Journal C'est à Dire 172 - Décembre 2011

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J U S T I C E

La victime. Il connaissait son agresseur. Déficient visuel, Zoran Grujic dit Zocco, vit également à Fesches-le-Châtel. Il est actuel- lement à la recherche d’un emploi. Il n’a pas de casier. L’avis de l’expert médical sur la blessure. Son expertise était attendue, notamment pour qua- lifier si l’acte a entraîné une

ne veut pas en rester là : “Et si mon client venait à perdre son dernier rein, dans un accident de la route, que se passe-t-il ?” demande-t-il à l’expert. Valse des témoins et mensonges. Au deuxième jour du procès, les témoins sont auditionnés. La gendarmerie dans un premier temps, rappelle les circonstances de l’intervention.

infirmité permanen- te ou une mutilation. “Monsieur Grujic a perdu un rein mais il n’y a aucune séquel- le fonctionnelle” dit

Puis, un jeune mineur est appelé à la barre. La veille, il ne s’est pas pré- senté à la convoca- tion du tribunal. Ce

Prescrire le moins de médicaments.

l’expert. Il y a eu quatre coups de couteau mais tout est conso- lidé à présent. “S’agit-il d’une amputation ou d’une muta- tion ?” questionne à plusieurs reprises l’avocate générale. L’expert médical ne parle pas de mutilation, chef d’accusation qui pourrait coûter plusieurs années de plus à l’accusé. L’avocat Alain Dreyfus-Schmidt

sont les gendarmes qui sont allés le chercher et l’ont conduit jusqu’au tribunal sur deman- de du président de la cour d’assises. Il dit n’avoir jamais reçu de convocation à son domi- cile. À la barre, il fait le mario- le. Et revient sur ses déclara- tions alors qu’il avait le soir du 14 juin, prévenu les secours en voyant Zoran être à terre, les

Maître Dreyfus- Schmidt,

avocat de la partie civile, satisfait du jugement.

Plaidoyer de Maître Jean-Charles Darey pour la défense. Il a plaidé pour la correctionna- lisation du procès qui réduit consi- dérablement l’échelle des peines. Selon l’avocat belfortain, on ne peut pas retenir la perte du rein comme une mutilation. Les jurés en décideront autrement. Les réquisitions de l’avocat général Claude Ruard. Pour les intérêts de la société civi- le, l’avocat général se range à l’avis de l’expert médical qui affirme l’absence d’infirmité rénale car la fonction rénale est parfaitement respectée avec un seul rein. Esti- mant néanmoins qu’il y a muti- lation, elle requiert six ans de pri- son “car il manque un organe.” Le délibéré des jurés. Après deux jours de procès, le président suspendra l’audience une dernière fois. Les dix jurés se retrouveront dans une arriè- re-salle pour délibérer avec les magistrats. Après deux heures, ils jugeront qu’il y a bien eu muti- lation ou infirmité permanen- te et ont laissé à Murad Yilmaz la responsabilité des coups de couteau portés. Il écope de 5 ans d’emprisonnement dont un avec sursis et une mise à l’épreuve de trois ans avec obligation d’une activité professionnelle. À comp- ter du 6 décembre, il a 10 jours pour faire appel. L’audience est levée. E.Ch.

boyaux à l’air. Il dit ne plus rien se souvenir : “Y faisait nuit, y a eu une baston, j’ai rien vu.” Il ment et croit protéger son “ami” accusé. Le président, un peu agacé, lui montre qu’il a signé un procès-verbal et qu’il a même dessiné le couteau. “J’ai rien signé” lâche-t-il avec aplomb. “Elle ne me concerne pas cette affaire. J’ai rien à voir avec.” Tellement pathétique que l’avocat du prévenu lui deman- de de dire la vérité d’autant que son client ne nie pas les coups de couteau portés. Le troisième témoin, jeune hom- me de 19 ans, ne sera pas plus prolixe. Il ne veut même pas donner son adresse, par “peur de représailles de la part de Yil- maz.” Enfin, la mère témoignera son malheur, celle de voir son enfant “un garçon pas méchant, dit- elle, mais influençable. Je suis sous cachets, je déprime. Mon mari s’est enfermé sur lui- même.” Plaidoyer de Maître Alain Dreyfus-Schmidt, avocat de la partie civile. “Si nous n’avons pas à juger la défense, nous aurions préféré pour la société que les mois en rétention auraient permis à Mon- sieur Yilmaz de reconnaître sa responsabilité. Qu’il arrête de mentir et rejeter la faute sur tout le monde ! La meilleure défen- se, c’est l’attaque, on renverse la situation et on fait passer la vic- time pour responsable.”

Jean-Charles Darey pour la défense n’a pu obtenir la correctionnalisation de l’affaire, qui aurait réduit l’échelle des peines pour son client.

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