Journal C'est à dire 254 - Mai 2019

P O L I T I Q U E

“Ma déception a été de courte durée” Politique Il aurait dû être numéro 4, donc largement éligible, sur la liste Renaissance (L.R.E.M.) aux élections Européennes. Il a été finalement écarté au profit du président national des jeunes agriculteurs. Sans amertume, il évoque les enjeux, notamment agricoles, de cette échéance électorale.

lement n’est que la continuité du gou- vernement. Du coup, on est dans un rapport d’opposition permanent, alors qu’en Europe, on s’oblige justement à des consensus permanents. C’est cela un système démocratique qui marche. Si en France, nous étions sur ce mode de fonctionnement basé sur le consen- sus, le pays ne serait jamais bloqué. C’est notre propre système de fonction- nement en France qui nourrit le natio- nalisme, ce n’est pas le fonctionnement de l’Europe. Càd : Vous semblez profondément pro-européen. C’est la raison pour laquelle vous aviez quitté Les Répu- blicains pour rejoindre EnMarche ? S.M. : Je soutiens clairement L.R.E.M., et malgré ce qui s’est passé pour moi, je voterai L.R.E.M. aux Européennes. J’ai été frappé par le discours politique d’Emmanuel Macron vis-à-vis de l’Union européenne. Il est le seul homme politique contemporain à être aussi clair sur ce que l’Europe doit porter comme compétences, sur ce que la France doit porter comme compétences et sur ce que les Régions doivent porter comme compétences. Il souhaite conti- nuer à bousculer les choses pour que l’on s’adapte aumonde moderne et c’est cela qui en dérange certains. Emmanuel Macron est toujours dans une stratégie d’alliances plutôt que d’opposition. Cela correspond bien à mes valeurs. Càd : Vous le spécialiste des ques- tions agricoles, comment convain- cre les agriculteurs français et du Haut-Doubs que l’Europe est bonne

et pas dans les chicailleries politiques franco-françaises. Il y a évidemment aussi l’enjeu climatique et tout ce qu’on sait faire ici, c’est de s’intéresser à notre nombril. Je me dis alors que ma situa- tion personnelle paraît bien anodine à côté des vrais enjeux de l’Europe. Càd : On risque donc de passer à côté des vrais enjeux à l’occasion de ces Européennes ? S.M. : Il faudrait déjà que les Français changent d’état d’esprit, sans quoi on ne pourra jamais entamer de grandes réformes. Quand on traverse une crise, il faut s’unir, se serrer les coudes et changer les choses et les méthodes. On a la chance de vivre dans un pays extra- ordinaire et si on ne prend pas conscience qu’on a à jouer un rôle moteur en France, reprendre notre place de leader , nous ne serons que les spectateurs déclassés d’une Europe impuissante. Càd : Comment expliquez-vous la montée des populismes partout en Europe, sans doute aussi en France ? S.M. : Nous rejetons sans cesse sur l’Europe la cause de nos malheurs et de notre impuissance. On critique l’Eu- rope en estimant qu’elle n’est pas démo- cratique et qu’elle est ultra-libérale. Je m’inscris en faux contre ces idées. La démocratie en Europe est encore plus poussée qu’en France où le Par-

C’ est à dire : Votre élection aux Européennes du 26 mai était quasiment assurée et… patatras, le jeu politique en a voulu autre- ment. Pas trop amer d’avoir été éjecté de la liste au dernier moment ? Sylvain Marmier : Bien sûr que je suis déçu de ne pas pouvoir devenir député européen compte tenu de mon expérience, d’autant que j’étais arrivé au bout du bout du processus de dési- gnation. Mais ma déception a été de courte durée. Car les enjeux de cette élection ont vite repris le dessus, ainsi que mes convictions profondes et mon envie de continuer à m’investir dans les dossiers dont j’ai la responsabilité ici en région. Càd : Comment expliquez-vous cette éviction de dernière minute ? S.M. : Nous étions au départ 2 500 can- didats au sein de L.R.E.M., je suis arrivé dans la “short list”, puis il a fallu com- poser avec les partenaires de L.R.E.M. (le MoDem, Agir et la société civile). Il a donc fallu faire des arbitrages et

ensuite, le jeu politique a fait qu’un agriculteur de Bourgogne, qui plus est président des J.A., Jérémy Decerle, s’est retrouvé en bonne position sur la liste. C’est ainsi. J’ai été surpris, mais pas étonné car c’est la politique, ça fait partie du jeu. En France, on s’intéresse hélas plus au débat interne qu’au débat international alors que les enjeux sont bien là. Càd : La déception est donc passée ? Quels sont ces vrais enjeux inter- nationaux que vous évoquez ? S.M. : Il y a d’abord la question de la finance internationale dont on ne parle jamais et je pense qu’on n’est pas du tout à l’abri d’une crise aussi grave que celle que le monde a connue en 2008. Il y a aussi la désindustrialisation de l’Europe. D’ici 30 ans, je pense qu’il n’y aura plus aucun pays européen au sein du G8. Nous devenons peu à peu les sous-traitants des grandes puissances et des pays émergents. Nous n’avons plus aucune chance de rester à la table des négociations internationales si on ne reste pas unis au sein de l’Europe. Ils sont là les vrais enjeux d’aujourd’hui,

pour eux ? S.M. : Si on est reconnu par tous les spécialistes comme l’agriculture la plus durable dumonde, c’est qu’on a su pren- dre le bon chemin, on a su monter en gamme, et on ne l’aurait pas fait sans les fonds européens et sans les règles que l’Europe a dictées. L’Europe apporte de l’union et non pas de l’uniformité. Autre atout : l’Europe a permis à nos productions haut de gamme de prendre la voie de l’exportation, ce qui n’est pas rien non plus. Il y a aussi des motifs d’inquiétude bien sûr. J’estime par exemple que l’Europe a eu tendance à trop baisser la garde en important de plus en plus de produits de l’extérieur, et qui ne respectent pas toujours les normes. Le vrai enjeu aujourd’hui est la liste Renaissance portée par L.R.E.M., malgré son absence sur la liste. Sylvain Marmier, agriculteur dans le Haut-Doubs, continue à soutenir

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