Journal C'est à dire 276 - Octobre 2021
L A P A G E D U F R O N T A L I E R
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Les frontaliers privés de télétravail à partir du 31 décembre Emploi
Alors que le télétravail s’est largement généralisé, le règlement européen interdit aux frontaliers de travailler plus de 25 % de leur temps à leur domicile hors de Suisse. Ce qui pourrait poser quelques problèmes dès 2022. Des sénateurs interpellent l’Union européenne.
au change. Gardera-t-elle son collaborateur ? Cherchera-t-elle un (nouveau) local pour son employé ? Qu’en sera-t-il du pré- lèvement à la source dans les cantons suisses qui y ont recours ? Autant de questions pour l’instant sans réponses. Engagée sur ce dossier, la par- lementaire du Doubs Annie Genevard demande qu’une révi- sion des accords européens soit engagée par la France. Le dossier est d’ailleurs dans les mains des sénateurs qui ont émis une pro- position de résolution euro- péenne visant à rendre pérenne l’augmentation du temps de télé- travail. La sénatrice du Doubs Annick Jacquemet a participé à ce travail qui doit permettre d’enclencher au niveau européen les négociations avec la France puis la Suisse dans le cadre des accords bilatéraux. Le rapport demande que l’Union euro- péenne revoie à la hausse jusqu’à au moins deux jours de travail et invite le gouvernement fran- çais à harmoniser les conven- tions fiscales avec les États qui lui sont frontaliers. Pour l’ins- tant, ce dossier n’a pas encore été ouvert par l’Union euro- péenne. n E.Ch. Pour illustrer l’excellence de la filière horlogère locale, le prix moyen d’une montre exportée par la Suisse est proche de 1 000 dollars, contre à peine 4 dollars pour une montre chi- noise. “En conséquence, si sept montres vendues sur dix en France sont chinoises, au niveau mondial, la Suisse représente la moitié des exportations mon- diales en valeur” ajoutent les statisticiens. Avec le doublement en valeur des exportations de l’horlogerie suisse ces vingt dernières années, les employeurs helvé- tiques offrent des rémunérations très attractives à une main- d’œuvre qualifiée et toujours plus nombreuse. Ainsi “en dix ans, le nombre de frontaliers travaillant dans ce secteur a crû de 5 000 postes.” Certains territoires comme le secteur de Maîche cumulent une part importante de fronta- liers horlogers et un tissu hor- loger local significatif. “Leur degré de dépendance à la filière est alors important, ce qui les rend fragiles aux retournements de conjoncture.” Dans le Pays de Maîche, on dénombre par exemple 14 % des actifs en emploi dans les établissements horlogers locaux et 20 % dans l’horlogerie suisse. n J.-F.H.
L e télétravail, inimagi- nable il y a quelques années pour un fronta- lier, s’est finalement imposé en Suisse et notamment dans le secteur de l’horlogerie. Les salariés y trouvent un confort, un gain de temps, un
de leur lieu de domicile. Dans le cas français, ce n’est pas une paille car être soumis aux coti- sations sociales françaises coû- terait plus du double aux entre- prises…mais aussi aux salariés. Le régime dérogatoire lié à la Covid-19 qui permet de télétra- vailler jusqu’au
avantage écologique. Pour la plupart de ceux qui ont goûté à ce nouveau mode de travail, l’expérience est à prolonger car la
15 novembre vient d’être repoussé jusqu’au 31 décembre.Une bonne nouvelle. Ensuite ? C’est le flou. Un salarié qui
Les sénateurs interpellent
le Conseil européen.
travaille à Neuchâtel se dit inquiet : “L’entreprise pour laquelle je collabore a décidé de ne plus louer les bureaux dans lesquels je travaillais parce que nous sommes, moi et des col- lègues, en télétravail. Que va-t- il se passer si je n’ai plus de poste de travail à Neuchâtel ?” inter- roge-t-il. Juridiquement, son entreprise - et le salarié - devraient payer les cotisations sociales en France. Financière- ment, cette dernière va y perdre
durée des trajets est souvent considérable et les entreprises indiquent avoir gagné en pro- ductivité et compétitivité. C’est sans compter sur la régle- mentation européenne qui inter- dit aux frontaliers de travailler hors de Suisse plus d’un jour par semaine. La réglementation européenne (avril 2004) estime que le télétravail ne peut pas représenter plus de 25 % du temps de travail sous peine d’être assujetti aux assurances sociales
Si beaucoup de frontaliers ont repris le chemin de la Suisse, le télétravail s’est généralisé. Sauf que des interrogations demeurent après 2022.
Le Locle “Depuis Orchamps-Vennes, j’utilise mon vélo pour me rendre au Locle”
L’horlogerie emploie plus de 15 000 Bourguignons-Francs-Comtois Étude
L ors de l’édition du mois d’octobre de C’est à dire, un de nos journalistes a rencontré trois fron- taliers qui utilisent quotidien- nement leur vélo pour se rendre depuis Villers-le-Lac au Locle ou à La Chaux-de-Fonds, qu’il pleuve, qu’il neige, qu’il vente. Leur témoignage a fait prendre conscience à d’autres, mais sur- tout à des élus, qu’il était temps de se mettre en selle… et de favoriser l’utilisation du deux- roues dans un espace où le tout- bagnole est roi. Les habitants de La Chaux-de- Fonds vont d’ailleurs se posi- tionner sur la nécessité ou non de créer le contournement lors d’un vote prévu d’ici la fin de l’année. Pour l’instant, de part et d’au- tre de la frontière, aucune politique cyclable commune n’est engagée. À la fin de notre précédent arti- cle, il est précisé que ces cyclistes assidus reliant leurs entreprises demeurent tous àVillers-le-Lac, et qu’il paraît difficile de venir à vélo depuis Le Russey voire de Morteau. L’article du mois d’octobre consacré à ces frontaliers utilisant quotidiennement leur vélo pour rallier la Suisse a suscité d’autres témoi- gnages. Voici celui d’un habi- tant d’Orchamps-Vennes qui délivre quelques conseils.
Ils sont près de 15 400 salariés de la région à travailler dans l’horlogerie. 11 000 d’entre eux travaillent de l’autre côté de la frontière.
C ôté français en Bour- gogne-Franche-Comté, la filière horlogère emploie 3 900 salariés, principalement dans de petits établissements.Mais cette filière locale s’insère au sein d’un bas- sin d’emploi franco-suisse beau- coup plus porteur en termes d’emploi. Ainsi, sur les 15 400 actifs résidant en Bourgogne- Franche-Comté, plus des trois quarts d’entre eux exercent en Suisse, l’épicentre mondial de l’horlogerie de luxe. “Ces tra-
vailleurs frontaliers de l’horlo- gerie représentent par ailleurs un tiers de l’ensemble des fron- taliers de la région” notent JérômeMathias etYohannRené, de l’I.N.S.E.E. Bourgogne- Franche-Comté, auteurs d’un rapport récemment publié. Au total, l’Arc jurassien suisse concentre environ 30 000 actifs dans l’horlogerie. Un tiers de ces emplois horlogers suisses sont donc tenus par des fronta- liers résidant en Bourgogne- Franche-Comté.
Un frontalier nous explique comment depuis Orchamps-Vennes il utilise sa voiture, puis son vélo, pour se rendre au Locle.
frontaliers, c’est que la Région, le Département, les communes frontalières, ne veulent pas faire de réels investissements pour les frontaliers, et encore moins la commune du Locle, qui serait prête à diminuer ce flux de voi- tures mais pas sans participation active de la France” répond le frontalier. Le 23 décembre, la ligne ferro- viaire des Horlogers reprendra du service entre Morteau et La Chaux-de-Fonds après sa réno- vation côtés suisse et français. Elle pourrait résoudre les pro- blèmes d’embouteillages mais il n’en sera rien. Il n’y aura pas de trains supplémentaires et encore moins de cadencement. Quant à l’électrification totale de la ligne, il faudra repasser. C’est bien trop coûteux. n
Alexandre, collaborateur deWer- thanor au Locle, est un contre- exemple. Il demeure à Orchamps-Vennes et utilise son vélo. Précision d’importance, il transporte sa monture sur un porte-vélo. “Je me gare à proxi- mité du Col-des-Roches. Cette solution très pratique, qui me
permet d’effectuer le trajet en seulement 12 minutes du Col-des-Roches à chez Werthanor S.A., pourrait être utilisée par un très
Avec son vélo sur le porte-vélo.
grand nombre de frontaliers si des aménagements étaient pré- vus : un grand parking-relais au Col-des-Roches, un garage à vélo sécurisé, une piste cyclable” nous dit-il, tout en pointant le vrai problème : l’argent. C’est le nerf de la guerre, qui paye ? “Le vrai problème pour nous
Plus des trois quarts de ces horlogers de la région B.F.C. travaillent côté suisse.
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