Journal C'est à Dire 177 - Juin 2012

V A L D E M O R T E A U

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“Pour les patrons, nous étions des emmerdeurs” Robert Samson a aujourd’hui 85 ans. Jusqu’à sa retraite, cet ancien salarié de l’industrie a été un syndicaliste actif de C.G.T. Parcours. Morteau

L e syndicalisme, Robert Samson l’a “chevillé au corps” comme il dit. Pen- dant 63 ans, il a défendu les inté- rêts de ses camarades ouvriers sous la bannière de la C.G.T. C’est l’engagement de cet hom- me que le syndicat salue aujour- d’hui en le nommant président d’honneur de la C.G.T. du Val de Morteau. “Je ne renie pas ce que j’ai fait. Surtout pas. C’est une vie de militant” assume-t-il. Sans des convictions profondes, il

n’aurait sans doute pas pu tenir son rôle à une époque où beau- coup de patrons préféraient que le droit social reste accroché au clou du vestiaire plutôt qu’il ne s’insinue dans les ateliers par la voix d’indésirables représen- tants syndicaux. “Nous étions des emmerdeurs pour les patrons qui faisaient tout pour margi- naliser les syndicats” reconnaît l’octogénaire. Il faut dire que dans les années 50-60, l’industrie horlogère tournait à plein régi-

me dans le Val de Morteau. On quittait une usine avec l’assurance de retrouver un tra- vail dans la fabrique voisine. Robert Samson a commencé à travailler en 1949 chez Magis- ter à Villers-le-Lac. Il y fera presque toute sa carrière en tant que mécanicien de précision, excepté un intervalle de quelque temps dans l’usine Mercier. Avec un père qui adhérait déjà à la C.G.T., il y avait un terreau familial pour que Robert Sam-

son embrasse à son tour la cau- se du syndicalisme une fois entré dans la vie active. Quelques luttes importantes ont marqué son engagement. Une des plus marquantes se situe dans les années 80, “quand on s’est bat- tu avec mes camarades pour le maintien de Magister. On savait que ça péclotait. Un matin le

çon en participant à la marche des Lip. De militant, Robert Samson est devenu délégué du personnel, puis secrétaire du comité d’entreprise chez Magister. Il fut également conseiller pru- d’hommes et conseillers des sala- riés. “J’en ai accompagné des dizaines aux entretiens préa-

entreprises où les syndicats sont encore bien représentés. Les temps changent. “Les gens ne s’engagent plus. Je l’ai déjà sen- ti quand je suis parti en retrai- te. Nous vivons une époque indi- vidualiste. À mon sens, cela est lié au fait que les gens s’accrochent à leur poste dans un contexte difficile. Ils mettent leur poing dans leur poche et se taisent. Il faut dire aussi que notre industrie a pratiquement disparu et que beaucoup de per- sonnes sont parties travailler en Suisse où la culture est diffé- rente.” La conjoncture n’est pas la seule responsable. Pour Robert Samson, il est temps que les syn- dicats acceptent de se remettre en question pour retrouver leur place au sein des entreprises dans l’intérêt des salariés. T.C.

patron nous a annoncé qu’il devait licencier 40 personnes. Nous lui avons répondu que nous n’accepterions jamais, à la suite de quoi il a décla-

lables au licenciement. Je connaissais la loi. Je pou- vais défendre leurs inté- rêts face aux patrons.” Robert Samson a quitté l’industrie en 1987 en pre-

“Tenu Magister à bout de bras.”

Robert Samson regrette que le combat syndical n’intéresse plus grand monde dans les entre- prises.

nant sa retraite. Depuis, son activité syndicale est moins for- te, mais il continue à s’intéresser à l’évolution de la conjoncture économique et sociale. Selon lui, il ne fait aucun doute que le com- bat syndical a du plomb dans l’aile à l’exception des grandes

ré que nous serions responsables de la fermeture de l’usine. Fina- lement, c’est lui qui est parti et nous avons tenu Magister à bout de bras jusqu’à l’arrivée d’un repreneur autrichien” se sou- vient-il. Par solidarité, plus tôt, il avait porté la lutte à Besan-

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