Journal C'est à dire 262 - Février 2020

É C O N O M I E

“Le secteur du petit commerce a particulièrement souffert” Justice

Pierre-André Dubreuil est le nouveau président du tribunal de commerce de Besançon. La juridiction commerciale a ouvert l’an dernier 224 procédures collectives, redressements ou liquidations judiciaires.

liquidations dans le petit commerce, les boulangeries notamment. Et en ce moment, on est particulièrement atten- tifs à la situation de la trentaine de commerces de Planoise suite à l’incen- die de la fourrière. Certains commer- çants sont dans une situation drama- tique et pourraient ne pas se relever de ce drame. Càd : Serez-vous en rupture par rapport à votre prédécesseur ? P.-A.D. : Je souhaite poursuivre les efforts qu’il avait initiés et apporter d’autres projets. Ce tribunal fonctionne bien, les délais de traitement des affaires ont été raccourcis. La durée d’un procès avant mise en délibéré est ainsi passée de 5,20 à 4,72 mois. Et à partir de la plaidoirie, le délai pour rendre le jugement est passé à 2 mois au lieu de 2,4 mois. Je ne suis pas un révolutionnaire, cependant il y a plu- sieurs points sur lesquels je souhaite qu’on avance plus vite.

C’ est à dire : Vous êtes depuis le 20 janvier le nouveau président du tribunal de commerce de Besançon en remplacement de Pierre Bourgeois. Quel est votre parcours ? Pierre-André Dubreuil : Je suis dés- ormais en retraite, même si j’ai gardé une petite société de conseil. Aupara- vant, j’ai été directeur administratif et financier pendant une quinzaine d’années avant de créer avec un ami associé un groupe industriel dans la métallurgie, composé de trois sociétés : une tôlerie industrielle, une entreprise de mécanique de précision, et une troi- sième spécialisée dans la mécano-sou- dure pour le militaire (fabrication de caisses de véhicules blindés, de tourelles de chars…). Pontissalien d’origine, je suis revenu sur le secteur de Besançon Le rôle du tribunal de commerce Le tribunal de commerce est compétent en matière de litiges entre commer- çants, entre banques ou entre eux, ainsi que de contestations entre socié- tés commerciales. Il l’est également en cas de conflits portant sur des actes de commerce. Le tribunal est égale- ment compétent en matière de procé- dures collectives. Il a notamment le pouvoir d’ouvrir une procédure de sau- vegarde, de redressement ou de liqui- dation judiciaire à l’encontre d’une entreprise en difficultés. n

après avoir cédé mes parts dans les sociétés il y a une dizaine d’années. Je suis juge du tribunal de commerce depuis six ans. Càd : Quelles sont les nouveautés de l’année au tribunal de com- merce ? P.-A.D. : Nous avons accueilli trois nouveaux juges à l’occasion de notre audience de rentrée le 20 janvier : Serge Roland, ancien directeur envi- ronnement et sécurité chez Frans Bon- homme, Luc Gentit, dirigeant d’une entreprise de T.P., et AngeAlez-Martin, dirigeant de Créations Perrin à Orchamps-Vennes. Le fait que le légis- lateur ait permis aux juges de faire un cinquième mandat alors que la loi en limitait le nombre à qua- tre jusqu’à maintenant nous a permis de recon- duire certains juges expé- rimentés et c’est un vrai plus pour notre tribunal composé de 19 juges très investis pour cette cause qui, je le rappelle, est totalement béné- vole. Càd : La conjoncture économique s’est-elle dégradée ou au contraire améliorée ? P.-A.D. : Le nombre de procédures col- lectives en cours (redressements, sau- vegardes, liquidations…) est de 1 349 pour l’année 2019, contre 1 380 l’année précédente. Le tribunal a prononcé 56 liquidations judiciaires contre 47 en 2019. Ce n’est donc pas en aggravation. Le constat que l’on peut faire cepen- dant, c’est que le secteur du petit com- merce a particulièrement souffert et qu’on déplore une part importante des

Càd : Lesquels ? P.-A.D. : Concernant la chambre des sanctions notamment. Une de nos missions est d’éliminer les escrocs de la vie des affaires. La chambre des sanctions prononce parfois

Pierre-André Dubreuil est le nouveau président du tribunal de commerce de Besançon.

“J’ai l’impression d’être aux commandes d’un vaisseau sans carburant.”

domaine de la sanction. Concer- nant la prévention, quel rôle doit jouer le tribunal de commerce ? P.-A.D. : C’est justement le deuxième point sur lequel je souhaiterais que le tribunal s’améliore. Je souhaiterais que quand un chef d’entreprise traverse des difficultés, il n’hésite pas à nous solliciter car c’est notre rôle également, à travers notre centre d’information sur la prévention (C.I.P.), de les conseil- ler sur la marche à suivre avant qu’il ne soit trop tard pour eux. Ils peuvent alors bénéficier de plusieurs mesures (le mandat ad hoc , la conciliation, la sauvegarde), des mesures discrètes qui ne font pas l’objet d’une publication et qui permettent de prévenir. Quand on nomme un mandataire ad hoc par exemple, ce dernier a le pouvoir de demander au bénéfice du chef d’entre- prise un échelonnement aux banques.

Je souhaiterais que le tribunal de com- merce remplisse mieux son rôle d’es- pace de conseil, ceci pour éviter le plus possible des procédures de redresse- ment ou de liquidation. Càd : Qu’en est-il de la conciliation ou de la médiation ? P.-A.D. : C’est tout l’objet d’un nouveau chantier àmettre en place, et qui consti- tue le dernier point d’amélioration de ce tribunal de commerce : la mise en place des modes alternatifs de résolu- tion des différends, les M.A.R.D. dans notre jargon. Il s’agit d’encourager notamment la conciliation par l’inter- médiaire d’un de nos 19 juges nommé conciliateur de justice et dont le rôle est de trouver un terrain d’entente entre d’un côté une entreprise en dif- ficulté et de l’autre une banque par exemple. Quand une banque souhaite encaisser la caution d’un chef d’entre- prise en difficulté, un juge conciliateur peut contribuer à ce que le paiement de cette caution soit échelonné sur 5 ou 10 ans au lieu des 24 mois régle- mentaires. Au tribunal de commerce de Lyon, 30 % des affaires sont désor- mais traitées en conciliation. Il faudrait que cette méthode monte en puissance chez nous. Càd : Le tribunal de commerce a- t-il les moyens de ces belles ambi- tions ? P.-A.D. : C’est justement là que le bât blesse. L’État nous octroie une somme dérisoire pour fonctionner : 2 500 euros par an. Même si le travail d’un juge du tribunal de commerce est basé sur le bénévolat, un principe auquel je suis d’ailleurs très attaché, il est difficile- ment compréhensible qu’aucune dota- tion basée sur des critères objectifs n’ait été prévue par le législateur pour assurer le bon fonctionnement d’un organisme qui rend un véritable service public. J’ai la désagréable et fâcheuse impression d’être aux commandes d’un fier vaisseau et de ne pas disposer de carburant pour le faire avancer. n Propos recueillis par J.-F.H.

des interdictions de gérer et il suffisait à ces gens de changer de région pour recréer ailleurs une entreprise. Nous bénéficions désormais d’un fichier national, ce qui devrait permettre de mieux lutter contre ces entrepreneurs sans scrupule.Nous devrions également actionner un deuxième levier qui est la faillite personnelle, permettant d’aller prendre les biens de ces gens peu honnêtes. Sur ce point, le tribunal a encore des progrès à faire. Je souhaite également que nous ayons plus de rela- tions avec le Parquet pour pouvoir engager des poursuites pénales.

Càd : Nous sommes là sur le

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