Journal C'est à dire 317 - Juin 2025

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VAL DE MORTEAU

LA FORÊT, ENTRE SOUFFRANCE ET RÉSILIENCE Particulièrement malmenés depuis quelques années, les massifs forestiers locaux donnent de sérieux signes de faiblesse, de dépérissement, quand ce n’est pas de mort. Face à ces phénomènes climatiques et sanitaires qui touchent nos forêts, quelles réponses peuvent être apportées ?

Nature

Les forêts du Doubs pansent leurs plaies Depuis 2018, un cumul d’événements climatiques et sanitaires décime les forêts du Doubs, particulièrement en altitude. Le phénomène est aussi palpable en plaine. Une note d’espoir semble cependant émerger.

cialistes entrevoient un petit espoir pour cette année grâce à un automne 2024 particulière ment arrosé qui permettra sans doute aux arbres de nos massifs de retrouver de la vigueur. “S’il n’y a pas de sécheresse ou de cani cule cette année, on peut espérer un déclin des phases épidémiques.” Autres lueurs d’espoir : la présence du clairon des fourmis qui est lui même un prédateur des scolytes. Une étude à son sujet a été com manditée par la D.R.A.A.F. L’épi démie en baisse concernant le sapin pectiné, lui aussi touché, mais par une espèce de scolyte moins agressive, est aussi une note d’espoir. “On revient à une endémie pour le sapin, c’est la bonne nouvelle de l’année” note M. Mirabel. Face à la récurrence des phéno mènes climatiques et sanitaires, comment réagissent les spécia listes de la forêt? Par tout une série d’expérimentations qu’on appelle des “îlots d’avenir”. Ces îlots d’expérimentation réalisés par l’O.N.F. sont implantés en forêt sur de toutes petites parcelles de 0,5 à 2 hectares, avec d’autres essences que celles déjà plantées.

L es sécheresses et cani cules à répétition depuis 2018, associées à l’arrivée de bio-agresseurs exo tiques (pyrale du buis, chalarose du frêne, etc.): le cocktail a été fatal pour de nombreux massifs forestiers locaux. “Tout n’est pas lié au réchauffement climatique tempère Mathieu Mirabel, res

geurs.” Si les forêts franc-comtoises sont si fragiles depuis quelques années, c’est sans doute aussi “parce qu’elles ne sont pas habituées jusqu’ici, contrairement aux forêts du Sud, à subir de tels stress hydriques. Avec moins d’eau depuis plusieurs années, les arbres font plus de racines, moins de croissance et moins de feuilles” détaille l’ingénieur de la D.R.A.A.F. Ce qui ne présume pas forcé ment de la suite car “les forêts ont aussi une force de résilience et d’adaptation.” Le plus connu de ces insectes - et le plus ravageur depuis plusieurs années - reste le scolyte pour les forêts de résineux, qui cause non seulement des dépérissements mais plus grave, des mortalités de massifs entiers. Il suffit d’aller

se promener du côté de Chapelle des-Bois ou de Mouthe pour se rendre compte, grandeur nature, des dégâts subis par les forêts de résineux avec dans certaines par celles plus de 50 % des épicéas scolytés. C’est moins le cas dans le Haut-Doubs Horloger entre Morteau et Maîche. Depuis 2018, 20 % de la surface forestière du massif jurassien franc-comtois ont ainsi été scolytées ou récoltées. Les attaques de ces scolytes dits typographes sont d’autant plus importantes en cas de fortes cha leurs. “Ce sont des parasites de faiblesse poursuit Mathieu Mira bel. Ils prolifèrent dès lors qu’un arbre est fragilisé.” Depuis 2022-2023, l’épidémie de scolytes s’est propagée au-delà de 1 000 m d’altitude. Les dégâts en forêts n’ont jamais été aussi importants qu’en 2024, provoqués par les attaques en 2023. Les spé

“Une autre stratégie consiste à ne pas changer d’essence par exemple dans une forêt de hêtres, mais à faire venir du hêtre du sud de la France qui aura peut-être un patri moine génétique plus adapté aux fortes chaleurs.” On appelle cela de la “migration assistée”. Dans les forêts d’altitude, on aura dés ormais tendance à mélanger un peu plus les essences. La gestion forestière étant celle du temps long, les spécialistes de la question restent très modestes par rapport à l’adaptation des massifs à ces récentes évolutions climatiques et sanitaires. Les efforts qu’ils déploient aujourd’hui pour diversifier les essences seront visibles dans plusieurs décennies. La sylviculture n’est pas une science de l’immédiat. n J.-F.H.

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ORIQUE DES Rép

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ponsable du dépar tement de la santé des forêts à la D.R.A.A.F. Bour gogne-Franche Comté. Les bio-agres

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Tout une série d’expérimentations qu’on appelle des “îlots d’avenir”.

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seurs sont liés à la mondialisation et aux échanges. Le dernier exemple en date est l’arrivée à l’automne dernier dans notre région de la punaise réticulée du chêne, origi naire des États-Unis, qu’on a détec tée à proximité des aires d’auto routes. Typiquement, c’est un insecte qui est arrivé avec des voya

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