Journal C'est à Dire 255 - Juin 2019

L A P A G E D U F R O N T A L I E R

Une coopération franco-suisse énergisante Barrages À qui appartiennent les barrages sur le Doubs franco- suisse, qui produit l’électricité sur ces trois ouvrages, où est dirigée l’énergie ? Le point avec les deux par- tenaires qui font tourner les turbines. Ses quatre turbines permettent aux groupes de production du Châtelot d’engendrer quasiment 100 GWh

L es barrages hydroélec- triques installés au fil du Doubs franco-suisse - le Châtelot à Villers- le-Lac, le Refrain à Charquemont et laGoule en contrebas de Char- mauvillers -, sont un symbole du subtil équilibre des relations qu’entretiennent les deux voisins français et suisses. En effet, l’électricité produite au Châtelot est équitablement répartie entre les communes suisses et fran- çaises, celle qui sort du Refrain est intégralement dirigée en France et l’énergie sortant de la Goule part, elle, entièrement en Suisse. Les sociétés concessionnaires des installations de production sont parfois détenues par plu- sieurs partenaires (pour le bar- rage du Châtelot par exemple : E.D.F. côté français, et Groupe E, société des forces électriques de LaGoule et État deNeuchâtel côté suisse). Encadrées par un règlement d’eau émis par les autorités françaises et suisses, elles collaborent étroitement au quotidien. “Le dernier règlement d’eau date de décembre 2017, il exige une très bonne coordination

entre les trois aménagements de manière à ce que le Châtelot, qui est le plus important des trois ouvrages, turbine généralement que des volumes d’eau que les deux autres ouvrages en aval peuvent absorber de manière à lisser les éclusées” explique Benoît Stolz, gestionnaire des infrastructures à la Société des Forces Motrices du Châtelot. Le barrage du Châtelot produit à lui seul, en moyenne sur les dix dernières années, 93 GWh (87 GWh à la centrale et 6 GWh à la turbine de dotation au pied du barrage). “Cela représente l’énergie nécessaire à plus de 20 000 ménages” précise M. Stolz. La Goule produit quant à elle entre 21 et 22 Gwh annuels. “Le Refrain produit en moyenne 60 Gwh” ajoute Aude Jenar, responsable d’équipe d’ex- ploitation chez E.D.F. Hydro. L’ouvrage de tête, le Châtelot, est concédé demanière conjointe par l’État français et Confédé- ration helvétique qui ont octroyé, en 1953 à la mise en service de l’ouvrage, un droit de turbinage à la Société des Forces Motrices du Châtelot pour 75 ans, qui

électriques annuels au bénéfice de plus

de 20 000 ménages.

Dans l’usine du Refrain, sur la commune de Charquemont.

court donc jusqu’en 2028. “Les discussions vont commencer pour savoir à qui va être confiée la concession après 2028. La parité France-Suisse devrait cependant être conservée” ajoute M. Stolz. Si l’équité entre les partenaires français et suisses préside au bon fonctionnement des trois ouvrages hydroélectriques du Doubs franco-suisse, il n’en va pas de même pour la part res- pective de l’énergie hydroélec- trique entre les deux pays. La France dépend toujours à 80 % de l’électricité nucléaire et l’hy- droélectrique ne représente chez nous que “10 % de la production totale d’électricité” précise Aude Jenar.Tandis que la Suisse, grâce à sa topographie montagneuse, couvre 60 % de ses besoins élec- triques grâce aux barrages hydroélectriques. Le pays ne dis- pose que de quatre centrales nucléaires qui fournissent un peumoins de 30%de l’électricité. “Le revers de la médaille de cette prédominance de l’hydroélectri- cité, c’est que les autres énergies renouvelables que sont l’éolien et le photovoltaïque ne progres- sent que très peu en Suisse” note

Benoît Stolz. Le parc éolien des Montagnes de Buttes (Val de Travers), avec 19machines, vient tout juste de voir ses oppositions directes levées par les communes hôtes du projet. L’avantage indéniable de l’hy- droélectricité reste la capacité qu’elle offre à pouvoir stocker l’énergie. Les ouvrages hydro- électriques présentent également

Châtelot : l’histoire d’une industrie franco-suisse L a révolution industrielle du XIX ème siècle a provoqué un fort accroissement de la demande en électricité. L’utilisation des moulins au fil de l’eau ne suffisant plus à satisfaire cette demande, il a fallu construire des barrages permettant de produire de l’électricité en plus grande quantité. Contrairement aux moulins au fil de l’eau, ceux-ci ont en effet l’avantage de stocker l’eau et de pouvoir l’utiliser au moment désiré. Le barrage du Châtelot a été mis en service en 1953 après 3 ans de travaux, le barrage du Châtelot a été construit dans cette optique. Il s’agit d’un barrage de type voûte haut de 74 mètres retenant un volume d’eau maximal de 16 millions de m 3 . La centrale du Torret, entrée en fonction également en 1953, a pour fonction de turbiner l’eau provenant du barrage du Châtelot. Son volume de production et la hauteur de sa chute (67 à 97 m) font de cette installation la centrale la plus importante de la vallée du Doubs. n

Le Châtelot est un barrage de type voûte haut de 74 mètres retenant un volume d’eau maximum de 16 millions de m 3 .

un aspect sécuritaire sur le plan de l’alimentation en eau. “L’été dernier, pendant quatre mois, le Châtelot a pu restituer plus d’eau qu’il n’en recevait et il a permis d’éviter les pénuries importantes en aval et jusqu’à Montbéliard” commente M. Stolz. “Cela nous oblige toujours à veiller à éco- nomiser l’eau pour pouvoir la

restituer de façonmesurée et res- ponsable” ajoute M me Jenar. Au-delà de leur fonction pre- mière de production d’énergie, les barrages du Doubs franco- suisses constituent donc aussi un réservoir d’eau potable pré- cieux en ces temps de dérègle- ment climatique. n J.-F.H.

La centrale du Torret, attenante au Châtelot.

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