Journal C'est à dire 289 - Décembre 2022

D O S S I E R

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À Plastivaloire, la situation est toujours aussi tendue Morteau

Le plus gros employeur industriel du Val de Morteau peine toujours à attirer la main-d’œuvre dont il a besoin. Malgré toutes les actions déployées. Sa directrice ne désespère pas.

U n responsable qualité, un technicien qualité, des outil leurs pour les meules, des opérateurs… La liste est longue des postes pour lesquels l’en treprise Plastivaloire (ex-Fabi) cherche des profils, quasiment en permanence car comme le déplore Florence Richard, la directrice du site mortuacien, “le turn-over est important, nous n’arrivons pas à fidéliser notre personnel” et ce, malgré les formations en interne pro posées à chaque nouvelle recrue. “On

Doubs à un taux de chômage particu lièrement bas. Plastivaloire ressent également des difficultés croissantes pour fidéliser ses intérimaires qui ont, selon la direc tion, beaucoup de mal à accepter les contraintes horaires d’une usine qui fonctionne en 3 X 8. De nombreux départs en retraite ont du mal à être remplacés, si bien que pour tenter de pallier l’absence de ces salariés expérimentés, Plastivaloire donne sa chance à des personnes moins

qualifiées avec une formation à la clé. Là encore, avec un succès mitigé. Ce n’est pourtant pas faute de déployer des efforts tous azimuts pour tenter de séduire : participation aux opérations Cap’Emploi à

forme beaucoup de monde et il arrive régulièrement que des salariés nous quittent au bout de deux mois seulement. Nous perdons donc beaucoup de temps” poursuit la diri geante. Actuellement, une quinzaine de postes de travail

Des logements pour héberger des travailleurs étrangers.

Florence Richard, la

directrice du site Plastivaloire de Morteau (photo archives Càd).

bonne trentaine d’intérimaires. Après un mois d’octobre intense, un mois de novembre correct, la fin d’année s’an nonçait plus compliquée en termes d’activités. Plastivaloire souffre toujours des arrêts répétés de la production chez ses clients qui subissent des pénu ries de composants. Une inquiétude supplémentaire pour un site de pro duction qui reste un des symboles industriels du Val de Morteau. n J.-F.H. ces difficultés de recrutement ? C.D. : Clairement, l’une des pro blématiques est l’accueil déplorable des conducteurs chez les clients, les chargeurs, etc. Cela s’est com plètement dégradé depuis le Covid. On a quand même passé un an sans douches ni restaurants. Des gens dont c’est la passion peuvent être démotivés par cet accueil, ce manque de reconnaissance au quo tidien. Clairement, on a l’impres sion qu’on dérange. L’image du métier ne permet pas d’attirer, encore moins les jeunes. On amé liore les conditions matérielles mais d’un autre côté, on assiste à une dégradation de l’environne ment externe. Notamment les inci vilités sur la route. Pourtant, les avantages du métier sont nom breux : autonomie, ambassadeur de la marque, une rémunération à sa juste valeur. En revanche, il faut travailler et faire des heures. C’est un métier qui se développe, l’activité est là, on a besoin de renouveler notre personnel, d’être attrayant. Ce qu’on fait est peut être méconnu. Il y a une fausse image des métiers du transport : toute une chaîne logistique existe, du personnel de quai, des mana gers, des exploitants et tous les métiers back-office administra tifs…On est un acteur économique du territoire, c’est important qu’on ne soit pas que les camions qui traversent les Fins ou qui patinent au Bas-de-la-Chaux quand il y a de la neige. n Propos recueillis par L.P.

aussi appel à du travail le samedi et aux heures supplémentaires. On essaie d’actionner tous les leviers” résume la patronne du site qui avait même envi sagé de louer des logements à Morteau pour héberger des travailleurs étran gers venus des autres sites européens de Plastivaloire. “Mais on a été confron tés à la difficulté d’obtenir des visas pour eux.” L’effectif de Plastivaloire Morteau est actuellement de 221 salariés, dont une

pour les jeunes, poursuit Florence Richard. On a de temps en temps des stagiaires mais si on les embauche, il leur faut un logement. Et c’est là que souvent ça coince...” La conséquence de cette situation, c’est le risque d’une désorganisation de la production, si bien que la direction est parfois contrainte de solliciter les sala riés du bureau pour tenir un poste devant une machine afin d’honorer les commandes dans les temps. “On fait

Morteau, Besançon ou même Montbé liard, intervention auprès des lycéens pour faire connaître les annonces de recrutement (notamment au lycéeMan dela d’Audincourt qui a une section plasturgie), participation à la récente Semaine de l’industrie avec un collège du Russey, portes ouvertes organisées au printemps dernier…Les initiatives se multiplient. “Mais nous sommes confrontés ici à une difficulté supplé mentaire, c’est la question du logement

manqueraient pour assurer le travail. L’augmentation du prix des carburants a accentué le phénomène : “Il y a des gens qui nous quittent pour aller en Suisse, mais il y en a aussi qui sou haitent chercher un emploi plus proche de chez eux” , à cause des coûts de dépla cement. Il y a aussi ceux, de plus en plus, qui changent de métier. “Ce phé nomène a été accentué depuis deux ans” affirme Florence Richard, confrontée comme toutes les entreprises du Haut

Les Fins

“Des conducteurs peuvent être démotivés par le manque de reconnaissance”

C’ est à dire : Aujourd’hui, quelles sont les difficultés de recrutement des Transports Idoux ? Cécilia Dioley : Il nous manque des conducteurs routiersmais aussi des exploitants. Ces collaborateurs qui managent les conducteurs, pla nifient les journées de transport, et les flux sont rares. Ce métier sédentaire demande de la dispo nibilité et énormément de compé tences. L’exploitant est au carrefour des clients, de la direction et des conducteurs. C'est un métier inté ressant mais exigeant, autonome avec des responsabilités. Il n’y a pas énormément d’écoles et les ses sions ont du mal à être remplies. De plus, sur cette partie exploita tion, nous souffrons d’un problème de compétitivité par rapport à la Suisse. Au niveau des conducteurs, l’année 2021 a été vraiment pénurique. Jusqu’en septembre 2021, il y avait peu de turn over et les C.V. tom baient régulièrement. Mais entre septembre 2021 et avril 2022, qua tre conducteurs sont partis en retraite anticipée (à partir de 57 ans, N.D.L.R.). Et puis, certains

Le secteur des transports se heurte, lui aussi, à des problèmes de recrutement. Pour Cécilia Dioley, gérante des Transports Idoux aux Fins, les métiers du transport souffrent d’une fausse image et d’un manque de reconnaissance au quotidien.

candidats jouent la carte de la pénu rie, parfois les négociations sala riales ne sont ni entendables ni réalisables. Càd : Quelles solutions appor tez-vous ? C.D. : Actuellement, il ne nous manque plus qu’un conducteur. Nous venons d’en recruter deux, de manière différente que d’habi tude. Des conducteurs formés, avec tous leurs permis qui peuvent être opérationnels en 15 jours, ces per sonnes on ne les trouve plus. On a donc recruté deux femmes en reconversion professionnelle. Leur formation de trois mois est payée par Pôle Emploi, sous réserve d’une embauche à la fin. C’est une bonne opération pour tout le monde, aujourd’hui, ce sont des conduc trices autonomes. En exploitation, nous misons depuis cinq ans sur l’alternance. Cette année, nous avons transformé en C.D.I. l’alternance d’une per sonne. Nous jouons aussi sur d’au tres choses pour fidéliser les col laborateurs : la cohésion d’équipe, l’ambiance au sein de l’entreprise.

Cécilia Dioley, gérante des Transports Idoux aux Fins dénonce le manque de reconnaissance des métiers du transport.

Càd : Comment expliquez-vous

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