Journal C'est à Dire 175 - Mars 2012

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P L A T E A U D E M A Î C H E

Débat Les syndicats agricole et la fin des quotas laitiers

C’ est à dire : Êtes-vous pour ou contre la suppression des quo- tas laitiers ? Philippe Monnet : Lorsqu’el- le a été proposée en 2003, nous avons aussitôt été contre mais nous n’avons pas été suivis par les autres pays européens, l’Allemagne notamment dont l’implication aux côtés de la France aurait pu faire la diffé- rence. Jean-Michel Bessot : Nous avons toujours été favorables aux quotas et nous sommes donc opposés à leur suppression. Ils permettent une maîtrise et une régulation du marché par les Càd : Quelles seront les conséquences pour les producteurs du Haut-Doubs comme d’ailleurs ? P.M. : Demain en théorie, cha- cun pourra faire ce qu’il veut, produire autant qu’il veut, ce qui va accroître la concurren- ce notamment entre les diffé- rents bassins de production. Mais évidemment les plus faibles seront les plus exposés et les plus en danger. Ce sont surtout les plus efficaces qui survivront, ce qui n’est pas forcément une question de taille. J.-M.B. : On va passer d’une ges- tion publique administrée à une pouvoirs publics. Notre position est la même depuis leur création.

En 2015, les quotas laitiers seront supprimés. Ainsi en a- t-il été décidé au niveau européen par la P.A.C. Face à ce profond changement, comment réagissent deux res- ponsables syndicaux du Doubs. Philippe Monnet (F.D.S.E.A.) et Jean-Michel Bessot (Confédération Pay- sanne). Interview croisée.

privatisation, sans plus aucune limitation. On estime qu’un tiers des exploitations vont dispa- raître. La concentration peut aussi induire une baisse des prix car finalement, c’est celui qui achète le lait qui aura les cartes en main et pourra faire pression par exemple sur ceux qui sont éloignés de l’entreprise et dont le ramassage coûte plus cher. Càd : Quelles mesures pro- pose votre syndicat pour fai- re face ? P.M. : Pour le lait standard, on a travaillé pour que la réfor- me de la P.A.C. inclue ce que l’on appelle le “mini-paquet lait”. Les tème mis en place permettra de gérer la production du comté par exemple en fonction des ventes effectives, donc de ne pas surproduire, ce qui finalement revient à un autre moyen de réguler le marché du lait. Aus- si, depuis des années, la F.N.S.E.A. se bat pour qu’une vraie régulation se mette en pla- ce sur tous les marchés des pro- duits laitiers. J.-M.B. : Pour pallier la sup- pression des quotas, les pouvoirs publics et la profession cherchent un autre moyen de réguler donc dans ce cas, autant laisser ou producteurs auront ainsi le droit de se regrouper et donc de peser plus lourd pour négocier avec l’acheteur. Pour ce qui est de l’A.O.C., le sys-

“Un tiers des exploitations vont disparaître.”

Jean-Michel Bessot (Confédération paysanne).

améliorer les quotas en place ! Voyez ce qui s’est passé en Suis- se où 80 % des paysans se sont regroupés pour négocier avec les acheteurs de lait. Finalement, les 20 % restants ont, eux, dis- cuté en direct et les volumes ont augmenté, entraînant une chu- te des prix. Nous souhaitons donc que les pouvoirs publics conti- nuent à gérer les volumes. Càd : Comment voyez-vous l’agriculture de demain ? P.M. : Je suis confiant car beau- coup de jeunes continuent à s’installer et sont de mieux en mieux formés. Nos produits sont de qualité et reconnus par les consommateurs qui les appré-

cient beaucoup. La demande mondiale en produits alimen- taires va toujours augmenter avec l’augmentation des popu- lations. Mais bien sûr, il faut rester vigilant face aux crises possibles. Mais je suis sûr que nous avons de beaux atouts en main. À nous de bien les valo- riser ! J.-M.B. : Le métier de paysan est menacé. La concentration des productions et des fermes va continuer. Les produits sous signe de qualité peuvent se démarquer et les filières courtes vont se développer. Seule une agriculture paysanne et durable survivra. Propos recueillis par D.A.

Philippe Monnet (F.D.S.E.A.).

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