Journal C'est à dire 290 - Janvier 2023
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Les nouvelles ambitions de Péquignet Morteau
L’entreprise horlogère mortuacienne s’est adossée à un fonds d’in vestissement familial pour se donner les moyens de conquérir de nouveaux marchés. Le plan de développement de l’horlogerie française pourrait être une opportunité supplémentaire pour la marque.
U ne des marques les plus emblématiques de l’horlo gerie française a amorcé un nouveau virage. Créée en 1973 par Émile Péquignet, reprise il y a quelques années par Dani Royer, l’entreprise horlogère mortuacienne à depuis l’an dernier un nouvel action naire majoritaire avec l’ar rivée de ce qu’on appelle dans le milieu des affaires un “family office”, c’est-à-dire un fonds d’investissement familial. Baptisé Enowe, ce fonds est dirigé par Hugues Souparis, un homme d’affaires originaire du Sud-Ouest qui a fait for tune en revendant en 2019 sa société spécialisée dans l’authentification des
documents officiels. Il est désormais, de fait, le nouveau patron de Péquignet, Dani Royer étant le directeur opéra tionnel. “Notre fonds d’investissement s’articule autour de trois axes de déve
loppement : la croissance et l’innovation verte, l’impact sociétal, et l’excellence. C’est dans ce troisième volet que s’inscrit notre prise de par ticipation chez Péquignet. L’idée est de sélectionner qua
Péquignet participera au salon Watches and Wonders à Genève.
Dani Royer, à droite, et Hugues
Souparis, le dirigeant du fonds d’investisse ment désormais majoritaire dans le capital de l’horloger Péquignet.
tre ou cinq marques comme Péquignet qui ont une cinquantaine d’années, qui fabriquent en France des objets de la vie quotidienne. Péquignet est la pre mière des marques que nous avons sou haité aider à se développer, l’idée étant de mutualiser toutes nos compétences
Dans ce nouveau contexte, Morteau a bien vocation à rester le cœur de l’ac tivité de Péquignet en termes de conception, fabrication, logistique et service après-vente. Les locaux de la rue du Bief ont récemment été réamé nagés pour que se déploie un nouvel atelier d’assemblage. L’entreprise emploie actuellement 27 salariés. Le fonds Enowe partage sur ce dossier l’ambition du gouvernement français à travers son plan de développement de l’horlogerie avec un objectif prin cipal : “renforcer encore le “fabriqué en France”, créer plus de valeur ajoutée en France, et qu’on vienne chercher en France, non pas que des sous-traitants, mais aussi de l’innovation” résume Hugues Souparis. n J.-F.H.
deurs en France. Le premier étage de la fusée est déjà en place : Enowe a déjà embauché un directeur du marketing digital, une directrice artistique et une équipe juri dique, basés au siège parisien du fonds d’investissement. Et une première bou tique a ouvert ses portes à Paris, rue de Rennes. Pour la première fois également de son histoire, l’horloger mortuacien par ticipera en mars au salonWatches and Wonders à Genève (l’ex-S.I.H.H.). Péquignet y sera ainsi le seul porte drapeau du Made in France dans ce temple de l’horlogerie haut de gamme suisse. “On présentera à cette occasion de nouveaux modèles et d’anciens modèles qu’on a modernisés” note Dani Royer.
au bénéfice des marques que nous sou tiendrons” résume Hugues Souparis. Le fonds Enowe dispose pour cela de fonctions supports comme un contrô leur financier, des juristes, une direction artistique et marketing de haut niveau, censés aider les entreprises à passer un cap dans leur croissance. “Péquignet a connu une histoire compliquée, nous allons faire ce qui est dans nos moyens pour lui donner les moyens de se redé ployer en matière de recherche et déve loppement, marketing, design…” ajoute M. Souparis. Avec une nouvelle ambi tion : le développement à l’internatio nal. “On souhaite développer en effet l’export et le e-commerce.” Le principal du chiffre d’affaires de la marque se fait encore aujourd’hui via le réseau traditionnel des distributeurs et reven
L’atelier de la manufacture a été réaménagé (photo S. Dourlot-Région B.F.C.).
Perspectives
La Suisse aura besoin de près de 4 000 horlogers d’ici 5 ans
Une enquête récente de la Convention patronale de l’industrie horlogère suisse détaille les besoins de la filière pour les prochaines années. L’aspiration de main d’œuvre par nos voisins ne ralentira pas.
D ans une longue enquête très fournie, la Convention patro nale de l’industrie hor logère suisse (C.P.) recense les besoins en personnel de la filière horlogère d’ici 2026. Une quin zaine de métiers de l’horlogerie sont recensés, et près de 150 entreprises horlogères ont répondu à l’enquête, comptant au total près de 37 000 emplois. Dans le contexte actuel post Covid, troublé par les difficultés d’approvisionnement enmatière première et dans un marché mondial secoué par la guerre en Ukraine, les perspectives de la branche horlogère suisse restent très optimistes malgré les doutes. “La volonté de consom mation des produits microtech niques suisses de qualité semble se maintenir. Par conséquent, les
perspectives à court et moyen terme prévoient des effectifs en hausse” résume prudemment la C.P. qui rappelle que dans les trente dernières années, “l’in dustrie horlogère et microtech nique a presque doublé ses effec tifs, passant de 30 000 à plus de
sionnels. “D’ici les 5 prochaines années, le secteur de la produc tion horlogère enregistrera entre 2 369 et 2 737 départs à la retraite” note l’enquête qui ajoute que “les métiers techniques ont de plus en plus de mal à trouver des jeunes intéressés au domaine
Les entreprises horlogères suisses
enregistreront près de 2 400 départs en retraite dans les cinq ans à venir (photo archive Càd).
57 000 travailleurs.” Et depuis plusieurs années, les formations horlogères suisses pei nent à alimenter à elles seules les besoins. “Le nombre d’opéra teurs en horlogerie for
et qui ont les compé tences et lamotivation pour se lancer dans un apprentissage.” Rien que sur le métier d’opérateur en horlo gerie, l’analyse de la C.P. met en évidence
Une augmentation des besoins de formation
“de 12,5 % d’ici 2026.”
branche dans les 5 prochaines années.De quoi donner des pers pectives à tous les élèves formés au lycée deMorteau ainsi qu’aux adultes sortants de l’A.F.P.A. de Besançon ou du G.R.E.T.A. de Morteau et de Besançon. n J.-F.H.
veaux postes de travail. Mais c’est sans compter sur les 2 369 départs en retraite prévisibles dans le même laps de temps. Ce qui préfigure donc que l’horlo gerie suisse aura besoin de for mer ou de recruter 3 855 nou veaux professionnels dans la
émailleurs, ingénieurs-designers en produits horlogers… sont également concernés. Au total, laConvention patronale table sur une augmentation des besoins de formation initiale “de 12,5 % d’ici 2026.” Ce qui repré sente concrètement 1 466 nou
qu’il faudra dans les 5 prochaines années 1 090 opérateurs en hor logerie, soit 218 personnes à for mer tous les ans. Les métiers de régleurs, rhabilleurs, horlo gers C.F.C. “méthodes indus trielles”, graveurs, polisseurs, termineurs en habillage horloger,
més n’est toujours pas suffisant pour atteindre les objectifs” confirme la Convention patro nale dont une des principales inquiétudes dans un pays où la démographie n’est pas orientée à la hausse est le départ en retraite de nombreux profes
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