Journal C'est-a-dire 279 - Janvier 2022
L A P A G E D U F R O N T A L I E R
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“Ce sont nos différences qui font nos forces” Diplomatie
Basé à Lyon, Pascal Bornoz est Consul général de Suisse en France. En cela, il est le représentant des plus de 100 000 citoyens suisses installés dans une circonscription qui couvre notamment le département du Doubs. Tour d’horizon des sujets qui occupent le diplomate helvétique au quotidien.
lement la question des déplace- ments France-Suisse et Suisse- France à l’heure des restrictions sanitaires ? P.B. : Nous actualisons régulièrement notre site Internet sur la base des mesures mises en place par nos deux gouvernements et nous traitons des demandes qui nous parviennent quo- tidiennement par téléphone ou cour- riel. Càd : Risque-t-on d’aller vers plus de restrictions à partir de ce mois de janvier et les travailleurs fron- taliers pourraient-ils être touchés ? P.B. : Pour l’instant, pas à ma connais- sance. Càd : Connaissez-vous les princi- pales raisons d’installation de vos compatriotes suisses en France ? P.B. : Elles sont diverses selon les sources : proximité géographique, lin- guistique et culturelle, traditionmigra- toire par exemple pour le commerce ou l’artisanat, ou encore logements plus abordables. Càd : Avec une très longue frontière franco-suisse, quelles sont les spé- cificités de ce territoire en termes d’échanges transfrontaliers ? P.B. : La frontière entre la France et la Suisse s’étale en effet sur 572 km, dont 50 sur le Léman, et 230 avec la Bourgogne-Franche-Comté. Elle longe également huit cantons suisses (BL, BS, SO, JU, NE, VD, GE, VS) et six départements français (Haut-Rhin, Territoire de Belfort, Doubs, Jura, Ain et Haute-Savoie) de trois régions fran- çaises (Grand Est, B.F.C. et A.U.R.A.). Les échanges sont donc forcément riches et intenses et se caractérisent par des contacts étroits entretenus à tous les niveaux et par une coopération trans- frontalière bien institutionnalisée, per- mettant ainsi d’anticiper ou de régler d’éventuelles difficultés. De nombreux mécanismes de coopération existent (Arcjurassien.org, Conseil du Léman… ). Il est à noter qu’ensemble, les trois régions frontalières A.U.R.A., B.F.C. et Grand Est concentrent près de lamoitié du volume des échanges commerciaux entre nos deux pays. Càd : Des résidents suisses en France travaillent-ils côté suisse et sont-ils considérés dès lors comme des travailleurs fronta- liers ? les frontaliers de nationalité suisse n’en ont pas besoin. Concernant le chô- mage, pour les frontaliers travaillant en Suisse et vivant en France, en cas de chômage en Suisse à 100 %, tout frontalier, quelle que soit sa nationalité, qui réside en France, bénéficie des pres- tations chômage françaises. S’il y a chô- mage partiel, c’est l’employeur qui se charge de faire les démarches auprès des institutions suisses. Les droits au chômage sont les mêmes pour tous les travailleurs, suisses et étrangers. P.B. : Le cas échéant “oui avec un statut particulier”. Par exemple, il est indispensable d’avoir un permis de travail en Suisse, pour travailler dans une entreprise. En revanche,
C’ est à dire : Quel est le péri- mètre d’action du consulat général de Suisse à Lyon ? Pascal Bornoz : Le consulat général de Suisse, avec son équipe de 21 colla- boratrices et collaborateurs est présent à Lyon depuis plus de deux siècles. Cette représentation encourage le dia- logue de proximité et promeut les inté- rêts de la Suisse dans une circonscrip- tion qui regroupe les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne- Franche-Comté. Cette circonscription recense plus de la moitié des quelque 200 000 concitoyennes et concitoyens établis en France à ce jour. Ce dernier constat fait d’ailleurs de ce consulat général la plus importante représen- tation consulaire suisse au monde en termes de compatriotes enregistrés. Si une partie essentielle de nos activités quotidiennes est étroitement liée à l’en- cadrement de notre communauté, domicile en France, nous suivons éga- lement activement l’évolution de la coo- pération soutenue et diversifiée entre de nombreux partenaires de part et d’autre des 500 kilomètres de frontière commune avec la France, duTerritoire de Belfort au nord-est à Saint-Gingolph au sud-est. Càd : Pouvez-vous décrire en quelques mots le travail au quoti- dien duConsul général et du consu- lat ? P.B. : La mobilité transfrontalière, l’énergie, l’environnement, le dévelop- pement durable commun constituent un échantillon de dossiers qui retiennent notre attention et, au besoin, sont traités au plan régional ou de pair avec les autres membres de l’équipe de Suisse Bio express l Pascal Bornoz est né en 1964, il est originaire de Tévenon dans le can- ton de Vaud (entre Sainte-Croix et Yverdon) l Il est entré en 1994 au service du Département fédéral des affaires étran- gères et a été en poste successive- ment à Barcelone, Santiago du Chili, Bangkok, Riyad, ainsi qu’auprès de la Direction des ressources puis de la Direction politique (division Afrique du Nord et Moyen-Orient) à Berne l Nommé Consul général à Vancou- ver en 2016, il est depuis septem- bre 2019 chef de poste à Lyon l Il est marié et père de 3 enfants notamment l’établissement de documents d’identité, le trai- tement de cas d’état civil et de citoyenneté, d’assistance aux personnes en difficultés, de questions notariales ou juri- diques, de sécurité sociale, ou encore relatives à la prise de
en France, que cela soit à Paris, Stras- bourg ouMarseille.Nous accompagnons d’autre part les entrepreneurs et artistes suisses de passage dans notre circons- cription et favorisons les échanges aca- démiques et scientifiques. À noter que dans le cadre du déploiement de nos activités quotidiennes nous pouvons nous appuyer sur l’expertise et le soutien de deux Consuls honoraires, l’un à Annecy, l’autre à Besançon. En tant que Consul général, j’assume la res- ponsabilité sur l’ensemble des activités, je joue un rôle actif dans la promotion des intérêts de la Suisse, respectivement du développement commun, et je suis l’interlocuteur privilégié des autorités locales dans le cadre des relations régio- nales transfrontalières. Càd : Vous êtes-vous déjà déplacé dans le Haut-Doubs ? P.B. : Bien sûr, plusieurs fois, notam- teau où j’ai visité une des seules écoles de formation qui délivre un diplôme transfrontalier : le lycée horloger Edgar- Faure. Càd : Le territoire dont vous avez la responsabilité couvre les deux régions Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté, plus étendu que la Suisse entière. Com- ment assurez-vous une “présence” sur tout le territoire ? P.B. : La superficie de l’arrondissement consulaire est effectivement trois fois supérieure à celle de la Suisse. Un réseau de contacts à divers niveaux, deux consuls honoraires (Annecy et Besançon), quelque 33 clubs ou asso- ciations suisses, des déplacements (entretiens officiels, participation à des réunions institutionnelles, etc.) et le soutien à l’organisation d’événements ponctuels (principalement de nature culturelle) contribuent à soigner un dialogue de proximité et à marquer notre présence sur le territoire. Càd : Combien de citoyens suisses sont-ils établis sur votre territoire, notamment en Franche-Comté et dans le Doubs ? P.B. : Sur les quelque 200 000 compa- triotes établis en France, environ 108 000 résident dans l’arrondissement du consulat général de Suisse à Lyon. Dans le détail, environ 82 000 en Auvergne-Rhône-Alpes et environ 26 000 en Bourgogne-Franche-Comté, dont 14 000 dans le Doubs, 3 500 dans le Jura et 2 900 dans le Territoire de Belfort. Ce sont des valeurs stables. ment à Pontarlier où j’y ai ren- contré le maire, la députée Annie Genevard ainsi que les autorités douanières et poli- cières, et pour découvrir les activités et les locaux pontis- saliens de la Chambre de com- merce et d’industrie. Et à Mor-
“14 000 citoyens suisses vivent dans le Doubs.”
Pascal Bornoz est Consul général de suisse à Lyon depuis septembre 2019. Il devrait rester en poste au total quatre ans.
Càd : En quoi les cultures suisses et françaises se ressemblent-elles, en quoi diffèrent-elles ? P.B. : Nous avons évidemment des dif- férences. Comme unAlsacien n’est pas unNormand ou un Provençal, et comme un Vaudois n’est pas un Bernois. Mais le plus intéressant est de voir que dans nos relations transfrontalières, ce sont nos différences qui font nos forces et enrichissent nos échanges. Le rappro- chement récent de deux entreprises horlogères, l’une suisse, l’autre française (N.D.L.R. : La Joux-Perret et Humbert- Droz) en est une parfaite illustration. Je m’aperçois tous les jours que plus on se rapproche de cette soi-disant fron- tière, plus on se rend compte que les relations sont concrètes et pragma- tiques, avec beaucoup de succès qui passent sous les radars des structures administratives officielles. Ces innom- brables collaborations franco-suisses mériteraient d’ailleurs d’être mieux connues.Au nombre des récents succès communs, je peux citer le Parc naturel régional du Pays Horloger, l’inscription du savoir-faire horloger au patrimoine mondial de l’Unesco, résultat d’un ensemble de mobilisations de tout l’Arc jurassien, ou encore la réserve de Clair- bief le long du Doubs. n
Càd : Dans quels secteurs s’instal- lent le plus les citoyens suisses en France ? (région Franche-Comté, Haut-Doubs, Genevois français, Lyon ?..). P.B. : Principalement dans les dépar- tements français voisins de la frontière suisse (bassin de vie) : Haute-Savoie, Ain, Jura, Doubs,Territoire de Belfort. Càd : Suivez-vous les discussions autour de l’amélioration des liai-
sons franco-suisses par la route ou par le rail entre la Franche-Comté et la Suisse voisine ? P.B. : Oui, bien sûr, à l’instar ou sur mandat spécifique de l’office fédéral des transports.
“Beaucoup de succès franco-suisses passent sous les radars.”
Càd : Quel est votre avis sur les structures de collaboration entre collectivités françaises et suisses (genre Aire de proximitéMont d’Or- Chasseron côté Pontarlier-Vaud, ou Agglomération urbaine du Doubs côté Morteau-La Chaux-de- Fonds ?). Ont-elles une pertinence ? P.B. : Toute action visant à promouvoir le développement commun est perti- nente à mon sens, et ces structures le sont.
Propos recueillis par J.-F.H.
Càd : Comment gérez-vous actuel-
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