La Presse Pontissalienne 306 - Juillet 2025
6 L’interview du mois
Juillet 2025
TOUR DE FRANCE
Alexandre Pasteur, le commentateur du Tour
“Je sais déjà que ce sera un moment hyper émouvant” Le 26 juillet, l’un des régionaux de l’étape ne sera pas forcément dans le peloton mais au commentaire de l’étape en direct sur France Tμ.V. Pontissalien et toujours attaché à sa région, Alexandre Pasteur se réjouit de pouvoir exercer son métier dans sa ville natale, le temps d’une étape.
A vez-vous reconnu l’étape Nantua Pontarlier ? Alexandre Pasteur : On a fait une reconnaissance le 17 juin avec Anthony Forestier, le réalisateur du Tour de France. Comme on n’avait pas beaucoup de temps, on a juste fait la dernière partie de l’étape depuis Saint-Claude. A.P. : Non, on n’a pas le temps de toutes les faire. Je cible les étapes que je connais le moins. En géné ral, j’en fais 6 ou 7 pour s’impré gner du parcours, voir l’état des routes, le relief, le paysage. Votre point de vue sur la côte de Thésy (3,6 km à 8,8 %), classée en seconde catégorie et que les coureurs emprun teront juste après Salins-les-Bains ? A.P. : Elle aura un rôle important. Le peloton avait déjà roulé sur Bio express l Alexandre Pasteur est né le 30 novembre 1970 à Pontarlier. l Journaliste sportif français, il est spécialisé dans le ski, le cyclisme et l’athlétisme. Il travaille au service des sports de France Télévisions de 2017. l Il a passé les vingt premières années de sa vie dans le Haut-Doubs. l Après l’école de journalisme, il effectue quelques stages et CDD dans la presse régionale. En 1995, Eurosport cherche un remplaçant à Christophe Josse pour commen ter le ski alpin. Il postule et est retenu. Il y commente également l’athlétisme. l Durant les J.O. d’hiver en 2010 à Vancouver, il commente les épreuves de ski alpin l Passionné de vélo depuis tou jours, il débute les commentaires de courses cyclistes par des rem placements de Patrick Chassé, journaliste spécialiste du cyclisme de la chaîne, pendant ses vacances. Après le départ de Chassé en 2010, la direction de la chaîne lui propose de s’investir davantage dans le vélo. Il devient ainsi le commentateur des plus grandes courses diffusées sur la chaîne. En 2011, il commente son premier Tour de France. De 2011 à 2016, il commente chaque année le Tour sur Eurosport. Vous essayez de toutes les reconnaî tre ?
mobilisent en effet. Le phénomène est global car tout le monde attend et veut son étape, les arrivées mais aussi les départs. J’ai l’im pression que Pontarlier est super mobilisé. La dernière arrivée du Tour dans la capitale du Haut Doubs remonte à 24 ans et le der
cette pente impressionnante lors du critérium du Dauphiné en juin 2023. C’est Jonas Vingegaard qui avait remporté l’étape en soli taire en posant une attaque vio lente dans ce petit mur, ce qui lui avait permis de prendre la tête du classement général. Certains disent que cette étape Nan tua-Pontarlier peut s’avérer décisive ? Qu’en pensez-vous ? A.P. : Je n’irais pas jusque-là, le final n’est pas très difficile. C’est une étape vallonnée qui arrive en fin de Tour. Il pourrait y avoir un groupe d’échappés pour jouer une ultime victoire d’étape qui ne serait pas réservée aux sprin ters. La Ville de Pontarlier et le Département du Doubs font de gros efforts pour que la fête soit complète le 26 juillet. A.P. : Toutes les collectivités se
je pense qu’il y aura entre 5 et 6 millions de personnes devant leur poste de télé. On peut rap peler que le Tour est diffusé dans pratiquement tous les pays de la planète. Pontarlier, vous connaissez ? (rires) A.P. : Je sais déjà que ce sera un moment hyper-émouvant pour moi. Pontarlier, c’est ma ville. C’est là que j’ai grandi. J’ai fait une grande partie de ma scolarité aux Augustins avant de poursui vre mes études dans le journa lisme à l’I.P.J. Paris-Dauphine. Je reviens de temps en temps à Pontarlier où vit encore une partie de ma famille, ma mère, ma sœur. C’est un point d’ancrage impor tant pour moi alors y revenir dans le cadre du Tour de France ! Je m’attends à être très sollicité. Il y aura plus de gens qui me connaissent que le contraire. Les Pasteur sont des sportifs ? A.P. : Oui assez. Mon grand-père avait créé l’Office Municipal des Sports. Mon père était président du C.A.P. foot. Dans ma jeunesse, j’étais licencié au foot, au tennis, au vélo-club. J’adorais le vélo mais je n’aimais pas rouler par mauvais temps et à Pontarlier, ce n’est pas toujours les grosses chaleurs… Votre point de vue sur ce Tour 2025 ? A.P. : Quand j’ai découvert le par cours, j’ai eu un peu peur car la montagne arrive tard. Notez que l’édition 2025 se court uniquement en France. Il faudra attendre 10 jours avant que la montagne arrive. Il y aura alors du spectacle et de l’animation. La seconde par tie risque d’être très éprouvante. À partir du 14 juillet, les coureurs vont enchaîner le Massif central, le Ventoux et les Alpes… Un favori ? A.P. : Pogacar sera dur à bouger. Il vient de gagner le Dauphiné. S’il reste dans le même état de forme, on ne voit pas qui pourrait le menacer. A.P. : Sans doute. Rappelons qu’il a gagné un tiers des étapes en 2024. Jusqu’à l’an dernier, on était dans la phase admiration et main tenant on passe dans la stupé faction. C’est un grand champion qui ne manque pas de panache. Il prend des risques et ça paie. C’est un sportif que j’aime bien commenter. On l’appelle le petit cannibale. Sa domination peut-elle casser le sus pense ?
nier départ d’étape, c’était en 2009. C’est important de faire des efforts pour mettre en valeur le patri moine local. Le Tour de France se singularise par des audiences énormes. On arrive à capter 8 à 9 millions de téléspectateurs sur les grandes étapes de montagne. Pour une arrivée comme celle de Pontarlier,
“On ne voit pas qui pourrait menacer Pogacar.”
des grimpeurs, des puncheurs. C’est frustrant de voir qu’un petit pays comme la Slovénie a produit deux champions - Pogacar et Roglic - qui ont gagné 9 fois des trois grandes épreuves par étapes que sont le Tour de France, le Giro et la Vuelta. Il faut remonter en 1997 pour trouver un français, Laurent Jalabert vainqueur de la Vuelta. A.P. : Je ne pense pas qu’il rem portera le Tour mais pourquoi pas des étapes. On a aussi de très bons jeunes coureurs comme Lenny Martinez ou Kevin Vau quelin. Vous entretenez de bonnes relations avec les cyclistes professionnels ? A.P. : Tout à fait. Les liens entre les coureurs et la presse sont très serrés. Cela reste un milieu où les sportifs sont accessibles. Pourquoi l’engouement autour du Tour reste intact depuis sa création ? A.P. : Le Tour, c’est 3 500 km de sourires. La recette fonctionne depuis plus de 100 ans. On voit la souffrance des coureurs. C’est un spectacle intemporel. Couvrir le Tour de France est aussi une épreuve pour vous ? A.P. : Cela représente 120 heures de direct et entre 6 et 7 heures d’antenne quotidienne dont 1 h 30 d’émission. C’est un véritable marathon médiatique. Je trouve que c’est hyper-physique. Pendant le Tour, on est porté par l’adré naline mais on ressent bien la Et Julian Alaphilippe, peut-il encore s’il lustrer ?
Une telle réussite suscite aussi des inter rogations ! A.P. : Forcément. Il faut savoir qu’il est très ciblé et fait l’objet de beau coup de contrôles anti-dopage. Pour l’instant, on en reste au stade des doutes. C’en est fini du dopage dans le cyclisme ? A.P. : Le peloton est beaucoup plus surveillé. L’E.P.O. remplaçait les bienfaits de l’altitude. Maintenant, les coureurs passent deux mois en montagne. On n’est plus dans le même système. Le métier a évolué vers une approche plus scientifique. On parle aussi de dopage mécanique ? A.P. : Non, je n’y crois pas. Les vélos sont scannés très fréquemment, l’U.C.I. a mis au point des contrôles très efficaces. Mais dans le vélo, comme dans d’autres sports, il y aura toujours des cou reurs qui jouent avec le feu.
Depuis Bernard Hinault en 1985, on attend tou jours le coureur français qui va lui succéder… Comment expliquer cette absence de vic toires françaises au général ? A.P. : Le cyclisme est un sport qui s’est mondialisé. Il y a aussi le fait qu’il n’y a pas actuellement en France un cou reur polyvalent, à l’aise en contre-la montre, et en haute montagne. On a de très bons rouleurs,
“Le Tour, c’est 3 500 km de sourires.”
Ce ne sera pas sans une certaine émotion qu’il sera présent le 26 juillet dans sa ville natale.
l En 2017, après 21 ans à Euro sport, il rejoint France Télévisions pour devenir le commentateur prin cipal des courses cyclistes dont, bien sûr, le Tour de France.
l En 2019, il est choisi pour com menter les championnats du monde d’athlétisme à Doha au Qatar. Il remplace alors Patrick Montel qui commentait la compé tition depuis sa création en 1983.
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