Journal C'est à dire 222 - Juin 2016
L A P A G E D U F R O N T A L I E R
Musée des civilisations de l’islam : pour l’intégration, contre l’intégrisme La Chaux-de-Fonds Financé par des fonds privés venus du Qatar et du Koweït, le musée des civilisations de l’islam a suscité des questions et de fausses polémiques à La Chaux-de-Fonds. Les proprié- taires nous ont ouvert le lieu.
Nadia Karmous, directrice du musée des civilisations de l’islam, dans la salle des décou- vertes scientifiques.
N on, ce musée n’est pas - et ne sera pas - une future école coranique. Non, ce n’est pas un lieu qui prend position politiquement. Encore moins un espa- ce qui prône le retour de la burqa pour les femmes musulmanes… Situé au 109, avenue Léopold-Robert à La Chaux- de-Fonds dans une ancienne fabrique horlogère, le musée des civilisations de
l’islam (M.U.C.I.V.I.) a ouvert ses portes le 29 mai dernier sur fond d’interro- gations. Elles sont balayées par les pro- priétaires : le musée est un formidable espace pour découvrir les civilisations de l’islam. “Que les personnes viennent visiter. Nous n’avons rien à cacher ! Ce musée, c’est une pièce à conviction. Avez- vous vu des terroristes cachés ? Non” lâche Nadia Karmous, la directrice.
Les craintes - relayées notamment par le parti U.D.C. - envers le musée de La Chaux-de-Fonds montrent plus que jamais la nécessité de ce lieu à l’heu- re où le terme “musulman” est asso- cié par certains à “terrorisme”. “Le musée est apolitique, il est consacré à la réflexion
au sujet des conflits. Le visiteur par- court six salles avec un audioguide (français, allemand, anglais, arabe et bientôt italien) dans des univers sonores et lumineux modernes. Il découvre les civilisations de l’islam au fil des siècles : leur diversité et leurs apports, notamment scientifiques,
et au dialogue. On ne juge pas. Il y a des divergences par exemple dans la pratique de la foi. Nous l’expliquons mais nous ne donnons pas de réponses” poursuit Khaldoun Dia-Eddine, direc- teur scientifique et professeur à Züri- ch. La muséographie est parfaite. Sur les murs extérieurs du bâtiment, cinq
moins connues que celles des Grecs, des Chinois ou des Égyp- tiens. “Les musulmans dans leur conquête ont assimilé les découvertes des autres civilisa- tions plutôt que les détruire. À la bibliothèque de Bagdad en
femmes sculptées, allégories des cinq continents, sont repré- sentées. “C’est un symbole de sa vocation d’ouverture” ima- ge Khaldoun Dia-Eddine. Le bâtiment acquis en 1999 pour 750 000 francs accueille
“Un plus dans la valorisation du site.”
au rez-de-chaussée le musée. La créa- tion de cet espace a coûté 4 millions de francs, au terme de 16 ans de travail et de recherche de fonds. “Ce sont des femmes qui ont donné le plus…” rela- te la directrice qui a refusé de taper aux portes de la Ville de La Chaux-de- Fonds ou du canton pour les subven- tions. Les donateurs n’ont aucune contrepartie et n’interviennent pas dans le contenu, confirme Nadia Kar- mous. Ce ne sont pas des États, mais des dames fortunées des pays du Gol- fe (Qatar, Koweït) et de Suisse, deve- nues ses amies, et qui se sont inté- ressées à son projet. Aujourd’hui, il faut faire fonctionner ce magnifique espa- ce. Il est ouvert du mardi au samedi. La muséographie évoque l’histoire, les sciences, les courants de l’islam. Il ne prend pas position politiquement
1258, il y avait par exemple 3 millions de livres (manuscrits). Les Mongols l’ont détruite : pendant 40 jours, le Tigre a coulé noir…” relate le directeur scien- tifique. Des anecdotes comme celles-ci, le M.U.C.I.V.I. en regorge. Le musée suscite la curiosité. Il n’éduque pas. Des sujets plus actuels, comme la présence des musulmans dans les socié- tés occidentales, seront abordés dans des expos temporaires. Bref, c’est un lieu d’ouverture. À visiter ! n E.Ch. Musée des civilisations de l’Islam, ouvert du mardi au samedi (14 heures à 17 heures), 109,
avenue Léopold-Robert à La Chaux-de-Fonds
L’ouverture fin mai a fait couler de l’encre. Un musée sur l’islam : “Une première en Europe” disent ses propriétaires.
Santé Le Val-de-Travers
enrôle 5 médecins français La commune suisse souhaitait anticiper une future pénurie de méde- cins. Elle a lancé le projet d’une maison médicale en 2015. 15 mois après, 5 ont posé ici leur stéthoscope. Tous sont Français.
L a pénurie de médecins généralistes n’est pas uniquement un problè- me français. Nos voisins suisses y sont confrontés. Sauf qu’ils ont un atout supplémen- taire pour attirer : le salaire et des conditions de travail. À 40 kilomètres de Morteau, la commune du Val-de-Travers dans le canton de Neuchâtel réa- lise un excellent coup à Fleu-
ment d’un partenariat public- privé permettant de remplir le cabinet. Annoncée avec l’arrivée d’un premier médecin pour le 1 er décembre 2015, puis d’un deuxième le 4 janvier. En mai, le cabinet collectif de la Villa Florius s’est étoffé de trois nou- veaux médecins généralistes : Monserrat Permanyer (active depuis le lundi 9 mai), Bénédicte Bedou et Arnaud Clottes. La commune a-t-elle obligé les nouveaux arrivants à vire là où ils travaillent ? “Non. Un méde- cin habitera en France. Les autres se sont installés ici. En y ajou- tant le maintien de la policli- nique de Couvet et ses consul- tations spécialisées, le service des ambulances, le S.M.U.R. et le numéro d’appel 144, la sécuri- té sanitaire de la région repose sur de solides bases pour les années à venir.” Les arguments
se depuis le début d’année. “Nous avons eu de nombreux C.V. à exa- miner. Un médecin arrive de Besançon, un de Bordeaux, deux du Nord parisien, un de Picar- die” explique Thierry Michel. Tous ont été reçus au préalable lors de différents entretiens. Leur a été précisé le contexte géographique, économique, social. La zone de Pontarlier scrute cela avec un œil curieux puisqu’el-
le est confrontée au départ de ses médecins. Idem à Morteau où des généralistes s’appro- chent de l’âge de la retraite. Nouveau
rier. En moins de quin- ze mois, elle a rempli sa maison médicale “dans un contexte com- pliqué de relève médi- cale et de concurrence avec d’autres régions” commente Thierry
“Un de Besançon, un de Bordeaux…”
La Villa Florès vient d’ouvrir ses portes, nouveau centre médical à Fleurier qui emploie 5 médecins français. Un partenariat public-privé.
des médecins s’installant en Suisse sont connus. L’un d’entre eux, basé à La Chaux-de-Fonds, l’avait confié dans nos colonnes : les plateaux techniques sont de qualité, les temps de consulta- tions chronométrés, moins de charges, des patients à l’écoute.
L’arrivée de 5 nouveaux prati- ciens dans cette zone frontière ne compensera toutefois pas complètement les prochains départs. “Il conviendra de res- ter attentif à l’évolution de l’ef- fectif médical et ce, en étroite col- laboration avec les acteurs de la
santé, notamment la société de médecine du Val-de-Travers.” La commune salue le travail qu’el- le a mené avec un couple de pri- vés (la famille Parmigiani). Ce sont eux qui ont mis à disposi- tion le bâtiment. Le Val-de-Tra- vers a fait le reste. n
patient, il devient diffi- cile de se faire accepter chez un généraliste à Pontarlier par exemple. Le Val-de-Travers (12 000 habi- tants) annonce que 15 mois se seront écoulés depuis le lance-
Michel, conseiller communal en charge des questions de santé. Cinq médecins français ont enle- vé leur plaque du territoire hexa- gonal pour l’installer en Suis-
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