Journal C'est à Dire 177 - Juin 2012

L A P A G E D U F R O N T A L I E R

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Indices des niveaux de prix en comparaison internationale en 2010

Alimentation, logement La Suisse, cet îlot de cherté Le coût de la vie en Suisse est l’un des plus élevés en Europe. Éléments de comparaison avec d’autres pays sur quelques grandes familles de dépenses.

Produit Intérieur Brut

Logement, eau, é́lectricité́, gaz et autres combustibles

L a ville du Locle ou la commune du Val de Tra- vers tentent d’attirer de nouveaux habitants avec des mesures d’accompagnement et des politiques d’accueil inci- tatives. Jusqu’à présent, elles peinent à trouver une crois- sance démographique qui soit en adéquation avec la dyna- mique économique observée sur les montagnes juras- siennes. À qui la faute ? Pas besoin d’être expert-comp- table pour comprendre l’intérêt du statut de frontalier. Le coût de la vie n’est pas du tout simi- laire de part et d’autre de la Principales dépenses en pourcentage du revenu brut des ménages Loyer : 16 % Impôts : 12 % Transport : 7,7 % Produits alimentaires et boissons non alcoolisées : 7 % Loisirs et culture : 6,7 % Sorties au restaurant et à lʼhôtel : 5,8 % Assurance-maladie obligatoire de base : 5 % Autres assurances (assurance-maladie complé- mentaire et autres) : 3,4 %

Budget des ménages : le poids du loyer En 2009, le revenu mensuel disponible des ménages privés en Suisse se montait à 6 650 francs suisses en moyenne, selon lʼoffice fédéral de la statistique (O.F.S.). Cet argent est consacré en grande partie à la consommation de biens et de services : les dépenses pour le logement et lʼénergie représentaient 1 495 francs, ce qui en fait le principal poste du budget des ménages. Ces der- niers ont dépensé quelque 1 185 francs par mois pour les pro- duits alimentaires, les boissons et la restauration, soit 13 % de leur budget. Après déduction de toutes les dépenses, le montant restant pour lʼépargne était de 1 160 francs en moyenne.

Santé

Produits alimentaires et boissons non-alcoolisé́es

Source Eurostat

frontière. En 2007, selon les chiffres de l’O.C.D.E., il était 22 % plus élevé en Suisse qu’en France ou en Allemagne. Avec le temps, cette différence tend à s’atténuer puisque l’écart avoi- sinait 30 % en 2001. Ce rattra- page s’explique en partie par l’augmentation plus rapide des prix dans les pays historiques de l’Union Européenne. Le coût de la vie en Suisse a fait preuve si l’on peut dire de plus de stabilité. Il reste quand même de la marge. Les données publiées par l’office statistique de la communauté européenne Eurostat montrent que le niveau des prix en Suisse res- te plus élevé que dans la plu- part des autres pays européens mais l’écart par rapport à la

moyenne des États-membres diminue lui aussi. Il est passé par exemple de 37 % à 22 % entre 2000 et 2007. Les différences les plus notables s’observent sur la santé, l’alimentation et les loyers. En moyenne, le prix des produits alimentaires et des boissons non alcoolisées est 40 % plus cher en Suisse qu’en France. Le différentiel pour le poste “logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles” s’élève à 72,6 %. Dans ce domaine, la Suisse devance même les pays nordiques comme le Danemark ou la Norvège où le coût de la vie tutoie aussi les sommets européens. La comparaison sur le poste “santé” bascule aussi en faveur de la Suisse avec un

coût supérieur de 36,6 % par rapport à la France. Heureusement, le coût de la vie chez nos voisins est compensé

par des niveaux de salaires éle- vés. Ces informations servent de points de repères généraux. Elles ne prennent pas en comp-

te les disparités entre les can- tons et entre les secteurs urbains et ruraux. F.C.

Emploi

P.M.E. qui partent en Suisse : un phénomène marginal Ponctuellement, l’actualité locale se fait l’écho d’un déménagement d’entreprise de la France vers la Suisse. Un phénomène qui pourtant n’inquiète pas la chambre de commerce et d’industrie (C.C.I.) qui insis- te plus sur la fuite de la main-d’œuvre française et ses conséquences.

C oût du travail trop éle- vé, pression fiscale, lour- deurs administratives… autant d’arguments qui reviennent sur le devant de la scè- ne dès qu’une P.M.E. française plie bagages pour aller s’installer de l’autre côté de la frontière. On vante alors l’état d’esprit suis- se plus favorable à l’entreprenariat, l’administration plus compréhen- sive et efficace. Mais force est de constater qu’aucun des patrons contactés n’a souhaité s’exprimer, souvent, disent-ils, par crainte de représailles de l’administration française. Ils confessent toutefois pour la plupart réfléchir àun éven- tuel départ, depuis quelque temps déjà. Sans plus. “La question est beaucoup moins inquiétante aujourd’hui et finalement ces dernières années, une vingtaine d’entreprises seulement ont fran- chi le pas” estime Laurent Sage, directeur des études écono- miques et territoriales à la C.C.I. du Doubs. “Le niveau du franc suisse minimise ce risque de départs” poursuit-il en dévelop- pant les autres questions aujour- d’hui sources de réflexion. “Aujourd’hui la question n’est plus vraiment celle du déména- gement d’entreprises mais plu- tôt de l’implantation directement

Laurent Sage, directeur des études économiques et territoriales à la C.C.I. du Doubs.

rée par des salaires doublés ou triplés, à quelques kilomètres de chez eux. “L’exaspération des chefs d’entreprise français est souvent focalisée sur cette ques- tion. Parfois, ils ne peuvent même pas assurer leurs commandes faute d’une capacité de produc-

mène de délocalisation… mais plutôt vers Besançon. Les entre- prises s’écartent de la frontière pour ne pas subir cette pression liée aux salaires.” Un autre défi s’ouvre donc aux entreprises françaises, bien au- delà des arguments qui fusaient jadis pour justifier un hypothé- tique départ selon le directeur des études économiques et ter- ritoriales de la C.C.I. : “Les patrons installés sur la bande frontalière doivent trouver des arguments nouveaux pour gar- der leurs employés. Même s’il n’est pas possible de s’aligner sur les salaires, ils peuvent mettre en place des pratiques sociales innovantes, de la souplesse dans l’organisation du travail, bref instaurer des relations où tout le monde s’y retrouvera !”

tion suffisante.” Un élé- ment qui est d’autant plus d’actualité pour Laurent Sage que “4 000 à 5 000 emplois vont encore se créer dans l’horlogerie suisse dans les années à venir.” Alors,

de l’autre côté de la fron- tière plutôt qu’en Fran- ce” explique l’analyste qui constate que le fort développement écono- mique en Suisse s’effectue grâce à la main-d’œuvre frontaliè-

“Une vingtaine d’entreprises ont franchi le pas.”

re. “Nous sommes aujourd’hui à 20 000 frontaliers, un chiffre qui a doublé en dix ans. Un record historique” note-t-il. La problématique sur laquelle se penche la C.C.I. est donc cel- le de cette main-d’œuvre atti-

comment un patron français peut-il résister à la tentation de s’implanter quelques kilomètres plus loin où à un coût identique, il aura la main-d’œuvre néces- saire qu’il pourra payer au prix fort ? “On assiste à un phéno-

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