Journal C'est à dire 228 - Janvier 2017
D O S S I E R
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Elles veulent continuer à recruter en dehors de la Suisse Pour l’instant, les agences de placement ne sont pas concernées par le “New Deal pour l’emploi” qui est entré en vigueur dans le canton de Neuchâtel afin de rédui- re le taux de chômage. Elles redoutent néanmoins de devoir appliquer cette mesure qui vise à placer en priorité les chômeurs suisses dans les entreprises. L’avis des agences de placement
L es agences de placement du canton n’ont pas enco- re reçu de consigne de l’État de Neuchâtel. Mais dans les prochains mois, il pourrait les pousser à orienter leur pro- cédure de recrutement pour pri- vilégier l’insertion profession- nelle des demandeurs d’emploi suisses de la région, avant de recourir à la main-d’œuvre étran- gère. Cette évolution se ferait dans le cadre du “New Deal pour l’emploi” mis en place par le pré- sident du gouvernement neu- châtelois, Jean-Nat Karakash. Pour tenter de faire baisser le taux de chômage sur son ter- ritoire où il est un des plus éle- vés de Suisse (5,2 %), l’élu socia- liste a imaginé ce dispositif qui repose sur un partenariat entre l’Office régional de placement et les employeurs privés et publics. Le principe est de pré- senter des candidats suisses à l’embauche dans un délai de 48 heures à des entreprises qui recrutent. Si ce “New Deal” n’est
pas assorti d’une obligation léga- le pour les employeurs d’y adhé- rer, on sent néanmoins la volon- té de l’État de Neuchâtel d’en- courager la “préférence canto- nale” dans la politique de recru- tement. Pour l’instant, les agences de placement ne sont pas concer- nées par cette mesure. Mais elles doivent se préparer à prendre le train en marche. “Elles seront concernées par le New Deal qui sera adapté mais dans un deuxiè-
place ne voient pas d’un très bon œil ce “New Deal” qui va à l’encontre de la réalité éco- nomique de ce territoire fron- talier où le recours à la main- d’œuvre française est massif dans les entreprises. Il y a 11 000 frontaliers dans le can- ton. “Ce qui intéresse nos clients, c’est qu’on leur propose une per- sonne compétente qui réponde au profil recherché pour le pos- te, peu importe qu’elle soit suis- se ou française. On est conscient
Par exemple, un demandeur d’emploi de La Chaux-de-Fonds ne se déplacera pas jusqu’aux Brenets. À l’inverse, on sait qu’un frontalier est disposé à faire plus d’une heure de voiture pour un travail. Le frontalier est forcé- ment mobile” dit-il, redoutant que le canton de Neuchâtel finis- se par imposer “la préférence cantonale” comme l’a fait le Tes- sin. “Ce sera pénible pour nous et plus difficile pour les fronta- liers de trouver un travail.” Car il n’est pas dit qu’à l’avenir le “New Deal” ne prenne pas la forme d’une obligation légale comme l’indique le Service can- tonal de l’emploi. “Dans le cadre de la mise en œuvre de la vota- tion du 9 février 2014, les chambres fédérales ont accep- té récemment un modèle visant à créer l’obligation légale pour les entreprises de soumettre sys- tématiquement leurs postes vacants aux O.R.P. (offices régio- naux de placement). Ce modè- le qui entrera en vigueur en 2018 fera l’objet de “réglages” et sera déployé de manière plus ou moins contraignante en fonc- tion des régions-cantons, de leur tissu économique et de leur taux de chômage” conclut l’admi- nistration cantonale, laissant entendre que le cas échéant elle pourrait renforcer le dis- positif pour lutter contre le chô- mage. n T.C.
Recrutement Adecco jouera le jeu jusqu’à un certain point L’organisme de placement est disposé à appliquer la “pré- férence nationale” dans sa politique de recrutement. Mais il veut aussi continuer à faire appel à des compétences étrangères pour répondre aux attentes de ses clients. A decco, un des plus importants organismes de placement du canton de Neuchâtel, est prêt à jouer le jeu de la “préférence nationale” mais jusqu’à un certain point. “Nous défendons la solution pour la mise en œuvre de l’initiative contre l’immigra- tion de masse décidée par les Chambres, même si celle-ci ne tient pas pleinement compte de toutes les préoccupations et de tous les intérêts de l’économie. Lors de l’élaboration des dispositions Adecco veut pouvoir continuer à recruter des compétences à l’étran- ger pour répondre aux besoins de ses clients. “Nous devons enco- re avoir la possibilité de recruter la main-d’œuvre indigène et étran- gère qualifiée, rapidement et sans bureaucratie. Cela dépend fortement de la mise en œuvre technique de l’initiative, qui n’a pas encore été réglée en détail jusqu’à présent. Le Conseil fédéral doit encore clarifier des détails importants par voie d’ordonnance. Une obligation de préciser dans les offres d’emploi “Résident suisse” serait discriminatoire.” n “Préciser “Résident suisse” serait discriminatoire. d’exécution de l’ordonnance, nous conti- nuerons à nous engager en faveur d’une solution applicable en pratique, libérée des contraintes administratives, et néan- moins efficace.”
me temps” annonce le Service de l’emploi du canton de Neuchâtel. “On ne sait pas du tout comment ça va se pas- ser. Il n’y a aucune
que des Français sont plus qualifiés que cer- tains Suisses” indique une agence de La Chaux-de-Fonds qui place en moyenne deux
“Il est souvent plus facile de trouver des candidats
directive” indique une agence intérim de La Chaux-de-Fonds. “Pour l’instant, nous ne chan- geons pas nos habitudes, sauf si notre client nous demande de recruter une personne de natio- nalité suisse” indique une agen- ce voisine. Certains professionnels de la
frontaliers sur cinq recrute- ments. D’après ce spécialiste, il est même souvent plus facile de trouver des candidats français à l’emploi. “La question de la mobilité est centrale. Or, beau- coup de personnes suisses ne sont pas prêtes à prendre un pos- te trop éloigné de leur domicile.
Les agences de placement seront sans doute ame- nées à appli- quer le prin- cipe de
préférence nationale.
Conjoncture
Neuchâtel a le taux de chômage le plus élevé de Suisse
Le canton de Neuchâtel est malheureusement la lanterne rouge. Ce territoire a le plus fort taux de chômage de Suisse. Il vient de s’établir à 6,3 %. Une des causes est le ralentissement économique qui frappe l’industrie.
L a situation se dégrade encore sur le front de l’em- ploi en Suisse et parti- culièrement dans le canton de Neuchâtel. L’état actuel de la conjoncture est un des éléments qui explique l’amertume que des chômeurs suisses ont à l’égard des frontaliers qui occupent un poste dans leur pays alors qu’eux n’en ont pas. Un sentiment qui ne va pas s’apaiser avec les der- niers chiffres du chômage ren- dus public début janvier. Globalement à l’échelle du pays, le chômage a progressé de 0,2 point pour atteindre 3,5 % de la population active. Un chiffre qui est encore faible pour l’ensemble de la Suisse. En revanche, il varie de façon importante d’un canton à l’autre. C’est dans celui de Neuchâtel qu’il est le plus
élevé ! “Le taux de chômage can- tonal augmente de 0,4 point et s’établit à 6,3 %” indique l'État de Neuchâtel. Un chiffre supé- rieur de 3 points à la moyenne nationale. Il est aussi plus éle- vé que celui de l’Arc jurassien (5,4 %) et que celui du canton de Vaud (5 %). “Au 31 décembre 2016, le nombre de demandeurs d’emploi résidant dans le can-
ment ceux du bâtiment et de l’hôtellerie. “Les professions de la construction (+ 174 personnes, près de 80 maçons et de 30 plâ- triers et autres ouvriers actifs en extérieur), de l’hôtellerie et de la restauration (+ 21, essentielle- ment du personnel de cuisine), des arts et métiers (+ 32, ouvriers de différents corps de métiers) ainsi que le regroupement des
L’industrie horlogère est une des branches les plus touchées par la hausse du chômage (photo d’illustra- tion).
ton de Neuchâtel et inscrits dans un O.R.P. a augmenté (+ 244 personnes) par rap- port au mois précédent et atteint 7 605 per-
ingénieurs, architectes et techniciens (+ 33 dont 32 machinistes) ont vu leur effectif de demandeurs d’emploi augmenter.”
Plus 3 points par rapport à la moyenne nationale.
La conjoncture se durcit éga- lement dans l’horlogerie où selon le secrétariat d’État à l’écono- mie le chiffre du chômage est de 9 %. Si le taux de chômage est si élevé dans le canton de Neu-
sonnes. De même, une hausse du nombre de chômeurs (+ 434) est observée. Cet effectif compte désor- mais 5 840 personnes.” Plusieurs secteurs d’activité sont concernés par la baisse, notam-
châtel, c’est aussi parce que l’in- dustrie horlogère où elle est très présente, rencontre des diffi- cultés économiques. Or, la limi- te des chiffres de l’emploi est
qu’ils ne tiennent pas compte des travailleurs frontaliers qui échappent aux radars des sta- tistiques de l’emploi suisse, puis- qu’ils sont comptabilisés en Fran-
ce. Pourtant, dans l’horlogerie, ils occupent près de 40 % des postes. Si le chômage concerne des Helvètes, il touche aussi des frontaliers. n
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