La Presse Bisontine 107 - Février 2010

LE GRAND BESANÇON - SPÉCIAL TEMPÊTE 28

MÉTÉO

Pour veut garder un temps d’avance Météo plus fine, “mais pas plus alarmiste” Depuis la tempête, Météo France a établi sa fameuse carte de vigilance. A-t-on tendance à vouloir ouvrir rapidement le parapluie ? Pas vraiment, à en croire l’antenne de Besançon.

O n sait que, localement, les rafales ont atteint, en pointe, 130 voi- re 140 km/h. Bien au-delà de la prévision. Alors, erreur ? Pas vraiment. En fait, les météorologues se fondent sur des algorithmes et sur des statistiques qui, par définition, n’intègrent pas des phénomènes hors normes… puisqu’ils ne se sont jamais produits. C’est dire qu’en décembre 1999, on attendait effectivement la tempête du côté de Besançon et des crêtes haut- doubiennes.Mais personne n’imaginait son ampleur. Ni même qu’un double coup de vent pouvait ainsi se produi-

Les prévisionnistes ont-ils tendance à ouvrir rapidement le parapluie quand un événement un peu violent semble pointer son nez ? “On dit que Météo France crie au loup plus facilement et plus souvent qu’auparavant mais ce n’est pas le cas”, rappelle Bruno Ver- mot-Desroches, deMétéo France Besan- çon. Il argumente, chiffres à l’appui : “Depuis la carte de vigilance, il y a 6 à 8 alertes par an alors qu’avant 1999, on pouvait alerter 15 à 20 fois.” Pour exemple en 2009 dans le département, il y a eu une alerte liée au vent, 2 pour la neige, 2 pour les orages et une pour les crues. Une chose est claire : “Nous sommes meilleurs qu’il y a dix ans en terme de prévision” conclut le météo- rologue bisontin.

Les ingénieurs de Météo France Besançon actualisent, minute par minute, les données climatiques récoltées à Besançon, Épenoy, Pontarlier, Maîche… pour une meilleure prévision.

ASSURANCES Les assureurs plus rapides Les nouvelles garanties des assureurs Depuis la tempête, les compagnies d’assurance ont amélioré leur processus d’expertise et proposent de nouvelles garanties. Aujourd’hui, on peut assurer son salon de jardin ou arbuste ! E n 1999, le département du Doubs n’ayant pas fait l’objet d’arrêté “catastrophes naturelles”, c’est donc au titre de la garantie tem- pêtes que la quasi-totalité des indemnités ont été versées par les assureurs locaux. Eddy Louvet, responsable d’un cabinet d’assurance dans le Doubs, se remémore assez bien les sinistres qu’il a fallu réparer puis indemni- ser au plus vite : “Nous avons traité environ 500 sinistres en quelques jours. En majorité des toits “détuilés”… Pour exemple, nous avons eu 3 à 4 sinistres au-delà du million de francs.” Quelles leçons la tempête a-t-elle apporté aux compagnies d’assurance en matière de contrat ? “Peu, résume Eddy Louvet. Disons que nous nous sommes aperçus que les garanties étaient assez bonnes, notam- ment sur les bâtiments. La principale leçon réside dans l’amélioration du processus et du seuil d’expertise.” Exemple : les experts - pour cet- te compagnie - ne se déplaçaient plus sur site pour des dommages mineurs : “Jusqu’à 3 000 à 4 000 euros, les assurés nous envoyaient la facture que l’on payait sans un passage de l’expert” évoque l’assureur. Bref, les contrats étaient finalement bien ficelés pour assurer une répa- ration des dommages. Aujourd’hui, quelques nouveautés sont venues se greffer à la longue liste des astérisques inscrits au bas de votre déclaration d’assurance. Depuis peu, on peut en effet assurer un arbuste d’un fort coup de vent ou assurer son mobilier de jardin. “Pour des options comme celles-ci, il faut compter 30 à 50 euros de plus par an” calcule l’assureur. Si la tem- pête n’a pas chamboulé le système de fonctionnement des assurances, elle a néanmoins eu un impact sur le prix des contrats, qui ont aug- menté chaque année depuis 10 ans. Rappelons tout de même que l’aléa climatique a coûté près de 3,3 milliards d’euros rien que “multirisque habitation” aux assurances…

re dans un délai très court. Ce qui a changé en dix ans à Besançon ? C’est d’abord l’amélioration des tech- niques de prévision et la mise en place des fameuses cartes de vigilance au niveau national (avec des niveaux vert, jaune, oran- ge, rouge). L’autre arrivée est technique avec l’installation de nouveaux radars météos (exemple de celui installé àVaufrey, dans le Doubs, à la limite avec la frontière suisse) et la création de nouveaux sites de mesure du vent.

“Moins d’alerte.”

Repères Les rafales maxi en 1999 mesurées le 26 décembre dans le Doubs 38 m/s à Épenoy (136,8 km/h), 36 m/s à Pontarlier et à Maîche (129,6 km/h), 30 m/s à Besançon (108 km/h). Depuis, il y a eu peu de tempêtes de fortes ampleurs, la plus forte étant celle du 2 et 3 décembre 2007 avec un maxi à 27,7 m/s à Épenoy (99,7 km/h).

FORÊT PRIVÉE Un nouveau modèle de gestion La tempête de la remise en question Même si l’on en parle peu, la forêt privée a aussi subi d’importants dégâts forestiers en décembre 1999. Exemple avec la copropriété forestière de Bonnevaux, vers Frasne.

locaux. “Avant la tempête, le prélèvement moyen variait de 400 à 600 m 3 par an. On a dû réduire de 50 % la pro- duction” , indique le techni- cien. Montant du préjudice : autour de 600 euros annuels en supposant que les 24 copropriétaires aient lamême surface forestière. Le travail de reconstitution a été mené en collaboration avec le Centre Régional de la Propriété Forestière (C.R.P.F.). Lequel a proposé un itinéraire technique de reconstitution agrémenté des demandes d’aides puis a confié à Coforêt la réalisa- tion de ce programme de tra- vaux à court et moyen ter- me. “On a privilégié la régénération naturelle sans aucune plan- tation. L’objectif

faire car ces arbres ont beau- coup souffert après la séche- resse de 2003.” Pierre Lema- réchal relève également l’efficacité du soutien public. “On a eu des aides considé- rables pour remettre en état les parcelles.” Quels enseignements peut- on tirer de cette tempête exceptionnelle ? Stéphane Pouchouloux estime qu’elle a sérieusement remis en question l’intérêt des plan- tations 100 % épicéa. Les pro- priétaires sont désormais plus enclins d’y intégrer d’autres espèces de résineux ou des feuillus. De même, la volonté de capitaliser à très long terme sur le bois sans jamais intervenir ou presque n’est plus forcément de mise. “La tempête a certainement joué en faveur de la futaie irrégulière même s’il ne faut pas enterrer pour autant la futaie régulière. Ce serait un raisonnement trop simpliste et faux de trancher entre l’un ou l’autre mode d’exploitation. Les résultats de la reconsti- tution se verront seulement dans 50 ans. C’est un vrai pari sur l’avenir.” Rendez- vous pour le cinquantenai- re. F.C.

B ienmalin celui qui pour- rait dresser un bilan global de l’impact de la tempête sur la forêt privée. “Globalement, il semble que les dégâts soient un peumoins importants. Le morcellement et l’hétérogénéité plus mar- quée des peuplements expli- quent peut-être pourquoi ils ont mieux résisté” , avancent avec la prudence qui s’impose Stéphane Pouchouloux qui travaille à Coforêt. Entre autres activités, cette coopé- rative s’occupe depuis le début des années quatre- vingt de la gestion technique de la copropriété forestière de Bonnevaux. Ce domaine de 74,58 ha appartient à 24 propriétaires. “Il s’agit d’une forêt familia- le où nous sommes tous cou- sins” , note Pierre Lemaré- chal à la tête de cette copropriété où chacun conser-

ve la jouissance réelle de son bien. Ce qui la différencie d’un groupement forestier structuré en parts. La nuan- ce est d’importance car l’impact de la tempête n’est pas mutualisé mais indivi- dualisé. “Le volume de bois mis à terre avoisine 10 000m 3 , soit la moitié du capital sur pied. C’est la seule forêt où l’on a dû refaire un plan simple de gestion sur 15 ans” , poursuit Stéphane Pou- chouloux. En surface, 70 % du massif a été touché. 50 % des par- celles à plus de 50 % et 20 % ont été totalement dévastés. Certains propriétaires ont donc été pénalisés plus que d’autres. Devant l’ampleur de la catastrophe, tous ont confié à Coforêt le soin de s’occuper du nettoyage et de la vente des bois écoulés en totalité auprès des scieurs

Eddy Louvet et Colette Jacoulot, assureurs.

La moitié du capital sur pied.

consiste à tendre vers un modèle de futaie irrégu- lière en conser- vant un maxi- mum de gros bois pour maintenir l’étagement. C’est assez compliqué à

Ce qu’il faut savoir Tout titulaire dʼun contrat dʼassurance contre lʼincendie bénéficie dʼune garantie contre les effets du vent dus aux tempêtes (loi du 25 juin 1990) selon les conditions du contrat. Pour les catastrophes naturelles (loi du 13 juillet 1982), la réglementation détermine lʼétendue de la garantie, les sinistres pris en charge, le taux de cotisation, les franchises.

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