Journal C'est à dire 263 - Juin 2020

D O S S I E R

Une découverte mondiale faite au C.H.U. de Besançon

Un poumon atteint par le Covid-19, une maladie qui est bien inflammatoire (image : Radiology)

L’équipe du Professeur Éric Delabrousse a établi le lien entre Covid-19 et embolie pulmonaire. La revue américaine “Radiology” a publié les travaux des Bisontins lesquels ont permis de sauver de nombreuses vies.

P ourquoi les patients atteints de Covid-19 ont- ils tendance à se dégrader alors qu'ils ont encore, pour certains, 75% de capacité respira- toire ? Personne ne le savait jusqu'à ce que l’équipe du Pr Éric Dela- brousse propose une réponse. Des patients à Besançon ont pu déjà

pulmonaire. “Notre recommandation est donc claire : il faut dorénavant proposer la réalisation d'un angios- canner pulmonaire au lieu du scan- ner thoracique sans injection aux patients Covid-19 ayant des signes de gravité” indique le professeur. Une technique qui a sauvé des patients à Besançon et qui en sau- vera d’autres. L'hôpital universitaire de Strasbourg partage cette recommandation. D'autres vont emboîter le pas. La conclusion des Dr Paul Calame (pra- ticien hospitalier), Franck Grillet (chef de clinique), JulienBehr (radio- logue spécialiste du poumon) et des professeurs SébastienAubry et Éric Delabrousse est la suivante : injecter tous les patients Covid-19 sévère pour analyser leurs vaisseaux pul- monaires enmême temps que leurs poumons, puis en cas d’embolie pul- monaire les décoaguler, car même une pneumonie Covid-19 modérée peut conduire à une embolie pul- monaire. L’hôpital de Besançon prouve, une nouvelle fois, qu’il est à la pointe de la médecine dans de nombreux domaines. n E.Ch.

bénéficier de cette découverte. D’au- tres hôpitaux dans le monde vont reprendre les résultats de ce travail depuis sa validation par une revue scientifique américaine. Publiée jeudi 23 avril par la revue scientifique américaine “Radiology”, référence mondiale dans le domaine médical, l'étude menée par l'équipe du Pr Éric Delabrousse au C.H.U. de Besançon est considérée comme un “tournant” dans la lutte contre le coronavirus. Elle a été validée dans une revue scientifique de très haut niveau. Si le professeur bisontin reçoit de nombreux messages de félicitations de la part de ses collègues à travers la France dont ceux du très réputé hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, il a pris le temps de nous vul- gariser la contenu de cette publi- cation princeps (la première du genre). “C'est une étude “en mode commando” menée avec mes confrères les Dr Franck Grillet, Julien Behr, Paul Calame et le Pr Sébastien Aubry. “Le scanner sans injection n'est pas la pierre angulaire. Il faut réaliser un angioscanner pul- monaire ! Nous ne comprenions pas

pourquoi des patients se dégradaient sur le plan respiratoire alors que leur atteinte pulmonaire était modé- rée et parfois stable.Maintenant, on comprend mieux” expose le Pr Éric Delabrousse, au service radiologie de l'hôpital de Besançon. Entre le 16 mars et le 4 avril, 100 patients du C.H.U. de Besançon ont été explorés par angioscanner, un examen d'imagerie médicale avec injection de produit de contraste qui consiste à explorer les veines et les artères. Jusque-là, les méde- cins utilisaient le scanner sans injec- tion. Pas suffisant visiblement. Car après quelques jours, des patients que l'on croyait dans un état stable avec 75% de capacité respiratoire présentaient une embolie pulmo- naire, non décelée sur le scanner, et mortelle dans certains cas. Les cardiologues ou réanimateurs ne pouvaient d'ailleurs pas la déceler sachant que l'hypoxie étaient due à des caillots présents au sein de tout petits vaisseaux, que seul l’an- gioscanner parvient à détecter. Parmi les patients explorés par angioscanner pulmonaire dans cette étude, 23 (23%) avaient une embolie

).

Le Professeur Delabrousse pose devant un scanner.

LES INNOVATIONS MÉDICALES

Le Dr Paul Calame (à gauche)

Ventilation Un produit capable de ventiler le patient avec le bon débit d’air En un temps record, et après avoir obtenu une dérogation de l'Agence de sécurité du médicament et des produits de santé, la start-up bisontine a développé un produit capable de ventiler avec la quantité d'air voulue un patient admis en réanimation. Une prouesse.

C’ est une pépite de la French Tech... et cette pépite est Made in Besançon.Archéon, start-up de 9 salariés basée

dédié à la réanimation cardiaque pour les services de réanimation adultes. Objectif : que ces derniers puissent ven- tiler correctement un patient s’ils n’ont plus de ventilateur de réanimation à disposition.Ce produit se nomme EOlife. La société vient d'apporter une nouvelle corde à son arc.“Notre produit ne rem- place pas un ventilateur de réanimation mais il est une solution palliative qui stabilise un malade pendant quelques heures voire quelques jours.Nous l'avons fait évoluer avec la crise sanitaire en changeant les algorithmes et enmodi- fiant l'interface. C'est ce qui a permis l'adaptation” annonce Alban De Luca, co-fondateur d'Archéon. La ventilation en réanimation est une procédure critique. Lorsqu’il s’agit d’un patient souffrant d’insuffisance respi- ratoire aiguë, comme c’est le cas pour les patients atteints du coronavirus, une erreur de réglage du ventilateur ou un dysfonctionnement peut entraîner une détérioration rapide de l’état de santé, jusqu’à la mort.

au centre-ville, vient en quelques semaines de réaliser une prouesse tech- nologique.Elle a redéployé son dispositif demonitoring de la ventilationmanuelle

Le produit EOlife.

L’Her au C.H.U. de Brest qui a pu tester la fiabilité des paramètres ventilatoires d’EOlife,mesurés dans le cadre d’essais cliniques. D'autres établissements en France le testent : les Hôpitaux de Paris, le C.H.U. de Besançon. Une limite : la gestion des stocks. "Nous devons faire face comme les industriels aux problématiques de rupture de certains produits comme les capteurs d'oxygène" relate le Bisontin.

Si Archéon s’est lancée dans ce travail, c'est après avoir été contacté par le pro- fesseur Erwan L’Her, chef du service demédecine intensive et de réanimation du C.H.U. de Brest. “Il connaissait notre produit de ventilation cardiaque. Il nous a demandés de créer un prototype” raconte le co-fondateur. Les ingénieurs se sont mis au travail. Les tests ont été concluants. L'Agence de sécurité du médicament et des pro-

Les appareils sont confection- nés à Témis, Pirey, et Lille, avec l'appui de sous-traitants. Quant au premier produit des- tiné à la réanimation car- diaque, imaginé avec la colla-

duits de santé (A.N.S.M.) a délivré une dérogation sur le marché d'EOlife jusqu'à fin mai. Les retours sont positifs : "EOlife propose grâce à sa

Testé au C.H.U. de Brest, puis Besançon.

boration du docteur Abdo Khoury, du Pôle des Urgences au C.H.U. de Besan- çon, il devrait être commercialisé en septembre. n E.Ch.

solution d’intelligence artificielle un outil fiable pour mesurer et ajuster l’air délivré à chaque patient, le clinicien n’a plus qu’à ajuster la quantité d’air-oxygène voulu" commente le professeur Erwan

L’équipe de recherche.

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