Journal C'est à dire 268 - Décembre 2020

É C O N O M I E

Comment le mont d’or réagit face à la crise sanitaire ? Fromage

Très peu concernée par le premier confinement arrivé en fin de campagne, la spécialité fromagère du Haut-Doubs arrive à son pic de production en pleine seconde vague pandémique. Sans trop en souffrir pour autant comme l’indique Éric Fevrier, le président du syndicat de l’A.O.P. mont d’or.

avaient utilisé toutes leurs plaques à comté. Mais aujourd’hui la filière comté souf- fre elle aussi d’un manque de lait. À la différence du comté, le mont d’or comme le morbier est un marché immédiat en gestion directe des coops. Certains ate- liers préfèrent honorer les com- mandes sur le marché du mont d’or en baissant la production à comté. Chaque atelier est libre d’agir à sa guise. Càd : Le projet d’élargisse- ment de la zone de produc- tion est toujours d’actualité ? sont proches du berceau de fabri- cation historique. Elles présen- tent des caractéristiques simi- laires en étant situées au-dessus de 700 m d’altitude avec une forte densité de peuplements résineux, en épicéa notamment. C’est une volonté des adminis- trateurs d’autoriser les com- munes répondant au cahier des charges à intégrer le périmètre de l’A.O.P. Pour autant, il n’y a pas de projet de création de nou- vel atelier à mont d’or. La pro- E.V. : Oui, on souhai- terait intégrer le sec- teur Épenoy-Avoudrey- Longemaison et celui de Maîche-Dampri- chard. Ces deux zones

le mont d’or. Ces arrêts même très ponctuels perturbent tou- jours la commercialisation. Càd : Et sur les ventes donc ? E.V. : Elles se sont plutôt bien tenues dans la grande distribu- tion. C’est plus compliqué pour les crémeries qui souffraient d’un problème de fréquentation. La situation est hétérogène dans les magasins de coop. Ils s’en sortent quand ils sont proches d’une ville, sinon ils se retrouvent confrontés au même souci que les crémiers. satisfaire la demande. La res- source en lait est connue, limitée avec un marché qui continue à s’accroître. On livre un peu moins. Il faudra s’habituer à cette situation. Càd : Impossible de trouver des alternatives ? E.V. : On pourrait faire plus de monts d’or mais au détriment des autresA.O.C. Les petits ate- liers dégageaient autrefois du lait sur le mont d’or quand ils Càd : La filière a-t- elle toujours le vent en poupe ? E.V. : Oui, on est encore sur une tendance où l’on ne parvient pas à

cédure d’extension suit le même cheminement que le cahier des charges. On espère que cela aboutisse en 2022 ou 2023. Càd : On voit toujours circu- ler des copies de mont d’or. C’est grave ? E.V. : Cela ne m’affole pas. Copie égale envie. Il faut dialoguer avec ces gens-là. Ces copies pal- lient aussi le déficit de produit. Je pense qu’il faut rester vigilant. Pour l’instant, aucune de ces copies n’est fabriquée au lait cru. Le copieur n’osera jamais s’aventurer sur ce terrain-là. Càd : Craignez-vous une pénurie de sangles avec les invasions de scolytes ? E.V. : C’est un sujet d’inquiétude sur lequel on travaille avec les sangliers et les filières fores- tières. Càd : Quid du concours pro- fessionnel pour cette cam- pagne ? E.V. : Pour l’instant, ce n’est plus d’actualité au même titre que le concours général agricole. Pas impossible non plus qu’on fasse quelque chose. On avisera selon l’évolution de la situation sani- taire. n Propos recueillis par F.C.

C’ est à dire : Que dire du début de cam- pagne avant le second confinement ?

Éric Fevrier : La production a débuté le 15 août pour une com- mercialisation des fromages autorisée depuis le 10 septembre.

Le démarrage s’annonçait pro- metteur. On était au-dessus des volumes habituels. Les ateliers avaient bien anticipé les proto- coles avec des mesures barrières qui s’appliquent d’ailleurs en permanence sur une filière au lait très sensible aux contami- nations. Pas de problème à signa- ler pour le recrutement de la main-d’œuvre. On était donc parti sur une bonne dynamique. La filière a été peu impactée par le problème récurrent de la res- source en lait. Laquelle est affec- tée par les sécheresses estivales qui deviennent presque une constante. Càd : Et à partir du 28 octo- bre ? E.V. : On a surtout été touché par la multiplication des cas contacts dans les ateliers. Cer- tains ont été touchés au point de devoir réviser leur production à la baisse. Un atelier a même dû arrêter quelques jours pour rebasculer sur du morbier ou du comté le temps de retrouver suffisamment de personnel pour

“On ne parvient pas à satisfaire la demande.”

“On a surtout été touché par la multiplication des cas contacts dans les ateliers”, indique Éric Fevrier, le président du syndicat du mont d’or.

“Je rêvais de trouver un pays où planter mes racines” Spiritueux

Après 21 ans dans le commerce international au sein du groupe L.V.M.H., François- Laurent Vitrac jeune cinquantenaire cherchait à se poser et à s’accomplir dans un projet plus personnel. Son rêve d’enfance se réalise en reprenant la dernière distillerie encore en activité à Pontarlier. Une icône à laquelle il compte bien apporter sa contribution dans le respect des traditions. Entretien.

C’ est à dire : Quelques mots sur vous ? François-Laurent Vitrac : Je suis né par très loin d’ici àNyons d’une mère allemande et d’un père français. Mes parents sont partis s’installer en Californie en 1980, j’avais 10 ans à l’époque. J’ai grandi dans la NapaValley, la région viticole la plus célèbre

Doubs et faire une visite inco- gnito à la distillerie. Cette région a tous les atouts dumonde. L’ac- cueil est incroyable.Tous les élé- ments étaient réunis pour me convaincre d’aller plus loin. Càd : C’est le début d’une nou- velle histoire ? F.-L.V. : J’ai tout à apprendre au niveau des recettes de la dis- tillerie qui ne sortaient pas du giron familial. Pour la fabrica- tion, je sais que je peux compter sur le personnel qui connaît les processus. Quand je maîtriserai tout ça, on se relancera dans des petites productions, des créations à l’image de la distillerie. Càd : Histoire d’apporter votre pierre à l’édifice ? F.-L.V. : J’ai 51 ans et j’espère piloter cette maison pendant une vingtaine d’années. Il faut toujours garder à l’esprit que tout homme n’est que de passage dans l’entreprise. Mon objectif est d’embellir cette maison pour la transmettre àmon successeur dans unmeilleur état qu’en arri- vant. C’est ce que j’ai toujours

l’idée de reprendre une biscui- terie. Au fil de mes recherches, j’ai découvert le fonds Capelia. C’est un groupe de chefs d’en- treprise qui accompagne des por- teurs de projets en leur appor- tant aussi un soutien financier. Ce sont eux qui m’ont parlé de la distillerie Guy à Pontarlier. Moi qui pensais faire un break,

de Californie. J’ai tou- jours baigné d’une façon ou d’une autre dans le monde des vins et spiritueux.

c’est tout l’inverse qui s’est produit en décou- vrant les caractéris- tiques de cette distille- rie. Il y a là un savoir-faire unique, un mode de transmission

“Je ne changerai pas les fondations.”

Càd : Pour vous, cette reprise de la Distillerie Guy est une remise en ques- tion au cap de la cinquan- taine ? F.-L.V. : Oui, en quelque sorte. C’est l’heure des bilans. Je ne regrette rien du passé mais il était temps pour moi de me consacrer à mes rêves d’enfance avec l’idée de reprendre une entreprise. Càd : Dans les spiritueux ? F.-L.V. : Pas forcément. J’avais d’abord ciblé la Bretagne avec

familial, un produit le Pontarlier Anis emblématique de toute une ville. Cette distillerie est une entreprise du patrimoine vivant avec tout l’historique autour de l’absinthe. J’ai succombé aux charmes d’une maison fondée en 1890 avec l’impression qu’elle était faite pour moi. Càd : Vous avez signé tout de suite ? F.-L.V. : Au préalable, je suis venu quatre jours en juillet der- nier pour découvrir le Haut-

Après plus de 20 ans à courir le monde au sein du groupe L.V.M.H., François-Laurent Vitrac souhaitait donner une autre direction à sa vie.

F.-L.V. : Oui, je pense qu’on peut générer encore un peu de crois- sance mais je ne changerai pas les fondations. On garde les mêmes alambics et onmaintient la production rue des Lavaux. J’attends avec impatience que la crise sanitaire soit derrière nous pour partir à la rencontre des consommateurs et des par-

tenaires, je pense notamment aux cafés, hôtels et restaurants. Càd : Tout s’annonce pour le mieux ! F.-L.V. : Je rêvais de trouver un pays où planter mes racines. Cela prend forme. n Propos recueillis par F.C.

fait.

Càd : La distillerie Guy en quelques chiffres ? F.-L.V. : Elle emploie 13 salariés. On produit 600 000 litres dont 85 % de Pont. Càd : Il y a desmarges de pro- gression ?

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