La Presse Bisontine 102 - Septembre 2009

La Presse Bisontine n°102 - Septembre 2009

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BILAN

DÉCRYPTAGE Les inondations du 26 juin Les 5 handicaps de l’A.R.D. Pourquoi l’Agence Régionale de Développement est-elle la cible “rêvée” des attaques ? Tentative de réponse en 5 points.

141 projets en cours Investissements extérieurs : les vrais chiffres de l’A.R.D. Tirer à boulets rouges sur l’Agence est devenu un peu la marotte de l’opposition régionale. Quels sont vraiment les résultats de l’activité “prospection” de l’A.R.D. ? Premier bilan 2009.

documents papier de l’Agence sont détruits. Seuls deux ordinateurs por- tables et les sauvegardes informatiques ont pu être sauvés. Les dégâts sont impressionnants, l’épisode fera deux blessés dont le directeur fraîchement nommé. Depuis, l’A.R.D. est provisoi- rement hébergée à la C.C.I. du Doubs. - LA CRISE. Si les résultats de l’A.R.D. sont discu- tables, la crise dans laquelle est plon- gé notre pays en général, et la Franche- Comté en particulier, n’arrangent pas ses affaires. Ceci dit, d’après les chiffres fournis par l’Agence, on s’aperçoit que le nombre de projets suivis par l’A.R.D. n’a pas vraiment baissé depuis la cri- se. Seulement, ce sont des projets de moindre envergure. Les projets d’ampleur ont quasiment disparu au profit de plus petits dossiers, par exemple des groupes étrangers qui avec la crise souhaitent trouver de nou- veaux marchés et veulent implanter un bureau de vente en France. Développement 25, les Chambres de Commerce et d’Industrie, la Commu- nauté d’Agglomération duGrand Besan- çon, la Région Franche-Comté, l’A.R.D. À force, le grand public n’y comprend plus rien. Pourquoi créer une agence régionale alors que les quatre dépar- tements francs-comtois disposent déjà chacun de leur agence économique ? Même si les missions de ces structures ne sont pas les mêmes et sont souvent complémentaires, le traditionnel “mil- lefeuilles” français pose là encore un sérieux problème de clarté. Problème qui subsistera tant que la réforme des collectivités n’aura pas réparti aumieux les missions de chacune. - LES BATAILLES POLITICIENNES. L’A.R.D. est devenue un peu la “tarte à la crème” des débats politiques au sein du Conseil régional. La droite reprochant sans cesse à la gauche d’avoir créé cet outil qui coûte 2 mil- lions d’euros par an au contribuable franc-comtois, la majorité actuelle ten- tant de défendre comme elle peut la légitimité de cette structure créée par feu Raymond Forni. Nul doute que le bien-fondé de l’A.R.D. reviendra dans les débats d’ici les prochaines élections régionales de mars 2010. J.-F.H. - LES MISSIONS “FLOUES” DES COLLECTIVITÉS.

- LA VALSE DES DIRECTEURS. Trois directeurs enmoins d’un an, voilà qui n’arrange pas l’image d’une Agen- ce déjà malmenée et dont la mission n’a pas vraiment été bien comprise du grand public depuis sa création en 2005 par Raymond Forni. L’Agence avait recruté en 2007 Yann- Yvan Le Goffic, un Breton qui ne s’est apparemment jamais accoutumé à l’air des sapins. Son principal fait d’armes : avoir contribué au lancement d’un site Internet consacré aux “Ambassadeurs de Franche-Comté”. Initiative sympa- thique mais qui n’a jamais provoqué la moindre implantation d’entreprise en Franche-Comté. C’est plus un réseau social qu’un véritable outil de prospec- tion. M. Le Goffic a saisi l’opportunité d’un poste sur La Rochelle pour rega- gner son Ouest natal, il démissionne de l’A.R.D. en septembre 2009 et s’en va après ses trois mois de préavis, en décembre. L’Agence lance un vaste recrutement et pendant trois mois, le navire n’a pas de capitaine, il est piloté par un collè- ge de direction composé de quatre per- sonnes. En avril, après avoir examiné 120 candidatures, elle retient celle de Benoît Bettinelli, un ancien de la D.R.I.R.E. originaire de Franche-Com- té. Hélas,manque de flair ou vraie“scou- moune”, l’A.R.D. a misé sur le mauvais cheval. “Il n’a jamais réussi à prendre la mesure du poste, il était intellectuel- lement absent” commente un proche de l’Agence.M. Bettinelli ne sera pas recon- duit à l’issue de sa période d’essai. Le 24 juin, troisième directeur en six mois avec la nomination de Vincent Donier dont l’arrivée est totalement occultée par le sinistre que subiront les locaux de l’Agence deux jours plus tard (voir point suivant). Avec un trimestre sans directeur, un trimestre de M. Bettinelli et un trimestre d’été sui- te aux inondations subies par l’Agence, la bonne marche de l’A.R.D. a sérieu- sement été entravée. - LA MALCHANCE. Vendredi 26 juin 2009 à 18 heures, un déluge d’eau s’abat sur certains quar- tiers de Besançon, dont celui de Saint- Ferjeux. C’est là, rue Jacquard, que l’Agence est installée, au rez-de-chaus- sée d’un bâtiment. En quelquesminutes, des milliers de mètres cubes d’eau s’engouffrent dans les locaux par les baies vitrées qui finissent par céder. Les bureaux sont dévastés, tous les

“N on, l’A.R.D. n’est pas une coquille vide” se défendVincent Donier, le tout nouveau direc- teur de l’Agence Régionale de Déve- loppement. Il compare volontiers le métier de l’Agence à celui d’architecte. “C’est un peu la même chose que pour une maison. On dit souvent que c’est le promoteur ou le maçon qui l’a construite en occultant complètement l’architecte. Dans les projets d’implantation d’entreprises en Franche-Comté, nous sommes les architectes” compare le directeur. Au cours du premier semestre 2009, l’A.R.D. a répondu à 45 nouvelles intentions de projets. En cumulé, dans les cartons de l’Agence, 141 dos- siers sont “dans les tuyaux”. Seule- ment, la crise est passée par là, si bien que “31 de ces projets sont pour l’instant différés. Pas annulés, mais reportés” précise le directeur. Dom- mage, puisque ces 31 projets repré- sentent à eux seuls 3 547 emplois potentiels, soit “plus de 100 emplois par projet.” Et parmi ces 31, “un dos- sier totalise à lui seul 2 000 emplois.” Toujours pour ce début d’année 2009, l’A.R.D. compte 16 projets en étape 3, c’est-à-dire que l’investisseur a reçu une offre précise de l’A.R.D. et se déclare intéressé par une implan- tation en Franche-Comté. 253 créa- tions d’emplois sont à la clé pour ces 16 projets. Parmi ceux-ci, une centrale photovoltaïque, un investisseur alle- mand qui cherche du périphérique pour des machines-outils, un Suisse qui souhaite fabriquer des véhicules électriques, un espagnol pour de l’emballage bois, un projet touristique pour un groupe qui souhaite créer un stade de ski nordique, un groupe suis- se-allemand spécialisé dans la laine de bois, un projet suédois tourné vers la fabrication de meubles, un Cana- dien qui cherche un site en Europe pour fabriquer ses éoliennes, un pro- jet français orienté sur la stérilisa-

pings municipaux.” 7 emplois ont déjà été créés. Deuxième projet réussi cette année avec une société de chaudronnerie de Toulouse, “Deftec”, qui s’est installée à Bourguignon pour fabriquer des équi- pements de dépous- siérage pour l’industrie du bois et l’industrie agro-ali- mentaire. Troisième trophée de l’année

tion d’instruments médicaux, un dos- sier américain pour installer une socié- té de fabrication de parquets tech- niques pour les gymnases, etc. “Si nous gagnons un projet sur deux, ce sera déjà très bien. Cette année, nous avons perdu 2 projets en phase 3” pré- cise M. Donier. Il s’agissait d’abord d’un bureau de traduction belge avec 10 emplois à la clé. Le deuxième dos- sier hélas perdu au profit de Rhône- Alpes était “un plus gros poisson” : il s’agissait de l’implantation d’un centre touristique. Selon nos informations, confirmées par l’A.R.D., le centre en question était un Center Parcs pour lequel l’Agence avait proposé un site dans le Jura, mais c’est finalement en Isère que ce futur Center Parcs se créera. Trois projets sont arrivés cette année en phase 4, c’est-à-dire à leur abou- tissement. Le premier en Haute-Saô- ne avec la société “Franche-Comté Ossature Bois”, un site de produc- tion de chalets à ossature bois pour des complexes touristiques, dont l’inauguration aura lieu le 24 sep- tembre. “Cet investisseur a déjà 13 campings en France et autant au Canada. Il est en train de franchiser son concept, un hybride entre la caba- ne en bois et la tente, pour les cam-

Plus grosse entreprise implantée cette année grâce à l’A.R.D. : Quali Call Center à Besançon, 25 emplois.

pour l’A.R.D., l’implantation à Besan- çon de la société “Quali Call Center”, un centre d’appels qui a créé 25 emplois. Bien sûr, le bilan peut être jugé bien maigre avec au plus une quarantai- ne d’emplois cette année. Alors soit on affirme que l’Agence est un luxe que la Franche-Comté ne peut plus se payer, soit on estime que c’est un investissement à long terme et que notre région ne pouvait plus être la seule de France à ne pas disposer d’un tel outil de promotion et de pros- pection. J.-F.H.

GRAND ANGLE Chez nos voisins suisses Des communes suisses voient

leur économie exploser

L es bénéfices de l’arrêté Bonny qui offre de nombreux avantages aux entreprises étrangères, continuent de se faire sentir en Suisse voisine. C’est peut-être ce genre d’incitations fiscales qui manque en France pour éprouver l’efficacité d’une structure comme l’A.R.D. Rolle, paisible commune de 5 000 habitants sur les rives du Léman, à 40 minutes à peine de la frontière franco- suisse. Paisible ? Pas tant que ça. La frénésie économique touche en particulier la petite cité, à tel point qu’une urbaniste a été embauchée spécialement pour penser les futurs quartiers de la ville et l’adaptation des lignes de bus pour desservir les nouveaux pôles économiques. Plu- sieurs entreprises internationales ont décidé d’implanter des unités à Rolle. Pour la douceur du climat de cette cité lacustre ? Pas seulement. Si Yahoo, le géant d’Internet, le Japonais Nissan, le groupe informatique Cisco Sys- tems ou encore le major de l’alimentaire Cadbury, entre autres, ont décidé de venir ici, c’est aussi parce que Rol- le et cette partie des rives du lac sont concernés par l’arrêté Bonny.

Voté dans les années soixante-dix par la Confédération, ce dispositif permet aux entreprises étrangères de venir s’implanter en Suisse dans des conditions particulière- ment avantageuses. Elles bénéficient notamment d’un allégement confortable de l’impôt fédéral direct pendant dix ans et d’allégements fiscaux par les cantons. Mais l’arrêté Bonny atteint en ce moment ses limites dans le sens où les cantons qui ont beaucoup utilisé le système sont contraints aujourd’hui de contribuer finan- cièrement au rééquilibrage au profit des cantons moins favorisé économiquement. La dernière trouvaille en matière de développement exo- gène en Suisse est la création très récente d’un groupe- ment entre les cantons romands qui ont décidé de jouer la collaboration entre eux. Ce groupement a envoyé dans la plupart des pays émergents un émissaire en charge d’attirer les entreprises en Suisse. Et ces entreprises sont ensuite dirigées dans tel ou tel canton selon son domaine d’activité : la micro-mécanique à Neuchâtel, l’informatique à Genève… J.-F.H.

Après la destruction de ses locaux rue Jacquard (photo), l’A.R.D. s’installera à partir du 1 er septembre sur la zone Lafayette à Planoise, dans une partie des bâtiments de l’entreprise Fabricom.

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