Journal C'est à Dire 89 - mai 2004

L A P A G E D U F R O N T A L I E R

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Éric Thévenaz : “Il faut se méfier du dumping salarial” Bilatérales Le secrétaire régional du syndicat F.T.M.H. (métiers de l’industrie, de la construction et des services) explique les changements qui interviendront dès le 1 er juin dans le cadre des accords bilatéraux. La question des salaires est en première ligne.

C’ est à dire : Que va-t- il précisément se pas- ser au 1 er juin 2004 en ce qui concerne l’emploi en Suisse ? Éric Thévenaz : À partir de cet- te date-là, il n’y aura plus de contrôle des autorités adminis- tratives sur les conditions de tra- vail en Suisse. En juin 2002, on a déjà assisté à l’assouplisse- ment dans l’octroi des permis de travail. Avant, ils étaient déli- vrés pour une année. Depuis juin 2002, ils sont délivrés pour 5 ans et la préférence nationale a disparu. Mais l’État continuait toujours à demander aux employeurs les conditions géné-

Càd : Dans quels secteurs d’activité craignez-vous les abus ? É.T. : Par exemple dans les assu- rances, les banques, la vente, le domaine du nettoyage, de la sécu- rité, etc. Et dans certains sec- teurs comme dans la restaura- tion, même s’il existe une conven- tion collective, encore faut-il que des salaires corrects soient ver- sés. Il n’y a hélas pas toujours moyen de vérifier partout. Cet- te commission mise en place doit tirer la sonnette d’alarme et inci- ter le gouvernement à étendre les conventions collectives là où elles n’existent pas. Exemple : si on se rend compte que les entreprises horlogères appli- quent des salaires minimums décents mais qu’une entrepri- se dissidente n’ayant pas signé cette convention et qu’elle fait du dumping salarial, l’État pour- ra demander l’extension de la convention à l’ensemble de la branche. Mais pour que tout cela fonctionne, il faut une vraie volonté politique dans chaque administration cantonale. Càd : Que conseillez-vous aux travailleurs frontaliers fran- çais ? É.T. : Il faut qu’ils aillent bien

être refusé au titre des condi- tions de travail et de rémuné- ration. C’est un alignement avec ce qui se passe dans les pays de l’Union Européenne. Càd : Cette évolution com- porte-t-elle des risques ? É.T. : Il faut principalement se méfier d’un phénomène de dum- ping salarial, c’est-à-dire d’une pression à la baisse des salaires en Suisse. Compte tenu des dis- parités flagrantes entre les condi- tions salariales entre la Suisse et ses voisins, dont la France, les syndicats suisses ont deman- dé des mesures d’accompagne- ment pour limiter les risques.

Éric Thévenaz est secrétaire régional du syndicat F.T.M.H. pour le canton de Neuchâtel.

frontaliers en Suisse ? É.T. : Pas spécialement. Quand l’Union Européenne s’est créée, il n’y a pas eu d’afflux massif de frontaliers. Pour que les gens arrivent en Suisse, il faut déjà qu’il y ait du travail pour eux ! La conjoncture est un peu meilleure que l’an dernier mais on n’est pas encore “sorti de l’au- berge”. Et je ne vois pas les entreprises licencier les résidents suisses pour embaucher des fron- taliers… Càd : Les autorités suisses se gardent la possibilité de

remettre en cause ces accords bilatéraux ? É.T. : En effet, en 2008, on a insé- ré dans les accords une clause de sauvegarde, qu’on appelle “clause guillotine”. Le peuple pourra être consulté en 2008 par une votation populaire et si on a constaté de nombreux déra- pages dans l’application des accords bilatéraux, tout sera remis en cause et deviendra caduc. !

rales dans lesquelles ils comptaient embau- cher leurs salariés. À partir du 1 er juin pro- chain, cette obligation disparaît, ces mesures dites de protection tombent.

se renseigner auprès des syndi- cats suisses. Surtout les nou- veaux travailleurs qui ne connais- sent pas forcément la politique salariale en cours dans tel sec- teur d’activité. Pour les fronta- liers en place, les choses ne seront pas bouleversées. Avant juin 2004, ils avaient au moins la garantie que leur salaire cor- respond à quelque chose de bien établi. Càd : Cette suppression tota- le du contrôle des salaires aura-t-elle une influence sur le nombre de travailleurs

Càd : Lesquelles ? É.T. : Essentiellement l’extension facilitée des conventions col- lectives dans les branches profession-

“Des mesures d’accompagne- ment pour limiter les risques.”

nelles, notamment les conven- tions collectives contenant les salaires minimums. Il faut savoir qu’en Suisse, 50 % des emplois ne sont pas concernés par une convention collective. Une com- mission tripartite réunissant l’É- tat, les patrons et les syndicats, a été mise en place pour signa- ler les éventuels abus commis.

Càd : Pour les salariés en Suisse, qu’est-ce que cela changera ? É.T. : Il suffira pour une per- sonne embauchée de dire “j’ai trouvé du travail dans l’entre- prise X” pour avoir un permis de travail. Un permis ne pourra pas

Propos recueillis par J.-F.H.

L’ACTU DU MOIS

Une association au service des frontaliers

La durée du travail en Suisse

La durée maximale du temps de tra- vail (hebdomadaire, journalière) est fixée par la loi qui limite d’une façon générale les possibilités d’occu- pation des travailleurs dans les entre- prises qui y sont soumises. Par ailleurs, des dispositions spéciales sont prévues pour certaines caté- gories d’entreprises ou de travailleurs (cliniques et hôpitaux, par exemple). Ainsi, sous réserve de prolongations éventuelles, la durée maximale de la semaine de travail est de : - 45 heures pour les entreprises industrielles, le personnel de bureau, le personnel technique et les autres employés, ainsi que pour le per- sonnel de vente des grandes entre- prises du commerce de détail. - 50 heures pour les autres entre- prises. Dès lors, il y a travail supplémen- taire au sens de la loi lorsque la durée maximum de la semaine (45 ou 50 heures) est dépassée. Il convient de bien distinguer cette notion de celle d’heures supplémentaires qui,

comme leur nom l’indique, s’ajou- tent à la durée normale du travail. Le travail supplémentaire ne peut avoir lieu qu’exceptionnellement et pour autant que d’autres mesures ne soient raisonnablement pas envi- sageables. Il ne peut être ordonné sans qu’il y ait urgence ou surcroît extraordinaire de travail, inventaire, liquidation, perturbation dans l’en- treprise, etc. Il ne peut pas dépasser 2 heures par jour, sauf exceptionnellement, ain- si qu’annuellement 140 heures lorsque la durée maximale de la semaine de travail est de 50 heures, et 170 heures lorsqu’elle est de 45 heures. Enfin, le travail supplémentaire don- ne droit soit à un supplément de salaire d’au moins 25 % soit à une compensation par un congé de même durée, le tout sous certaines conditions.

Au 1 er juin 2004, le marché de l’emploi en Suisse se libéralise. Désormais, tout européen muni d’un contrat, peut obtenir une autorisation de travail.

Pour tout savoir sur ces changements, le Groupement transfrontalier vous accueille et vous informe Pontarlier et à Morteau. Nos conseillères répondent à toutes les questions relatives au statut du travailleur frontalier. Une juriste assure également le traitement des dos-

En adhérant, le frontalier bénéficie de l’abonnement au frontalier magazine, l’accès aux services juridique, social et fiscal et l’adhésion au Club Frontaliers (Club Med, Camif, Azureva, Stations de ski, etc.).

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Hasna CHARID Juriste Groupement Transfrontalier Européen Antennes de Morteau et Pontarlier

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