La Presse Bisontine 104 - Novembre 2009

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Déjà le 8 septembre dernier,

la coordination rurale du Doubs organisait une distribution gratuite de lait au centre de Besançon. Une manière comme une autre de sensibiliser les consommateurs

au problème des marges.

détriment des éleveurs qui paient les pots cas- sés. La situation des producteurs de lait standard comtois s’aggrave de semaine en semaine. Fré- déric Perrot, le président de la F.D.S.E.A. du Jura l’explique par l’abandon progressif de toutes les formes de soutien, la disparition des prix de sécu- rité sur les produits industriels et la pression impitoyable des opérateurs de la G.M.S. “Même s’ils annoncent des marges nettes de 2 à 3 %, ils font des plus-values énormes” , considère ce pro- ducteur de lait standard qui n’a jamais vécu pareille situation. La plupart des autres responsables syndicaux com- tois sont sensiblement sur lamême longueur d’on- de. La Confédération paysanne estime que la gran- de distribution n’est pas l’unique responsable de la crise laitière. Elle réclame surtout le retour à une politique interventionniste de l’Europe sur la régulation des marchés. Les Jeunes Agriculteurs du Doubs souvent à l’initiative des opérations de relevés de prix apprécieraient qu’on sanctionne les abus. “On constate une déconnexion complète entre le prix des matières premières et les prix consom- mateurs. Dans les filières régionales, on sait que la distribution prend desmarges importantes.On s’in- terroge devant l’attitude des transformateurs. Il serait bon demettre en place des brigades de contrô- le de la D.G.C.C.R.F. qui reproduisent le travail de l’observatoire des marges sur les produits régio-

Connivence entre pouvoirs publics et grande distribution

L a F.D.S.E.A. du Doubs parti- cipe depuis plusieurs années au Pac40, cet observatoire alimenté par les agriculteurs sur les prix pratiqués dans la grande et moyenne distribution. “On a déjà constaté certains dérapages notamment sur l’emmental avec des marges distributeurs qui pou- vaient varier de 55 à 71 %. Ces abus montrent que des opérateurs s’en mettent plein les poches” , observe Martial Marguet. Le président de la Fédération Natio- nale des Producteurs Laitiers qui sʼoccupe de ce dispositif dans le Doubs dénonce aussi les mises

naux. On a sollicité le préfet dans ce sens” , note Phi- lippe Cuinet, le président des J.A. du Doubs. Jean-Claude Jeannin, à la tête de la F.D.S.E.A. du Doubs, s’étonne de voir que le prix du pain n’a pas bougé d’un centime alors que les cours du blé ont chuté de 35 %. Le syndicat majoritaire avait choi- si de bloquer en juin dernier plusieurs centrales d’achat. La Coordination rurale a préféré d’autres moyens comme la grève du lait ou la distribution gratuite aux citadins. “On s’était déplacé au centre de Besançon le 8 septembre dernier.On leur a expli- qué que le litre de lait payé 25 centimes au pro- ducteur se retrouve à presque 1 euro dans les rayons des grandes surfaces après qu’il ait été condition- né en briques. On agissant un tant soit peu sur les marges distributeurs, on améliorerait forcément la situation des producteurs. J’espère que les constats de l’observatoire vont déboucher sur des mesures concrètes” conclut Daniel Pépiot, le président de la Coordination rurale du Doubs. F.C. et J.-F.H.

de fond imposées par la G.M.S. à certains transformateurs pour accéder aux rayons. “On réclame un vrai partage de la valeur ajou- tée entre les différents acteurs. Il faudrait pouvoir l’adosser aux coûts réels pour définir le prix de vente consommateur.” Ces problèmes de marges sont récurrents et rien ne semble évo- luer depuis des années. Face à cet immobilisme, Martial Marguet soupçonne une certaine conni- vence entre les pouvoirs publics et la grande distribution. “À force de trop tirer sur la corde, elle risque de casser.” Il nʼest pas plus tendre

avec la P.A.C. qui ne fait pas son boulot. “Avec des systèmes de régulation, on éviterait d’avoir des abus importants et les distribu- teurs n’auraient plus la possibili- té de faire la pluie et le beau temps. On a une commission européen- ne qui a oublié ses agriculteurs.” Le processus actuel est-il irré- versible ? Pas sûr. Sachant quʼon nʼest jamais aussi bien servi que par soi-même, les agriculteurs vont poursuivre leurs actions de surveillance. “On n’arrêtera jamais et on est suffisamment nombreux et en capacité d’agir vite.” Il y a encore de lʼaction dans lʼair.

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