Journal C'est à dire 284 - Juin 2022
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Flânerie dans le quartier des tanneurs Saint-Hippolyte On dit qu’à Saint-Hippolyte les tanneries sont aussi vieilles que la ville. La commune qui s’appelait à l’époque “Villa Sancti Hippolyti” y est mentionnée dès l’an 1040.
A u XIV ème siècle, la Comtesse de la Roche, Dame de Saint-Hip polyte, souhaitait déplacer les tanneries hors des murs de la ville fortifiée. “Elle prétendait alors que cette activité était à l’origine de la peste. Il faut aussi avouer que le tannage dégage une odeur pestilentielle” , commente Michèle Racine. Mémoire de la cité et collectionneuse de documents historiques, elle exerce une activité d’antiquaire dans ce quartier. “En fait monmagasin est situé dans l’an cienne maison d’habitation des Briot. Ils exercèrent cette industrie depuis le XVII ème siècle jusqu’en 1922, faute de repreneur” , précise-t-elle. La tannerie Briot était ins tallée au bord de la rivière, car il fallait beaucoup d’eau claire. On allait alors chercher les peaux de bœufs et vaches de Besançon jusqu’en Suisse. “La première opération consistait à les rincer, puis à enlever les poils, et enfin à les écharner (racler) avec de grands couteaux qui pou vaient mesurer jusqu’à unmètre” , poursuit Madame Racine. Ce dernier travail extrê mement minutieux ouvrait la voie à la certification de “Maître Tanneur”. Puis les peaux trempaient dans des fosses intérieures avec de l’écorce de chêne broyée.Michèle Racine possède une belle
Côté rue, le système de ventilation pour le séchage des peaux.
La Vallée du Dessoubre et son riche passé industriel La Voyèze
Ultime vestige d’une industrie qui tirait son énergie de l’eau de la rivière, l’usine Bernardot produit sur le site de la Voyèze, commune de Vauclusotte, du mobilier sur-mesure.
jusqu’en Algérie” , précise-t-il. 1955 signa l’arrêt de mort de la plupart de ces entreprises avec l’arrivée des chaises en métal et formica. “Mon grand-père céda l’entreprise en 1954 à son gendre Léon Bernardot et en 1968, nous avons arrêté de produire nos chaises et ouvert un premier magasin à Audincourt” , note Jean-Pierre Bernardot. Pour lui, l’industrie française dumeuble est à l’agonie. Les gros fabricants fran çais ont quasiment disparu faute d’in vestissement. Le passage à l’euro a rendu les entreprises moins compéti tives par rapport à des concurrents à la main-d’œuvre moins chère (Pologne, Portugal, Roumanie…). Il fallait donc se réinventer. “Au début des années 1980, nous avons ouvert notre belle sur face d’exposition de Voujeaucourt, puis à Belfort et en Alsace” , se souvient-il. Confrontée à la difficulté de recrute ment de personnel spécialisé, la firme a investi à la Voyèze dans de belles machines de production. “Pour péren niser l’entreprise, nous avons misé sur de la fabrication sur-mesure” , confie l’entrepreneur. Thierry Grillot, chef d’atelier, nous présente une table réa lisée sur place. Une dizaine de salariés assurent ici la production, la société employant au total une trentaine de personnes. “Nous comptons beaucoup sur le bouche-à-oreille qui nous permet d’élargir notre clientèle jusqu’en Suisse” , note Jean-Pierre Bernardot. Ils ont également investi le domaine du mobi lier professionnel en fabricant des banques d’accueil personnalisées. “Il est par contre très difficile pour des
L e printemps venu, cyclistes, motards, pêcheurs et pro meneurs en quête de fraî cheur s’emparent de la route sinuant au fond de la vallée encaissée. Tous sont loin de se douter du riche passé industriel des lieux. “Jusqu’au milieu des années 1950, il y avait le long de la rivière plus de 10 chaiseries et bien d’autres à Charmoille et Cour Saint-Maurice” , rappelle Jean
Pierre Bernardot. Il est un des membres de la fratrie (avec Gilles, Michel et Françoise) à la tête de l’établissement. La proximité du bois et de l’eau, doublée d’un réel savoir-faire des ouvriers locaux permirent la naissance de cette industrie. Son grand-père, Joseph Rous sey, s’était installé à laVoyèze (signifiant “Voie aisée”) en 1934. “À cette époque, les chaises partaient de la gare de Saint Hippolyte dans toute la France et même
Thierry Grillot, chef d’atelier & Jean-Pierre Bernardot présentent une de leurs dernières créations.
pour attirer l’attention des élus sur une simplification administrative des marchés publics et à une plus large collaboration des collectivités territo riales avec les entrepreneurs locaux. n
petites structures comme les nôtres d’accéder aux marchés publics. Les appels d’offres sont complexes et on en arrive à voir des E.H.P.A.D. de la région équipés par des fabricants polonais” , regrette Jean-Pierre Bernardot. Il pro fite donc de cette séquence électorale
Vue aérienne du site de pro
duction à la Voyèze.
Ph.D.
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