Journal C'est à dire 213 - Septembre 2015

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D O S S I E R

Réaction

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“La vraie injustice est qu’un urbain vaut deux ruraux” Maire d’une petite commune de 65 habitants, Daniel Cassard est le président de l’association des maires ruraux du Doubs. Il est naturellement très remonté contre les réformes en cours. Coup de gueule.

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une chose, mais ce n’est pas la plus grande injustice. Càd : Quel est l’autre pro- blème ? D.C. : C’est que les ruraux ont toujours été moins bien lotis. L’État verse 64 euros par an et par habitant aux communes rurales alors que ce montant est de 128 euros pour les villes. La grande injustice de départ est là. Cela signifie simplement qu’un urbain vaut deux ruraux. Je pen-

cièrement à la commune va peser sur le budget (les acquéreurs payent toujours 80 euros T.T.C.). Cela n’arrange pas Le Narbief dans le contexte de baisse bud- gétaire. D’après ses calculs, la commune va perdre 4 600 euros en dotations, soit environ 1/12 ème de son budget. Comment faire ? “Augmenter les impôts est exclu, répond le maire. Nous avons la chance d’avoir un prêt qui se ter- mine concernant des travaux de voirie. La perte des 4 600 euros sais naïvement que la Consti- tution française prévoyait que tous les citoyens étaient égaux, ce n’est manifestement pas le cas. On en est même très loin. Je n’ai rien contre mes amis des grandes villes mais il y a quand même un vrai malaise au départ et ça ne date pas d’hier ! On peut toujours argumenter en disant que les besoins financiers sont plus importants en ville mais à l’inverse quand dans une vil- le il y a un immeuble de dix étages, c’est autant d’argent qui rentre en fiscalité avec les taxes foncières et d’habitation. Il serait temps qu’on revoie cette ques- tion au nom de l’égalité des citoyens devant la loi. Càd : Il faut quand bien fai- re des économies dans ce contexte de rigueur budgé- taire ? D.C. : On a d’un côté le prési- dent de la République qui annon- ce et applique des baisses d’impôt et de l’autre le même président qui rogne tous azimuts sur les dotations aux communes et aux communautés de communes. On reprend aux uns pour redonner aux autres et le résultat au final ne fait pas avancer les choses. Càd : Les communes ne peu- vent donc pas faire d’efforts

C’ est à dire : Dans votre commune, Belmont, 65 habi- tants, que repré- sentent les dotations de l’État ? Daniel Cassard : Toutes dota- tions confondues, ces dotations représentent 16 000 euros, c’est environ 30 % de notre budget annuel. Sachant que cette année

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par exemple, nous avions consi- déré les travaux à l’école com- me un dossier prioritaire. Nous avons dépensé 11 000 euros pour l’école. On imagine très bien que si l’État baisse ses dotations, même des dossiers prioritaires comme l’école seront menacés. C’est un exemple parmi d’autres. Et la baisse des dotations est

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en matière de dépenses ? D.C. : Pas les petites communes comme les nôtres ! Je ne vois pas où on pourrait en faire. Cela fait 32 ans que je suis maire et 32 ans que mon épouse s’occupe bénévolement du fleu- rissement du village. Qui balaie les caniveaux, entretient le cime- tière ? C’est “ma pomme” et un ou deux conseillers et quelques bénévoles. Les communes ne

promulguée, elle réforme éga- lement les communautés de communes, les Régions. Tout cela est fait pour engendrer des économies non ? D.C. : On a voulu nous faire croi- re qu’il y avait des gains d’argent à la clé, mais c’est faux. Avec les Régions, c’est la même chose. Les nouvelles capitales régio- nales ne pourront même pas accueillir les assemblées régio-

sont pas dépensières et les maires ruraux sont de bons gestion- naires pour qui un sou est un sou. On n’a pas le choix. Nous sommes obligés de rogner par- tout, ça ne peut plus

nales car les locaux des Conseils régionaux sont trop petits ! On va donc commencer par de nou- velles dépenses. Même chose pour les commu- nautés de communes : la réforme risque

“Qui entretient le cimetière ?

C’est “ma pomme.”

durer. La conséquence de ces restrictions, c’est qu’on baisse notre capacité d’investissement et au final, c’est toute l’économie locale qui en subit les consé- quences. Il y a sans doute des économies à faire, mais d’abord au sein de l’appareil d’État à mon sens.

d’aggraver la fiscalité pour bon nombre de contribuables avec des communautés de communes qui seront obligées de prendre des compétences qu’elles n’avaient pas auparavant. Enco- re une fois, on s’aperçoit que les gens qui ont pondu ce genre de réforme n’ont aucune notion de ce qu’est un territoire. Propos recueillis par J.-F.H.

Daniel Cassard : “Il y a sans doute des économies à faire, mais d’abord au sein de l’appareil d’État.”

Càd : La loi N.O.T.R.E. a été

Taxes Le Narbief perd 4 600 euros de dotations et doit 106 000 euros à l’État !

La commune a lancé un lotissement de 15 parcelles. Un investisse- ment d’avenir en période de restrictions budgétaires. Or, l’État lui récla- me 106 000 euros au titre de la taxe sur les terrains nus rendus construc- tibles. L’affaire remonte jusqu’au Premier ministre.

par Le Narbief aux autres com- munes du département. Beau- coup seront concernées. Para- doxe de cette affaire : si Le Nar- bief avait vendu son terrain com- munal à un promoteur immo- bilier, ce dernier n’aurait pas été taxé. Cherchez l’erreur. Si le vil- lage ne reverra jamais les 58 000 euros déjà versés à l’État, elle compte bien se battre pour éviter de verser les euros res- tants… E.Ch.

sera absorbée. Nous serons à l’avenir peut-être obligés de rédui- re les dépenses d’investissement, ce qui est dommageable pour l’économie locale” ajoute l’élu. Avec 62 000 euros de budget de fonctionnement, Le Narbief qui compte sur la vente de bois n’est pas inquiet pour son ave- nir financier. Mais pas question d’être le dindon de la farce. L’association des maires ruraux transmettra à toutes les com- munes du Doubs la motion votée

I ls l’ont mauvaise les élus du Narbief. À l’unanimité (7 voix), ils ont voté une motion le 5 juin dernier dénonçant l’application de la taxe sur les terrains nus rendus constructibles. Si le maire Jérô- me Renaud respecte les lois, il ne comprend pas celle-ci qui péna- lise directement sa commune et qui pend au nez de nombreuses autres. “On veut bien payer cet- te taxe mais pas sur la totalité ! L’État oublie que nous avons investi savoir en alertant les parle- mentaires du département et l’association des maires ruraux qui ont, depuis, interpellé le ministère. Rappel des faits. Pour développer le village et assurer des recettes supplé- mentaires en taxes foncières à cette bourgade située entre Mor- teau et Le Russey, Le Narbief lance la création d’un lotisse- ment de 15 parcelles sur un ter- rain communal qui a peu de valeur agricole. Les choses se présentent bien : des candidats se déclarent. Il reste encore 9 parcelles à vendre. Mais le mai- 480 000 euros hors taxes afin de financer les études, les frais de maîtrise d’œuvre, les travaux” dit le premier magistrat. Il l’a fait

re va vite découvrir le pot aux roses. Lors de la signature de l’acte de vente d’une parcelle, le notaire lui fait savoir que la loi du 29 décembre 2014 (article 62) et insérée dans l’article 1 605 du code général des impôts implique une taxe sur les cessions des ter- rains nus rendus constructibles. Cette taxe est assise sur la plus- value réalisée lors de la vente. Elle est calculée comme étant la

tembre, le ministre des Finances Michel Sapin a écrit au maire pour lui annoncer qu’un examen approfondi est engagé. Rien de nouveau depuis. Cette opération qui devait per- mettre de donner de l’air finan-

différence entre le prix de cession (prix réel stipulé dans l’acte de vente) et le prix d’acquisition (ou la valeur vénale réelle à la date d’entrée dans le patrimoine du

“Ils oublient notre investissement de 480 000 euros.”

cédant). Ce terrain communal est un bien immémorial pour Le Narbief. Le taux de cette taxe est progressif : 5 % de la plus- value, lorsque celle-ci est com- prise entre 10 et 30 fois le prix d’acquisition, et 10 % de la plus- value si celle-ci dépasse 30 fois le prix d’acquisition. Le Narbief dépasse 297 fois le prix d’acquisition puisqu’elle vend 67 euros hors taxes le mètre car- ré le terrain qui ne lui a rien coû- té. “C’est injuste, il faut soustraire les frais engagés” , rappelle le maire qui a alerté le Premier ministre le 7 août. Le 4 sep-

Le maire du Narbief Jérôme Renaud ne lâchera pas l’affaire face à l’État qui lui réclame 106 000 euros pour son lotissement.

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