Journal C'est à Dire 146 - Septembre 2009

30

É C O N O M I E

À quoi sert l’Agence Régionale de Développement ? Défaut de communication, manque de dynamisme ou d’opportunisme, crise économique ? Quelques déboires récents ont terni un peu plus l’image de l’A.R.D., cet organisme dont la mission première est d’attirer des investissements extérieurs en Franche-Comté. À quelques mois des élections régionales de mars 2010, l’opposition ne manque pas une occasion de tirer à boulets rouges sur l’Agence qui de son côté, avec ses 17 agents, fait le maximum pour redorer son blason. Quel bilan peut-on tirer de son action, à quoi ser- vent les 2 millions d’euros de budget annuel de l’Agence ? Éléments de réponse.

Ils veulent supprimer l’A.R.D. ! L’Agence Régionale de Développement fait l’objet de critiques de plus en plus vives sur son manque supposé de résultats. Du côté de la majorité actuelle au Conseil régional, il n’est pas encore question de remettre en cause cet outil de promotion et de prospection économique. Débat

F aut-il purement et simple- ment supprimer l’Agence Régionale de Développe- ment ? Une question radica- le mais qui commence à cir- culer dans les couloirs des collectivi- tés locales. Depuis sa création par Ray- mond Forni en 2005, l’A.R.D. n’a pas encore su convaincre de sa pertinen- ce. Combien d’entreprises a-t-elle contri- bué à implanter sur le territoire franc- comtois, combien d’emplois a-t-elle ame-

Sylvie Vermeillet accuse l’A.R.D. d’être “une usine à gaz.” Alors que le Conseil régional dispose toujours d’un service économique “qui à mon sens est très per- formant, pourquoi est-on venu recoller une A.R.D. là-dessus. Le problème, c’est qu’avec cette Agence, c’est toujours du peut-être, elle ne produit rien de concret” ajoute-t-elle avec sévérité. Ironie du sort : le jour même de cette séance, les locaux de l’A.R.D. sont rava- gés par des inondations. “L’A.R.D. a véri- Au sein des Conseils généraux, qui financement également en partie l’A.R.D., certains com- mencent également à tiquer, d’autant que les quatre dépar- tements francs-comtois dispo- sent eux aussi de leur propre agence de développement. De son côté, l’Agence continue à défendre son travail de fond. Ses 17 collabora- teurs, quelque peu démobilisés par des changements trop fréquents à la tête de l’Agence (voir page suivante), continuent à être à pied d’œuvre. “Pourquoi tou- jours cibler les critiques surl’A.R.D. et sur le développement économique alors que le développement touristique ou cul- turel est organisé de la même manière en région ?” se défend la direction de l’Agence qui est la cible récurrente des critiques. L’arrivée à la tête de l’Agence d’un nou- veau directeur, l’installation dans de nouveaux locaux, la crise économique qui oblige à redoubler d’efforts… Tous ces éléments nouveaux donnent à l’Agen- ce des raisons supplémentaires de vou- loir prouver sa pertinence. Mais du côté des financeurs, logiquement, on attend désormais des résultats tangibles. Élé- ment positif : le nombre de dossiers tablement coulé, ajoute l’élue U.M.P. C’est peut-être l’occasion de tout remettre à plat…”

en cours suivis par l’A.R.D. a doublé par rapport à l’année dernière. Il reste désor- mais à les concrétiser. Dans ses salves contre l’Agence, l’op- position régionale oublie peut-être que l’A.R.D. n’est autre qu’une émanation mieux structurée d’un outil créé en 2000 par la droite régionale : “Franche-Com- té Expansion”, dont on ne peut pas affir- mer non plus qu’elle ait révolutionné l’attractivité économique de la Franche- Comté… J.-F.H.

né en Franche-Comté ? Jamais l’Agence n’a été jusqu’ici en mesure de répondre à ces ques- tions basiques. Défaut de com- munication ou absence de résul- tats tangibles, une chose est sûre, le travail de l’Agence ali- mente les débats, notamment au sein du Conseil régional, la

“C’est l’occasion de tout remettre à plat…”

La conseillère régionale Sylvie Vermeillet a la dent dure contre l’A.R.D. : “Une usine à gaz” dit-elle.

collectivité de laquelle émane l’Agen- ce et qui la finance en grande partie. Dernière séance en date du Conseil régio- nal de Franche-Comté, le 26 juin. L’op- position, menée par Jean-François Hum- bert, évoquant la crise économique que traverse notre région, ironise : “Dans cette période si exigeante de réactivité, nombre d’entre nous s’étonnent toujours de la discrétion, on peut même dire de l’absence de votre A.R.D., qui est à nou- veau à la recherche d’une tête pensan- te agissante, efficace et réactive. Que d’ar- gent gâché pour une structure qui ne fonctionne pas” commente le sénateur. Porte-flingue de l’U.M.P. dès qu’il s’agit de sortir la calculette et d’analyser les chiffres, la conseillère régionale juras- sienne Sylvie Vermeillet en remet une couche, non sans un certain brio d’ora- trice, teinté d’emphase : “À quoi sert l’A.R.D. ?” demande-t-elle tout de go. “Depuis sa création, elle a coûté 8,7 mil- lions d’euros. C’est du gaspillage pur, c’est une hérésie, c’est une folie.” Prévisionnel 2009 en euros Le budget de l’Agence RECETTES Région 1,9 million Doubs 132 000 Jura 122 000 Haute-Saône 38 000 Territoire-de-Belfort 57 000 Plate-forme collaborative Pôles de compétitivité 11 250 Produits financiers 9 000 Total 2 269 250 millions DÉPENSES Impôts et taxes 90 000 Salaires et traitements 860 000 Charges sociales 414 000

141 projets en cours

Investissements extérieurs : les vrais chiffres de l’A.R.D.

Tirer à boulets rouges sur l’Agence est devenu un peu la marot- te de l’opposition régionale. Quels sont vraiment les résultats de l’activité “prospection” de l’A.R.D. ? Premier bilan 2009.

bureau de traduction belge avec 10 emplois à la clé. Le deuxième dos- sier hélas perdu au profit de Rhône- Alpes était “un plus gros poisson” : il s’agissait de l’implantation d’un centre touristique. Selon nos infor- mations, confirmées par l’A.R.D., le centre en question était un Center Parcs pour lequel l’Agence avait pro- posé un site dans le Jura, mais c’est finalement en Isère que ce futur Cen- ter Parcs se créera. Trois projets sont arrivés cette année en phase 4, c’est-à-dire à leur abou- tissement. Le premier en Haute-Saô- ne avec la société “Franche-Comté Ossature Bois”, un site de production de chalets à ossature bois pour des complexes touristiques, dont l’inau- guration aura lieu le 24 septembre. “Cet investisseur a déjà 13 campings chaudronnerie de Toulouse, “Deftec”, qui s’est installée à Bourguignon pour fabriquer des équipements de dépous- siérage pour l’industrie du bois et l’in- dustrie agro-alimentaire. Troisième trophée de l’année pour l’A.R.D., l’im- plantation à Besançon de la société “Quali Call Center”, un centre d’ap- pels qui a créé 25 emplois. Bien sûr, le bilan peut être jugé bien maigre avec au plus une quarantai- ne d’emplois cette année. Alors soit on affirme que l’Agence est un luxe que la Franche-Comté ne peut plus se payer, soit on estime que c’est un investissement à long terme et que notre région ne pouvait plus être la seule de France à ne pas disposer d’un tel outil de promotion et de pros- pection. J.-F.H. en France et autant au Cana- da. Il est en train de franchiser son concept, un hybride entre la cabane en bois et la tente, pour les campings munici- paux.” 7 emplois ont déjà été créés. Deuxième projet réussi cette année avec une société de

“N on, l’A.R.D. n’est pas une coquille vide” se défend Vincent Donier, le tout nouveau directeur de l’Agence Régio- nale de Développement. Il compare volontiers le métier de l’Agence à celui d’architecte. “C’est un peu la même chose que pour une maison. On dit souvent que c’est le promoteur ou le maçon qui l’a construite en occultant complètement l’architecte. Dans les projets d’implantation d’entreprises en Franche-Comté, nous sommes les architectes” compare le directeur.

Au cours du premier semestre 2009, l’A.R.D. a répondu à 45 nouvelles intentions de projets. En cumulé, dans les cartons de l’Agence, 141 dossiers sont “dans les tuyaux”. Seulement, la crise est passée par là, si bien que “31 de ces projets sont pour l’instant dif- férés. Pas annulés, mais reportés” pré- cise le directeur. Dommage, puisque ces 31 projets représentent à eux seuls 3 547 emplois potentiels, soit “plus de 100 emplois par projet.” Et parmi ces 31, “un dossier totalise à lui seul 2 000 emplois.” Toujours pour ce début d’année 2009, l’A.R.D. compte 16 projets en étape 3,

c’est-à-dire que l’investisseur a reçu une offre précise de l’A.R.D. et se déclare inté- ressé par une implantation en Franche-Comté. 253 créa- tions d’emplois sont à la clé pour ces 16 projets. Parmi ceux-ci, une centrale photo- voltaïque, un investisseur

Un Center Parcs finalement parti en Isère.

allemand qui cherche du périphérique pour des machines-outils, un Suisse qui souhaite fabriquer des véhicules électriques, un espagnol pour de l’em- ballage bois, un projet touristique pour un groupe qui souhaite créer un stade de ski nordique, un groupe suis- se-allemand spécialisé dans la laine de bois, un projet suédois tourné vers la fabrication de meubles, un Cana- dien qui cherche un site en Europe pour fabriquer ses éoliennes, un pro- jet français orienté sur la stérilisation d’instruments médicaux, un dossier américain pour installer une société de fabrication de parquets techniques pour les gymnases, etc. “Si nous gagnons un projet sur deux, ce sera déjà très bien. Cette année, nous avons perdu 2 projets en phase 3” précise M. Donier. Il s’agissait d’abord d’un

(+ fournitures, ` déplacements, réceptions, maintenance, loyers…) Total

Plus grosse entreprise implantée cette année grâce à l’A.R.D. : Quali Call Center à Besançon, 25 emplois.

2 068 250

Made with FlippingBook - Online catalogs