La Presse Bisontine 104 - Novembre 2009

L’ÉVÉNEMENT La Presse Bisontine n° 104 - Novembre 2009 SONORAMA LE GRAND DÉLIRE La première édition de Sonorama n’a pas été convaincante. Les reproches fusent de toute part et s’adressent en bloc à la municipalité et aux quatre directeurs artistiques qui n’ont fait finalement que se plier aux exigences du cahier des charges fixé par leur donneur d’ordres. Malheureusement, on retiendra de ce festival de créations les excès dans la présentation d’œuvres contemporaines dont le public peinait à comprendre le sens, le manque de cohérence et de lien dans la programmation, et ce ne fut pas le rendez-vous festif qu’on nous promettait. Les Bisontins ont des raisons d’être déçus. Les concepteurs des défuntes Musiques de Rues réclament même la démission de l’adjoint à la culture Yves-Michel Dahoui. Une vraie déception Le festival qui a fait “pschitt” HUMEUR 6

S onorama 2009 se voulait “une sorte de palette chromatique du sensible.” C’était écrit en toutes lettres sur la page de garde du programme. Quelques lignes plus loin, il était annoncé “quatre univers singuliers qui se frottent, s’entre- choquent et se croisent.” Curieux de tous poils, de tout âge, de Besançon, de l’Agglo ou de beaucoup plus loin, nous avions donc quatre jours pour trouver le sens de l’énigmatique formule et vérifier sur le terrain ce mélan- ge des genres promis par les organisateurs et ceux qui les avaient choisis. Quatre jours plus tard, force est de constater que Sonorama 09 n’a pas fait le bruit escompté, que l’interaction entre les arts n’a pas eu lieu et que l’événement est loin d’avoir séduit dans les grandes largeurs. 40 000 personnes selon les organisateurs, un comptage digne d’une intersyndicale emportée dans son élan. Et selon la police ? Sur ce coup-là, elle ne dit rien. Faute de clients, “Autoradiohotel”, hôtel éphémère composé de neuf voitures est devenu gratuit la seconde nuit (contre 30 euros ini- Ce festival a laissé perplexe plus d’un spectateur venu se distraire au centre-ville de Besançon. Réflexion autour d’un beau gâchis.

Le public est resté perplexe. Ici, séance de massages sonores à l’église.

tialement prévus) sans toutefois convaincre. Et la place de la Révo- lution n’a été noire de monde que le dimanche soir, lors du final. Trop tard. Quand le public est venu, il est souvent resté perplexe, dubitatif devant ce qu’on lui donnait à voir ou à entendre. Nombre de fes- tivaliers ont erré comme des âmes en peine place Granvelle, pour- tant “cœur du festival” sur le papier, se rabattant finalement sur une gaufre ou une crêpe, histoire de ne pas être venu pour rien. Pourtant, individuellement, les quatre directeurs artistiques ont respecté le cahier des charges : chacun dans sa spécialité a fait

RÉACTION Extrait d’une lettre ouverte “M. Dahoui, pourquoi vous devez maintenant démissionner”

université Diderot de Dijon qui don- nait un taux de satisfaction de lʼordre de 90%. Lʼavez-vous lu seulement ? Vous nʼétiez même pas à son ren- du en juin 2008 ! Nous vous met- tons au défi de nous trouver un nombre significatif de personnes satisfaites de Sonorama.” La lettre indique plus loin : “ Vous avez, en affichant crânement votre posture dʼélu qui prend-des-risques- et-qui-saura-prendre-ses- responsabilités, maintenant perdu toute crédibilité. Non seulement pour ce festival, mais aussi pour lʼen- semble de la politique culturelle que vous entendez mener. Quoi que vous fassiez, vous serez lʼhomme du “bilan mitigé”, le tueur de “Musiques de Rues”. La meilleure preuve est la querelle sur le coût de Sonorama. Lʼappel dʼoffres se situait à 0,75 million dʼeuros, vous avez

parlé dʼ1 million dʼeuros, le chiffre dʼ1,2 million dʼeuros sʼest imposé et maintenant, on parle dʼ1,3 mil- lion. Quʼest-ce que cʼest que cette histoire ?Deux foismoins dʼartistes, et un budget qui grimpe, qui grim- pe…Il est vrai que quatre directeurs artistiques de renom… Ainsi, quoi que vous fassiez, vous êtes en train de vous mélanger les crayons et créer le doute. Dès lors, vous êtes devenu un sus- pect, et quelle que soit votre sincé- rité, votre foi et votre engagement en la démocratisation de lʼart contem- porain comme du spectacle vivant, vous avez perdu lʼautoritédʼun adjoint au maire en charge du projet cul- turel de Besançon. Ce qui veut dire que vous nʼêtes plus en position de force pour les arbitrages budgé- taires et que toute décision même pertinente que vous prendrez vous

sera à présent contestée.” Et de conclure : “Réglons aussi une ambiguïté : nous souhaitons àSono- rama la pérennisation que nous nʼavons pas eue et qui nous semble nécessaire au développement cul- turel de cette ville.” Mais pour cela, Pascal Esseau et François-Xavier Ruan invitent Yves-Michel Dahoui à quitter “la scène de la culture” pour laisser “ à quelquʼun dʼautre le soin de “reprendre” Sonorama et par là même relancer le développement culturel de Besançon. Et cʼest par- ce que nous aimons Besançon et ses habitants, dont nous avons été citoyens, quʼil nous semble impor- tant de vous demander de laisser la place à plus averti.” La lettre est publiée sur www.musiquesderues.com

Pascal Esseau et François-Xavier Ruan, les deux directeurs de feu le festival Musiques de Rues, estiment dans une lettre ouverte qu’Yves-Michel Dahoui n’est plus crédible.

budgétaires, ni pour porter la secon- de édition de Sonorama” juge Pas- cal Esseau. Ces deux acteurs culturels qui ont suivi avec attention la première édi- tion de Sonorama, rappellent dans leur courrier que “malgré quelques réussites (la Friche, par exemple, mais quelle originalité ?) qui ne sau- vent pas le reste, le chiffre de 40 000 personnes nʼest que la moitié de lʼaffluence estimée pour la premiè- re de Musiques de Rues (…). En 2007, la Ville a commandé une étu- de des publics à la très sérieuse

P armi les réactions à Sonora- ma, il y a celle plus retentis- sante de Pascal Esseau et de François-Xavier Ruan. Les deux directeurs deMusiques de Rues, le festival populaire qui a dû sʼeffacer prématurément après la troisième édition pour que puisse émerger un paysage sonore placé sous le signe

de lʼart contemporain, se fendent dʼune lettre ouverte adressée direc- tement à lʼadjoint à la culture Yves- Michel Dahoui. Ils demandent à lʼélu de démissionner. “Nous ne réglons pas nos comptes. Il faut que Besan- çon se dote dʼune politique cultu- relle. MaisYves-Michel Dahoui nʼest plus crédible ni pour les arbitrages

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