commission permanente (N.D.L.R. : voir article page suivante). C’est de l’argent public dépensé en plus et là, il va dans les poches des conseillers” esti- me l’élue U.M.P. Une autre élue de droite ajoute : “On peut stigma- tiser sur ce voyage minis- tériel mais on n’imagine pas combien peuvent coû- ter tous les déplacements dans les collectivités locales, c’est tout autant !” À titre d’exemple, la flotte de véhi-

un déplacement en Martinique du secrétaire d’État à la Coopération a sérieusement écorné l’image du leader U.M.P. au Conseil régional de Franche-Comté.

L es membres du gouvernement disposent du parc aérien de lʼE.T.E.C. (Escadron de transport, dʼentraînement et de calibrage) qui sʼest substitué au G.L.A.M. Cet escadron, stationné à Villacoublay, comprend 165 personnes (effec- tifs 2007). Ses moyens sont les suivants : 2 Airbus A319, 1 Falcon 7X, 1 Falcon 900, 4 Falcon 50 et 3 Super-Puma. Les coûts horaires moyens dʼutilisation des appareils de

lʼescadron de lʼE.T.E.C. ont été réévalués le 1 er juillet 2007 pour lʼensemble des bénéficiaires des vols. Cʼest le ministère de la Défen- se qui chapeaute lʼE.T.E.C., il fac- ture ensuite à chaque ministère en fonction de lʼutilisation des appa- reils. Au final bien sûr, cʼest lʼÉtat, donc le contribuable, qui paye. Pour exemple, le coût horaire facturé pour lʼutilisation dʼun Airbus est de 5 836 euros, celui dʼun Falcon 50 de 2 601 euros.

L e prix d’un appartement, pour 36 heures de voyage et une réunion de quelques heures outre- mer…La révélation de cette infor- mation quelques jours après le deuxième tour des Régionales en Franche- Comté a provoqué une vague de réac- tions sur le plan national. L’image du Vésulien est naturellement écornée sur le plan régional. Le secrétaire d’État a

justifié le recours à une compagnie pri- vée pour des raisons d’agenda puisque selon lui, sa présence au conseil des ministres le lendemain de cette visite éclair était indispensable. Vers la Martinique, plusieurs compa- gnies aériennes proposent pourtant des allers et retours quotidiens. Et s’il pré- férait néanmoins un jet, le Falcon 7X de l’E.T.E.C. (le service de transport aérien géré pour les ministères) aurait été moins cher que celui d’une compagnie privée. Dans son dernier rapport, le député P.S. René Dosière (voir son interview en page 21), estime que le coût horaire fac- turé par l’E.T.E.C. pour un Falcon de ce type est de 3 178 euros. Si l’on compte dix heures de vol pour la Martinique aller-retour, on arrivait selon le parle- mentaire à une facture de 63 500 euros, “soit presque moitié moins” dit-il. Pire : M. Joyandet serait “un récidiviste” , avec un voyage similaire en Haïti quelques semaines auparavant sur une compa- gnie privée, et étrangère de surcroît. Ce dernier épisode largement relayé dans les médias a eu le mérite de provoquer un recadrage du Premier ministre, à suivre dans les faits. Le principal intéressé qui estimait que le recours à ce jet privé “a pu choquer” n’a pas souhaité apporter de commen- taires supplémentaires, maintenant que le soufflé est retombé. C’est l’élue juras- sienne Sylvie Vermeillet qui prend sa défense : “Alain Joyandet ne dilapide pas l’argent public. Depuis qu’il est maire de Vesoul en 1995, jamais il n’a été épinglé pour une quelconque dérive. C’est unmau-

“C’est un mauvais procès qu’on lui fait.”

cules de fonction et de services au Conseil général du Doubs est facturée 850 000 euros à la collectivité chaque année. L’épisode du voyage enMartinique d’Alain Joyandet n’est pas la première dérive du genre. Son collègue Christian Estrosi, alors qu’il était encore ministre de l’Outre- Mer, avait aussi été épinglé en 2008 pour un voyage retour de Washington factu- ré… 138 000 euros. Pour Alain Joyandet, le coup fait mal, d’autant que le secrétaire d’État franc- comtois a déployé des efforts remarqués pour réduire le coût de son cabinet. En fin d’année dernière, il avait été salué comme un des membres du gouverne- ment à avoir le plus diminué les coûts de fonctionnement de son cabinet minis- tériel avec une facture allégée de 16 % en un an. Le “buzz” médiatique provo- qué par ce voyage dispendieux a eu tôt fait de faire oublier ces efforts… J.-F.H.

Si Alain Joyandet était passé par le service mis à la disposition des ministres, la facture aurait pu être divisée au moins par deux.

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