Journal C'est à dire 273 - Juin 2021

P A Y S D E S A N C E Y - B E L L E H E R B E

Sancey

La ferme des plaines, le “petit paradis” de Barbara Ackerman

H ormis des étés à travailler dans les alpages, rien ne prédisposait cette dessina- trice en bâtiment et ingé- nieure en environnement à opter pour Installée sur un domaine aux multiples activités, cette Fribour- geoise d’origine a rassemblé une équipe de passionnés dans sa ferme de Sancey.

la vie à la campagne. “J’ai été conquise par l’endroit et ses paysages, mais aussi par la diversité du travail et des pro- duits” , déclare Barbara. À 600 mètres d’altitude, au-dessus du village de Sancey, l’endroit est magique. “Le corps de ferme qui fête cette année ses 240 ans a été restauré en 1982. Depuis 1984, l’exploitation est certifiée bio et labellisée “agriculture et tourisme”, ajoute la maîtresse des lieux. Barbara et son équipe valorisent le site et les produits mais loin de toute idée d’auto-

Barbara Ackerman et son frère Thomas.

suffisance. “Au contraire, nous voulons nous faire plaisir avec ce qui nous entoure et partager avec les gens” , note Thomas, son frère qui a rejoint récem- ment l’exploitation. “Ici, pas d’élevage intensif, nous sommes paysans-bou- langers” , précise Barbara. Ils produisent leur propre blé avec des

boule, piscine naturelle et la forêt toute proche promettent des vacances inou- bliables. Les enfants peuvent également participer à la tournée de distribution de nourriture aux ânes,moutons, lapins, canards, poules, oies et cochons qui peuplent la ferme. Tous les mercredis et sur réservation l’équipe propose des

mais aussi confitures, sirops, jus et com- potes des fruits du verger” , poursuit Barbara. On trouve également des tisanes, huiles et baumes confectionnés avec les plantes environnantes. Les légumes du potager sont transformés sur place. Selon arrivage, de la viande de bœuf et de mouton est disponible au magasin. Emmanuelle, Pietro, Louise, Noémie, Arnaud, René et Lotti constituent le reste de la troupe. Ils apportent chacun selon son temps disponible, leurs connaissances et leurs savoir-faire. “Nous sommes ouverts à toute idée ou initiative compatible avec le quotidien et l’environnement de la ferme” , conclut Barbara. La Ferme des Plaines et son équipe constituent un projet de vie, original et bien dans l’air du temps. n Ph.D.

semences paysannes. La farine sort de leur moulin et le ven- dredi, c’est jour de production : que du pain au levain vendu au village ou sur place. Le lieu offre 40 places d’hébergement dans des logements individuels au cœur de la ferme. “Nous pro-

promenades à dos d’âne. “Et le soir, c’est soirée pizza à la mode locale, pâte réalisée avec notre propre farine, saucisse et fro- mage du terroir et verdure du jardin” , ajoute Thomas. Il est conseillé de réserver car l’année dernière, ces soirées affichaient

“Nous voulons partager avec les gens.”

complet. Tous les produits issus de la ferme ou du voisinage immédiat sont en vente sur place. “Nous vendons bien sûr nos farines d’épeautre et de blé, nos œufs

posons beaucoup d’activités et nos gîtes sont particulièrement adaptés aux familles avec des enfants” , précise Bar- bara. Cabanes dans les arbres, terrain de

Le potager.

La folle épopée de 14 jeunes voulant fuir les nazis Surmont

En découvrant un carnet de notes détenu par son papa, Jean Piranda dévoile comment des jeunes ont quitté Sur- mont, Provenchère et Belleherbe pour fuir les Allemands à vélo en juin 1940. Un périple de 445 km que le fils retrace en hommage à son père et aux enfants du pays.

81 ans plus tard, le carnet au format 7 x 12 cm est intact, comme s’il venait d’être refermé. Les pages ne sont pas écornées, l’écriture au crayon de papier parfaite- ment lisible. Depuis la terrasse de sa maison située à Surmont, Jean Piranda manie avec pré- caution ce calepin riche des informations qu’il recèle. Il l’a

se retrouver au milieu des fuyards et des soldats sur les routes” poursuit le fils, 77 ans. Le livret de bord tenu par Xavier Piranda a la particularité de narrer un pan d’histoire locale méconnu : la débâcle de juin 1940 vécue par des jeunes de Surmont, Provenchère et Bel- leherbe. À l’époque des faits, Xavier Piranda, le père de Jean, a 20 ans. Ses deux frères Charles

Jean Piranda avec le journal de bord de son papa écrit il y a 81 ans lors de la débâcle de juin 1940.

ouvert au lendemain du décès de son papa et avec lui la boîte aux souvenirs : “Je l’ai découvert par hasard dans une commode de la maison de mes parents que je vidais après le décès de mon

et Louis ont respecti- vement 18 et 17 ans. Un après-midi du dimanche 16 juin 1940, alors qu’il rentre de Sancey, Xavier Piranda écrit dans son livre “qu’il faut partir immédiatement.” Pour

La plupart de ces jeunes n’avaient jamais quitté le secteur.

(ferme du Roz) et l’abbé Pierre Guillin rejoint à Avoudrey. “Notre père avait souvent évoqué cet épisode qui a marqué sa jeu- nesse sans que nous ayons des détails sur l’itinéraire emprunté, sinon le lieu d’arrivée. Avec le calepin, tout est précisé. Il faut remettre cela dans son contexte : c’était la guerre, les routes n’étaient pas ce qu’elles sont aujourd’hui, les vélos non plus, et la plupart de ces jeunes n’avaient jamais quitté le pays

crite dans sa totalité dans le livre “Sancey, son Vallon, ses environs, un regard sur le passé (pages 129 à 133)” publié par Jean-Marie Vivot. Le 3 juillet 1940, tous sont de retour. Sains et saufs. Jean Piranda accompagné de son épouse a tenu à reprendre l’itinéraire choisi par son aïeul en camping-car. Son seul regret : n’avoir pas pu emmener son papa. n E.Ch.

si ce n’est pour aller au conseil de révision à Clerval ou aumieux à Besançon” commente Jean Piranda, qui coule une retraite paisible dans sa maison de Sur- mont après avoir été professeur des universités à Besançon. En sept étapes, les jeunes par- courent 445 kilomètres pour arriver le 25 juin à Saint-Alban en Lozère. Ils apprennent que la guerre est finie et reprennent le 26 juin le chemin inverse. Une fabuleuse histoire retrans-

diennement.Au total, ils seront quatorze avec pour seul objectif de partir le plus loin possible. Direction l’Auvergne. Au final, treize jeunes gens montent sur le vélo, ainsi qu’un prêtre : Xavier, Charles, Louis Piranda, Gilbert, XavierVuillier-Devillers, Claude Cuenot, Justin Henriet de Surmont, Georges Schelle, EugèneVieillard, Robert Dubois, Robert Neuvemaison, Chopard (la Fricassée - Belleherbe) de Provenchère, Oneste Mauvais

papa, en juillet 2017, raconte Jean. J’ignorais totalement son existence même si mon papa et mes deux oncles nous avaient déjà parlé de leur fuite à vélo pour échapper aux Allemands. Il faut s’imaginer le stress de cette bande de jeunes qui décide de quitter leur village à vélo pour

quelle raison ? Fuir les Alle- mands, évidemment. Il explique partir avec “1 000 francs pour nous trois.” Après avoir dit au revoir à ses parents et à son oncle Albert Courgey, alors maire, “nous rejoi- gnons les Provenchère” écrit-il dans son calepin tenu quoti-

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